La séance, suspendue à vingt heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze.
La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion en deuxième lecture de la proposition de loi, modifiée par l’Assemblée nationale, relative à la protection de l’enfant.
Nous poursuivons l’examen du texte de la commission.
TITRE II
SÉCURISER LE PARCOURS DE L’ENFANT EN PROTECTION DE L’ENFANCE
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus, au sein du titre II, à l’article 5 ED.
Après le deuxième alinéa de l’article L. 543-1 du code de la sécurité sociale, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’un enfant est confié au service d’aide sociale à l’enfance, l’allocation de rentrée scolaire due à la famille pour cet enfant est versée à ce service. »
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 37 est présenté par le Gouvernement.
L'amendement n° 43 est présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Le chapitre III du titre IV du livre V du code de la sécurité sociale est complété par un article L. 543-3 ainsi rédigé :
« Art. L. 543 -3. – Lorsqu’un enfant est confié au service de l’aide sociale à l’enfance, l’allocation mentionnée à l’article L. 543-1 ou l’allocation différentielle mentionnée à l’article L. 543-2 due au titre d’un enfant confié en application des articles 375-3 et 375-5 du code civil, est versée à la Caisse des dépôts et consignations, qui en assure la gestion jusqu’à la majorité de l’enfant ou, le cas échéant, jusqu’à son émancipation. À cette date, le pécule est attribué et versé à l’enfant.
« Pour l’application de la condition de ressources, la situation de la famille continue d’être appréciée en tenant compte à la fois des enfants présents au foyer et du ou des enfants confiés au service de l’aide sociale à l’enfance.
« La ou les sommes indûment versées à la Caisse des dépôts et consignations sont restituées par cette dernière à l’organisme débiteur des prestations familiales. »
II. – Le I est applicable à Saint-Pierre-et-Miquelon.
III. – Le présent article est applicable à l’allocation de rentrée scolaire due à compter de la rentrée scolaire 2016.
La parole est à Mme la secrétaire d'État, pour présenter l’amendement n° 37.
Cet amendement vise à rétablir une disposition qui figurait dans le texte adopté par l’Assemblée nationale. Cette disposition va sans doute susciter quelques discussions, mais je souhaite la défendre devant vous ce soir.
Cette disposition a d’abord pour origine une observation, évoquée hier par plusieurs d’entre vous, notamment par Mme Archimbaud, sur les ruptures qui émaillent la vie des jeunes de l’ASE, l’aide sociale à l’enfance, tout au long de leur parcours, et en particulier sur la rupture spécifique que constituent la sortie de l’ASE et l’entrée dans la vie adulte.
Les jeunes dont nous parlons entrent en général dans cette vie sans économies, parfois sans famille – en tout cas dans des situations familiales très délicates –, donc sans soutien et sans appui, et souvent sans diplômes, ou presque, et, en tout état de cause, sans emploi. L’entrée dans la vie adulte est donc, pour un jeune de l’ASE, encore plus difficile que pour les autres jeunes.
Les articles précédents visaient à sécuriser la sortie de l’ASE par l’accompagnement des jeunes concernés, avant leur majorité – via l’organisation, par le président du conseil départemental, d’un entretien avec chaque mineur de l’ASE un an avant sa majorité – ou après – via le suivi des jeunes devenus majeurs.
L’article 5 ED vise quant à lui à doter les jeunes majeurs, à leur sortie de l’ASE, d’un pécule constitué par le versement de l’allocation de rentrée scolaire à la Caisse des dépôts et consignations.
Vous savez, puisque vous avez eu l’occasion d’en débattre à l’occasion de l’examen d’une autre proposition de loi, que, s’agissant des enfants placés, les allocations familiales peuvent être, selon la décision du juge, versées à la famille ou au département.
En revanche, l’allocation de rentrée scolaire, qui n’obéit pas aux mêmes règles que les allocations familiales, demeure, elle, systématiquement versée à la famille, y compris lorsque l’enfant est placé. Cet article prévoit de verser l’allocation de rentrée scolaire non plus aux parents de l’enfant confié à l’ASE, mais sur un compte de dépôt auquel le jeune a accès à la date de sa majorité. Il s’agit de lui permettre de démarrer sa vie d’adulte en disposant d’un petit pécule.
Je comprends tout à fait que cette disposition puisse susciter la surprise - elle est en effet très innovante –, mais l’accompagnement de ces jeunes à l’entrée d’une vie d’adulte qu’ils ont encore à construire exige des dispositions innovantes.
La parole est à Mme Claire-Lise Campion, pour présenter l'amendement n° 43.
Mme la secrétaire d’État vient d’expliquer avec beaucoup de conviction la solution innovante qui constitue l’objet de l’amendement n° 37 présenté par le Gouvernement, et que le groupe socialiste et républicain appuie en présentant cet amendement identique n° 43.
Je voudrais simplement préciser que cette disposition n’emporte aucune modification de la règle actuelle. Celle-ci prévoit que, lorsqu’un enfant est confié aux services de l’aide sociale à l’enfance, les allocations familiales sont versées au conseil départemental, sauf si le juge décide d’en maintenir le versement à la famille.
La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable, d’une part pour des raisons de principe – cette allocation de rentrée scolaire étant destinée aux parents, une telle mesure constituerait pour les administrateurs de la commission des affaires sociales un dévoiement du dispositif, d’autre part pour des raisons, déjà largement évoquées, qui tiennent au manque de moyens des départements.
À titre personnel, j’émets un avis favorable, d’abord parce que, comme cela vient d’être souligné par Mme la secrétaire d’État, il s’agit d’une mesure nouvelle, qui répond – partiellement, bien entendu – de manière originale à un problème réel, à savoir la demande d’autonomie des jeunes devenus majeurs à la sortie de l’ASE.
Cette mesure est d’ailleurs le fruit, notamment, de concertations – il en a été question hier – avec les anciens de l’ASE.
L’allocation de rentrée scolaire est servie sous conditions de ressources et aide les ménages modestes à faire face aux dépenses induites par la scolarisation des enfants. Dans la mesure où les parents n’ont plus la charge de leurs enfants placés, il me semble important et intéressant de verser cette allocation aux jeunes eux-mêmes, en vue de leur autonomie, sous la forme d’un pécule accessible à leur majorité.
L’avis de la commission des affaires sociales est en tout cas défavorable.
Cette disposition présente dans le texte initial a été en effet supprimée par la commission des affaires sociales, celle-ci ayant adopté un amendement déposé par mon collègue Christophe Béchu et moi-même.
Nous avions été, en 2013, à l’origine d’une proposition de loi clarifiant la situation des enfants placés à l’ASE et dont l’entretien est financé par les départements. Nous avions alors souhaité qu’une partie des allocations familiales soit systématiquement versée à l’ASE lorsque l’enfant était confié à ce service par décision du juge – ce qui n’est pas toujours le cas.
Quant à l’allocation de rentrée scolaire, dans la mesure où l’ensemble des frais inhérents à la scolarisation – fournitures, etc. – sont financés non pas par les familles, mais par les services d’aide sociale à l’enfance des départements, nous avions alors décidé qu’elle devait être systématiquement versée – lorsque les enfants y avaient droit – aux départements.
Le dispositif aujourd’hui proposé est totalement différent : les familles ne reçoivent plus l’allocation de rentrée scolaire, mais celle-ci est consacrée à la constitution d’un pécule.
L’idée du pécule ne fait l’objet d’aucun a priori négatif très ferme. Néanmoins, la mesure nous placerait dans une situation où les départements continueraient d’assumer les charges liées à la rentrée scolaire sans que l’allocation ad hoc leur soit versée.
Cela reviendrait, en définitive, à organiser un double financement : les départements continueraient de financer la rentrée scolaire, alors que l’allocation serait dédiée au financement d’un pécule destiné à être ultérieurement attribué à l’enfant.
Un tel dispositif ne nous semble pas d’une grande cohérence ; c’est pourquoi le groupe Les Républicains émet un avis tout à fait défavorable à son rétablissement.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 37 et 43.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l'avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 15 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'article 5 ED.
L'article 5 ED est adopté.
Après l’article L. 222-5 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 222-5-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 222 -5 -2. – Peuvent être pris en charge dans un centre parental, au titre de la protection de l’enfance, les enfants de moins de trois ans accompagnés de leurs deux parents quand ceux-ci ont besoin d’un soutien éducatif dans l’exercice de leur fonction parentale. Peuvent également être accueillis, dans les mêmes conditions, les deux futurs parents pour préparer la naissance de l’enfant. »
L'article 5 E est adopté.
Le chapitre III du titre II du livre II du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’avant-dernier alinéa de l’article L. 223-1 est supprimé ;
2° Après l’article L. 223-1, il est inséré un article L. 223-1-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 223 -1 -1. – Il est établi, pour chaque mineur bénéficiant d’une prestation d’aide sociale à l’enfance, hors aides financières, ou d’une mesure de protection judiciaire, un document unique intitulé “projet pour l’enfant”, qui vise à garantir son développement physique, psychique, affectif, intellectuel et social. Ce document accompagne le mineur tout au long de son parcours au titre de la protection de l’enfance.
« Le projet pour l’enfant est construit en cohérence avec les objectifs fixés dans la décision administrative ou judiciaire le concernant. Dans une approche pluridisciplinaire, ce document détermine la nature et les objectifs des interventions menées en direction du mineur, de ses parents et de son environnement, leur délai de mise en œuvre, leur durée, le rôle du ou des parents et, le cas échéant, des tiers intervenant auprès du mineur ; il mentionne, en outre, l’identité du référent du mineur.
« Le projet pour l’enfant prend en compte les relations personnelles entre les frères et sœurs, lorsqu’elles existent, afin d’éviter les séparations, sauf si cela n’est pas possible ou si l’intérêt de l’enfant commande une autre solution.
« L’élaboration du projet pour l’enfant comprend une évaluation médicale et psychologique du mineur afin de détecter les besoins de soins qui doivent être intégrés au document.
« Le président du conseil départemental est le garant du projet pour l’enfant, qu’il établit en concertation avec les titulaires de l’autorité parentale et, le cas échéant, avec la personne désignée en tant que tiers digne de confiance ainsi qu’avec toute personne physique ou morale qui s’implique auprès du mineur. Ce dernier est associé à l’établissement du projet pour l’enfant, selon des modalités adaptées à son âge et à sa maturité. Le projet pour l’enfant est remis au mineur et à ses représentants légaux et est communicable à chacune des personnes physiques ou morales qu’il identifie selon les conditions prévues par la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d’amélioration des relations entre l’administration et le public et diverses dispositions d’ordre administratif, social et fiscal.
« Le projet pour l’enfant est transmis au juge lorsque celui-ci est saisi.
« Il est mis à jour, sur la base des rapports annuels mentionnés à l’article L. 223-5, afin de tenir compte de l’évolution des besoins fondamentaux de l’enfant. Après chaque mise à jour, il est transmis aux services chargés de mettre en œuvre toute intervention de protection.
« Les autres documents relatifs à la prise en charge de l’enfant, notamment le document individuel de prise en charge et le contrat d’accueil dans un établissement, s’articulent avec le projet pour l’enfant.
« Un référentiel approuvé par décret définit le contenu du projet pour l’enfant. » ;
3° À la première phrase de l’article L. 223-3-1, la référence : « L. 223-1 » est remplacée par la référence : « L. 223-1-1 ».
L'amendement n° 54, présenté par Mme Meunier, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéa 10, première phrase
Supprimer le mot :
annuels
La parole est à Mme la rapporteur.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 19 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, MM. Kern et Canevet, Mme Loisier, MM. Bonnecarrère, Gabouty, Morisset et Pierre, Mme Férat, MM. Chasseing, Détraigne et Commeinhes, Mme Lopez, MM. Houpert et Longeot, Mme Billon, MM. L. Hervé, Lasserre et Luche, Mme Gatel, MM. Danesi, J.L. Dupont, Cigolotti, Laménie et Pellevat et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
Cet amendement s’inscrit dans le respect des lois de décentralisation, qui font du département le chef de file en matière de protection de l’enfance.
L’élaboration d’un référentiel approuvé par décret définissant le contenu du projet pour l’enfant créerait une compétence liée pour le président du conseil départemental.
Nous proposons donc de supprimer l’alinéa 12 de l’article 5.
Encore une fois, une loi, ce n’est pas un recueil de bonnes pratiques !
L'amendement n° 11 rectifié, présenté par Mme Malherbe, MM. Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Après le mot :
contenu
insérer le mot :
minimal
La parole est à Mme Hermeline Malherbe.
Nous ne sommes pas favorables à la suppression de l’alinéa 12. En revanche, nous souhaitons préciser que le référentiel définit le contenu « minimal » du projet pour l’enfant. Il s’agit de laisser une marge de manœuvre aux départements.
Mme la secrétaire d’État a insisté sur la nécessité de retrouver une certaine équité sur l’ensemble du territoire français pour l’ensemble des enfants pris en charge par les services de l’aide sociale à l’enfance. Nous proposons donc d’instituer un cadre à la fois applicable à tous et susceptible d’ajustements en fonction des territoires, d’où l’idée de préciser qu’il s’agit d’un contenu « minimal ».
La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 19 rectifié bis, suivant Mme Doineau en ses arguments.
Toutefois, à titre personnel, j’y suis défavorable. J’avoue ne pas bien comprendre ce qui se passe ici. La proposition de loi a, certes, une colonne vertébrale, son article 1er, mais elle a aussi un ADN, qui est le projet pour l’enfant !
C’est ce qui permet d’avoir une véritable logique de parcours. L’enfant qui est confié à l’ASE arrive, avec son histoire familiale et affective, ses caractéristiques de santé physique ou psychique. Et l’équipe éducative et les services du département se mobilisent pour l’aider à grandir sur la base de ce projet.
Je ne comprends donc pas cette volonté de supprimer une disposition qui, je le rappelle, avait été adoptée en première lecture au Sénat. C’est pourquoi je ne suis pas favorable à cet amendement, contrairement à la commission.
Enfin, l’avis de la commission est défavorable sur l’amendement n° 11 rectifié. Le référentiel qui doit être approuvé par décret n’a pas vocation à définir de manière exhaustive le contenu du projet pour l’enfant. L’ajout de l’adjectif « minimal » dans le texte ne se justifie donc pas.
Je souhaite préciser l’objet de l’alinéa 12, que l’amendement n° 19 rectifié bis vise à supprimer.
Le projet pour l’enfant était une disposition majeure de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance. Simplement, huit ans plus tard, nous constatons que moins du tiers des enfants de l’Aide sociale à l’enfance bénéficient d’un projet pour l’enfant. Évitant de faire du dogmatisme et de l’idéologie en tout, je me suis simplement demandé pourquoi.
Je ne soupçonne pas les départements d’être rétifs au projet pour l’enfant. J’ai simplement noté, en discutant avec les professionnels, qu’ils n’avaient pas forcément d’outil adéquat pour l’exercice.
J’ai lu nombre de projets pour l’enfant. Certains relèvent quasiment de la dissertation, quand d’autres sont de véritables projets. Mais il arrive également que des professionnels avouent ne pas savoir faire.
Nous avons donc observé les expériences étrangères. En France, on n’aime pas les référentiels ; ce n’est pas dans notre culture. Ailleurs, par exemple au Québec, cela se fait beaucoup plus. Sans aller jusqu’à copier la pratique québécoise, nous pourrions au moins, me semble-t-il, nous en inspirer.
Le référentiel est un outil pour permettre aux travailleurs sociaux de rédiger le projet pour l’enfant. C’est donc un guide explicatif de ce que le projet doit contenir. L’objectif est, à tout le moins, de parvenir à doubler la proportion d’enfants de l’ASE qui bénéficient d’un projet pour l’enfant, voire – quelle ambition ! – de faire en sorte que la loi s’applique, c'est-à-dire qu’il y ait un projet pour tous les enfants concernés. Rien de plus !
Je veux bien que l’examen de chaque article ou de chaque amendement serve de prétexte à un débat sur quelques sujets virant presque à l’obsession, comme la libre administration des collectivités territoriales, la situation financière des départements ou le niveau de compensation de l’État. Mais on pourrait peut-être aussi élargir de temps en temps l’angle de vue !
En l’occurrence, ce que nous proposons, c’est simplement un outil pour les professionnels, dans l’intérêt de l’enfant, afin que la loi de 2007 soit mieux appliquée.
Madame Malherbe, le référentiel sera élaboré sur la base des réflexions de trois groupes de travail.
Le premier est le groupe de travail des départements, qui se réunit régulièrement, sur mon initiative ou sur celle de la direction générale de la cohésion sociale, la DGCS. Il rassemble des élus de toutes tendances politiques. À cet égard, mesdames, messieurs les membres de la majorité sénatoriale, je vous indique que les élus départementaux de votre sensibilité politique sont très allants et demandeurs ; ils participent à ces groupes avec enthousiasme et semblent beaucoup en attendre.
Le deuxième groupe est pluridisciplinaire, l’objectif étant bien d’avoir une approche pluridisciplinaire.
Le troisième groupe est, bien entendu, l’Observatoire national de l’enfance en danger, l’ONED, organisme qui a une meilleure connaissance de l’Aide sociale à l’enfance et dont la réflexion sur ce que doit être un projet pour l’enfant est déjà avancée.
À partir de ces trois groupes de travail, nous élaborerons le référentiel, dans la concertation, comme nous l’avons fait pour la loi. Et la question, très administrative, de la compétence liée des départements n’a pas grand-chose à voir avec ce dont nous parlons ici.
Par conséquent, j’émets un avis défavorable sur l’amendement n° 19 rectifié bis, et j’espère avoir rassuré Mme Malherbe sur la coconstruction du référentiel.
Je vous l’avoue, je vis mal ce débat, que d’aucuns voudraient transformer en une confrontation – c’est en tout cas ce qui transparaît dans certains propos – entre ceux qui auraient une très grande ambition pour l’enfance et ceux qui ont la responsabilité de gérer un département.
Je le dis sans forfanterie, l’ambition pour l’enfance n’est pas une invention du moment ! Voilà bien longtemps qu’elle anime les exécutifs départementaux. Certes, des vocables comme ceux que vous avez employés – « référentiel » ou « projet pour l’enfant », par exemple – n’apparaissent pas forcément. Mais, pour bien connaître un certain nombre de départements, je puis vous certifier que les présidents de conseil départemental partagent cette noble préoccupation.
