Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la proposition de loi tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes répond à plusieurs enjeux, qui, j’en suis convaincue, doivent être appréhendés avec quelques exigences de bon sens : d’abord, celle de la considération profonde que nous portons au métier de dockers ; ensuite, celle du pragmatisme, qui doit nous guider dans le traitement de ces questions.
Les ouvriers dockers exercent une activité qui reste liée à une culture maritime à laquelle, en tant que maire de Calais, je suis attachée.
Bien sûr, au-delà des symboles, le métier de docker a beaucoup changé au cours des dernières décennies ; mais il a gardé son importance stratégique à mesure que sa technicité s’accroissait. Pouvoir compter sur une main-d’œuvre efficace et compétente est indispensable à notre économie des flux comme à la sécurité des opérations de manutention.
J’ai parlé de pragmatisme. Tel est, en effet, l’esprit qui doit prévaloir dans un secteur économique stratégique pour l’ensemble de notre pays, dont la compétitivité passe aussi par celle de ses ports.
Notre compétitivité passe également par la préservation du consensus social qui s’est construit au cas par cas, au niveau local. Le conflit de MyFerryLink, dont nous sommes récemment sortis à Calais, a rappelé ce que coûtent à une place portuaire des blocages qui pourraient être évités.
Forte de ces convictions, je tiens à formuler plusieurs remarques au sujet de la présente proposition de loi.
D’abord, la résolution de la question soulevée par le conflit de Port-la-Nouvelle est la priorité à laquelle le législateur doit se consacrer.
Alors que le statut d’intermittent est appelé à disparaître dans quelques années, il est essentiel de prévenir d’éventuels conflits qui pourraient résulter de la rédaction inadaptée du dispositif actuel. En dissociant la notion d’intermittence de celle de priorité d’embauche, nous confortons le cadre juridique dans lequel évoluent les ouvriers dockers. Le texte initial de la proposition de loi est à cet égard tout à fait pertinent.
En revanche, je considère, comme notre rapporteur, qu’il importe de ne pas troubler les équilibres fragiles qui existent localement. C’est pourquoi j’estime que notre commission a fait preuve de sagesse en s’en tenant à dissiper le flou juridique actuel, sans ouvrir de nouveaux fronts.
En particulier, l’introduction d’une charte suscite certaines interrogations. Pourquoi créer un dispositif qui instaure une méthode à l’échelon national sans prévoir explicitement de déclinaisons au niveau local ? De ce point de vue, il me semble que la charte est non seulement inutile, mais aussi source d’ambiguïtés et de tensions futures.
Je veux également dire combien les dockers occasionnels constituent une catégorie importante pour les activités de manutention. À Calais, par exemple, le principal opérateur emploie douze dockers professionnels et quarante-deux dockers occasionnels. En cas de surcroît important d’activité, le recours à l’intérim peut porter les effectifs à cent, voire cent cinquante personnes. Quoi qu'il en soit, le professionnalisme des dockers occasionnels leur permet naturellement d’être retenus de manière privilégiée.
À la lumière de cette expérience locale, je n’aurais pas été opposée par principe au renforcement de leur statut, tel que le prévoit le texte transmis par l’Assemblée nationale. Toutefois, ces dispositions ne changeront pas la donne, pas plus que leur suppression !
En résumé, je partage le souci exprimé par M. le rapporteur de soutenir en priorité le métier de docker, en cherchant des solutions aux défauts de la législation actuelle. C’est pourquoi le groupe Les Républicains votera en faveur du texte issu des travaux de la commission.