Il aurait presque fallu examiner les articles 6 bis et 6 ter dans l’ordre inverse.
L’article 6 bis concerne les visites dans un lieu de rencontre prescrites par le juge aux affaires familiales, et l’article 6 ter est relatif aux visites médiatisées prescrites par le juge des enfants.
Mme la rapporteur l’a évoqué, on observe une augmentation assez étonnante de la prescription par les juges des visites médiatisées, soit dans un lieu de rencontre lorsqu’un des deux parents a la garde de l’enfant, soit, en application de l’article 375-7 du code civil, en présence d’un tiers désigné par l’établissement ou le service à qui l’enfant est confié.
Pour le coup, ces deux articles visent à permettre aux départements de faire des économies, dans la mesure où la multiplication de ces visites médiatisées pèse lourdement sur l’activité des travailleurs sociaux. Or ni ces derniers ni les enfants ne perçoivent toujours clairement le but de ces visites.
Par ailleurs, comme l’a dit également Mme la rapporteur, il arrive que ces visites médiatisées, lorsqu’elles interviennent dans des contextes de conflit intrafamilial, donnent lieu à des agressions à l’encontre des travailleurs sociaux.
Mme Meunier a rappelé l’affaire de Nantes, dans laquelle un travailleur social a été assassiné par un père à l’occasion de l’une de ces visites. J’ajoute que, samedi dernier, une éducatrice spécialisée a également été agressée par un père dans des circonstances similaires.
Pour résumer ce que nous disent les travailleurs sociaux à propos des visites médiatisées, il n’est pas évident de convaincre les enfants de s’y rendre dans un contexte familial de violence. Par ailleurs, ces visites n’apparaissent pas en elles-mêmes comme étant réparatrices pour l’enfant. Enfin, il faut ensuite « récupérer » un enfant qui a souvent été bouleversé par la visite.
Notre but n’est pas d’interdire ces visites, mais plutôt de donner aux travailleurs sociaux un outil pour comprendre pourquoi une telle mesure a été prescrite et quelle est l’attente du juge en la matière.
Cette compréhension est importante à la fois pour les travailleurs sociaux et pour l’enfant. Il faut aussi que les juges se posent la question de la raison pour laquelle, dans un cas précis, ils prescrivent une visite médiatisée. La mention « par décision spécialement motivée » permettra d’éviter les motivations « copiées-collées » et obligera le juge à rédiger une prescription adaptée à la situation précise de l’enfant.
Les articles 6 bis et 6 ter ont donc pour objet de répondre à cette inflation de demandes et à une situation qui échappe un peu aux travailleurs sociaux, tout en étant génératrice de tensions tant pour les enfants et les mères, dans un contexte de violences, que pour les travailleurs sociaux eux-mêmes.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.