Réduire le débat à un affrontement entre un grand et beau dessein et des soucis de gestion, c’est un peu court !
La position des départements devient totalement insoutenable.
Les conseils départementaux sont, pour une fois, désignés comme chefs de file sur ce qui est une très belle ambition. Or on ne leur fait pas confiance ; on leur impose des règlements sur lesquels ils n’ont pas été consultés. Pourtant, ils seraient prêts à souscrire aux objectifs, à condition – vous voudrez bien me pardonner ce manque de romantisme – qu’on leur en donne les moyens financiers.
J’ai examiné attentivement la proposition de loi. La plupart des articles risquent d’accroître les difficultés des conseils départementaux. À mon sens, ce serait une erreur de balayer une telle objection d’un revers de main sous prétexte qu’elle serait un peu triviale et manquerait d’élévation…
Dans ce débat, il manque une dimension essentielle : la nécessaire solidarité nationale en matière de prestations sociales.
Il n’est pas normal que des décisions nationales, même justifiées, s’imposent de cette manière à l’échelon départemental. Je vous renvoie à ce qui s’est passé pour la jeunesse, le revenu de solidarité active ou le handicap ; d’ailleurs, la mise en place de projets de vie pour les handicapés fut une merveilleuse aventure.
Il n’est pas normal que la solidarité nationale financière soit totalement absente de nos débats !
Madame Doineau, je suis vraiment très étonné par la philosophie qui sous-tend votre amendement n° 19 rectifié bis.
Mes chers collègues, il est évident que la décentralisation n’est pas la négation de l’État ! L’État est parfaitement habilité à produire des décrets en matière de santé, d’hygiène ou de respect de la sécurité dans de nombreux domaines. Or, dans notre République, il y a un État !
Comment pourriez-vous fonder la contestation de la légitimité d’un décret pour définir les conditions que doit respecter un référentiel relatif au parcours de ces enfants et à leur projet ? Si c’est illégitime, nous changeons de République, car cela signifie qu’il y a des départements autonomes. C’est un peu comme si vous jugiez illégitimes les programmes scolaires nationaux, en considérant que chaque collectivité locale devrait pouvoir organiser l’enseignement comme elle l’entend !
La réalité de notre République, c’est qu’il y a un État républicain et que les collectivités locales travaillent dans le cadre des compétences dévolues par la loi, mais également de règles fixées par l’État.
Je ne comprends donc pas du tout le sens d’un tel amendement. Dans un domaine aussi important que celui de la protection des enfants pris en charge, il faut accepter que l’État puisse poser des règles. Et si vous défendez le contraire, il faut argumenter. Mais une telle argumentation pourrait alors nous mener fort loin ; nous aurons l’occasion d’en reparler.
Quoi qu’il en soit, je ne suis pas d'accord avec la philosophie sous-jacente ici. Ce que vous dites là, ma chère collègue, pourrait s’appliquer à un grand nombre de décrets !
Je partage totalement les propos de notre collègue Jean-Pierre Sueur sur la décentralisation et l’unicité de la Nation.
Plusieurs intervenants prennent prétexte d’un texte sur la protection de l’enfant pour nous faire part des difficultés financières des départements. Bien sûr que les départements sont confrontés à des difficultés financières ! Mon collègue Christian Favier, lui-même président d’un département francilien, l’a amplement souligné !
Mais ce n’est pas dans cette proposition de loi qu’il faut évoquer le financement des départements ! Nous pourrons le faire lors de l’examen des textes budgétaires. Ce sera d’ailleurs l’occasion d’observer les positions des uns et des autres sur le sujet…
En attendant, les auteurs de ces amendements intentent un mauvais procès au texte dont nous sommes saisis et nient la réalité de la situation de l’ASE dans un grand nombre de nos départements.
L’ASE est en difficulté. Disant cela, je n’accuse pas les personnels de ne pas bien accomplir leur travail ni les départements de ne pas être sensibles à la protection de l’enfant. Malheureusement, la situation de l’ASE dans l’ensemble de nos départements n’en est pas moins difficile.
Il est un dernier point qui m’étonne beaucoup dans le débat de ce soir, et Michelle Meunier l’a évoqué : cette proposition de loi a été votée ici même, en première lecture, à l’unanimité. Le texte a été défendu par Michelle Meunier, mais aussi par Muguette Dini, membre de votre groupe, madame Doineau, qui était alors présidente de la commission des affaires sociales et vice-présidente chargée de l’enfance dans le Rhône, département à l’époque présidé par M. Mercier, sénateur également de l’UDI-UC qui connaît bien à la fois la situation de l’ASE, de la protection de l’enfance et des départements. Or c’est ce texte que le Sénat avait soutenu à l’unanimité que vous détricotez aujourd'hui, amendement après amendement !
Je ne vous comprends pas. Mme Dini doit être désolée de ce qui se passe ce soir !
Au fil des amendements, c’est toujours le même débat qui revient et ce sont toujours les mêmes convictions et les mêmes arguments de fond qui sont avancés.
Je comprends que les départements soient extrêmement vigilants et prudents, après avoir subi autant de désillusions. Je rappelle qu’en 2007 la loi réformant la protection de l’enfance prévoyait des compensations financières : elles n’ont jamais été versées. Le dernier gouvernement a consenti une compensation d’un montant d’une année, pour solde de tout compte. Or c’est tous les ans que cette somme devrait être allouée aux départements si l’on souhaite conforter les équipes de l’ASE et mettre en place une réelle politique de protection de l’enfance.
Idem pour les jeunes majeurs, qui étaient pris en charge par l’État, par l’intermédiaire de la justice. Il n’était pas question, en effet, qu’ils arrêtent leur vie scolaire après dix-huit ans ni que cesse l’accompagnement. Celui-ci passait alors à la charge de l’État après avoir été supporté par le département. Je ne sais plus si c’était en 2011 ou en 2012 – étant au centre, je m’abstiens de toute politique politicienne –, mais je me souviens que l’on est venu me dire, à l’époque où j’étais président de conseil général : vous aviez 800 000 euros, l’année prochaine ce sera 400 000 euros, mais l’année n+2 vous n’aurez plus rien, et vous vous débrouillerez !
Les services de l’ASE réalisent un travail formidable. Il est certes imparfait, car, dans le secteur de la protection de l’enfance, on n’en fait jamais assez, mais il a le mérite d’exister. Ce n’est donc pas comme s’il n’y avait rien avant cette proposition de loi !
Par ailleurs, la décentralisation n’est pas non plus l’indépendance. En matière d’enfance et de protection de l’enfant, il faut des règles homogènes sur l’ensemble du territoire. C’est fondamental.
Ne transformons pas un texte relatif à la protection de l’enfant en une loi de défense des finances locales ! Les deux problèmes sont différents. Je me sens d’autant plus autorisé à faire ce petit rappel qu’au sein de l’Assemblée des départements de France, l’ADF, sous tous les régimes, j’ai été l’un des présidents les plus vindicatifs – certains, ici, peuvent l’attester – lorsqu’il s’agissait de défendre les finances des départements. Or ici il s’agit de défendre l’enfant.
Qu’il y ait une loi-cadre, une référence sur laquelle se « mouler » pour que la défense de l’enfant soit homogène sur l’ensemble du territoire, j’y suis favorable.
L’amendement présenté par Mme Malherbe me paraît judicieux puisqu’il prévoit un cadre, mais laisse une marge de manœuvre pour des arrangements. En effet, les problèmes liés à l’enfance ne sont pas les mêmes dans les milieux ruraux que dans les banlieues : s’ils y sont souvent plus cachés, ils sont aussi parfois plus graves.
Le débat est donc faussé depuis le début, et il continuera à l’être jusqu’à la fin de l’examen de ce texte si nous n’actons pas qu’il s’agit ici de discuter non pas des finances départementales, mais de la protection de l’enfant.
Lorsque le temps viendra d’examiner les budgets alloués aux conseils généraux pour qu’ils assument leurs missions, ce qu’ils font d’ailleurs très bien avec les moyens qu’ils ont, je ne manquerai pas d’être de leur côté pour les soutenir.
Aujourd'hui, concentrons-nous plutôt sur la situation de l’enfant. C’est lui qu’il faut défendre !
La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote, mais j’invite notre collègue à respecter son temps de parole.
La tâche sera d’autant plus facile, monsieur le président, que je serai très bref.
Madame la secrétaire d’État, j’ai trouvé votre argumentaire complet, intelligent, pour ne pas dire brillantissime !
Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain . – Exclamations amusées sur les travées du groupe Les Républicains.
Il est essentiel de bien cadrer le débat pour savoir de quoi il est question ici. À défaut, nous pourrions y passer la nuit !
S’agit-il d’un texte relatif aux départements et à leurs prérogatives ? Examinons-nous une proposition de loi qui porte sur les finances des départements ou un texte sur la protection de l’enfant ?
En ce qui concerne la protection de l’enfance, des améliorations sont nécessaires. Je suis donc très étonnée de constater qu’un certain nombre de nos collègues se sentent attaqués dès que l’on parle d’améliorer la protection de l’enfant ! Nous avons pour mission de voter la loi, d’examiner ce qui va, de prendre la mesure de ce qui ne fonctionne pas et d’essayer ensemble d’améliorer les différents mécanismes.
Dans ma pratique professionnelle, j’ai pu constater des dysfonctionnements. Je me réjouis donc qu’une loi vienne améliorer la prise en charge des enfants. Je n’accuse personne ; c’est un constat, et je me réjouis qu’une loi vienne bientôt améliorer la situation.
Je suis également très contente de découvrir que l’on se soucie sur toutes les travées des finances des conseils généraux. Il m’avait pourtant semblé que, jusqu’à présent, seul le groupe CRC réclamait la fin des restrictions budgétaires. Or le sujet fait visiblement consensus. Nous saurons nous en souvenir pour d’autres propositions de loi !
Quoi qu’il en soit, prévoir qu’« un référentiel approuvé par décret définit le contenu du projet pour l’enfant » coûtera-t-il de l’argent ?
Par conséquent, l’argument financier n’est pas recevable pour demander la suppression de cet alinéa. Soyez logique !
Les différentes interventions ont prouvé que le maintien de cet alinéa donnerait satisfaction à tout le monde. Pourquoi ne vous en trouveriez-vous pas également satisfaite, madame Doineau ?
Une fois n’est pas coutume, je suis d’accord avec M. Roche.
J’entends l’inquiétude des conseils départementaux – nous en avons déjà parlé dans cet hémicycle –, mais, je suis d’accord, les finances départementales ne sont pas le sujet du jour. Nous aurons bien d’autres occasions et d’autres textes – notamment le projet de loi de finances – pour les évoquer !
En tout état de cause, je ne vois pas en quoi l’élaboration d’un référentiel pouvant être repris par l’ensemble des départements et des professionnels de l’enfance pèserait sur les finances départementales. C’est au contraire une aide qui doit permettre d’économiser du « temps agent ». L’argument financier avancé contre le référentiel n’est donc pas recevable.
Pourquoi donc supprimer cet alinéa ?
Monsieur le président, je souhaite tout d’abord exprimer le mécontentement de la commission des affaires sociales. Le « saucissonnage » des textes est de plus en plus fréquent, et de moins en moins admissible pour nos commissaires.
Lors de l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé, nous avions déjà repris la séance à vingt-trois heures. Aujourd'hui, la séance, prévue pour vingt et une heures trente, a repris à vingt-deux heures quinze ! Aurons-nous le temps de finir l’examen du texte ce soir ? Je l’ignore. Tout cela commence à être pénible. Je tenais à le signaler, pour que vous puissiez faire remonter notre mécontentement, monsieur le président.
Applaudissements.
Pour en revenir au fond du débat, je suis d’accord avec M. Roche. La décentralisation donne des compétences aux collectivités territoriales, parmi lesquelles l’aide sociale à l’enfance. Il n’empêche que l’État a pour devoir de faire en sorte que les enfants de la France entière soient protégés. Il importe donc de mettre en place des lois que les collectivités territoriales et chaque citoyen devront appliquer.
Par ailleurs, s’il a été abondamment question cet après-midi de finances, et à juste titre, ce n’est pas le sujet ici. Il s’agit uniquement de prévoir un référentiel définissant un cadre général et national afin de mettre en place un projet pour l’enfant.
Enfin, de nombreux départements, depuis la loi de 2007, n’ont pas mis en place le projet pour l’enfant. L’instauration d’un référentiel national sur lequel chacun des départements s’appuiera obligatoirement pour définir un projet pour l’enfant me paraît une excellente solution.
Je vous demande donc, mes chers collègues, de ne pas voter ces deux amendements.
Je ne suis évidemment pas contre le projet pour l’enfant. Nous l’avons d’ailleurs mis en place dans mon département, et nous ne sommes sans doute pas les seuls à l’avoir fait.
Je comprends la volonté d’appliquer à tous les mêmes principes sur le plan national. Néanmoins, en lisant le texte de la proposition de loi, j’ai constaté que de nombreuses mesures, dont celle-ci, seraient définies par décret. J’ai eu le sentiment que les départements se trouvaient dépossédés de la méthode qu’ils auraient à déployer sur leur territoire, et que cette décentralisation à laquelle nous sommes attachés partait en morceaux.
J’accepte de retirer mon amendement, mais il est essentiel de faire confiance aux élus et aux professionnels des départements. Je vous donne rendez-vous dans quelques années pour vérifier si tous les départements auront appliqué le référentiel et défini un projet pour l’enfant. De tels projets sont très importants et doivent surtout être stables pour les enfants. C’est du moins ainsi que nous l’appréhendons dans mon département.
En cas de non-application du dispositif dans certains départements, des contrôles sont toujours possibles.
Cela étant, je retire l’amendement, monsieur le président.
L'amendement n° 11 rectifié est retiré.
Je mets aux voix l'article 5, modifié.
L'article 5 est adopté.
I. – Après l’article L. 223-1 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 223-1-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 223–1–2. – Lorsque l’enfant est accueilli, pour le compte du service d’aide sociale à l’enfance, par une personne physique ou morale, le projet pour l’enfant précise ceux des actes usuels de l’autorité parentale que cette personne ne peut accomplir, au nom de ce service, sans lui en référer préalablement. Il mentionne, à titre indicatif, une liste d’actes usuels que la personne qui accueille l’enfant peut accomplir sans formalités préalables.
« Le projet pour l’enfant définit les conditions dans lesquelles les titulaires de l’autorité parentale sont informés de l’exercice des actes usuels de l’autorité parentale, en fonction de leur importance. »
II. – Avant la dernière phrase du deuxième alinéa de l’article L. 421-16 du code de l’action sociale et des familles, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Il reproduit les dispositions du projet pour l’enfant relatives à l’exercice des actes usuels de l’autorité parentale et à l’information des titulaires de l’autorité parentale sur cet exercice, mentionnées à l’article L. 223-1-2. »
L'amendement n° 47, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. L. 223 -1 -2. – Lorsque l’enfant, accueilli au service de l’aide sociale à l’enfance, est confié à une personne physique ou morale, une liste des actes usuels de l’autorité parentale que cette personne ne peut pas accomplir, au nom de ce service, sans lui en référer préalablement est annexée au projet pour l’enfant.
II. – Alinéa 3
Supprimer les mots :
, en fonction de leur importance
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Cet amendement vise à réécrire l’alinéa 2 de l’article 6 pour inverser la logique de la liste, dans un souci de simplification. Ainsi, il s’agit d’annexer au projet pour l’enfant la seule liste des actes qui ne peuvent être accomplis sans en référer au service et non en sus la liste des actes que la personne peut accomplir sans formalités.
La commission a émis un avis favorable. La formulation retenue est issue de nos travaux de première lecture. Il n’apparaît pas pertinent de prévoir, en plus de la liste négative, une liste indicative positive.
La démarche proposée est pertinente puisque son objectif est de faciliter la prise en charge quotidienne de l’enfant. La rédaction sera également plus efficace que celle qui était prévue initialement.
J’émets donc un avis favorable.
ne partage pas cet avis.
L’amendement vise en effet à supprimer le principe d’une liste indicative des actes usuels de l’autorité parentale que la personne qui accueille un enfant peut accomplir sans en référer à l’ASE.
Si cet amendement était adopté, nous ne disposerions plus que d’une liste négative des actes qui doivent obligatoirement donner lieu à la consultation de l’ASE.
J’attire l’attention des auteurs de l’amendement sur un point important : ils se proposent de remettre en cause une rédaction que le Sénat avait adoptée dès la première lecture en commission et qui a été ensuite validée par les députés, même si le vote n’avait pas été totalement conforme, une petite modification rédactionnelle ayant été introduite.
Surtout, nous avions fait le choix de compléter la liste négative par une liste positive pour la raison suivante : la liste négative ne lève pas toutes les incertitudes ; elle permet de savoir ce que l’on ne peut pas faire, mais, faute d’être exhaustive, elle ne donne aucun renseignement sur ce qui ne s’y trouve pas. Le risque est donc grand que les personnes, dans le doute et par prudence, préfèrent en référer à l’ASE. Cela revient exactement à la situation actuelle, à laquelle nous nous efforçons pourtant de remédier.
Avec une liste positive, les intéressés seront certains de pouvoir agir sans en référer à l’ASE.
Certes, la liste ne pourra pas être exhaustive et il restera des actes qui ne figureront ni sur la liste négative ni sur la liste positive. Pour ceux-ci, de deux choses l’une : soit on pourra raisonner par analogie par rapport à des actes inscrits sur l’une ou l’autre des listes ; soit on ne le pourra pas, et il faudra alors saisir l’ASE. Celle-ci proposera peut-être une modification de la liste indicative positive, ce qui améliorera la situation pour l’avenir.
L’amendement tend également à supprimer la mention selon laquelle les parents sont informés des actes usuels accomplis, « en fonction de leur importance ».
Encore une fois, j’attire l’attention des auteurs de l’amendement sur le fait que le texte lui-même distingue entre les actes usuels, ceux qui appellent une autorisation de l’ASE, et les autres. Il s’agit uniquement de rendre compte et de ne pas soumettre au même régime d’information, par exemple, l’autorisation de départ en classe de neige et l’achat d’une nouvelle chemise !
