Intervention de Pascale Boistard

Réunion du 14 octobre 2015 à 14h30
Lutte contre le système prostitutionnel — Adoption en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Pascale Boistard, secrétaire d'État :

Une enquête de l’Institut de veille sanitaire montre que 36 % des personnes prostituées ont subi un viol au cours de leur vie.

Au nom de quoi faudrait-il accepter de sacrifier les droits, les vies de femmes et d’hommes ? Pour assouvir le désir sexuel de quelques-uns ? Ce n’est pas la société que nous voulons ! Mais c’est cela, la réalité de la prostitution. Je me demande donc comment certains peuvent encore parler d’un métier, d’un choix.

Ceux qui mettent en avant la liberté de disposer de son corps se trompent de débat. Le système prostitutionnel induit au contraire la contrainte : la contrainte sexuelle, physique et financière. Ce qu’ils défendent, ce n’est pas la liberté des femmes ; c’est le droit de certains hommes à disposer du corps de ces dernières !

Je suis allée sur le terrain, en maraude ou dans des centres d’hébergement sécurisés. J’ai pu constater la douleur créée par ces parcours de contraintes. Si ce n’est pas clair pour tout le monde, la loi doit l’énoncer : les femmes ne sont pas des objets. Je refuse d’accepter que des hommes puissent continuer à violenter, à dominer, à humilier contre quelques euros !

Celles et ceux parmi vous qui sont allés aux côtés des travailleurs sociaux et des associations le savent : dès lors que l’on rencontre ces personnes victimes de la prostitution, leur situation effroyable suscite l’indignation et la volonté d’agir. C’est avant tout pour elles, pour apporter des solutions à leurs situations dramatiques, que je suis devant vous aujourd’hui.

Tel est l’objet de cette proposition de loi, qui se fonde sur quatre piliers : renforcer la lutte contre la traite et le proxénétisme, accompagner les personnes prostituées, sensibiliser toute la société et responsabiliser le client. Ces fondations construisent un édifice cohérent et solide. Si un pilier est retiré, l’ensemble est fragilisé.

Parmi ces piliers, la responsabilisation des clients fait débat au sein de la Haute Assemblée.

Pourtant, responsabiliser le client a plusieurs fonctions : indiquer qu’il participe à l’exploitation d’êtres humains ; refuser toute banalisation de cette violence ; réaffirmer que le corps des femmes n’est pas à vendre ; faire progresser le regard de la société et des jeunes sur les relations entre les femmes et les hommes.

Néanmoins, responsabiliser le client, c’est aussi empêcher l’enrichissement des réseaux et leur envoyer un message de fermeté : « La France n’est pas un pays d’accueil pour vos trafics ! » Comme l’explique une survivante courageuse que j’ai rencontrée et que je salue chaleureusement : « Donner le droit aux clients d’acheter des femmes, c’est donner le droit aux proxénètes de les vendre. »

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