Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le président de la commission des lois, messieurs les rapporteurs, je vous prie d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Bernard Cazeneuve, qui est retenu en ce moment à l’Assemblée nationale.
En son nom, je remercie l’ensemble des sénateurs qui se sont investis dans cette discussion sur un sujet, le droit des étrangers, qui est un sujet important du débat public, mais qui reste, hélas, encore trop souvent un sujet de polémiques inutiles, voire de caricatures affligeantes et révoltantes, comme nous en avons malheureusement eu une illustration cet après-midi.
Je me réjouis que, sur un certain nombre de points, nous ayons vu émerger au cours de ce débat les voies d’un consensus républicain, sinon sur les moyens à mettre en œuvre, du moins sur les grands objectifs à atteindre.
Quels sont ces objectifs, qui sont partagés sur toutes les travées des partis qui se réclament de la République ?
Ils sont au fond assez simples, et au nombre de trois.
Premier objectif : améliorer l’intégration de ceux qui peuvent légalement nous rejoindre, en renforçant notamment les exigences linguistiques.
Deuxième objectif : attirer ceux qui peuvent, par leur talent ou leurs compétences, contribuer au rayonnement et à la croissance de la France.
Enfin, troisième objectif : lutter contre l’immigration irrégulière et la fraude au séjour dans le respect des lois de la République.
Tout cela doit fonder une politique équilibrée, qui ne devrait pas laisser de prises aux positionnements tactiques. Le Gouvernement regrette donc que le Sénat ait souhaité, comme sur le projet de loi relatif au droit d’asile, adopter des dispositions dont il connaît soit l’inconstitutionnalité, soit le caractère contre-productif.
Je pense bien sûr à la politique des quotas, une politique qui n’est constitutionnelle qu’à la condition de ne porter que sur l’immigration professionnelle et étudiante, et non sur l’immigration familiale et les réfugiés politiques, cette immigration étant protégée par des droits.
L’amendement adopté par le Sénat à ce sujet est donc inconstitutionnel, car il n’exclut que le regroupement familial, et non toute l’immigration familiale, créant ainsi une rupture d’égalité, comme vous l’a démontré M. le ministre de l’intérieur.
Aussi, je pense que, sur ces points, l’Assemblée nationale n’aura d’autre choix que d’en revenir au droit positif.
Le Gouvernement trouve également dommage que, sur certains sujets comme le contentieux de la rétention ou la définition du droit au séjour des étrangers malades, le Sénat ait cru devoir revenir à la loi du 16 juin 2011, qui pose, et vous le savez bien, plusieurs difficultés. La rédaction de l’Assemblée nationale paraissait au Gouvernement plus innovante et, surtout, plus efficace sur ce point.
Enfin, le Gouvernement est bien conscient, si l’on veut faciliter l’intégration, qu’il faut sortir des tracasseries administratives : 5 millions de passages d’étrangers en préfecture par an pour 2, 5 millions d’étrangers titulaires d’un titre de séjour, c’est beaucoup trop ! Cette situation ne sert ni la lutte contre la fraude ni l’intégration. Le Gouvernement souhaite donc que le titre de séjour pluriannuel, adossé à un puissant parcours d’intégration et à des outils de lutte contre la fraude, devienne la norme.
Mesdames, messieurs les sénateurs, il me reste à vous remercier de la qualité de vos débats, qui ont permis, certes, de marquer des nuances fortes entre nous, mais également de poser les bases d’un diagnostic partagé : si la France doit demeurer une terre d’immigration, elle doit mieux intégrer ceux qu’elle accueille, mieux attirer les talents et, bien sûr, mieux lutter contre l’immigration irrégulière.
Malheureusement, les écarts importants entre les deux textes nous font craindre qu’un texte commun ne soit difficile à trouver lors de la CMP. Pour autant, le Gouvernement s’efforcera, dans le respect de l’équilibre du texte issu de l’Assemblée nationale, de tenir compte de la qualité des échanges qui ont eu lieu dans votre assemblée.