Pour cette raison, la commission des lois a émis un avis défavorable.
En conclusion, je tiens à insister sur ce que je disais au début de cette intervention : le texte initial avait été voté par le Sénat, de même que par l’Assemblée nationale. Si nous adoptions cet amendement, nous renoncerions à un vote conforme sur une formule qui donnait satisfaction à nos deux assemblées.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 6 est adopté.
(Non modifié)
À la seconde phrase du troisième alinéa de l’article 373-2-9 du code civil, après le mot : « peut », sont insérés les mots : «, par décision spécialement motivée, ».
L’amendement n° 3, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
L’article 6 bis vise à imposer au juge aux affaires familiales de motiver spécialement sa décision lorsqu’il décide que le droit de visite du parent qui n’a pas la garde de l’enfant ne peut s’exercer que dans un espace de rencontre.
La situation plus particulièrement visée par cet amendement est celle où « il existe un contexte de violence entre les parents ».
La commission des lois, vous le savez, s’attache toujours à rappeler les textes en vigueur pour éviter l’adoption de dispositions surabondantes. Or, aux termes de l’article 373-2-9 du code civil, le juge aux affaires familiales ne peut imposer le recours à un espace de rencontre, pour l’exercice du droit de visite du parent qui n’a pas la garde de l’enfant, que « lorsque l’intérêt de l’enfant le commande ».
Cette incise impose d’ores et déjà au juge aux affaires familiales de motiver sa décision, puisqu’il doit justifier en quoi l’intérêt de l’enfant commande ce recours, par exemple en faisant état d’un risque de violence contre l’enfant ou de mise en danger de celui-ci. Une obligation de motivation spéciale serait donc surabondante.
D’une manière générale, mes chers collègues, j’attire votre attention sur le fait qu’à vouloir toujours des « décisions spécialement motivées », on finira un jour par penser que, lorsqu’on ne l’aura pas précisé, le juge ne sera pas obligé de motiver sa décision, ce qui est une aberration juridique.
Je conclurai en paraphrasant Montesquieu : il ne faut pas oublier que les mentions inutiles affaiblissent les mentions nécessaires !
La commission des affaires sociales a émis un avis favorable, suivant en cela les arguments qui viennent d’être défendus par M. Pillet.
À titre personnel, j’y suis défavorable. L’article 6 bis avait en effet été introduit dans la proposition de loi à la suite d’un drame qui s’est produit à Nantes en mars dernier : un travailleur social avait été poignardé par un homme, en lieu et place de l’ex-conjointe de celui-ci, lors d’une visite médiatisée.
La présence d’un tiers lors de l’exercice du droit de visite a pour but de préserver l’enfant. Toutefois, cette présence, souvent mal acceptée, peut être source de tensions, voire de violences, qui peuvent déboucher sur des drames, comme dans le cas que je viens de citer.
Sans remettre en cause la faculté pour le juge d’apprécier les circonstances, il apparaît donc opportun que la décision d’organiser un tel droit de visite soit spécialement motivée, afin que le juge précise, à l’intention des parties concernées et du service de l’aide sociale à l’enfance, les raisons qui la sous-tendent.
En effet, la médiatisation de la visite peut avoir pour objectif de protéger l’enfant contre la violence potentielle du parent, mais aussi de protéger l’autre parent ou encore d’accompagner le parent dans la construction ou le maintien d’une relation de parentalité.
Il aurait presque fallu examiner les articles 6 bis et 6 ter dans l’ordre inverse.
L’article 6 bis concerne les visites dans un lieu de rencontre prescrites par le juge aux affaires familiales, et l’article 6 ter est relatif aux visites médiatisées prescrites par le juge des enfants.
Mme la rapporteur l’a évoqué, on observe une augmentation assez étonnante de la prescription par les juges des visites médiatisées, soit dans un lieu de rencontre lorsqu’un des deux parents a la garde de l’enfant, soit, en application de l’article 375-7 du code civil, en présence d’un tiers désigné par l’établissement ou le service à qui l’enfant est confié.
Pour le coup, ces deux articles visent à permettre aux départements de faire des économies, dans la mesure où la multiplication de ces visites médiatisées pèse lourdement sur l’activité des travailleurs sociaux. Or ni ces derniers ni les enfants ne perçoivent toujours clairement le but de ces visites.
Par ailleurs, comme l’a dit également Mme la rapporteur, il arrive que ces visites médiatisées, lorsqu’elles interviennent dans des contextes de conflit intrafamilial, donnent lieu à des agressions à l’encontre des travailleurs sociaux.
Mme Meunier a rappelé l’affaire de Nantes, dans laquelle un travailleur social a été assassiné par un père à l’occasion de l’une de ces visites. J’ajoute que, samedi dernier, une éducatrice spécialisée a également été agressée par un père dans des circonstances similaires.
Pour résumer ce que nous disent les travailleurs sociaux à propos des visites médiatisées, il n’est pas évident de convaincre les enfants de s’y rendre dans un contexte familial de violence. Par ailleurs, ces visites n’apparaissent pas en elles-mêmes comme étant réparatrices pour l’enfant. Enfin, il faut ensuite « récupérer » un enfant qui a souvent été bouleversé par la visite.
Notre but n’est pas d’interdire ces visites, mais plutôt de donner aux travailleurs sociaux un outil pour comprendre pourquoi une telle mesure a été prescrite et quelle est l’attente du juge en la matière.
Cette compréhension est importante à la fois pour les travailleurs sociaux et pour l’enfant. Il faut aussi que les juges se posent la question de la raison pour laquelle, dans un cas précis, ils prescrivent une visite médiatisée. La mention « par décision spécialement motivée » permettra d’éviter les motivations « copiées-collées » et obligera le juge à rédiger une prescription adaptée à la situation précise de l’enfant.
Les articles 6 bis et 6 ter ont donc pour objet de répondre à cette inflation de demandes et à une situation qui échappe un peu aux travailleurs sociaux, tout en étant génératrice de tensions tant pour les enfants et les mères, dans un contexte de violences, que pour les travailleurs sociaux eux-mêmes.
L’avis du Gouvernement est donc défavorable.
L'amendement est adopté.
(Non modifié)
Après le mot : « exige, », la fin du quatrième alinéa de l’article 375-7 du code civil est ainsi rédigée : « notamment dans les situations de violences commises par l’un des parents sur la personne de l’autre parent ou de l’enfant, décider que l’exercice de tout ou partie de ces droits est provisoirement suspendu. Il peut également, par décision spécialement motivée, imposer que le droit de visite du ou des parents ne puisse être exercé qu’en présence d’un tiers désigné par l’établissement ou le service à qui l’enfant est confié, ou par lui quand il a confié l’enfant à un tiers digne de confiance. Les modalités d’organisation de la visite en présence d’un tiers sont précisées par décret. »
L’amendement n° 4, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
La dernière phrase du quatrième alinéa de l’article 375-7 du code civil est ainsi modifiée :
1° Le mot : « décider » est remplacé par les mots : «, par décision spécialement motivée, imposer » ;
2° Après le mot : « tiers », sont insérés les mots : « qu’il désigne lorsque l’enfant est confié à une personne ou ».
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement procède de la même logique que le précédent puisqu’il tend à supprimer les précisions inutiles figurant à l’article 6 ter.
Il n’y a, en effet, aucune raison de préciser que la suspension provisoire de tout ou partie de l’exercice du droit de correspondance ou du droit de visite et d’hébergement des parents de l’enfant placé peut « notamment » être prononcée par le juge « dans les situations de violences commises par l’un des parents sur la personne de l’autre parent ou de l’enfant », plutôt que de mentionner d’autres situations.
Il n’est pas non plus opportun de tenter de dresser la liste exhaustive de ces situations, car, à tous les coups, on en oubliera.
L’amendement vise également à supprimer le renvoi à un décret pour la fixation des modalités d’organisation de la visite en présence d’un tiers. D’un point de vue légistique, le pouvoir réglementaire n’a en effet pas besoin de l’autorisation du législateur pour prendre un tel décret d’application.
Toutefois, après des échanges avec Mme la secrétaire d’État sur ce point, le Gouvernement a déposé un sous-amendement visant à maintenir ce décret.
L’objectif gouvernemental est à l’évidence de prendre l’engagement d’intervenir sur ce sujet. Je ne m’y opposerai pas, mais je proposerai une légère modification rédactionnelle du sous-amendement que Mme la secrétaire d’État va nous présenter. Il s’agirait, concernant les modalités, de remplacer les mots « de fonctionnement » par les mots « d’organisation ». Ainsi parviendrons-nous sur ce point, madame la secrétaire d’État, à un accord total...
Le sous-amendement n° 57 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 4
Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé:
... - Le quatrième alinéa de l'article 375-7 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les modalités de fonctionnement de la visite en présence d’un tiers sont précisées par décret en Conseil d'État. »
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Ce sous-amendement se justifie par son texte même, monsieur le président.
S’agissant de la modification suggérée par M. le rapporteur pour avis, j’y souscris : « les modalités d’organisation », c’est mieux ! Je rectifie par conséquent le sous-amendement en ce sens.
Je suis donc saisi d’un sous-amendement n° 57 rectifié bis, présenté par le Gouvernement et ainsi libellé :
Amendement n° 4
Compléter cet amendement par un paragraphe ainsi rédigé:
... - Le quatrième alinéa de l'article 375-7 du code civil est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Les modalités d'organisation de la visite en présence d’un tiers sont précisées par décret en Conseil d'État. »
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 4 et sur le sous-amendement n° 57 rectifié bis ?
M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour une explication de vote rapide…
Sourires.
Mme Annie David. Aux termes du nouveau règlement, que vous devez connaître parfaitement, monsieur le président, je dispose de deux minutes et demie !
Nouveaux sourires.
Madame la secrétaire d'État, monsieur le rapporteur, je ne suis pas sûre de bien comprendre : nous discutions de l'amendement n° 4, qui vise à remplacer le mot « décider » par les mots «, par décision spécialement motivée, imposer » et à insérer, après le mot « tiers », les mots « qu’il désigne lorsque l’enfant est confié une personne ou ». Mais vous n’avez absolument pas parlé de cela !
Monsieur le rapporteur, ce qui est assez étrange, c’est que le Sénat vient de supprimer, en adoptant votre amendement précédent, la décision spécialement motivée du juge, qui serait, selon vous, une disposition redondante. Là, vous proposez d’ajouter dans le texte que la décision du juge doit être spécialement motivée. J’avoue que je suis un peu perdue…
Peut-être pourriez-vous prendre un peu de temps pour nous apporter quelques explications, afin que nous puissions prendre part au vote ? Sinon, comme nous n’avons pas saisi toute la finesse de votre amendement, nous ne pourrons pas voter !
L’amendement n° 4 tend à supprimer, à l’article 6 ter, la précision selon laquelle la suspension provisoire de tout ou partie de l’exercice du droit de correspondance ou du droit de visite et d’hébergement des parents d’un enfant placé peut « notamment » – c'est ce terme que nous voulons retirer – être prononcé par le juge dans les situations de violences commises par l’un des parents sur la personne de l’autre parent ou de l’enfant.
Nous avons, en revanche, conservé – c'est une exception, mais les cas visés nous paraissaient le justifier – l’exigence d’une décision spécialement motivée. C'est sans doute la raison pour laquelle Mme la secrétaire d'État a donné un avis favorable à cet amendement, ce qui m’a permis de donner à mon tour un avis favorable sur le sous-amendement du Gouvernement prévoyant un décret en Conseil d’État.
Mais je ne suis pas certain, chère collègue, d’avoir été beaucoup plus clair !
Sourires.
Je voudrais apporter une précision, sous le contrôle de M. le rapporteur pour avis.
Madame David, les deux articles sont différents et renvoient à des situations différentes. L’un concerne les visites dans des lieux de rencontres prescrits par le juge aux affaires familiales. Dans ce cas, la commission des lois n’a pas souhaité imposer une décision spécialement motivée du juge. L’’autre concerne des décisions prises par le juge des enfants. En l’occurrence, la commission a adhéré à l’idée qu’il fallait imposer au juge une motivation spéciale.
Ce ne sont pas les mêmes magistrats, effectivement !
Le sous-amendement est adopté.
L'amendement est adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 49, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Au premier alinéa de l’article 378-1 du code civil, après le mot « délictueux, », sont insérés les mots : « notamment lorsque l’enfant est témoin de pressions ou violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre ».
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Les enfants témoins de violences conjugales subissent des traumatismes qui peuvent être extrêmement profonds et durables. Leur environnement familial est, de ce fait, dépourvu de sécurité, et ils peuvent se trouver en danger.
Il importe de prévoir plus explicitement les cas dans lesquels l’enfant est témoin de violences exercées par l’un de ses parents sur la personne de l’autre.
Il est également nécessaire d’assurer une bonne cohérence avec le 6° de l’article 373-2-11 du code civil, qui prévoit que « les pressions et violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre » sont à prendre en considération lorsque le juge aux affaires familiales se prononce sur les modalités d’exercice de l’autorité parentale.
Ma chère collègue, dans l’objet de votre amendement, il est indiqué que ce dernier ne serait que rédactionnel, ce dont je doute. La commission des affaires sociales et la commission des lois ont proposé la suppression de l’article 6 quater au motif qu’il ne faisait qu’ajouter aux motifs pouvant justifier un retrait d’autorité parentale une circonstance déjà comprise dans les motifs existants.
Votre amendement tend à revenir sur cette suppression, pour ajouter dans le corps de l’article le fait d’exposer l’enfant à des violences conjugales. Or les violences conjugales sont un délit : le fait d’y exposer l’enfant peut d’ores et déjà justifier un retrait d’autorité parentale, si cela conduit à mettre l’enfant en danger. Les violences conjugales n’entrent pas dans ce qu’il est convenu d’appeler des « violences légères », et ne sont pas passibles de contraventions, même de la cinquième classe. Elles constituent – je le répète – un délit. Tous les délits de ce type sont donc concernés.
La précision que vous souhaitez apporter est donc surabondante. Elle est même, à mon avis, problématique, car la rédaction proposée entretient une confusion entre les motifs susceptibles de fonder une décision de retrait de l’autorité parentale, prévus à l’article 378-1 du code civil, et ceux qui sont susceptibles de fonder un simple aménagement de l’exercice de l’autorité parentale, qui sont, eux, fixés à l’article 373-2-11 du même code. Les deux cas sont différents : dans le premier, la décision est grave et définitive ; dans le second, il s’agit simplement de modifier les modalités du droit de visite et d’hébergement.
J’ajoute que, dans la rédaction de l’amendement, l’un des termes employés est particulièrement vague : celui de « pressions ». Ce mot est inconnu du droit pénal et du droit civil. J’attire votre attention : il ne faut pas oublier que les violences conjugales sont un délit et qu’elles peuvent d’ores et déjà justifier un retrait de l’autorité parentale si elles mettent en danger le mineur. Des imprécisions de la législation, des mentions superflues, peuvent engendrer des situations jurisprudentielles qui iraient totalement à l’inverse de ce que vous recherchez. Encore une fois, il y a un texte ; ce que vous voulez, nous le voulons aussi, mais c’est déjà prévu !
La commission a émis un avis défavorable, suivant ainsi l’avis de la commission des lois.
L’amendement porte sur un sujet important qui mérite que l’on prenne la peine de s’y arrêter.
Les enfants victimes de la violence des adultes de leur entourage, notamment d’un parent, vivent un réel traumatisme. Des spécialistes, tels que Maurice Berger ou Muriel Salmona, ont montré les dégâts que pouvait causer pour un enfant le fait de voir l’un de ses parents agresser l’autre.
À titre personnel, je suis favorable au rétablissement de rétablir l’article 6 quater.
Le Gouvernement est favorable à l’amendement de Mme Campion, et ce pour plusieurs raisons.
D’abord, je veux répondre aux arguments du rapporteur pour avis de la commission des lois. Selon lui, comme les violences à l’encontre d’un parent – la victime est, en général, la mère – sont déjà un délit, il n’est pas nécessaire de le préciser de nouveau dans le texte. Mais on pourrait citer l’article 318-1 du code civil, qui concerne l’usage de stupéfiants. Cet usage est déjà un délit, et pourtant cette incrimination est reprise dans la loi. Si l’on peut le faire pour l’usage des stupéfiants, on peut aussi le faire pour les violences à l’encontre des femmes !
Ensuite, cette question relève d’un débat récurrent : faut-il spécifier les violences à l’encontre des femmes ou considère-t-on qu’elles sont incluses dans la dénomination d’autres faits délictueux ?
Ce à quoi nous travaillons, c'est à les citer spécifiquement, parce qu’elles sont justement spécifiques. J’observe que les juges ne sont pas extrêmement enclins à prononcer des mesures de retrait de l’autorité parentale. Il est donc nécessaire de spécifier ces violences.
Enfin, toute une série de travaux – Mme la rapporteur en a cité certains, mais je peux ajouter ceux, plus connus, du juge Durand, pour lequel protéger la mère, c'est protéger l’enfant – mettent l’accent sur la violence que constitue pour un enfant le fait d’être témoin des violences commises à l’égard de sa mère.
L’amendement de Mme Campion est donc doublement utile : premièrement, pour rappeler au juge qu’il peut procéder à un retrait de l’autorité parentale, deuxièmement, pour rendre visibles les violences à l’encontre des femmes.
J’ajouterai un argument supplémentaire à ceux qu’a avancés Mme la secrétaire d'État. M. le rapporteur pour avis estimait que les « pressions et violences » ne sont pas définies juridiquement. Il se trouve qu’elles figurent dans le code civil, au 6° de l’article 373-2-11, aux termes duquel « les pressions et violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre » sont prises en compte par le juge.
Faire figurer ces pressions à l’article 6 quater n’introduit donc pas d’imprécision, bien au contraire !
