Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 23 juin 2009 à 9h30
Questions orales — Vétusté de la maison d'arrêt de la santé

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Madame la ministre, mes chers collègues, je vous prie tout d’abord d’excuser notre collègue Roger Madec, qui a été retenu pour une raison totalement indépendante de sa volonté et ne peut être présent parmi nous. J’aurai donc l’honneur de poser la question en son nom.

Le XIVe arrondissement de Paris abrite l’une des prisons les plus médiatiques de notre système judiciaire : la maison d’arrêt de la Santé, centre pénitentiaire qui reste l’un des plus délabrés de France.

Construite en 1867, la maison d’arrêt de la Santé est la dernière prison intra-muros de Paris. Tout comme la majorité du parc pénitentiaire datant d’avant 1920, elle n’est plus conforme aux normes d’hygiène et de sécurité obligatoires pour l’hébergement de personnes écrouées.

Il s’agit aujourd’hui d’une petite structure qui accueille un centre de détention et un quartier de semi-liberté. Les conditions de vie y sont inacceptables.

La maison d’arrêt de la Santé tombe en ruine. Elle montre, du fait de la défection de l’État, un grand état de délabrement. Le bâtiment a subi une détérioration irréversible qui s’est accélérée au cours des dernières années. La corrosion qui attaque les fondations internes des murs a conduit, pour des raisons de sécurité, à la fermeture de deux blocs sur quatre en 2006. Depuis, aucune rénovation, aucune transformation, aucune reconstruction de ces blocs n’a été entreprise. Ils sont aujourd’hui à l’abandon.

La grande vétusté entraîne une insalubrité croissante, rendant difficiles les conditions de travail des agents de l’administration pénitentiaire ainsi que les conditions de détention. Les murs s’effritent, les plafonds s’écroulent. La maison de la d’arrêt de la Santé, usée par le temps, se mue en ruine.

La détérioration de l’établissement ne permet pas de proposer de programme de formation tel que la loi le préconise. En effet, les locaux adaptés à la formation sont en nombre manifestement insuffisant. Il en est de même pour le travail, qui n’est pas proposé, faute, là encore, de locaux conformes aux normes en vigueur. Les activités sportives sont, elles aussi, très limitées. L’agencement architectural de la maison d’arrêt ne permet pas le déroulement de séances de sport en extérieur. Seule une salle de musculation est proposée pour l’ensemble des détenus.

Depuis 2000, la restructuration de la Santé est à l’étude. Des travaux de rénovation ont été programmés pour 2008 et estimés à 150 millions d’euros. Or, à la suite d’un audit mené dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, ce projet a été suspendu, ce qui reculerait la rénovation à 2013-2016.

Cette suspension des travaux aggrave les conditions de travail des agents de l’administration pénitentiaire, qui font pourtant preuve d’une grande conscience professionnelle. Les grèves qui ont touché la maison d’arrêt de la Santé au mois de mai dernier ont démontré l’existence d’un malaise profond parmi eux.

Depuis trente ans, les rapports sur les prisons françaises se suivent et se ressemblent, sans grand effet sur les conditions de détention. Vous savez, madame la ministre, que la France est régulièrement condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme. Nos prisons font l’objet de critiques, tant au niveau national qu’au niveau international, avec les rapports de l’ONU et du CPT, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants. Je rappelle que ce comité dénonce depuis 1991 – et encore récemment, dans un rapport de 2007 qui faisait suite à des visites menées en 2006 – des « traitements inhumains et dégradants », précisément.

Hier, mes chers collègues, nous étions à Versailles, où nous avons pu entendre le Président de la République s’indigner de l’état de nos prisons, qualifiant ledit état de « honte pour notre République ». C’était d’ailleurs, je crois, le titre d’un rapport parlementaire qui avait été établi sur l’initiative de la commission des lois du Sénat…

Face à un projet de réfection estimé à 150 millions d’euros, madame la ministre, vous prévoyez un financement d’un montant de 771 000 euros. La différence entre les deux sommes est évidente ! On est loin des engagements pris en 2005 pour la réhabilitation de l’établissement de la Santé.

Notre collègue Roger Madec souhaiterait savoir quelles dispositions vont être prises afin d’honorer les engagements de l’État concernant la réhabilitation de la maison d’arrêt de la Santé.

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