Intervention de Jacques Blanc

Réunion du 23 juin 2009 à 15h00
Débat sur les pôles d'excellence rurale

Photo de Jacques BlancJacques Blanc :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je souhaite tout d’abord remercier et féliciter notre collègue Jean Boyer d’avoir pris l’initiative de ce débat, afin que nous fassions le point sur les pôles d’excellence rurale.

En outre, monsieur le secrétaire d’État, je suis très heureux, car je pense que vous pourrez poursuivre votre action forte au service de l’espace rural.

Comme cela a été rappelé tout à l’heure, la création des pôles d’excellence rurale a été annoncée par le gouvernement Villepin, M. Christian Estrosi étant alors ministre délégué à l’aménagement du territoire. Il s’est agi d’un véritable choix politique.

En complément des pôles de compétitivité, dispositif bien connu de notre collègue Alain Chatillon, qui fait figure de « grand maître » de ces pôles dans le secteur agroalimentaire, un geste fort en faveur de l’espace rural était attendu. Ce geste est venu : ce fut la décision de prendre en compte et de soutenir les projets innovants dans les territoires ruraux, afin de renforcer la coopération entre les partenaires et de favoriser la création d’emplois.

Un certain nombre de thèmes prioritaires ont été retenus. Je pense notamment à la promotion des richesses naturelles, culturelles et touristiques, à la valorisation et à la gestion des bio-ressources – je précise que cette décision est antérieure au Grenelle de l’environnement –, aux actions en faveur de l’offre de service et de l’accueil des nouvelles populations et au développement des productions industrielles et artisanales.

De telles initiatives ont créé un contexte nouveau et suscité plusieurs évolutions de fond. Un nombre important de territoires, prenant bien la mesure des changements, ont décidé non pas de les subir, mais au contraire d’innover, en utilisant les ressources humaines et naturelles de la vie rurale – l’agriculture en demeure l’un des piliers –, qu’il s’agisse des activités de production ou de service.

D’abord, ces zones connaissent un regain d’attractivité – elles accueillent ainsi de nouveaux résidents –, notamment par rapport aux territoires périurbains. Comme cela a été indiqué, ceux-ci avaient également besoin de continuer à exister tout en maîtrisant des mutations susceptibles de leur faire perdre leur âme.

Ensuite, de nouveaux comportements ou modes de vie apparaissent. Le découplage entre le lieu de travail et le lieu de vie ouvre des perspectives d’installation dans l’espace rural.

Enfin, l’arrivée de nouveaux résidents dans l’espace rural crée une dimension économique nouvelle.

À l’heure où le Gouvernement décidait d’agir fortement en faveur de l’enseignement supérieur et de la recherche, il était souhaitable qu’il adresse également un signe en direction des territoires ruraux.

Vous permettrez au sénateur de la Lozère, territoire rural s’il en est – ce ne sont pas nos voisins de l’Aveyron ou d’ailleurs qui me contrediront –, de souligner l’intérêt d’une telle démarche pour un département comme le nôtre.

Nous nous sommes mobilisés pour obtenir sept pôles d’excellence. D’ailleurs, leur variété montre bien les atouts divers de nos zones de montagne. Je rappelle que l’ensemble du département est classé en zone de revitalisation rurale.

Les projets ayant obtenu le label de pôle d’excellence rurale sont les suivants : « Patrimoine naturel, tourisme de découverte et de pleine nature des Gorges du Tarn et de la Jonte », « Hébergement tourisme-sport-loisir-handicap » – premier grand pôle en France et peut-être en Europe pour offrir un accès au sport et aux loisirs aux personnes handicapées –, « Valorisation des bio-ressources par la cogénération à partir de biomasse » et « Valorisation du lait des montagnes de Margeride ». À ces projets de la première génération se sont ajoutés des projets de la deuxième génération : « Télémédecine en zone rurale de montagne », « Structurer et développer le tourisme équestre en Margeride-Aubrac », « Accueil chasse et pêche en Lozère : une dynamique de territoire » – vous voyez que nous savons faire preuve d’ouverture – et « Création d’un éco-site et développement de la filière », projet porté par le syndicat départemental d’électrification et d’équipement de la Lozère, structure chargée de la collecte de l’ensemble des déchets du département et que j’ai l’honneur de présider.