Nous voterons cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
Avant le dernier alinéa de l’article L. 223-1 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le président du conseil départemental met en place une commission pluridisciplinaire et pluri-institutionnelle chargée d’examiner, sur la base des rapports prévus à l’article L. 223-5, la situation des enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance depuis plus d’un an lorsqu’il existe un risque de délaissement parental ou lorsque le statut juridique de l’enfant paraît inadapté à ses besoins. La commission examine tous les six mois la situation des enfants de moins de deux ans. Sont associés à l’examen de la situation de l’enfant son référent éducatif et la personne physique qui l’accueille ou l’accompagne au quotidien. La commission peut formuler un avis au président du conseil départemental sur le projet pour l’enfant mentionné à l’article L. 223-1-2. Cet avis est remis à chacune des personnes morales ou physiques auxquelles le projet pour l’enfant est remis et au juge lorsque celui-ci est saisi. Les membres de cette commission sont soumis au secret professionnel, selon les modalités prévues aux articles L. 221-6 et L. 226-2-2. Sa composition et son fonctionnement sont fixés par décret. »
L'amendement n° 27 rectifié, présenté par M. Cardoux, Mmes Canayer et Cayeux, M. Chasseing, Mmes Debré et Deroche, M. Dériot, Mme Deseyne, MM. Forissier et Gilles, Mmes Giudicelli, Gruny et Imbert, M. Lemoyne, Mmes Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller et Pinton, Mme Procaccia et MM. Retailleau, D. Robert, Savary et Mandelli, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Jean-Noël Cardoux.
Nous avions proposé le même amendement en première lecture, et nous avions supprimé l’article. J’observe au passage que, à l’époque, le groupe du RDSE avait présenté un amendement de suppression identique, mais qu’il n’a pas récidivé cette fois-ci.
Au-delà de la question des charges pour les départements, sur lesquelles je reviendrai, nous sommes ici dans un cas typique de ce que j’ai pour habitude de qualifier une « usine à gaz ». Il s’agit de créer encore une commission pluridisciplinaire pour examiner le cas de certains enfants de moins de deux ans, avec un réexamen tous les six mois.
Cette mesure va à l’encontre du but recherché. D’abord, les départements ont déjà mis en place des procédures de ce type. Ensuite, cette commission risque de prendre des décisions avant le juge, ce qui entraînera un risque de télescopage entre les positions respectives des services de l’ASE et des services judiciaires. Enfin, au lieu de fluidifier le cheminement des décisions, on va l’asphyxier complètement.
C’est l’exemple même d’un empilement de dispositions qui va tout à fait – je le redis – à l’encontre du but recherché, sans même parler des charges supplémentaires !
S’agissant maintenant des charges, sujet dont nous avons largement débattu depuis le début de la discussion de cette proposition de loi, on nous a reproché – c’était un procès d’intention – de vouloir préserver les finances des départements. Mais, lorsque les services de l’ASE seront confrontés à de telles obligations, ils vont automatiquement subir la pression des personnels, dont la charge de travail augmentera, dont le temps sera de plus en plus précieux. Les services de l’ASE vont forcément demander des renforts !
Avec de telles obligations, on crée des postes supplémentaires qui, in fine, pèsent indirectement sur le budget des départements.
Voilà l’exemple même d’une suppression d’article qui va dans le sens de la protection de l’enfant, en essayant de minimiser les sources d’embouteillage, et qui limite aussi les charges des départements.
La commission a émis un avis favorable sur cet amendement de suppression, suivant l’argumentaire de M. Cardoux et des cosignataires de l’amendement.
Il est heureux que certains départements aient déjà adopté cette bonne pratique consistant à faire étudier la situation d’un enfant confié à l’aide sociale à l’enfance par une équipe pluridisciplinaire. Que l’on soit enseignant, travailleur social ou conseiller en économie sociale et familiale, le travail en équipe permet de croiser les regards dans l’intérêt de l’enfant.
Un proverbe dit qu’il faut tout un village pour éduquer un enfant ; alors, pourquoi ne faudrait-il pas une commission pluridisciplinaire pour protéger l’enfance ?
La commission des affaires sociales est favorable à cet amendement de suppression de l’article.
Cette commission pluridisciplinaire ne concerne pas tous les enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance, mais seulement deux catégories d’entre eux : les enfants de moins de deux ans confiés à l’ASE et les enfants confiés depuis plus d’un an à l’ASE pour lesquels on a identifié un risque de délaissement parental. Or, dans ces deux situations spécifiques, il est important de poser la question du statut et de l’avenir de ces enfants, et il est préférable de le faire en amont et à plusieurs que trop tard et tout seul.
Il ne s’agit donc pas d’une « usine à gaz ». Par ailleurs, je ne dispose pas de statistiques par département, mais j’imagine que les cas évoqués ne représentent pas la grande majorité des enfants confiés à l’ASE. Les conseils départementaux auraient donc à mon avis intérêt, étant donné la spécificité de la situation de ces enfants, à mettre en place des équipes pluridisciplinaires. Je ne doute pas que certains le fassent déjà.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
L'amendement est adopté.
Mme Laurence Cohen s’exclame.
Toutefois, pour la bonne information du Sénat, je rappelle les termes de ces amendements.
L'amendement n° 52, présenté par Mme Meunier, au nom de la commission des affaires sociales, était ainsi libellé :
Alinéa 2, quatrième phrase
Remplacer la référence :
L. 223-1-2
par la référence :
L. 223-1-1
L'amendement n° 8 rectifié, présenté par Mme Malherbe, MM. Amiel, Arnell, Bertrand, Castelli, Collin, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Mézard, Requier et Vall, était ainsi libellé :
Alinéa 2, dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Un décret fixe la liste des différentes institutions qui doivent y être obligatoirement représentées ainsi que ses règles de fonctionnement.
L’article L. 223-3 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque le service départemental de l’aide sociale à l’enfance auquel est confié un enfant en application de l’article 375-3 du code civil envisage de modifier le lieu de placement de cet enfant, il en informe le juge compétent au moins un mois avant la mise en œuvre de sa décision. Cette disposition ne s’applique pas en cas d'urgence et, pour l’enfant de deux ans révolus confié à une même personne ou un même établissement pendant moins de deux années, en cas de modification prévue dans le projet pour l’enfant. » –
Adopté.
I. – L’article L. 223-5 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Le deuxième alinéa est ainsi modifié :
a) Après les mots : « par an », sont insérés les mots : «, ou tous les six mois pour les enfants âgés de moins de deux ans, » ;
b) Sont ajoutées trois phrases ainsi rédigées :
« Ce rapport porte sur la santé physique et psychique de l’enfant, son développement, sa scolarité, sa vie sociale et ses relations avec sa famille et les tiers intervenant dans sa vie. Il permet de vérifier la bonne mise en œuvre du projet pour l’enfant mentionné à l’article L. 223-1-1 et l’adéquation de ce projet aux besoins de l’enfant ainsi que, le cas échéant, l’accomplissement des objectifs fixés par la décision de justice. Un référentiel approuvé par décret en Conseil d’État fixe le contenu et les modalités d’élaboration du rapport. » ;
2° Le troisième alinéa est complété par les mots : « annuellement ou tous les six mois pour les enfants de moins de deux ans » ;
3° Au dernier alinéa, après le mot : « sont », il est inséré le mot : « préalablement ».
II. –
Non modifié
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 20 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, MM. Kern et Canevet, Mme Loisier, MM. Bonnecarrère et Gabouty, Mme Férat, MM. Morisset, Pierre, Chasseing, Détraigne et Commeinhes, Mme Lopez, MM. Houpert, Longeot et L. Hervé, Mme Billon, MM. Lasserre et Luche, Mme Gatel, MM. Danesi, J.L. Dupont, Cigolotti, Laménie et Pellevat et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Alinéa 5, dernière phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
À la suite de l’échange que nous avons eu tout à l’heure sur le référentiel, je retire cet amendement.
L'amendement n° 20 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 21 rectifié bis, présenté par Mme Doineau, MM. Kern et Canevet, Mme Loisier, MM. Bonnecarrère, Gabouty et Morisset, Mme Férat, MM. Pierre, Chasseing, Détraigne et Commeinhes, Mme Lopez, MM. Houpert, Longeot et L. Hervé, Mme Billon, MM. Lasserre et Luche, Mme Gatel, MM. Danesi, J.L. Dupont, Laménie, Cigolotti et Pellevat et Mme Deromedi, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :
Les conseils départementaux représentés par l’Assemblée des départements de France sont associés à l’élaboration de ce référentiel.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
L'amendement n° 21 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'article 9.
L'article 9 est adopté.
(Non modifié)
I et II. –
Supprimés
III. – Après l’article L. 227-2 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 227-2-1 ainsi rédigé :
« Art. L. 227 -2 -1. – Lorsque la durée du placement excède un seuil fixé par décret selon l’âge de l’enfant, le service départemental de l’aide sociale à l’enfance auquel a été confié le mineur en application de l’article 375-3 du code civil examine l’opportunité de mettre en œuvre d’autres mesures susceptibles de garantir la stabilité des conditions de vie de l’enfant afin de lui permettre de bénéficier d’une continuité relationnelle, affective, éducative et géographique dans un lieu de vie adapté à ses besoins. Il en informe le juge des enfants qui suit le placement, en présentant les raisons qui l’amènent à retenir ou à exclure les mesures envisageables. » –
Adopté.
(Non modifié)
Au troisième alinéa de l’article 375 du code civil, les mots : «, lorsqu’il s’agit d’une mesure éducative exercée par un service ou une institution, » sont supprimés. –
Adopté.
I. – Au 4° de l’article L. 2112-2 du code de la santé publique, les mots : « entretien systématique psychosocial réalisé au cours du quatrième mois de grossesse » sont remplacés par les mots : « entretien prénatal précoce proposé systématiquement et réalisé à partir du quatrième mois de grossesse, tel que prévu au 3ème alinéa de l’article L. 2122-1 ».
II. – Le dernier alinéa de l’article L. 2122-1 du code de la santé publique est ainsi complété :
« Lors de cet examen, le médecin ou la sage-femme propose à la femme enceinte un entretien prénatal précoce dont l’objet est de permettre au professionnel d’évaluer avec elle ses besoins en termes d’accompagnement au cours de la grossesse. » –
Adopté.
TITRE III
ADAPTER LE STATUT DE L’ENFANT PLACÉ SUR LE LONG TERME
(Non modifié)
L’article 370 du code civil est ainsi rédigé :
« Art. 370. – S’il est justifié de motifs graves, l’adoption peut être révoquée, lorsque l’adopté est majeur, à la demande de ce dernier ou de l’adoptant.
« Lorsque l’adopté est mineur, la révocation de l’adoption ne peut être demandée que par le ministère public. »
L'amendement n° 5, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement a trait à un problème de fond, qui nous divise.
Conformément à la position du Sénat en première lecture, nous proposons de supprimer l’article 12, qui rend l’adoption simple quasiment irrévocable durant la minorité de l’adopté. En effet, aux termes de la rédaction de cet article, seul le ministère public pourrait en demander la révocation.
On entend souvent dire que la révocabilité de l’adoption simple serait un frein à son utilisation. Pour ma part, je n’ai pas connaissance d’éléments qui étaient scientifiquement cette affirmation.
Quel est le constat ? L’adoption simple n’est que très peu utilisée pour les mineurs. Les demandes de révocation sont très peu nombreuses et elles sont très rarement acceptées par le juge. Dans la plupart des cas, cette révocation résulte d’une initiative de l’adoptant lui-même, et non de la famille biologique de l’adopté, qui tenterait de s’immiscer dans les relations créées entre l’adoptant et l’adopté.
Pour ma part, j’estime que cette disposition risque d’avoir un effet contraire à celui qui est recherché, à savoir une augmentation du nombre d’adoptions simples d’enfants mineurs. Priver le parent candidat à l’adoption simple de la possibilité d’en demander la révocation risque de le dissuader de se lancer dans ce projet. En effet, je le rappelle, les enfants faisant l’objet de telles adoptions ont un certain vécu, une histoire parfois très difficile, et les rares demandes de révocation émanent de l’adoptant lui-même, notamment dans des hypothèses de violence.
Parallèlement, la famille d’origine de l’enfant risque désormais d’être aussi très réticente à consentir à l’adoption de celui-ci si elle ne peut plus en demander la révocation. En effet, quand on s’engage dans ce type de démarche, on ne le fait pas sans conseil : que ce soit le procureur de la République, le notaire, l’avocat ou une association, quelqu'un devra bien expliquer que l’adoption est devenue irrévocable ! Je crains donc que les parents biologiques, réalisant qu’ils ne peuvent plus demander la révocation de l’adoption, refusent de donner leur accord. Nous verrons alors le nombre d’adoptions simples encore diminuer.
Je propose donc de supprimer cet article ; j’ai déjà indiqué qu’il serait peut-être plus utile d’élaborer un texte traitant spécifiquement du grand problème de l’adoption dans son ensemble.
Cette fois-ci, la commission des affaires sociales n’a pas suivi la commission des lois et elle a émis un avis défavorable sur cet amendement de suppression. Il s’agit là de la sécurisation du parcours de l’enfant : l’adoption simple est un outil à cet égard, qui peut permettre de donner une nouvelle chance à un enfant.
Les dernières statistiques disponibles concernent 2009 : cette année-là, il y a eu 1 291 adoptions simples de mineurs, autant dire très peu.
Or nous connaissons tous de nombreux cas dans lesquels l’adoption simple aurait constitué une bonne solution pour un enfant.
Depuis 2008, plusieurs rapports, dont ceux de M. Colombani, de l’IGAS ou de Mme Gouttenoire, ont souligné que la faible attractivité de l’adoption simple tiendrait à sa révocabilité. Nous proposons donc d’en tirer les conséquences en encadrant les conditions de révocation de l’adoption simple.
Il est vrai, monsieur Pillet, que nous ne disposons pas d’études d’impact : il est difficile de mesurer l’effet d’une loi sur un comportement humain de ce type. Néanmoins, avec moins de 1 300 adoptions simples par an, nous n’avons pas grand-chose à perdre à essayer de lever les freins, d’autant que cette proposition recueille l’assentiment de presque tous ceux qui se sont penchés sur ce sujet.
Ceux qui ne partagent pas mon avis ont un espoir ; pour ma part, j’ai une crainte. Nous ne saurons que dans deux ou trois ans qui avait raison. J’espère sincèrement que c’est vous !
Néanmoins, si ce dispositif est mis en œuvre, les professionnels mettront en garde les candidats à l’adoption et les familles biologiques contre l’irrévocabilité de l’adoption simple. Je crains que, de ce fait, celle-ci ne disparaisse presque totalement. Il faudrait revoir tout le système des adoptions, ce qui nous permettrait d’ailleurs de revenir sur la kafala et sur le parrainage, qui n’est pour l’heure quasiment pas réglementé.
Je suivrai l’avis de la commission des affaires sociales et du Gouvernement.
Vous avez dit, madame la secrétaire d’État, que vous manquiez de données et d’études d’impact. Or le Conseil supérieur de l’adoption, qui œuvre depuis de nombreuses années auprès de votre ministère, est en mesure de fournir quantité d’éléments sur tous les mécanismes de l’adoption, en particulier sur l’adoption simple.
Cela dit, le fonctionnement de cette instance est quelque peu bloqué actuellement, dans l’attente de la nomination de personnalités qualifiées.
Tout en appréciant le travail mené par mon collègue de la commission des lois François Pillet, je souscris sur cette question à l’avis de la commission des affaires sociales.
En effet, dans l’exposé des motifs de votre amendement, monsieur Pillet, il est écrit que la « quasi-irrévocabilité de l’adoption simple risque, contrairement à l’objectif poursuivi, d’avoir un effet dissuasif sur le candidat-adoptant, mais également sur la famille d’origine qui doit consentir à l’adoption de l’enfant, puisqu’ils ne pourraient plus en demander la révocation » si l’adoption est un échec.
Je veux rappeler que les associations regroupant les familles adoptantes craignent que les révocations ne deviennent trop faciles et trop fréquentes, ce qui porterait atteinte au recours à l’adoption. C’est pourquoi il me paraît sage que l’adoption simple puisse rester révocable, mais seulement sur l’initiative du ministère public.
Enfin, il faut garder à l’esprit que, pour l’enfant adopté, les allers et retours induit par la révocation de l’adoption simple peuvent être extrêmement traumatisants.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 12 est adopté.
Le titre II du livre II du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° L’article L. 223-7 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’un enfant né sous le secret est restitué à l’un de ses parents, le président du conseil départemental propose un accompagnement médical, psychologique, éducatif et social du parent et de l’enfant pendant les trois années suivant cette restitution, afin de garantir l’établissement des relations nécessaires au développement physique et psychologique de l’enfant ainsi que sa stabilité affective. » ;
2° L’article L. 224-6 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsqu’un enfant pupille de l’État est restitué à l’un de ses parents, le président du conseil départemental propose un accompagnement médical, psychologique, éducatif et social du parent et de l’enfant pendant les trois années suivant cette restitution, afin de garantir l’établissement des relations nécessaires au développement physique et psychologique de l’enfant ainsi que sa stabilité affective. » –
Adopté.
L’article L. 225-1 du code de l’action sociale et des familles est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi rédigé :
« Les enfants admis en qualité de pupille de l’État en application des articles L. 224-4 et L. 224-8 doivent faire l’objet, dans les meilleurs délais, d’un projet de vie, défini par le tuteur avec l’accord du conseil de famille, qui peut être une adoption, si tel est l’intérêt de l’enfant. Ce projet de vie s’articule avec le projet pour l’enfant mentionné à l’article L. 223-1-1. » ;
2° Le dernier alinéa est supprimé.
L'amendement n° 55, présenté par Mme Meunier, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 3
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au début du deuxième alinéa, sont insérés les mots : « Lorsque ce projet de vie est celui d'une adoption, » ;
La parole est à Mme la rapporteur.
L'amendement est adopté.
L'article 13 bis est adopté.
(Non modifié)
I. –
Supprimé
II. – Après le premier alinéa de l’article 353 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le mineur capable de discernement est entendu par le tribunal ou, lorsque son intérêt le commande, par la personne désignée par le tribunal à cet effet. Il doit être entendu selon des modalités adaptées à son âge et à son degré de maturité. Lorsque le mineur refuse d’être entendu, le juge apprécie le bien-fondé de ce refus. Le mineur peut être entendu seul ou avec un avocat ou une personne de son choix. Si ce choix n’apparaît pas conforme à l’intérêt du mineur, le juge peut procéder à la désignation d’une autre personne. »
III. –
Supprimé
L'amendement n° 6, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 3, deuxième phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement vise à revenir sur l’introduction par l’Assemblée nationale de la précision selon laquelle, dans le cadre d’une procédure d’adoption le concernant, l’enfant devra être entendu « selon des modalités adaptées à son âge et à son degré de maturité ».
