Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 14 octobre 2015 à 14h30
Lutte contre le système prostitutionnel — Adoption en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

Dans le système prostitueur, on a affaire à des réseaux de traite d’êtres humains qui s’appuient sur la détresse, la crédulité et la misère des plus fragiles pour développer un marché qui rapporte beaucoup d’argent. Il faut sortir des fantasmes et prendre conscience que la prostitution n’est ni un choix ni une activité professionnelle !

Qui peut sincèrement imaginer sa femme, sa fille, sa sœur avoir des dizaines de rapports sexuels par jour, très souvent accompagnés de violences, de coups, d’humiliations, et soutenir que la prostitution est un acte banal faisant partie de la liberté sexuelle ? Et quand bien même ce serait un choix pour un nombre infime de personnes, en quoi cela devrait-il nous empêcher de légiférer comme nous nous apprêtons à le faire ?

Prenons l’exemple du don d’organes : certaines personnes, poussées par des difficultés financières ou sociales, pourraient sans nul doute être conduites à accepter de vendre un de leurs organes – et c’est parfois la triste réalité dans certains pays –, mais, en France, la loi ne le permet pas et c’est heureux ! L’interdiction est donc totalement déconnectée du consentement présumé des personnes, c’est une mesure de protection des plus vulnérables.

L’argument consistant à affirmer que pénaliser l’acte sexuel tarifé aurait pour conséquence de renvoyer les personnes prostituées à la clandestinité, les mettant davantage en danger, ne me semble pas solide. En effet, comme le souligne le Mouvement du Nid, « pour la première fois, le rapport de force sera partiellement en faveur de la personne prostituée, […] qui n’aura rien à prouver, car le simple fait de la solliciter sera illégal ». Ainsi, l’article 1er ter, fruit d’un gros travail que je tiens à saluer, met en place un régime de protection intéressant et équilibré – j’y reviendrai lors d’une intervention sur l’article.

La loi que nous allons voter doit véritablement mettre fin à l’impunité des clients, notamment parce que leurs comportements individuels nourrissent un système plus vaste et dangereux. S’attaquer à la demande, c’est aussi s’attaquer aux profits des proxénètes.

Par ailleurs, il faut répéter encore et toujours les traumatismes vécus par d’anciennes prostituées. De nombreuses associations qui les accompagnent dénoncent les risques qu’elles encourent. Il y a ainsi, parmi les personnes prostituées, huit fois plus de viols et seize fois plus de suicides que dans la population générale. En outre, en 2014, huit prostituées ont été assassinées par des individus officiellement reconnus comme clients.

Quant à l’argument consistant à affirmer que ce dispositif serait inefficace avant même de l’avoir mis en œuvre et sans tenir compte des expériences menées par d’autres pays, il me semble inopérant.

Mes chers collègues, nous avons reçu ces derniers jours de nombreux courriers électroniques nous interpellant. Je veux citer notamment celui de deux cent cinquante-neuf collègues maires et élus municipaux, toutes tendances politiques confondues, …

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