Ma question porte sur le principe de continuité écologique, introduit en 2006 par la loi sur l’eau et les milieux aquatiques. Huit années se sont écoulées depuis l’adoption de cette loi qui, malheureusement, a donné lieu à une application aveugle et précipitée.
La restauration des continuités écologiques s’impose sur le terrain, sans concertation, dans un contexte budgétaire difficile pour tous les propriétaires d’ouvrages situés sur les cours d’eau classés en liste 2, qu’ils soient publics ou privés.
Certes, la continuité écologique est essentielle à la circulation des poissons migrateurs, au transport de sédiments, mais on ne peut ignorer les conséquences financières qui pèsent aujourd'hui sur les propriétaires de ces ouvrages, contraints de mobiliser de lourds moyens pour les aménager.
Nous assistons ainsi à une destruction du patrimoine des territoires ruraux, sans parler de la perte de potentiel hydroélectrique pour les barrages ou les installations qui contribuent pourtant aux objectifs de transition énergétique !
On délaisse également la fonction de réserve d’eau des biefs pour les usages locaux, et aucune garantie n’est apportée en ce qui concerne les risques pour les personnes, les habitations et les écosystèmes en aval.
Des études scientifiques démontrent pourtant que la continuité écologique n’a, en réalité, qu’un poids très faible sur les obligations de bon état chimique et écologique imposées par la directive-cadre sur l’eau. À l’heure actuelle, on le sait, les rivières souffrent de nombreuses pressions : changement climatique, prélèvements excessifs d’eau, pollutions. Il est réducteur d’imputer toute la responsabilité de ces phénomènes aux moulins, présents pour la plupart depuis plus de deux siècles !
Sans remettre en cause le principe de la continuité écologique, il est nécessaire de s’interroger sur sa réelle efficacité en matière de qualité des milieux. La dépense d’argent public doit aujourd'hui être justifiée par des bénéfices environnementaux avérés.
Entre la solution de l’arasement complet de ces ouvrages ou l’obligation d’équipement, il existe d’autres options respectueuses de l’intérêt collectif pour annuler ou a minima réduire les impacts sur la continuité écologique ; par exemple, l’abaissement de seuil ou l’ouverture de vanne. Le rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable en date de 2013 avait d’ailleurs recommandé la gestion concertée des vannages et l’élaboration de grilles multicritères pour servir de base d’évaluation de l’intérêt des ouvrages.
Les propriétaires font face à un empilement de contraintes réglementaires. Les politiques de l’eau ont, elles aussi, besoin d’un choc de simplification !
Ces derniers jours, Mme la ministre de la culture a annoncé devant l’Assemblée nationale la mise en place d’un groupe de travail, conjointement avec les services du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, et les parties prenantes pour traiter de la question des moulins à eau. S’agit-il d’un travail de concertation, en vue d’aboutir à plus de pragmatisme dans l’application de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques ?