Intervention de Hervé Maurey

Réunion du 14 octobre 2015 à 14h30
Organisation de la manutention dans les ports maritimes — Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, mon intervention viendra bien entendu en appui de celle du rapporteur, Michel Vaspart, que je remercie de son travail approfondi et rigoureux. Pour son premier rapport, notre collègue a en effet réalisé un travail remarquable, sur un sujet qui n’est pas simple, procédant à de nombreuses auditions et rencontrant l’ensemble des parties prenantes.

Monsieur le secrétaire d’État, j’ai été un peu surpris, pour ne pas dire choqué, que vous ayez parlé de défiance de notre part à l’égard des partenaires sociaux, et plus surpris encore que le rôle du Parlement se limite selon vous à valider les accords conclus par les partenaires sociaux.

Je ferai une observation préalable sur la procédure retenue par le Gouvernement. Il s’agit officiellement d’une proposition de loi adoptée par les députés le 25 juin dernier, soit à peine plus d’un mois après son dépôt. En réalité, nous l’avons bien vu – je dirai même que nous l’avons entendu, tant vous avez paru vous exprimer en « père naturel » de ce texte –, il s’agit plutôt d’un projet de loi déguisé, comme cela est, hélas, de plus en plus souvent le cas, en vue d’éviter les arbitrages interministériels, les avis du Conseil d’État, et pour faire en sorte qu’un texte soit examiné rapidement.

Nous allons donc examiner un texte législatif d’origine gouvernementale sous forme d’une proposition de loi, et je ne crois pas que cela contribue à revaloriser le rôle du Parlement !

Le Gouvernement, très impliqué sur ce texte, je le répète, a décidé d’engager la procédure accélérée, jadis tant critiquée à la gauche de cet hémicycle, et ce sans réelle justification, si ce n’est, semble-t-il, la volonté de « classer promptement le dossier ».

L’attitude de nos collègues socialistes en commission l’a bien montré puisqu’ils ont refusé tout amendement, y compris rédactionnel, dans le but évident d’obtenir un vote conforme.

Est-ce vraiment satisfaisant et judicieux pour un texte qui concerne l’ensemble de nos ports et plusieurs milliers de salariés ?

Sur le fond, actualiser le statut des dockers est évidemment souhaitable. Il y va de la compétitivité et de l’avenir de nos ports. Il y va également de l’importance du maintien d’un régime adapté pour une profession bien particulière, dont les tâches sont en constante évolution. En outre, il est important de trouver le bon équilibre entre ces deux impératifs. C’est précisément ce à quoi se sont efforcés le rapporteur et la commission.

Celle-ci a ainsi très largement soutenu le principe d’une rectification à la marge des lois antérieures, pour lever uniquement les incertitudes juridiques, notamment l’incertitude qui a conduit, il y a quelques mois, à des mouvements sociaux à Port-la-Nouvelle. Entre la disparition progressive de la catégorie des dockers intermittents et une difficulté d’interprétation de la loi, il était en effet nécessaire de procéder à cet ajustement.

En revanche, et c’est cela qui nous sépare, monsieur le secrétaire d’État, la commission n’a pas souhaité que ce texte aille au-delà, et surtout sans le dire, modifiant presque en catimini des points aussi importants que le périmètre d’emploi prioritaire des dockers, l’implantation industrielle en bord à quai et la définition des dockers occasionnels.

Nous ne l’avons pas souhaité pour plusieurs raisons.

La première est que deux lois mûrement réfléchies et discutées – la loi Le Drian de 1992 et la loi Bussereau de 2008 – ont procédé, elles, à une véritable réforme du statut des dockers et sont parvenues à un équilibre satisfaisant, qu’il ne faudrait pas remettre en question à la légère, sous couvert d’un simple ajustement juridique.

La deuxième raison est que des négociations sont en cours à l’échelon européen et devraient aboutir au cours du premier semestre 2016. Il est donc parfaitement prématuré de légiférer avant de savoir quelles seront les conclusions de ces négociations.

La troisième raison, enfin, est que le Parlement est pour ainsi dire « pris en otage » par la méthode retenue, car une partie des évolutions devrait figurer dans une charte prévue à l’article 6, sans qu’il nous soit donné de réelles assurances quant aux modalités concrètes de son application. Ce flou est d’ailleurs reconnu par la plupart des défenseurs de la proposition de loi.

La commission a donc considéré que la priorité, aujourd’hui, était la situation économique de nos ports, encore fragile, et la compétitivité de notre dispositif maritime, fondamentale pour un certain nombre d’entreprises et de secteurs de notre économie.

C’est le sens de la position exposée au nom de la commission par notre rapporteur, qui est soutenue par la majorité sénatoriale.

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