Madame Morin-Desailly, vous l’avez rappelé, et je vous en remercie, la culture est une compétence partagée. La loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales ne prévoit rien d’autre s’agissant des conservatoires.
Je le rappelle, l’État a la charge du classement et du contrôle pédagogique. Les communes et leurs groupements sont responsables de la mise en œuvre des formations. Les départements, quant à eux, doivent concevoir des schémas d’égal accès aux formations sur leur territoire. Les régions, enfin, sont compétentes pour les enseignements préparant à l’entrée dans l’enseignement supérieur de la création, qui sont appelés « cycles d’enseignement professionnel initial » et qui conduisent à la délivrance par l’État du diplôme national d’orientation professionnelle.
Pour autant, je partage le constat que vous avez posé d’une situation de blocage pour les enseignements artistiques spécialisés. En réalité, ce qui a été prévu dans la loi n’a été que partiellement mis en œuvre, notamment pour la formation professionnelle initiale. Je suis d’accord avec vous : il faut que cela change.
C’est pourquoi, dans le nouveau paysage territorial qui se dessine actuellement, je souhaite clairement tourner une page et affirmer une politique lisible aux côtés des conservatoires et des collectivités territoriales. Mon objectif est d’encourager une ouverture toujours plus grande, de favoriser toutes les pratiques amateurs, y compris les plus expérimentales, et de promouvoir les projets novateurs.
Cette nouvelle ambition doit s’appuyer sur les grands principes définis en 2004, sur l’approfondissement des orientations données par la loi et surtout sur la mise en œuvre effective de cette dernière.
Cette réforme, j’entends la conduire autour de trois axes.
Tout d’abord, il faut réaffirmer le rôle de l’État en matière d’expertise et d’orientations pédagogiques. J’ai pour cela souhaité que soient inscrits dans le projet de loi relatif à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, qui vient d’être adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale, les « schémas nationaux d’orientation pédagogique ». Ils permettront de traduire les attentes de l’État en matière d’innovation pédagogique, de pratiques collectives et de méthodes d’apprentissage, afin d’attirer les jeunes et de diversifier l’offre artistique.
Ensuite, il convient de réengager l’État financièrement, dès 2016, dans le fonctionnement des conservatoires, avec des moyens spécifiques et nouveaux. J’ai ainsi engagé dès mon arrivée rue de Valois, il y a un peu plus d’un an, un travail visant à permettre à l’État de se réengager auprès des conservatoires, sous réserve des orientations pédagogiques précédemment indiquées, car ces établissements constituent un réseau extrêmement important de démocratisation culturelle.
J’ai obtenu plus de 8 millions d’euros, qui s’ajouteront aux moyens existants – 5, 6 millions d’euros –, pour un montant global de 13, 6 millions d’euros en faveur de l’ensemble des conservatoires classés ; sans compter les crédits pour l’éducation artistique et culturelle, qui bénéficient aussi aux conservatoires, soit 2 millions d’euros en 2015 – le montant sera quasiment identique en 2016. Bref, la masse globale de financement est de l’ordre de 15 millions d’euros.
Enfin, il importe de reprendre le dialogue avec les collectivités territoriales, qui ont la responsabilité première des établissements d’enseignement spécialisé. Le chantier de révision des critères d’intervention de l’État en faveur des conservatoires et, parallèlement, de leur classement, sera ainsi mené en concertation avec les collectivités territoriales dans le cadre d’un groupe de travail « Conservatoires » au sein du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel, le CCTDC.
Associations représentatives du secteur, enseignants, parents d’élèves, directeurs de conservatoire et, plus largement, acteurs culturels et éducatifs partenaires des conservatoires seront entendus sur ces sujets d’ici à la fin de l’année.
Vous le voyez, madame la sénatrice, au travers d’un dialogue régulier et constructif avec les collectivités locales et l’ensemble des acteurs concernés, je souhaite mobiliser pleinement les conservatoires, premier réseau de proximité pour l’accès et la formation des jeunes aux pratiques artistiques, afin qu’ils participent activement à la politique d’éducation artistique et culturelle et, plus largement, à la démocratisation culturelle.
Leurs savoir-faire et leurs compétences sont essentiels pour le développement d’une pratique amateur de qualité, exigeante, en direction d’un public de jeunes venus de tous horizons, ce qui constitue l’une des dimensions fondamentales de la mission de transmission que défend le ministère de la culture.