La variété de ces thèmes montre bien la diversité des atouts de cet espace rural, que ces pôles d’excellence rurale ont l’ambition de développer. Appuyons-nous sur une richesse naturelle et sur les hommes pour aller plus loin et créer les chances ! Et cela n’est pas servir seulement l’espace rural !

Comme l’a souligné le Président de la République hier à Versailles, notre société a besoin d’inventer de nouvelles réponses pour le développement durable. Cela passe par un nouvel équilibre et par le maintien en activité d’espaces qui étaient menacés de désertification hier et qui apparaissent à présent comme présentant de nombreux atouts, par exemple leur production agricole ciblée de qualité bio.

Le problème d’ingénierie, qui a été soulevé par l’un de nos collègues, est un problème important dans ces zones. Il faut prendre en main son propre destin. Si nous ne l’avions pas fait dans le département de la Lozère, j’ignore où nous en serions aujourd'hui.

Par chance, en 1993, sous le gouvernement Balladur, un comité interministériel a consacré la vocation d’action sanitaire et sociale de la Lozère, vocation qui s’est concrétisée dans un autre pôle d’excellence rurale. Ensuite, nous avons eu le plan Delevoye, qui a permis de financer des opérations d’aménagement. M. de Villepin est également venu pour consacrer de telles perspectives.

Nous avons bien pris conscience que notre sort dépendait de notre capacité. Il s’agit non pas de demander aux autres d’inventer les atouts de notre développement, mais de nous projeter nous-mêmes dans l’avenir, en imaginant de nouveaux modèles de développement rural.

Pour cela, nous avons besoin de soutien. Comment voulez-vous qu’un département comme la Lozère puisse apporter les financements nécessaires sur la seule base de sa fiscalité locale ? En l’occurrence, il s’agit d’investissements porteurs d’avenir, et non de quelconques dispositifs d’assistanat.

Monsieur le secrétaire d’État, vous êtes venu nous voir, et nous avons apprécié votre visite. J’ignore si l’espace Causses-Cévennes sera classé cette semaine au patrimoine mondial de l’UNESCO, mais je l’espère. Nous nous sommes mobilisés pour cela et nous avons contribué à promouvoir l’idée de l’agro-pastoralisme à valeur universelle de référence. Je ne sais pas si nous obtiendrons gain de cause, mais je sais combien vous nous avez soutenus.

Peut-être est-il important d’envisager des projets de troisième génération. Ainsi, nous pourrions consacrer certaines réussites de pôles d’excellence existants ou développer des perspectives nouvelles sur des thèmes nouveaux. Je pense notamment au développement durable avec sa triple dimension, sociale, économique et environnementale. Je pense également au thermalisme de santé, du bien-être, et à la mise en valeur d’espaces à protéger pour une cohérence territoriale avec des démarches d’écotourisme. Je pense enfin aux installations d’entreprise en milieu rural qui déploient des activités de service à haute valeur ajoutée ou aux projets d’accueil de nouvelles populations, par exemple les populations handicapées.

C’est donc un vaste chantier qui est encore devant nous. Nous avons franchi des étapes. Notre collègue Jean Boyer proposait des mesures pour éviter que des retards ne soient pénalisés. Je précise d’ailleurs que ces retards sont le plus souvent indépendants de la volonté des porteurs de projets. Il arrive que l’État nous incite à utiliser les crédits alloués avant la fin d’une année civile tout en bloquant la mise en œuvre des actions programmées ! Veillons donc à ne pas pénaliser les porteurs de ces projets.

Monsieur le secrétaire d’État, à l’aube d’une ère nouvelle dont vous serez, j’en suis certain, un acteur important, il est, me semble-t-il, important que notre pays consacre un aménagement du territoire équilibré. Je vous rappelle que le traité de Lisbonne érige la cohésion territoriale au rang d’objectif de l’Union européenne.

Il est nécessaire de maintenir les mesures prises dans les zones de revitalisation rurale, en particulier l’exonération des charges sociales pour des activités au service des hommes. C’est un dossier capital pour l’avenir de ces zones rurales.

Je compte sur vous, monsieur le secrétaire d’État. Je sais que vous pourrez continuer à agir demain au service de cette ambition : l’équilibre entre les grandes métropoles et l’espace rural dans notre pays. C’est une réponse indispensable aux besoins qu’ont les hommes de se réconcilier avec eux-mêmes et de se retrouver dans un environnement protégé.

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