Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires européennes, mes chers collègues, ces dernières années ont vu les crises se succéder. Alors que la crise économique et financière fait encore ressentir ses effets, l’Europe a dû affronter il y a peu l’éventualité d’une sortie de la Grèce de la zone euro. Elle doit désormais faire face à l’afflux de nombreux réfugiés cherchant à fuir les conflits qui enflamment le Proche-Orient.
Aussi, l’Union européenne paraît plus fragile que jamais, et ce alors même que le Royaume-Uni s’apprête à organiser un référendum sur le principe de son appartenance à celle-ci.
Dans ces conditions, il semble urgent de trouver des solutions afin d’apaiser les dissensions entre les États membres et de déterminer de nouveaux ressorts au projet européen. Car de cette période de crises ressortira soit une Union plus resserrée, soit une Europe plus divisée.
Dans cette perspective, la gouvernance budgétaire de l’Union européenne présente une importance centrale, dans la mesure où elle constitue l’un des socles du vivre ensemble européen.
À ce jour, les désaccords les plus profonds qui menacent la cohésion européenne concernent la gestion des flux migratoires. Or se pose naturellement la question de la prise en charge financière de l’accueil des réfugiés. À ce titre, une telle circonstance étant « inhabituelle [et] indépendante de la volonté » des États membres, l’Italie et l’Autriche ont demandé que le pacte de stabilité et de croissance puisse faire l’objet d’une application souple à l’égard de leur situation budgétaire, susceptible d’être affectée par les dépenses engagées en faveur des migrants. La Commission européenne s’est dite prête à examiner cette requête. Aussi, monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer quelle est la position défendue par la France sur cette demande adressée à la Commission ?
En tout état de cause, la cohésion de l’Union européenne dépendra de notre capacité à faire évoluer et à approfondir l’Union économique et monétaire. À cet égard, le rapport des cinq présidents, présenté en juin dernier, a avancé des propositions en ce sens, dont nous aurons à discuter dans les semaines et les mois à venir. Ce point sera d’ailleurs abordé lors du prochain Conseil européen.
Alors que le ministre des finances et des comptes publics, Michel Sapin, semble avoir engagé une série de consultations sur l’avenir de la zone euro, je souhaite vous interroger, monsieur le secrétaire d’État, sur la position qui sera défendue par la France s’agissant de certaines de ces propositions.
Tout d’abord, le rapport des cinq présidents recommande la création d’un comité budgétaire consultatif qui fournirait, « au niveau européen, une évaluation publique et indépendante des budgets – et de leur exécution – à l’aune des objectifs économiques et des recommandations formulées dans le cadre de la gouvernance budgétaire de l’Union. » Selon le Gouvernement, quels devraient être la composition et le rôle exact de cette nouvelle entité, afin que ses travaux ne soient pas redondants avec ceux qui sont d’ores et déjà conduits par la Commission européenne ?
Ensuite, il est proposé la mise en place d’une nouvelle architecture institutionnelle de l’Union économique et monétaire qui devrait notamment permettre un renforcement du rôle du Parlement européen et des parlements nationaux. À cet égard, considérez-vous, monsieur le secrétaire d’État, qu’il serait souhaitable de créer un parlement de la zone euro, dont la spécificité par rapport à l’Union européenne tend à se renforcer ? Dans ce cas, ne devrait-il pas intégrer des représentants des parlements nationaux ? En particulier, il pourrait être l’organe où seraient discutées et examinées les actions engagées par la présidence « à temps plein » de l’Eurogroupe et le Trésor de la zone euro, dont la mise en place est également préconisée.
Selon le rapport des cinq présidents, le Trésor de la zone euro constituerait le lieu où seraient prises « certaines décisions [en matière de politique budgétaire] de façon collective ». Quelle forme prendrait ce « ministère des finances » de la zone euro ? Quelles pourraient être, selon le Gouvernement, les décisions qui lui seraient déléguées ?
Enfin, il est proposé la création d’un mécanisme de stabilisation budgétaire pour la zone euro, dont les contours demeurent encore flous. À quoi ce mécanisme devrait-il ressembler, selon le gouvernement français ? Une assurance chômage commune devrait-elle être créée, ainsi que l’a suggéré au mois de mai dernier le ministre de l’économie ? En outre, quelle ressource financière pérenne devrait être affectée à ce mécanisme de stabilisation budgétaire ?
Pour conclure mon propos, je revendrai quelques instants sur le référendum que le Royaume-Uni s’apprête à organiser sur le principe de son appartenance à l’Union européenne. Chacun sait que le gouvernement britannique souhaite négocier son maintien dans l’Union contre des concessions de ses partenaires européens. Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous indiquer les lignes rouges que le gouvernement français ne souhaite pas voir dépasser dans le cadre de ces négociations ? Quelles seraient, en clair, les concessions que la France jugerait inacceptables ?
Voilà, très rapidement exposées, quelques questions essentielles dans la perspective du Conseil européen des 15 et 16 octobre prochain, dont j’espère qu’elles appelleront des réponses aussi précises que possible.