Cette précision pose deux difficultés importantes.
En premier lieu, cette rédaction est inspirée, sans pourtant la reprendre tout à fait à l’identique, de celle qui est proposée pour l’article 388-1 du code civil, relatif à l’audition de l’enfant dans toutes les procédures le concernant, par l’article 19 de la proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant actuellement examinée en première lecture à l’Assemblée nationale.
Si nous retenions la rédaction ici proposée, deux versions différentes coexisteraient donc dans deux textes différents. Cela n’améliorerait pas, vous l’admettrez, la lisibilité de la loi !
En second lieu, si l’Assemblée nationale a d’ores et déjà examiné la proposition de loi relative à l’autorité parentale et à l’intérêt de l’enfant, ce texte n’a pas encore été inscrit à l’ordre du jour du Sénat. Il n’est pas, à mon avis, de bonne méthode législative de lier, au détour d’une disposition ponctuelle introduite dans notre texte, la position du Sénat sur une question dont il va être appelé à connaître dans quelque temps.
La commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur cet amendement.
Cependant, je voudrais faire remarquer que l’article 1er de cette proposition de loi comporte la notion de « degré de maturité ». Par cohérence, j’émets donc, à titre personnel, un avis défavorable.
L’avis du Gouvernement est défavorable.
Vous avez raison, monsieur le rapporteur pour avis, de rappeler que, pour les procédures le concernant, l’audition du mineur est de droit. Toutefois, cela signifie non pas qu’elle est systématique, mais qu’elle ne peut être refusée si le mineur, son avocat ou quelqu’un d’autre la demande. Cet article a pour objet de rendre l’audition du mineur obligatoire, l’adoption ayant une incidence tout à fait exceptionnelle sur sa vie.
L'amendement est adopté.
L'article 15 est adopté.
I. –
Non modifié
II. –
Supprimé
III. –
Supprimé
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers amendements sont identiques.
L'amendement n° 2 rectifié est présenté par M. Milon, Mme Cayeux et MM. Frassa et Cantegrit.
L'amendement n° 14 rectifié est présenté par MM. Raoul, Sueur, Botrel et les membres du groupe socialiste et républicain.
L'amendement n° 15 rectifié ter est présenté par MM. Houpert, Bonnecarrère et Cambon, Mmes Lamure et Garriaud-Maylam, MM. Commeinhes, Frassa, Lenoir et Joyandet, Mme Morhet-Richaud, MM. D. Robert et Vaspart, Mme Loisier, MM. Leleux, Vasselle, de Raincourt, Revet, Pellevat et Longuet, Mme Deromedi et M. Lefèvre.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 2 et 3
Rétablir les II et III dans la rédaction suivante :
II. – Dans les situations visées au I et lorsque le fait générateur est antérieur à la date d’application de la présente loi, le 1° de l'article L. 247 du livre des procédures fiscales est applicable pour la fraction des droits qui excède ceux qui auraient été dus si le I du présent article avait été en vigueur à la date du fait générateur.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Alain Milon, pour défendre l’amendement n° 2 rectifié.
L’article 16 prévoit l’alignement sur le régime applicable aux transmissions en ligne directe du régime d’imposition des transmissions à titre gratuit entre adoptant et adopté lorsque l’adoptant décède durant la minorité de l’adopté. Cette modification s’appliquera aux droits dont le fait générateur, à savoir le décès de l’adoptant, surviendra à compter de l’entrée en vigueur de la proposition de loi.
L’Assemblée nationale avait adopté un amendement prévoyant que l’administration fiscale procède, à la demande des intéressés, à la remise des droits restés impayés afin que le régime plus favorable s’applique aux personnes ayant actuellement des dettes fiscales.
Cet amendement de l’Assemblée nationale posait un problème de constitutionnalité, car il introduisait une inégalité entre les personnes ayant déjà payé leurs droits de succession et ceux qui, pour une raison ou une autre, ont toujours des dettes envers le Trésor public. La commission est donc revenue sur ce dispositif.
Le présent amendement prévoit la possibilité, pour l’administration fiscale, de procéder à des remises gracieuses dans le cas prévu au 1° de l’article L. 247 du livre des procédures fiscales.
La parole est à M. Daniel Raoul, pour présenter l'amendement n° 14 rectifié.
Je souligne que la France a déjà été condamnée pour discrimination au regard de dispositions fiscales en raison du statut de l’enfant. Certes, il s’agissait en l’occurrence non d’un mineur ayant perdu ses parents adoptifs, mais d’un enfant adultérin, néanmoins il y avait bien inégalité de traitement. Lorsqu’un enfant mineur ayant fait l’objet d’une adoption simple perd ses parents adoptifs, il n’est pas en mesure de défendre ses intérêts.
Je précise qu’il s’agit d’un amendement de repli par rapport à l’amendement n° 13 rectifié, que je défendrai dans quelques instants.
La parole est à M. Alain Houpert, pour présenter l'amendement n° 15 rectifié ter.
Nous devons protéger les plus faibles. Dans cet hémicycle, Victor Hugo et le baron Thénard se sont opposés à propos du travail des enfants. De ce combat est né, en 1862, un livre que nous avons tous lu : Les Misérables.
Il n’y a pas deux sortes d’enfants, il n’y a pas deux sortes d’adoptés, mais il existe en effet une différence juridique entre l’adoption plénière et l’adoption simple. Les adoptés simples sont souvent des enfants placés, qui ont souffert, connu un parcours difficile. L’adoption plénière n’intervient que tardivement.
Or, que l’adoption soit plénière ou simple, l’amour des parents est égal. Cependant, le traitement fiscal est différent. Ces amendements identiques ont pour objet de supprimer cette aberration juridique revenant à soumettre un enfant ayant fait l’objet d’une adoption simple à la diligence d’un tuteur pour lui éviter la mort sociale qui le guette au moment de la succession : financièrement écrasé, il ne pourra pas sortir la tête de l’eau !
Ce qui différenciait les enfants Thénardier et Cosette, c’était l’amour. Cosette avait besoin d’amour ; Jean Valjean lui a donné cet amour. La remise gracieuse que nous proposons d’instaurer favorisera l’égalité.
L'amendement n° 13 rectifié, présenté par MM. Raoul, Sueur, Botrel et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Rétablir les II et III dans la rédaction suivante :
II. – Pour les droits de succession dont le fait générateur est antérieur à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, et par dérogation à l’article L. 247 du livre des procédures fiscales, l’administration procède, à la demande du contribuable, à la remise des droits restés impayés, pour la partie qui excède les droits qui auraient été dus si le I du présent article avait été en vigueur à la date du fait générateur.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Daniel Raoul.
Sans faire référence à la littérature du XIXe siècle, je soulignerai que le Défenseur des droits, M. Jacques Toubon, a fait part à Mme la rapporteur, ainsi qu’à M. le rapporteur pour avis, de son entier soutien à ces propositions visant à mettre fin à une discrimination qui n’a pas lieu d’être.
Dans l’état actuel des choses, un mineur ayant fait l’objet d’une adoption simple qui perd ses parents adoptifs est considéré comme un étranger au regard de la succession, ce qui lui vaut de devoir payer 60 % de droits et le plonge dans une situation de surendettement dont il ne pourra sans doute jamais sortir.
Cela étant dit, je retirerai cet amendement au profit des trois amendements identiques.
Pour ce qui concerne l’alignement du régime successoral applicable aux enfants ayant fait l’objet d’une adoption simple sur celui dont relèvent les enfants ayant bénéficié d’une adoption plénière, la question est réglée puisqu’une telle disposition figure déjà dans l’article.
Il nous est ici proposé d’instituer la rétroactivité de ce dispositif, ce qui est un autre sujet.
Le Gouvernement est défavorable à ces amendements en raison d’un risque d’inconstitutionnalité au regard de l’égalité devant l’impôt. En outre, seule une loi de finances peut comporter une mesure de rétroactivité fiscale. Si ces amendements étaient adoptés, ils encourraient fortement la censure du Conseil constitutionnel.
La commission des lois rejoint totalement l’avis de Mme la secrétaire d'État sur l’amendement n° 13 rectifié.
L’objectif de ses auteurs est évidemment tout à fait louable sur le plan humain, mais son dispositif est inconstitutionnel, puisqu’il institue une rupture d’égalité entre des personnes ayant régulièrement acquitté des droits de succession à raison des dispositions fiscales actuellement en vigueur et d’autres qui bénéficieraient de cette extension du régime applicable aux transmissions en ligne directe parce qu’elles ne les ont pas encore acquittés – y compris, d’ailleurs, dans des hypothèses où elles auraient contrevenu à la loi, ce qui serait tout de même assez extraordinaire !
En revanche, mon appréciation diverge de celle de Mme la secrétaire d'État sur les amendements identiques n° 2 rectifié, 14 rectifié et 15 rectifié ter, visant à créer une nouvelle hypothèse dans laquelle pourraient s’appliquer les dispositions de l’article L. 247 du livre des procédures fiscales en matière de remises gracieuses. Sur ces amendements, j’émets, au nom de la commission des lois, un avis de sagesse.
Un professeur de droit constitutionnel que j’ai consulté m’a assuré que cet amendement est tout à fait conforme à la Constitution et ne créerait pas une inégalité de traitement.
Cela étant, je le retire au profit des amendements identiques.
L'amendement n° 13 rectifié est retiré.
Je mets aux voix les amendements identiques n° 2 rectifié, 14 rectifié et 15 rectifié ter.
Les amendements sont adoptés.
L'article 16 est adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 45, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
L’article 388-2 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Dans le cadre d’une procédure d’assistance éducative, l’administrateur ad hoc désigné en application du premier alinéa du présent article doit être indépendant de la personne morale ou physique à laquelle le mineur est confié, le cas échéant. »
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
L’article 388-2 du code civil prévoit la désignation d’un administrateur ad hoc chargé de représenter le mineur lorsque ses intérêts apparaissent en opposition avec ceux de ses représentants légaux.
L’amendement ajoute une condition supplémentaire : l’administrateur ad hoc doit être indépendant du service de l’aide sociale à l’enfance.
Il ne s’agit nullement de marquer une défiance à l’égard de ce service. Un administrateur ad hoc, c’est-à-dire une personne qui se substitue aux représentants légaux de l’enfant mineur pour protéger les intérêts et exercer les droits de celui-ci, a une mission de représentation de l’enfant, alors que les services du conseil départemental ont une mission générale de protection de l’enfance.
Cette disposition a pour objet d’assurer la pleine représentation de l’enfant.
La commission des affaires sociales a émis un avis favorable sur cet amendement. Il convient d’éviter les conflits d’intérêts.
L’avis de la commission des lois sur cet amendement est bien différent de celui de la commission des affaires sociales.
Cet amendement tend à imposer que l’administrateur ad hoc désigné pour représenter les intérêts du mineur soit indépendant du service de l’ASE ou de la personne à laquelle l’enfant a été confié. Ses auteurs présupposent de ce fait l’existence d’un conflit d’intérêts dans tous les cas. Or ce n’est pas du tout vrai sur le terrain.
Ainsi, lorsque les parents s’opposent à un acte usuel relevant de l’autorité parentale, par exemple un départ en classe de neige, et que l’ASE demande l’arbitrage du juge, faut-il estimer que l’intérêt du mineur n’est pas défendu ? À l’évidence, tel n’est pas le cas, au contraire.
En outre, la mise en œuvre de cette disposition se heurterait à une difficulté pratique : le nombre de structures susceptibles d’être désignées pour remplir la fonction d’administrateur ad hoc est d’autant plus restreint que sont exclues les associations financées par le conseil départemental.
Enfin et surtout, il faut faire confiance au juge. C’est lui qui prend la décision de nommer un administrateur ad hoc quand il estime que l’intérêt de l’enfant n’est pas suffisamment représenté. Pourquoi nommerait-il un administrateur ad hoc rattaché à l’ASE s’il a des raisons de penser que cela irait à l’encontre des intérêts de l’enfant ?
Je propose donc au Sénat de repousser cet amendement, comme nous l’avons déjà fait en première lecture et en commission.
L'amendement est adopté.
(Supprimé)
Après le deuxième alinéa de l’article 377 du code civil, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Dans ce dernier cas, le juge peut également être saisi par le ministère public, avec l’accord du tiers candidat à la délégation totale ou partielle de l’exercice de l’autorité parentale, à l’effet de statuer sur ladite délégation. Le cas échéant, le ministère public est informé par transmission de la copie du dossier par le juge des enfants ou par avis de ce dernier. » –
Adopté.
Aux articles 221-5-5 et 222-48-2 du code pénal, après la référence : « 378 » est insérée la référence : «, 379 ». –
Adopté.
I. –
Non modifié
II. – Le chapitre Ier du titre IX du livre Ier du code civil est complété par une section 5 ainsi rédigée :
« Section 5
« De la déclaration judiciaire de délaissement parental
« Art. 381 -1. – Un enfant est considéré comme délaissé lorsque ses parents se sont volontairement abstenus d’entretenir avec lui les relations nécessaires à son éducation ou à son développement pendant l’année qui précède l’introduction de la requête.
« Art. 381 -2. – Le tribunal de grande instance déclare délaissé l’enfant recueilli par une personne, un établissement ou un service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui se trouve dans la situation mentionnée à l’article 381-1 pendant l’année qui précède l’introduction de la demande en déclaration judiciaire de délaissement parental. La demande en déclaration de délaissement parental est obligatoirement transmise par la personne, l’établissement ou le service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant à l’expiration du délai d’un an prévu à l’article 381-1. La demande peut également être présentée par le ministère public agissant d’office ou, le cas échéant, sur proposition du juge des enfants.
« La simple rétractation du consentement à l’adoption, la demande de nouvelles ou l’intention exprimée mais non suivie d’effet de reprendre l’enfant ne constituent pas un acte suffisant pour rejeter de plein droit une demande en déclaration de délaissement parental et n’interrompent pas le délai mentionné au premier alinéa du présent article.
« Le délaissement parental n’est pas déclaré si, au cours du délai mentionné au premier alinéa, un membre de la famille a demandé à assumer la charge de l’enfant et si cette demande est jugée conforme à l’intérêt de ce dernier.
« Le délaissement parental peut être déclaré à l’endroit des deux parents ou d’un seul.
« Lorsqu’il déclare l’enfant délaissé, le tribunal délègue par la même décision les droits d’autorité parentale sur l’enfant à la personne, à l’établissement ou au service départemental de l’aide sociale à l’enfance qui a recueilli l’enfant ou à qui ce dernier a été confié.
« La tierce opposition n’est recevable qu’en cas de dol, de fraude ou d’erreur sur l’identité de l’enfant. »
III. –
Non modifié
L'amendement n° 41, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Alinéa 5
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Art. 381–1. – Un enfant est considéré comme délaissé lorsque ses parents n’ont pas entretenu avec lui les relations nécessaires à son éducation ou à son développement pendant l’année qui précède l’introduction de la requête, sans que ces derniers en aient été empêchés par quelque cause que ce soit.
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Cet article concerne les situations de délaissement, dans lesquelles si un parent est encore théoriquement titulaire de l’autorité parentale, il ne l’exerce pas en réalité.
Tout le monde connaît l’histoire de la carte postale : il suffit que le parent envoie une carte postale dans l’année pour que le juge considère que l’enfant n’est pas délaissé…
L’obstacle à la mise en œuvre de la déclaration judiciaire d’abandon, devenue déclaration judiciaire de délaissement, est l’interprétation restrictive des conditions de cette mise en œuvre faite par les juges du fond. La majeure partie de la jurisprudence repose ainsi sur une conception subjective du délaissement parental, considérant que le délaissement ne pouvait être judiciairement déclaré que s’il était démontré qu’il avait un caractère volontaire.
Dans les cas qui nous occupent, les enfants sont manifestement délaissés, mais la volonté de délaissement n’apparaît pas. Or le juge ne peut pas déclarer le délaissement en l’absence d’identification d’une volonté de délaissement.
L’article 18, tel qu’il avait été adopté par l’Assemblée nationale, permettait justement de lever l’exigence d’une manifestation de la volonté de délaissement. Il avait aussi été précisé que les parents devraient ne pas avoir entretenu avec l’enfant les relations nécessaires à son éducation et à son développement sans en avoir été empêchés par quelque cause que ce soit.
Au travers du présent amendement, il s’agit de prévoir que le délaissement ne puisse être judiciairement déclaré si les parents se trouvaient dans l’impossibilité physique d’apporter les soins nécessaires à l’enfant, tout en permettant au juge de constater le délaissement en l’absence de manifestation de volonté des parents, ce qui débouchera ensuite soit sur une délégation d’autorité parentale, soit sur l’attribution du statut de pupille à l’enfant.
Cet amendement tend à réintroduire l’exception de l’empêchement des parents par quelque cause que ce soit pour faire échec au prononcé du délaissement d’un enfant.
Le champ de cette exception est très large. Si elle couvre effectivement les hypothèses d’empêchement involontaire des parents, que la commission des lois souhaitait voir prises en compte, elle risque également de mettre en échec la procédure pour des raisons tenant au comportement des parents eux-mêmes.
Par ailleurs, en raison de son imprécision, cette rédaction risque de donner lieu à d’abondantes interprétations jurisprudentielles, ce qui n’est pas souhaitable.
C’est pourquoi je propose de s’en tenir à la rédaction adoptée par la commission des affaires sociales, qui était également celle que le Sénat avait adoptée en première lecture, imposant que le délaissement parental ait un caractère volontaire. L’avis de la commission des lois est donc défavorable.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 30, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 6, deuxième phrase
Remplacer les mots :
d’un an
par les mots :
de neuf mois
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Le texte initial de la proposition de loi imposait au tribunal de grande instance un délai de six mois pour statuer sur une demande de déclaration judiciaire de délaissement ; le Sénat a jugé ce délai trop court et l’a porté à un an. Pour notre part, nous proposons de le fixer à neuf mois. Cela se justifie par la nécessité de rendre une justice efficace dans l’intérêt de l’enfant et des familles, tout en tenant compte des contraintes temporelles du juge.
