En effet, la mission commune d’information sur la gouvernance de l’internet, qui a été constituée sur mon initiative au mois de novembre 2013 à la suite de l’affaire Snowden, avait donné l’alerte dans son rapport rendu en juin 2014 en préconisant, entre autres, un régime exigeant et réaliste de protection des données, ainsi qu’une nécessaire modernisation du cadre juridique européen, préconisations traduites par la suite dans deux résolutions européennes votées à l’unanimité par notre assemblée.
Aujourd'hui, l’invalidation du Safe Harbour a des conséquences opérationnelles et juridiques inquiétantes. Elle amène à exiger de la Commission une grande fermeté dans la renégociation de cet accord, afin d’obtenir des autorités américaines de réelles garanties de protection et d’assurer la possibilité de recours judiciaires pour les citoyens de l’Union.
Il faut par ailleurs une plus grande vigilance dans les négociations en cours d’une nouvelle directive de l’Union sur la protection des données, afin que ce texte encadre scrupuleusement le transfert international de données personnelles à la demande des autorités de pays tiers en les soumettant à l’accord de l’autorité nationale de protection des données compétente au sein de l’Union européenne.
Je regrette une fois de plus que le Conseil européen n’accorde pas sa juste place aux enjeux du numérique qui, comme vous le savez, ébranlent nos modèles économiques traditionnels et ne cessent de questionner notre souveraineté.
Les échéances importantes dans le cadre du TTIP et du G20 de novembre se rapprochent et l’Europe s’impose, chaque jour un peu plus hélas, comme une colonie américaine du numérique.
Le Gouvernement, la Commission européenne et le Conseil européen ne peuvent plus invoquer leur ignorance, ni des enjeux ni des solutions. L’Union doit vraiment réagir pour peser dans cette gouvernance du net, porter une régulation offensive de l’écosystème numérique, ainsi qu’une ambition industrielle.
Je terminerai par deux questions, monsieur le secrétaire d’État. Quelle stratégie votre gouvernement compte-t-il poursuivre dans le cadre du Conseil européen pour mieux affirmer la nécessité de constituer, enfin, une Europe du numérique plus substantielle et, surtout, plus effective qu’une simple communication de la Commission européenne ? Quelle stratégie comptez-vous également mettre en œuvre, au regard du retard européen en la matière, pour ne pas aboutir à un accord boiteux avec les États-Unis dans le cadre de l’accord de libre-échange ?