… car, comme chacun le sait, mes chers collègues, les gens préfèrent toujours l’original à la copie.
C’est pourquoi, monsieur le secrétaire d'État, à la veille des élections régionales, alors que le Front national distille son poison xénophobe dans les esprits troublés de nos concitoyens, il aurait peut-être été judicieux, à défaut de reporter l’examen d’un tel texte, d’être davantage attentif aux propositions qui s’élevaient sur votre gauche et qui auraient pu garantir un minimum de stabilité et de droits effectifs aux ressortissants étrangers dans notre pays, telles que le principe d’une durée de validité de quatre ans de la carte de séjour pluriannuelle, la suppression du dispositif de contrôle des préfets tout à fait disproportionné ou a minima son encadrement par la saisine obligatoire de la commission départementale du titre de séjour, le maintien du dispositif d’évaluation médicale aux médecins des agences régionales de santé, ou ARS, la mise en conformité du droit outre-mer avec notre droit commun, notamment pour mettre fin aux discriminations inacceptables en matière de droits aux recours, l’assignation à résidence comme réelle alternative à la rétention, ou encore l’interdiction formelle de rétention des mineurs isolés ou de familles comprenant un ou plusieurs enfants mineurs, sans que cette prohibition souffre d’aucune exception.
Hélas, monsieur le secrétaire d'État, monsieur le président de la commission des lois, aucune de ces propositions n’a été retenue !
En revanche, sur la base d’un texte peu humaniste, la droite sénatoriale a eu tout le loisir de durcir notre droit en matière d’immigration.
La délivrance du titre de séjour pluriannuel à géométrie variable du Gouvernement a laissé place à l’ajout par la droite de conditions de délivrance pour en faire l’exception, et maintenir le titre annuel comme principe.
Le contrat d’intégration républicaine a conduit la droite à instaurer une participation des étrangers au financement des formations civiques et linguistiques qu’on les oblige à suivre.
De plus, la délivrance d’un visa de long séjour a été subordonnée à la preuve préalable de la connaissance suffisante de la langue française, à l’adhésion aux valeurs essentielles de la société française et à la capacité à exercer une activité professionnelle ou à assurer son autonomie financière.
Par ailleurs, le transfert des compétences des médecins des ARS aux médecins de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, l’OFII, a été complété par la substitution de l’aide médicale d’État, l’AME, à une aide médicale d’urgence limitée.
Les contrôles administratifs permis par les articles 8, 8 bis A et 25 ont également été renforcés pour « vérifier la réalité de la situation des personnes disposant d’un titre pluriannuel ».
En outre, tous les délais en matière d’éloignement et de recours ont été revus pour permettre des éloignements plus rapides et un droit de recours quasi impossible.
En résumé, le texte que nous sommes amenés à voter n’a plus rien à voir avec le texte initial…