Le délai d’un an mentionné dans la rédaction proposée pour l’article 381-2 du code civil est cohérent avec les dispositions de l’article 381-1 du même code.
En effet, aux termes de l’alinéa 5 de l’article 18 de la proposition de loi, un enfant peut être considéré comme délaissé si ses parents n’ont pas entretenu avec lui de relations durant une année. Dès lors, il est logique que l’action en déclaration de délaissement ne puisse être engagée qu’au bout d’un an.
Pour ces raisons, l’avis de la commission sur cet amendement est défavorable.
Il y a en effet un problème d’adéquation entre les deux délais. Je ne suis pas sûre que l’adoption de cet amendement produirait les effets attendus par ses auteurs. L’avis du Gouvernement est défavorable.
L’explication de Mme la rapporteur est extrêmement pertinente. Par conséquent, je retire l’amendement.
L'article 18 est adopté.
Le dernier alinéa de l’article 378-1 du code civil est complété par les mots : «, soit par le tiers auquel l’enfant a été confié en vertu de l’article 375-3 ».
L'amendement n° 48, présenté par Mme Campion et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Remplacer les mots :
, soit par le tiers auquel l’enfant a été confié en vertu de l’article 375-3
par les mots :
, soit par le service départemental de l’aide sociale à l’enfance auquel l’enfant est confié
La parole est à Mme Claire-Lise Campion.
Cet amendement vise à ajouter le service départemental de l’aide sociale à l’enfance à la liste des titulaires pouvant exercer l’action en retrait total de l’autorité parentale. Actuellement, seul le ministère public, un membre de la famille ou le tuteur de l’enfant peuvent engager cette action.
La commission a élargi l’exercice de l’action en retrait de l’autorité parentale à tout tiers auquel l’enfant est confié sur le fondement de l’assistance éducative. Le présent amendement vise à restreindre cette possibilité au seul service de l’aide sociale à l’enfance et à permettre à ce dernier d’engager l’action quel que soit le fondement sur lequel l’enfant lui a été confié. L’avis de la commission est favorable.
Il s’agit de savoir qui a compétence pour engager une action en retrait de l’autorité parentale quand des enfants sont maltraités.
Actuellement, cette compétence est réservée au procureur de la République, aux membres de la famille de l’enfant et à son tuteur.
Sur l’initiative de la commission des lois, nous avons étendu cette faculté au tiers auquel l’enfant a été confié par le juge. La rédaction proposée au travers de cet amendement diffère de celle que nous avons retenue sur deux points.
D’abord, elle est plus restrictive : elle n’ouvre cette faculté qu’aux services de l’ASE, et non pas aux autres tiers auxquels l’enfant a pu être confié. Il s’agit sans doute, dans l’esprit des auteurs de l’amendement, de conférer à l’ASE un statut particulier à l’égard des membres de la famille de l’enfant ou de son tuteur. On peut raisonnablement objecter à cela que l’on ne voit pas pourquoi on n’attribuerait pas au tiers auquel le juge a confié l’enfant la même mission de protection contre les parents.
À l’inverse, cette rédaction est aussi plus large, puisqu’elle ne précise pas dans quel cadre l’enfant a été confié à l’ASE : soit cette décision a été prise par le juge des enfants sur le fondement de l’article 375-3 du code civil – c’est la rédaction qui a été retenue par la commission des affaires sociales –, soit l’enfant a été confié à l’ASE par ses parents ou une autre personne en dehors de toute procédure d’assistance éducative.
Dans ce dernier cas, les parents doivent toujours être systématiquement associés à toutes les décisions concernant le mineur. Il serait pour le moins paradoxal que le service auquel ils ont confié l’enfant puisse les attaquer en retrait de l’autorité parentale alors qu’il ne tiendrait qu’à eux de reprendre immédiatement l’enfant, ce qui rendrait aussitôt irrecevable l’action en justice, faute d’intérêt à agir pour l’ASE.
Cette contradiction manifeste me conduit à émettre un avis défavorable sur cet amendement.
Ne conviendrait-il pas de faire référence au président du conseil départemental plutôt qu’au service départemental de l’aide sociale à l’enfance ?
En effet, davantage qu’un service qui n’est pas forcément bien identifié, c’est le président du conseil départemental qui a autorité sur les enfants placés. Mentionner de façon impersonnelle le service départemental de l’aide sociale à l’enfance ne me semble pas particulièrement judicieux.
Mon cher collègue, vous avez tout à fait raison sur le principe, mais il se trouve que le code civil fait systématiquement référence à l’ASE. Si nous faisions droit à votre remarque, nous devrions substituer à chaque mention de l’ASE dans le code celle du président du conseil départemental.
L'amendement est adopté.
L'article 21 bis A est adopté.
Le 1° de l’article 21-12 du code civil est ainsi rédigé :
« 1° L’enfant qui, depuis au moins trois années, est recueilli sur décision de justice et élevé par une personne de nationalité française ou est confié au service de l’aide sociale à l’enfance ; ».
Cet article prévoit la possibilité, pour un enfant recueilli et élevé par une personne de nationalité française ou confié à un service de l’aide sociale à l’enfance, de demander la nationalité française.
Lors de l’examen du texte en première lecture au Sénat, j’avais proposé que la nationalité française puisse être octroyée après un délai de deux ans, quel que soit le lieu où l’enfant recueilli par des ressortissants français est effectivement élevé par ceux-ci.
L’Assemblée nationale, à la demande du Gouvernement, a porté ce délai à trois ans en séance publique, l’objectif étant que l’accès à la nationalité française ne devienne pas, dans le cas des mineurs entrés tardivement sur le territoire, plus facile que l’obtention d’un titre de séjour. Je comprends parfaitement cette exigence de cohérence entre les différentes dispositions législatives relatives au séjour et à la nationalité.
En commission, la rapporteur, Michèle Meunier, a fait adopter un amendement visant à éviter que ces dispositions n’ouvrent la voie à des dérives telles que la mise en place de filières de trafic d’enfants. Ainsi, seuls les enfants recueillis sur décision de justice seront concernés par ce dispositif.
Je me réjouis que, après de fructueux échanges avec toutes les parties concernées, nous soyons parvenus à une rédaction finale permettant d’éviter tout risque de détournement, tout en offrant la possibilité à tous les enfants nationaux de pays ne connaissant que cette procédure spécifique de recueil, et non l’adoption, de demander la nationalité française après trois années de recueil par un ressortissant français, en France ou à l’étranger.
Soulignons combien le statut de ces enfants, qui sont souvent sans filiation, est précaire. Il est par ailleurs aisé d’imaginer combien les démarches auprès de l’administration ou des organismes sociaux peuvent être rendues plus compliquées dans ce cas. La reconnaissance de ce lien, pourtant ressenti comme quasiment filial, entre le kafil et l’enfant pourra ainsi se déployer pleinement.
L'article 21 bis est adopté.
(Supprimé)
Les examens radiologiques osseux aux fins de détermination de l’âge, en l’absence de documents d’identité valables et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable, ne peuvent être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et après recueil de l’accord de l’intéressé.
Les conclusions de ces examens, qui doivent préciser la marge d’erreur, ne peuvent à elles seules permettre de déterminer si l’intéressé est mineur. Le doute profite à l’intéressé.
En cas de doute sur la minorité de l’intéressé, il ne peut être procédé à une évaluation de son âge à partir d’un examen du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires.
Il est créé́ dans chaque département un comité́ d’éthique chargé de statuer sur la minorité́ ou la majorité́ des personnes à partir des éléments d’évaluation. Ce comité́ pourra avoir accès au traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé́ VISABIO.
Ce comité́ est composé de trois personnes qualifiées nommées conjointement par le préfet et le président du conseil départemental.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 31, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
L’article 388 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’évaluation tendant à la détermination de la minorité ne peut être effectuée à partir de données radiologiques de maturité osseuse ou à partir du développement pubertaire des caractères sexuels primaires et secondaires. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Le 12 mai 2015, un amendement du Gouvernement visant à encadrer la pratique des tests d’âge osseux a été adopté. Désormais, leur mise en œuvre en cas de doute sérieux sur l’âge sera conditionnée à une décision de l’autorité judiciaire et à l’accord de l’intéressé.
Pour limiter au minimum la portée des tests, l’expert qui lira la radiographie devra « préciser la marge d’erreur qu’il estime » et « le doute sur un résultat devra profiter au jeune en valorisant une présomption de minorité ».
De très nombreuses instances médicales, scientifiques ou éthiques ont clairement signifié leurs réticences, voire leur opposition aux tests osseux.
L’intérêt principal de ces tests, aux yeux de ceux qui y ont recours, est qu’ils sont rapides et peu onéreux, qu’ils permettent de déclarer majeurs une très forte proportion de ceux qui y sont soumis et qu’ils confèrent un fondement scientifique à des décisions très lourdes de conséquences pour les jeunes concernés.
Nous sommes opposés à cette pratique. L’argument selon lequel il n’existe pas de solution de remplacement n’est pas recevable : ce n’est pas parce que l’on n’a pas de réponse fiable à un problème qu’il faut recourir à une solution que l’on sait erronée, insatisfaisante et contraire aux engagements internationaux de la France, au premier rang desquels la Convention relative aux droits de l’enfant.
Pour mémoire, un appel à la suppression des tests d’âge osseux sur les mineurs isolés étrangers a été signé par 12 000 personnes, dont des magistrats, des avocats, des médecins, des scientifiques, des artistes, des intellectuels, des responsables d’ONG de premier plan, ainsi que des parlementaires et des élus locaux communistes, écologistes et socialistes. Cette liste est loin d’être exhaustive.
Des amendements visant à supprimer ces tests ont été déposés à l’Assemblée nationale. Ici, au Sénat, certains de nos collègues du groupe socialiste et républicain ont également présenté un amendement en ce sens à l’occasion de l’examen du projet de loi relatif aux droits des étrangers en France.
J’indique enfin que l’accueil de tous les mineurs isolés, sans vérification préalable de leur âge, devient la norme dans la capitale, de même que l’accès de tous aux soins.
J’en appelle à la conscience de chacun : c’est d’êtres humains qu’il s’agit. Nous demandons la suppression de ces tests d’un autre âge, qui n’ont aucune fiabilité.
L'amendement n° 32, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le premier alinéa de l’article L. 221-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« En cas de doute sur son âge, l’évaluation de la minorité ne peut être effectuée à partir de données radiologiques de maturité osseuse. » ;
2° Au début de la seconde phrase, le mot : « Celui-ci » est remplacé par les mots : « L’administrateur ad hoc ».
La parole est à Mme Annie David.
Cet amendement relève de la même philosophie que le précédent. Nous demandons que le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile soit modifié afin d’écarter l’évaluation de la minorité à partir de données radiologiques de maturité osseuse.
La Commission nationale consultative des droits de l’homme, dans son avis rendu le 14 juin 2014, a préconisé de mettre fin « à la pratique actuelle consistant à ordonner des expertises médico-légales de détermination de l’âge reposant sur des examens physiques du jeune isolé étranger ». Pour la CNCDH, « l’évaluation de l’âge à partir d’un examen osseux, des parties génitales, du système pileux et/ou de la dentition doit être interdite ».
Aussi ne comprenons-nous pas que cette mesure figure dans ce texte. La réponse réside peut-être dans le fonctionnement actuel de la prise en charge des jeunes isolés étrangers. La circulaire de la garde des sceaux du 31 mai 2013, qui fixe les modalités de prise en charge des jeunes isolés étrangers, prévoit trois étapes : une évaluation sociale, une vérification des documents d’état civil et, en cas de doute, des examens médicaux, sur réquisition du parquet. Parmi ces examens figure le test osseux, dont il est admis qu’il comporte une marge d’erreur, notamment après l’âge de seize ans.
On l’aura compris, la détermination de l’âge du jeune est essentielle, car elle conditionne sa prise en charge : celle-ci relève de l’État s’il est majeur, du conseil départemental s’il est mineur.
Le groupe CRC est hostile à cette pratique pour le moins humiliante. Il m’a semblé, lors des explications de vote sur l’ensemble du projet de loi relatif aux droits des étrangers en France, que nous partagions tous la volonté d’accueillir les étrangers dans de bonnes conditions : cela suppose de ne pas pratiquer de tests osseux.
La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur ces deux amendements.
La méthode des tests osseux est bien sûr discutable. Elle ne peut être considérée comme le moyen unique de déterminer l’âge d’un individu, la marge d’erreur étant importante. Ces tests doivent donc être utilisés dans le cadre d’une approche pluridisciplinaire et ne peuvent être qu’un élément d’un faisceau d’indices.
L’article 21 ter précise que les tests de maturité osseuse ne pourront être réalisés que sur décision de l’autorité judiciaire et avec l’accord de l’intéressé. Ces conditions nous paraissent suffisantes ; il n’est pas souhaitable d’interdire totalement le recours à ces tests.
Le sujet est sensible du fait de sa nature, de ses implications et du contexte actuel.
Il y a consensus sur le relatif manque de fiabilité des tests osseux. Cela étant, les différentes autorités de santé qui ont été consultées à ce sujet, qu’il s’agisse du Comité consultatif national d’éthique, de l’Académie nationale de médecine ou du Haut Conseil de la santé publique, n’ont pas exclu le recours à ces tests, à condition que la marge d’erreur soit prise en compte et qu’ils soient croisés avec d’autres modes d’évaluation médicale.
À l’Assemblée nationale, après une vive discussion, il a été choisi de ne pas exclure totalement la pratique des tests osseux – aucun pays ne l’interdit de manière absolue et le Conseil de l’Europe ne l’a pas rejetée –, mais de l’encadrer strictement, ce que permet à mon sens la rédaction actuelle de l’article : il ne peut être recouru à des tests osseux que sur décision d’un juge et avec l’accord de l’intéressé, en l’absence de documents d’identité valables permettant de déterminer l’âge de ce dernier et lorsque l’âge allégué n’est pas vraisemblable. Par ailleurs, les conclusions de l’examen doivent préciser la marge d’erreur. Enfin, ces tests ne peuvent à eux seuls permettre de déterminer si l’intéressé est ou non mineur, le doute devant profiter à ce dernier.
Pour ma part, je considère que cet article représente une immense avancée par rapport à la situation actuelle.
Enfin, je tiens à souligner que le même article interdit le recours aux examens pubertaires.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur les deux amendements.
La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote sur l’amendement n° 31.
Je pensais que ce sujet susciterait davantage le débat que la question des moyens financiers des conseils généraux…
Certes, le Gouvernement a consenti un effort en matière d’encadrement de la pratique des tests osseux, mais le groupe CRC s’oppose à celle-ci pour des raisons de principe, en s’appuyant sur les avis d’experts, de personnalités de diverses sensibilités politiques – je citerai Jacques Toubon, Défenseur des droits –, qui reconnaissent tous l’existence d’une marge d’erreur de dix-huit mois à deux ans, particulièrement pour la tranche d’âge de dix-huit à vingt ans. Une méthode entachée d’une marge d’erreur aussi importante ne peut être considérée comme fiable : autant supprimer le recours aux tests osseux. Le risque est de déclarer majeurs des jeunes qui ne le sont pas.
Enfin, je le dis très franchement, je regrette que ce dispositif, qui ne figurait pas dans le texte en première lecture, nous soit soumis comme par hasard alors même que nous venons d’achever l’examen du projet de loi relatif aux droits des étrangers en France. Il y a tout de même de drôles de coïncidences !
Mme la secrétaire d’État proteste.
J’ai trouvé l’intervention de Mme Cohen très claire : je voterai l’amendement qu’elle a présenté.
Je voterai cet amendement, par cohérence avec la position que j’ai adoptée lors de l’examen du projet de loi relatif au droit des étrangers en France.
En quoi le régime prévu pour les jeunes majeurs est-il plus défavorable que le dispositif applicable aux mineurs ? Dans les deux cas, il y a prise en charge. Dans le doute, je suivrai l’avis de la commission.
Les tests osseux visent bien évidemment à déterminer si le jeune étranger est mineur ou majeur : dans le premier cas, il sera confié l’ASE ; dans le second, il peut être renvoyé dans son pays. Cela fait une sacrée différence !
Les femmes et les hommes du réseau éducation sans frontières se battent pour que des enfants étrangers puissent poursuivre leurs études une fois devenus majeurs : il arrive très fréquemment qu’ils soient renvoyés dans leur pays à la fin de l’année scolaire.
Outre qu’ils ne sont pas fiables, ces tests sont pour le moins humiliants. Nous considérons pour notre part qu’une telle procédure manque d’humanité et n’est pas digne d’un pays tel que le nôtre.
J’ai l’impression que certains de nos collègues veulent exclure le recours à des tests scientifiques, peut-être légèrement imparfaits, pour permettre à des jeunes qui n’y auraient pas vocation de rester néanmoins en France… Nous ne pouvons les suivre.
Avec une marge d’erreur de dix-huit mois à deux ans, la fiabilité de ces tests est relative !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 33, présenté par Mmes Cohen et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 551-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les mineurs isolés et les familles comprenant un ou plusieurs enfants mineurs ne peuvent être placés en rétention par l’autorité administrative. Cette prohibition ne souffre d’aucune exception. »
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Le 19 janvier 2012, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour le placement en rétention d’une famille avec deux enfants en bas âge. La violation de la Convention européenne des droits de l’homme a été constatée sur plusieurs fondements : violation de l’article 3 – interdiction des traitements inhumains ou dégradants –, de l’article 5 – droit à la liberté et à la sûreté – et de l’article 8 – droit au respect de la vie familiale.
Au lendemain de cet arrêt « Popov » de la Cour européenne des droits de l’homme, toute rétention d’étrangers mineurs aurait dû cesser sur le territoire français, y compris dans les territoires d’outre-mer. Or force est de constater que tel n’est pas le cas.
La Commission nationale consultative des droits de l’homme, le Défenseur des droits, un collectif de soixante professeurs de droit et de nombreuses associations de défense des droits de l’homme considèrent, en effet, que l’arrêt « Popov » n’a pas été pleinement exécuté.
Certes, le 6 juillet 2012, une circulaire a été prise visant à restreindre le recours à la rétention administrative des familles – parents et enfants – trouvées en situation irrégulière en France, mais il ne s’agit que d’une restriction, et non d’une interdiction de placer les enfants étrangers en rétention.
En outre, le champ d’application de ce texte est limité, puisque celui-ci ne s’applique pas à Mayotte, considérée par le Gouvernement comme relevant d’une « situation territoriale d’exception ».
La situation, dans ce département, est dramatique : sur les 5 692 mineurs enfermés en France en 2014, 5 582 l’étaient à Mayotte. Ce chiffre alarmant témoigne aussi d’une pratique inacceptable de la préfecture de Mayotte : le rattachement fictif de mineurs à des tiers dépourvus de tout lien légal avec eux.
En définitive, si la circulaire de 2012 a fait diminuer le nombre de placements en rétention de familles avec enfants, les placements en rétention administrative continuent, sans que les enfants bénéficient de garanties suffisantes.
C’est la raison pour laquelle nous demandons au Sénat d’adopter cet amendement, afin d’inscrire dans la loi l’interdiction du placement en rétention administrative des mineurs isolés, ainsi que des familles comprenant un ou plusieurs enfants mineurs.
Les membres de la commission des affaires sociales ont été sensibles aux arguments présentés. Le placement des mineurs en centre de rétention n’est évidemment pas une solution. Nous souhaitons entendre le Gouvernement sur ce sujet.
Je voudrais préalablement souligner qu’il n’y a aucun « vice » dans l’élaboration du calendrier des travaux du Sénat. Les articles en question ont été introduits dans la proposition de loi relative à la protection de l’enfant, par voie d’amendements à l’Assemblée nationale, à un moment où celui-ci n’était pas encore précisément fixé. La concomitance avec l’examen du projet de loi relatif au droit des étrangers en France est donc fortuite.
Concernant l'amendement n° 33, l’Assemblée nationale a limité le placement en rétention de familles avec enfants mineurs à deux cas : celui des familles qui se sont soustraites de toutes les manières possibles aux mesures d’éloignement et le cas très rare du placement pour une nuit en vue de prendre un avion tôt le matin. Si nous ne placions pas en rétention les familles concernées par ce second cas, nous devrions les contraindre à dormir dans un véhicule de police, ce qui ne constituerait pas vraiment un progrès…
Le Sénat a lui-même participé à cet encadrement, en précisant que la rétention des familles devrait s’exercer uniquement dans des centres de rétention dotés de chambres isolées, adaptées et spécifiquement dédiées à l’accueil des familles.
Le Gouvernement considère donc que l’amendement est déjà largement satisfait par la disposition adoptée par le Sénat. S’il devait être maintenu, l’avis du Gouvernement serait défavorable.
Oui, monsieur le président.
Comme beaucoup de mes collègues, j’ai visité des centres de rétention administrative : les conditions d’hébergement y sont terribles. Je ne crois nullement qu’il soit possible de garantir aux familles un hébergement dans de bonnes conditions.
Notre assemblée s’honorerait en votant cet amendement prévoyant qu’aucune famille ne doit être placée en rétention. C’est une question de principe.
Je comprends les motivations qui ont poussé Mme Cohen à déposer cet amendement, mais que l’on invoque, encore une fois, le cas de Mayotte pour appuyer des revendications sans s’intéresser réellement à ce qui se passe sur ce territoire, notamment en matière d’immigration clandestine, me gêne profondément.
Mayotte est un territoire de 374 kilomètres carrés, où sont pratiquées plus de la moitié des reconduites à la frontière. Dans ces conditions, si un droit des étrangers dérogatoire ne s’y applique pas, comment faire pour mettre un terme à une pression migratoire insensée ?
Soit on prend en considération la situation de ce territoire dans sa globalité au lendemain de la départementalisation, soit on arrête d’en tirer argument pour justifier le dépôt de tel ou tel amendement ! Je m’oppose farouchement au présent amendement et je demande à mes collègues de me suivre sur ce point.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 21 ter est adopté.
Le titre II du livre II du code pénal est ainsi modifié :
1° Le paragraphe 3 de la section 3 du chapitre II est ainsi modifié :
a) L’article 222-31-1 est ainsi rétabli :
« Art. 222 -31 -1. – Les viols et les agressions sexuelles sont qualifiés d’incestueux lorsqu’ils sont commis sur la personne d’un mineur par :
« 1° Un ascendant ;
« 2° Un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce ;
« 3°
Supprimé
« 4° Le conjoint, le concubin d’une des personnes mentionnées aux 1° à 2° ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité avec l’une des personnes mentionnées aux 1° à 2°, s’il a sur le mineur une autorité de droit ou de fait. » ;
b) Au premier alinéa de l’article 222-31-2, les mots : « ou l’agression sexuelle » sont remplacés par les mots : « incestueux ou l’agression sexuelle incestueuse » ;
2° La section 5 du chapitre VII est ainsi modifiée :
a) Après l’article 227-27-2, il est inséré un article 227-27-2-1 ainsi rédigé :
« Art. 227 -27 -2 -1. – Les infractions définies aux articles 227-25 à 227-27 sont qualifiées d’incestueuses lorsqu’elles sont commises sur la personne d’un mineur par :
« 1° Un ascendant ;
« 2° Un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu ou une nièce ;
« 3°
Supprimé
« 4° Le conjoint, le concubin d’une des personnes mentionnées aux 1° à 2° ou le partenaire lié par un pacte civil de solidarité avec l’une des personnes mentionnées aux 1° à 2°, s’il a sur le mineur une autorité de droit ou de fait. » ;
b) Au premier alinéa de l’article 227-27-3, après le mot : « sexuelle », il est inséré le mot : « incestueuse ».
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 50, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Compléter cet alinéa par les mots :
, si cette personne a sur le mineur une autorité de droit ou de fait
II. – Alinéa 7
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
« 3° Son tuteur ou la personne disposant à son égard d’une délégation totale ou partielle d’autorité parentale ;
III. – Alinéa 8
1° Après les mots :
le conjoint
insérer les mots :
ou l’ancien conjoint
2° Après les mots :
le concubin
insérer les mots :
ou l’ancien concubin
3° Remplacer (deux fois) la référence :
par la référence :
4° Après les mots :
le partenaire
insérer les mots :
ou l’ancien partenaire
IV. – Alinéa 14
Compléter cet alinéa par les mots :
, si cette personne a sur le mineur une autorité de droit ou de fait
V. – Alinéa 15
Rétablir cet alinéa dans la rédaction suivante :
3° Son tuteur ou la personne disposant à son égard d’une délégation totale ou partielle d’autorité parentale ;
VI. – Alinéa 16
1° Après les mots :
le conjoint
insérer les mots :
ou l’ancien conjoint
2° Après les mots :
le concubin
insérer les mots :
ou l’ancien concubin
3° Remplacer (deux fois) la référence :
par la référence :
4° Après les mots :
le partenaire
insérer les mots :
ou l’ancien partenaire
La parole est à Mme la secrétaire d'État.
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous regrettez que la définition pénale de l’inceste ne corresponde pas exactement à sa représentation sociétale ou à sa définition implicite qui résulte des règles du code civil. J’entends bien la difficulté, mais il n’est pas possible d’avoir une correspondance exacte entre ces différents périmètres. C’est la spécificité et l’autonomie du droit pénal qui justifient ces différences. Le Gouvernement estime donc nécessaire de rétablir la condition d’autorité de droit ou de fait.
Par mesure de prudence et pour éviter toute difficulté constitutionnelle, il paraît nécessaire de pouvoir répondre que l’inceste ne s’applique que dans des cas où la loi prévoyait déjà une aggravation.
L’exemple le plus évident, qui est incontestable, est celui de l’inceste entre frère et sœur majeurs commis sans violence ni contrainte. Il s’agit bien d’un inceste au regard de la représentation sociétale de la notion ; il s’agit également d’un inceste au regard du droit civil, qui édicte une impossibilité absolue de mariage. Pour autant, il ne s’agira pas d’un inceste au sens du code pénal, même avec la rédaction retenue par la commission des affaires sociales. Ce ne sera un délit que dans un cas prévu par l’article 227-27 du code pénal : si l’une des personnes est mineure de plus de quinze ans, l’autre ayant sur elle une autorité de droit ou de fait.
L'amendement n° 56, présenté par Mme Meunier, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Alinéas 8 et 16
Remplacer (deux fois) les références :
par les références :
1° et 2°
La parole est à Mme la rapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 50.
L'amendement n° 56 est un amendement de précision.
La commission des affaires sociales a émis un avis défavorable sur l’amendement n° 50, pour les raisons que M. Pillet, rapporteur pour avis de la commission des lois, ne manquera pas d’exposer.
À titre personnel, je suis favorable à cet amendement présenté par Mme la secrétaire d'État tendant à redéfinir les contours de l’inceste.
Madame la secrétaire d'État, j’ai beaucoup apprécié la modération de vos propos au sujet de l’amendement n° 50, dans le texte duquel je ne reconnais pas forcément votre plume…
Nous avions supprimé cet article en première lecture, comme le Gouvernement nous y avait d'ailleurs lui-même invités.
Tenant compte des travaux des députés, nous acceptons de traiter la question de l’inceste dans ce texte. J’avais d’ailleurs indiqué, lors de la première lecture, que nous n’y étions pas du tout opposés, mais que nous voulions que la réflexion soit approfondie, pour éviter une deuxième censure du Conseil constitutionnel.
Notre souci aujourd’hui est donc double : établir une définition pénale de l’inceste qui corresponde à la représentation qu’en a la société ; être suffisamment précis pour éviter une nouvelle censure, la première ayant été particulièrement forte et nette.
Les I et IV de l’amendement du Gouvernement visent à poser l’exigence, pour reconnaître l’inceste, que les membres de la famille disposent d’une autorité de droit ou de fait sur la victime.
Compte tenu de cette rédaction, il serait impossible de qualifier d’inceste l’agression sexuelle commise par un frère sur sa sœur plus âgée que lui, dans la mesure où cette différence d’âge équivaudrait à une absence d’autorité de droit ou de fait. Pourtant, un tel crime apparaît bien présenter un caractère incestueux, et il est important, fondamental même, notamment aux yeux des associations, que le périmètre de l’inceste pénal corresponde aux représentations de la société.
Les II et IV de l’amendement visent à ajouter le tuteur d’un enfant ou la personne disposant à son égard d’une délégation d’autorité parentale dans la liste des personnes susceptibles de commettre un inceste. Cela permettrait de qualifier d’inceste une agression sexuelle alors qu’il n’existe entre l’enfant et l’auteur de l’infraction aucun lien familial ou d’alliance.
J’ajoute que cette mention pourrait poser des difficultés insurmontables dans le cas, par exemple, où le mineur aurait été confié avec délégation d’autorité parentale à l’ASE et serait abusé par un travailleur social employé par ce service. Cette agression sexuelle serait alors qualifiée d’incestueuse, alors que nous sommes tout de même loin de l’idée que l’on se fait de l’inceste. Il ne faut pas faire perdre tout sens à la notion.
Enfin, en retenant les anciens conjoints, concubins ou partenaires de PACS parmi les personnes susceptibles de commettre un inceste, le présent amendement rendrait possible la condamnation d’une personne pour inceste contre l’enfant d’un ancien compagnon ou d’une ancienne compagne né après leur séparation.
En conclusion, il faut toujours éviter, en droit pénal, que la représentation que la victime se fait d’une infraction ne soit pas de nature à caractériser une infraction pénale.
Telles sont, exposées à grands traits, les raisons pour lesquelles je m’oppose à cet amendement du Gouvernement. S’il était adopté, il rendrait le texte conforme à celui de l’Assemblée nationale – nous ne pourrions donc pas y revenir – et poserait, selon moi, un problème de légalité constitutionnelle de cette qualification pénale. Il serait tout de même très désagréable d’essuyer un deuxième avis défavorable du Conseil constitutionnel.
La parole est à M. Jean-Pierre Sueur, pour explication de vote sur l'amendement n° 50.
Je soutiens la position de M. le rapporteur pour avis. En effet, l’argumentation qu’il a livrée doit nous conduire à réfléchir.
À partir du moment où l’on pose l’obligation de l’existence d’un rapport d’autorité, de droit ou de fait, ce qui est appelé inceste entre un frère et une sœur par exemple, ne pourra plus être qualifié ainsi, du fait de l’absence de rapport d’autorité.
Il est tout à fait clair aussi que le lien familial caractérisé est à prendre en compte de la manière la plus rigoureuse possible, et la proposition du rapporteur pour avis de la commission des lois me semble en effet de nature à éviter une nouvelle censure du Conseil constitutionnel.
Je comprends les arguments de Mme la secrétaire d’État. Toutefois, la rédaction issue des travaux de la commission des affaires sociales et de la commission des lois du Sénat présente l’avantage de comporter les précisions nécessaires quant au périmètre de l’inceste, ce qui permet de répondre à l’objection du Conseil constitutionnel, qui avait jugé la première définition imprécise et ne répondant donc pas aux critères de lisibilité et d’intelligibilité de la loi. Si nous retenons cette rédaction, nous pourrons enfin faire entrer l’inceste dans le code pénal, ce qui nous paraît être une nécessité.
Je mets aux voix l'amendement n° 50.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 16 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 56.
L'amendement est adopté.
L'article 22 est adopté.
Au deuxième alinéa de l’article 434-1 du code pénal, les mots : « de quinze ans » sont supprimés. –
Adopté.
(Non modifié)
Au premier alinéa de l’article 434-3 du code pénal, les mots : « atteintes sexuelles infligés à un mineur de quinze ans » sont remplacés par les mots : « agressions ou atteintes sexuelles infligés à un mineur ». –
Adopté.
Le code de procédure pénale est ainsi modifié :
1° §(Supprimé) ;
2° L’article 356 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« La qualification d’inceste prévue aux articles 222-31-1 et 227-27-3 du code pénal fait l’objet, s’il y a lieu, d’une question spécifique. » ;
3°
Supprimé
L'article 22 quater A est adopté.
(Non modifié)
Après l’article L. 221-2 du code de l’action sociale et des familles, il est inséré un article L. 221-2-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 221 -2 -2. – Pour permettre l’application du troisième alinéa de l’article 375-5 du code civil, le président du conseil départemental transmet au ministre de la justice les informations dont il dispose sur le nombre de mineurs privés temporairement ou définitivement de la protection de leur famille dans son département. Le ministre de la justice fixe les objectifs de répartition proportionnée des accueils de ces mineurs entre les départements en fonction de critères démographiques. Les modalités d’application du présent article, ainsi que les conditions d’évaluation de la situation de ces mineurs, sont définies par décret en Conseil d’État. »
L'amendement n° 7, présenté par M. Pillet, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Alinéa 2, deuxième phrase
Remplacer les mots :
fixe les objectifs de répartition proportionnée des accueils de ces mineurs entre les départements
par les mots :
évalue les capacités d’accueil de ces mineurs de chaque département
La parole est à M. le rapporteur pour avis.
Cet amendement vise à remplacer la fixation d’objectifs par une évaluation des capacités d’accueil de mineurs isolés étrangers par chaque département, en fonction de critères démographiques.
Cet amendement ne modifie pas substantiellement l’article 22 quater, mais vise simplement à assouplir sa rédaction.
De plus, les termes « capacités d’accueil » sont également ceux utilisés par le Conseil d’État dans un arrêt du 30 janvier 2015, Département des Hauts-de-Seine et autres, décision à l’origine de l’introduction des articles 22 quater et 22 quinquies dans le présent texte. Le Conseil d’État a considéré que le garde des sceaux pouvait inviter les magistrats du parquet à prendre contact, préalablement au prononcé de l’ordonnance de placement provisoire, avec une cellule nationale chargée de mettre à tout moment à leur disposition des indicateurs sur le nombre de mineurs isolés étrangers déjà accueillis dans chaque département et sur les capacités d’accueil des services d’aide sociale à l’enfance de chacun d’entre eux.
La commission a émis un avis favorable.
Les objectifs de répartition, qui ne s’imposent pas aux juges, doivent bien évidemment s’appuyer sur une évaluation de la capacité d’accueil. Néanmoins, cette évaluation serait sans effet si elle ne conduisait pas, d’abord, à la fixation d’objectifs de répartition. Il est donc important de préciser que la décision d’orientation demeure celle du juge, qui la prend en fonction de l’intérêt de l’enfant. Les objectifs de répartition n’ont qu’une valeur indicative destinée à éclairer la décision du juge. À titre personnel, je suis défavorable à cet amendement.
L’article vise à introduire dans le code de l’action sociale et des familles l’obligation, pour les départements, de transmettre au ministère de la justice les informations dont ils disposent sur le nombre de mineurs isolés étrangers présents sur leur territoire.
La transmission de ces informations permet au ministère de la justice de fixer des objectifs de répartition proportionnés aux capacités d’accueil de ces mineurs dans les différents départements. Il s’agit donc d’un dispositif de solidarité nationale entre les départements relativement à l’accueil des mineurs isolés étrangers. Par ailleurs, il appartient toujours au juge de prendre, ensuite, une décision dans l’intérêt de l’enfant.
Monsieur le rapporteur pour avis, nous avons besoin non pas d’une évaluation des capacités d’accueil des départements, mais d’objectifs de répartition et de solidarité entre les départements. C’est pourquoi le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 22 rectifié, présenté par MM. Mohamed Soilihi, Sueur et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Alinéa 2
1° Deuxième phrase
Compléter cette phrase par les mots :
et d'éloignement géographique
2° Dernière phrase
Rédiger ainsi cette phrase :
Les modalités d’application du présent article, notamment les conditions d’évaluation de la situation de ces mineurs, et la prise en compte de la situation particulière des collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution, de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, sont définies par décret en Conseil d’État.
La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.
En 2013, Mme la garde des sceaux a mis en place un système de solidarité entre les départements pour la prise en charge des mineurs isolés. Ce système, qui permet de s’occuper de nombreux enfants en détresse, exclut les départements et collectivités d’outre-mer, au motif – certes louable – d’éviter aux enfants originaires de ces territoires des déracinements traumatisants. En effet, imaginerait-on envoyer un enfant isolé de Mayotte en Bretagne ou un mineur de Martinique à Marseille ?
Toutefois, le dispositif créé par Mme Taubira en 2013 offre également un soutien de l’État aux départements au titre de la mission régalienne d’évaluation du danger et de l’isolement. Actuellement, les enfants d’outre-mer en sont également exclus, ce qui n’est pas juste. J’ai pris l’attache du ministère de la justice afin d’engager une concertation en vue de trouver une solution. J’y ai trouvé une écoute, ainsi qu’un intérêt marqué pour la situation ultramarine.
Le présent amendement tend à replacer les départements et les collectivités d’outre-mer dans lesquels s’applique le code de l’action sociale et des familles dans une situation de droit commun, tout en protégeant les enfants d’un éloignement excessif. Ce dispositif sera mis en œuvre en concertation avec les collectivités concernées, qui ne manqueront pas d’être consultées dans le cadre de l’élaboration d’un décret pris en Conseil d’État.
Il s’agit d’un amendement de bon sens. Effectivement, le critère d’éloignement géographique doit être pris en compte, indépendamment des critères démographiques. Par ailleurs, cet amendement ne remet pas en cause la solidarité entre les départements. En conséquence, l’avis du Gouvernement est favorable.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 28 rectifié bis, présenté par M. Luche, Mme Doineau, MM. Détraigne et Pozzo di Borgo, Mmes Gatel, Morin-Desailly et Loisier, M. Cigolotti, Mme Goy-Chavent, M. Longeot, Mme Billon et M. Guerriau, est ainsi libellé :
Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
II. – Est institué, à compter de 2015, un prélèvement sur les recettes de l’État au bénéfice des départements.
Le montant de ce prélèvement est égal aux dépenses contractées par les départements au cours de l’année précédant la répartition au titre de la mise à l’abri, de l’évaluation de la situation et d’orientation des jeunes se présentant comme mineurs isolés étrangers, déduction faite des charges déjà assumées par l’État. Il comprend également la prise en charge des mineurs isolés étrangers au sein des établissements et services relevant du 1° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles lorsque le coût de celle-ci excède un seuil fixé par arrêté interministériel.
Ce montant est réparti entre les départements en proportion des dépenses engagées à ce titre.
Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent II.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du II est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Élisabeth Doineau.
L’article 22 quater tend à mettre en place une répartition plus équilibrée des mineurs isolés étrangers dans l’ensemble des départements, notamment pour assurer une meilleure prise en charge de chacun d’entre eux.
Toutefois, les départements ne disposent pas de moyens financiers suffisants pour proposer un accueil matériel et un accompagnement socio-éducatif adaptés à ces mineurs isolés étrangers. En effet, la participation de l’État – qui reconnaît ainsi sa responsabilité dans ce dossier – est strictement limitée à un forfait équivalent au financement des cinq premiers jours de l’accueil et de l’évaluation des mineurs isolés étrangers. Or l’essentiel de la charge financière, pour les départements, concerne l’accueil de longue durée de ces mineurs, souvent jusqu’à leur majorité et parfois au-delà, dans le cadre des contrats jeunes majeurs.
Pour les départements les plus concernés par la présence de mineurs isolés étrangers, la prise en charge de ceux-ci a des conséquences économiques bien plus importantes encore : de nouveaux dispositifs ont dû être créés, de nouveaux travailleurs sociaux ont dû être recrutés… Tout cela a un coût.
La question d’une prise en charge, au niveau national, des mineurs isolés étrangers est aussi celle du rôle que doit jouer l’État en la matière. Ce dernier ne peut se désintéresser d’un phénomène qui relève directement de ses compétences régaliennes, donc d’un traitement à l’échelon national, reposant sur la solidarité nationale. Il a d’ailleurs reconnu sa responsabilité en la matière au travers de la prise en charge du coût de l’accueil et de l’évaluation.
Ainsi, le présent amendement prévoit la création d’un prélèvement sur recettes couvrant la prise en charge des mineurs isolés étrangers accueillis au sein des services de l’aide sociale à l’enfance.
La commission a émis un avis défavorable. Les relations financières entre l’État et les départements au titre de la prise en charge des mineurs isolés étrangers sont organisées par le protocole du 31 mai 2013, qui a été signé par les représentants des départements. En outre, une telle disposition n’a pas sa place dans la présente proposition de loi, sachant que le projet de loi de finances pour 2016 nous sera bientôt soumis.
Sur le fond, cet amendement revient sur le consensus fondant la loi de 2007, c’est-à-dire sur le fait que les enfants doivent être protégés, quelle que soit leur nationalité. Or il est proposé de créer, parmi les bénéficiaires de l’aide sociale à l’enfance, une catégorie distincte, non définie par la loi, qui serait constituée des mineurs isolés étrangers. Un tel traitement spécifique nous paraît contraire aux valeurs de la République.
Au surplus, l’article 40 de la Constitution pourrait être invoqué contre cet amendement, dont l’adoption aurait pour conséquence un accroissement des dépenses de l’État.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 22 quater est adopté.
L’article 375-5 du code civil est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Lorsqu’un service de l’aide sociale à l’enfance signale la situation d’un mineur privé temporairement ou définitivement de la protection de sa famille, selon le cas, le procureur de la République ou le juge des enfants demande au ministère de la justice de lui communiquer, pour chaque département, les informations permettant l’orientation du mineur concerné.
« Le procureur de la République ou le juge des enfants prend sa décision en stricte considération de l’intérêt de l’enfant, qu’il apprécie notamment à partir des éléments ainsi transmis pour garantir des modalités d’accueil adaptées. » –
Adopté.
(Suppression maintenue)
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l’objet de la deuxième lecture.
Avant de mettre aux voix l’ensemble de la proposition de loi dans le texte de la commission modifié, je donne la parole à Mme Claire-Lise Campion, pour explication de vote.
La proposition de loi relative à la protection de l’enfant vise à offrir aux enfants placés une vie plus stable.
Ce texte, corédigé par Michelle Meunier et Muguette Dini, avait été adopté à l’unanimité, en mars dernier, par la Haute Assemblée en première lecture. Le Gouvernement et l’Assemblée nationale l’ont enrichi.
Son élaboration témoigne de l’existence d’un réel besoin de réajuster la loi du 5 mars 2007, de tirer les enseignements des disparités observées et d’encadrer les pratiques.
Les avancées obtenues au cours de nos débats sont notables et je veux de nouveau remercier notre rapporteur, Michelle Meunier, d’avoir réintroduit le thème de la protection de l’enfant dans le débat national au travers de cette proposition de loi.
Je vous remercie, madame la secrétaire d’État, de votre implication, de votre engagement et de votre mobilisation. Je salue votre souci d’associer étroitement à ce travail les acteurs de terrain.
J’ai déjà eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale : assurer une protection à tous les enfants, garantir leurs droits et leur permettre de se construire un avenir est au cœur de cette réforme.
Si nous partageons, mes chers collègues, le constat d’une trop grande hétérogénéité de l’application de cette politique sur le territoire national, force est de constater que nous ne sommes pas totalement parvenus à nous accorder sur les moyens d’en assurer une meilleure organisation.
Même si nous regrettons la suppression de la création du conseil national de la protection de l’enfance, celle de la mesure d’accompagnement des jeunes majeurs leur permettant de terminer leur année scolaire et le rejet de la solution innovante consistant à verser l’allocation de rentrée scolaire sur un compte destiné à aider les jeunes parvenus à l’âge de la majorité à démarrer dans la vie, nous voterons en faveur de l’adoption de cette proposition de loi.
L’intention de Muguette Dini et de Michelle Meunier d’améliorer la politique publique de la protection de l’enfance était tout à fait louable et légitime. Toutefois, tant le texte que la situation des départements ont beaucoup évolué depuis la première lecture.
Je veux lancer un cri d’alarme. Dans tous nos départements, les dispositifs sont saturés : nous n’avons plus de places disponibles dans les structures ou les familles d’accueil ; chaque travailleur social, chaque éducateur suit davantage de jeunes aujourd’hui qu’il n’en suivait hier, et la charge de travail ne fera que s’alourdir demain.
Nous attendons d’un texte visant à améliorer la protection de l’enfance qu’il nous donne les moyens financiers et humains d’accompagner au mieux les enfants confiés à l’ASE, pour leur permettre d’évoluer et de grandir dans de bonnes conditions. Or, cette proposition de loi ne remédie pas au manque de moyens actuel.
J’ai donc pris mes ciseaux et proposé la suppression de dispositions qui me semblaient de nature à compliquer encore le travail des professionnels, dont on exige chaque jour davantage que la veille, comme dans la patrouille de France ! Je tiens à saluer ici leur motivation et leur courage.
Je le répète, plus que d’un nouveau conseil national, ce sont de moyens dont nos départements ont besoin. Il existe déjà une structure dont les missions pourraient être étoffées : je pense à l’Observatoire national de l’enfance en danger.
Les membres du groupe UDI-UC voteront ce texte.
Le débat s’est, au début, un peu éloigné du sujet de la protection de l’enfance, pour se focaliser sur la question de l’insuffisance des moyens financiers des collectivités territoriales. Je me réjouis de cette prise de conscience et j’espère que, lors de l’examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, vous serez très nombreux à demander la fin des restrictions budgétaires et à voter les recettes que nous proposerons…
Pour en revenir au présent texte, nous regrettons que la majorité sénatoriale ait supprimé deux mesures qui nous paraissaient importantes et de nature à améliorer la situation des jeunes confiés à l’ASE : la création du conseil national de la protection de l’enfance et l’accompagnement des jeunes atteignant l’âge de dix-huit ans pour leur permettre de terminer leur année scolaire ou universitaire.
Par ailleurs, la pratique des tests osseux pour déterminer l’âge des jeunes étrangers isolés a malheureusement été réintroduite. Nous l’avons dit, une telle disposition n’a pas sa place dans un tel texte, et nous regrettons qu’une majorité ne se soit pas dégagée pour rejeter cette pratique d’un autre âge.
Alors que, en première lecture, ce texte avait été adopté à l’unanimité, nous ne pourrons le voter aujourd’hui, tel qu’il a été remanié par le Sénat. Cela étant, cette proposition de loi allant malgré tout globalement dans le bon sens, notre groupe s’abstiendra.
Sous la présidence de Mme David, la commission des affaires sociales avait chargé Mmes Dini et Meunier de rédiger un rapport sur l’application de la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, issue d’un projet de loi présenté par le ministre Philippe Bas. Ce rapport a été adopté à l’unanimité par la commission des affaires sociales. Mme Meunier a ensuite déposé une proposition de loi qui a été examinée en séance publique dans le cadre de l’ordre du jour réservé au groupe socialiste et républicain.
L’examen de ce texte en première lecture fut, déjà, extrêmement chaotique : commencé le 11 décembre 2014, il s’est poursuivi les 28 janvier et 11 mars 2015.
Lorsque cette proposition de loi a été transmise à l’Assemblée nationale, elle comportait seize articles. Il était normal que les députés fassent leur travail et essaient d’améliorer le texte du Sénat. Pour une fois, l’Assemblée nationale n’a pas si mal travaillé… §Je le dis par provocation !
Mme la secrétaire d’État avait déclaré, à la fin de nos débats de première lecture, qu’elle se pencherait sur le sujet. Dans l’ensemble, contrairement à Mme Cohen, j’ai le sentiment que ce texte marque une amélioration certaine par rapport à la loi de 2007. Je suis intimement persuadé que sa mise en œuvre permettra des progrès importants dans le fonctionnement de l’aide sociale à l’enfance.
Je remercie de leur contribution l’ensemble des participants à ce débat. Ce texte me semble bon et j’estime donc que nous devons le voter.
Je tiens à saluer à nouveau le travail réalisé par Mmes Dini et Meunier.
Concernant les apports de l’Assemblée nationale, il faut souligner l’importance de la concertation. En vue de la deuxième lecture, nous avons dû fournir, tant en commission qu’en séance publique, un travail supplémentaire, mais tout à fait intéressant.
Je ne m’appesantirai pas sur nos difficiles conditions de travail, en première comme en deuxième lecture, M. le président de la commission venant de les évoquer.
Je voudrais faire part de ma préoccupation quant à la question du délaissement au regard des perspectives d’adoption. Nous pensons d’abord aux jeunes, ainsi qu’à tous les professionnels qui interviennent auprès d’eux. Cette proposition de loi comportant des éléments tout à fait positifs par rapport au constat établi sur la mise en œuvre de la loi de 2007, l’ensemble du groupe du RDSE votera en faveur de son adoption.
Je tiens moi aussi à saluer le travail de Mmes Dini et Meunier. Le groupe écologiste se félicite de voir aboutir l’examen de cette proposition de loi relative à la protection de l’enfant et, malgré la teneur de certains amendements adoptés, il votera en faveur de son adoption.
Tout naturellement, je m’associe aux remerciements et au recadrage de M. le président de la commission des affaires sociales.
Les amendements visant à rétablir les dispositions ayant été supprimées par l’Assemblée nationale ont été adoptés et les deux dispositions introduites sur l’initiative du Gouvernement relatives aux mineurs étrangers et au pécule constitué à partir de l’allocation de rentrée scolaire ont été supprimées : pratiquement tous les objectifs que j’avais fixés lors de mon intervention dans la discussion générale ont donc été atteints. Je ne pense pas que les prises de position de notre groupe aient abouti à dénaturer le texte. Comme l’a dit Alain Milon, nous avons œuvré en faveur de la protection de l’enfance. Le groupe Les Républicains votera la proposition de loi telle qu’elle est issue de nos travaux.
L’élaboration d’un tel texte s’apparente un peu à une naissance : lorsque l’on voit l’enfant apparaître, on oublie les douleurs de l’accouchement…
Nos désaccords ont parfois tenu à ce que l’on se trompait de texte et de cadre : il s’agissait de la deuxième lecture, au sein de la Haute Assemblée, d’une proposition de loi dont l’examen n’aurait sûrement pas atteint ce stade sans l’appui de Mme la secrétaire d’État, que je tiens à remercier encore une fois. §Depuis 2007, j’avais rarement eu l’occasion de me sentir aussi proche d’un membre du Gouvernement sur les questions relatives à la politique publique de protection de l’enfance.
Je remercie également l’ensemble de nos collègues de l’intérêt qu’ils ont manifesté pour cette proposition de loi, et plus particulièrement M. le président de la commission des affaires sociales et M. le rapporteur pour avis de la commission des lois, avec qui j’ai pu travailler dans un esprit cordial et positif.
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe CRC, du groupe écologiste, du RDSE et de l’UDI -UC.
Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix dans le texte de la commission, modifié, l’ensemble de la proposition de loi relative à la protection de l’enfant.
La proposition de loi est adoptée.
Je tiens à remercier à mon tour l’ensemble de la Haute Assemblée, en particulier les deux auteurs de la proposition de loi, dont je crois pouvoir dire qu’elles reconnaissent leur travail dans ce texte dont la discussion va se poursuivre. Muguette Dini a suivi le cheminement parlementaire de la proposition de loi, puisqu’elle a été associée au comité de pilotage de la concertation et a validé les évolutions intervenues à l’Assemblée nationale.
Je remercie les deux rapporteurs, ainsi que M. le président de la commission des affaires sociales pour sa présence utile et apaisante tout au long de l’examen de la proposition de loi.
Enfin, je souhaiterais exprimer quelques regrets.
Tout d’abord, pour bien débattre de tels sujets, il faut une représentation nationale apaisée. Or, à cet égard, le calendrier de cette semaine n’a pas été particulièrement favorable.
Je regrette ensuite que le cri d’alarme lancé par certains au nom des départements ait pu parfois couvrir ceux des enfants, des familles et des professionnels de l’aide sociale à l’enfance.
Le travail que nous avons réalisé ne doit pas être interprété comme une remise en cause ou l’expression d’une forme de suspicion à l’égard des départements. Bien au contraire, il a pour objet de faciliter et d’accompagner leur action.
Je regrette également la suppression de certaines dispositions importantes. Je pense, en particulier, à la possibilité offerte aux jeunes étrangers atteignant l’âge de dix-huit ans de terminer leur année scolaire et à la constitution du pécule pour les jeunes majeurs.
Je regrette également la disparition du conseil national de la protection de l’enfance, même si cela aura moins d’incidence sur la vie des enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance.
La concertation a permis de donner la parole à ceux que l’on entend peu et dont j’ai tenu à me faire la porte-parole, à savoir les mineurs confiés à l’aide sociale à l’enfance et leurs parents, qui eux aussi peuvent émettre des propositions utiles à l’élaboration d’une réforme importante.
Le travail n’est pas fini et j’aurai l’occasion de revenir sur les amendements dont je déplore l’adoption. Je ne désespère pas de vous convaincre !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE. – M. Olivier Cadic applaudit également.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 14 octobre 2015, à quatorze heures trente, le soir et, éventuellement, la nuit :
Trois conventions internationales examinées selon la procédure d’examen simplifié :
- Projet de loi autorisant l’approbation de l’accord relatif aux mesures du ressort de l’État du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée ;
Rapport de M. André Trillard, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 25, 2015 2016) ;
Texte de la commission (n° 26, 2015-2016).
- Projet de loi autorisant l’approbation de l’amendement à la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement, pris par décision II/1 adoptée dans le cadre de la deuxième réunion des parties à la convention ;
Rapport de M. Cédric Perrin, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 27, 2015 2016) ;
Texte de la commission (n° 28, 2015-2016).
- Projet de loi autorisant la ratification du protocole pour éliminer le commerce illicite des produits du tabac (procédure accélérée) ;
Rapport de M. Gilbert Roger, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 23, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 24, 2015-2016).
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, tendant à consolider et clarifier l’organisation de la manutention dans les ports maritimes (procédure accélérée) ;
Rapport de M. Michel Vaspart, fait au nom de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable (n° 16, 2015-2016) ;
Texte de la commission (n° 17, 2015-2016).
Deuxième lecture de la proposition de loi, adoptée avec modifications par l’Assemblée nationale en deuxième lecture, visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées ;
Rapport de Mme Michelle Meunier, fait au nom de la commission spéciale (n° 37, 2015-2016) ;
Texte de la commission spéciale (n° 38, 2015-2016).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le mercredi 14 octobre 2015, à une heure vingt-cinq.