Intervention de Cyril Pellevat

Réunion du 21 octobre 2015 à 14h30
Protection des sportifs de haut niveau et professionnels — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Photo de Cyril PellevatCyril Pellevat :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, grâce à ses valeurs éducatives bien connues et à ses multiples autres bienfaits, le sport apporte énormément à notre société. Pratiqué à haut niveau, il participe au rayonnement de notre pays à l’international. Nous devons donc choyer nos sportifs de haut niveau et professionnels. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui va dans ce sens.

Ces hommes et ces femmes consacrent une part de leur vie à la performance sportive. Être un sportif de haut niveau constitue un métier à temps plein. Pour autant, ce n’est pas toujours un métier qui permet véritablement de vivre. Ni salariés ni travailleurs indépendants, la majorité des sportifs connaissent une précarité sociale. À titre d’exemple, ils ne sont pas couverts si un accident survient à l’occasion de la pratique de leur sport. Un accident peut pourtant mettre un terme prématuré à leur carrière. Pensons également au cas de la maternité.

Cette proposition de loi, qui comble un vide juridique, vise à les protéger et à sécuriser leur situation juridique et sociale. Elle est inspirée des préconisations du rapport que Jean-Pierre Karaquillo vous a remis, monsieur le secrétaire d’État, au mois de février dernier. Ce rapport a mis en évidence non seulement l’incertitude de rattachement juridique de certains sportifs, la précarité de leur statut, mais également leur insuffisante préparation à la reconversion en fin de carrière.

L’article 1er du texte nous permet tout d’abord d’exprimer notre reconnaissance envers les sportifs de haut niveau. C’est assez rare pour être souligné. En effet, il est indéniable que « les sportifs, entraîneurs, arbitres et juges sportifs de haut niveau concourent, par leur activité, au rayonnement de la nation et à la promotion des valeurs du sport ». Ils sont la vitrine de la France à l’international.

Sur le fond, la proposition de loi met en œuvre une protection sociale pour les sportifs de haut niveau, dont la charge serait partagée entre l’État et les fédérations ; elle prévoit ainsi une couverture minimale des accidents du travail et des maladies professionnelles par l’État et, en complément, l’obligation pour les fédérations de contracter des assurances privées pour couvrir les dommages corporels résultant de la pratique sportive.

En outre, les sportives de haut niveau enceintes pourront conserver le bénéfice de leurs droits pendant un an à compter de la constatation médicale de la grossesse.

Le coût de la couverture des sportifs de haut niveau non salariés a été évalué par M. Karaquillo dans son rapport à 4, 3 millions d’euros par an, pris sur le budget des sports, et à 3, 5 millions d’euros au minimum, selon vous, monsieur le secrétaire d’État.

J’en viens à l’un des points les plus importants de cette proposition de loi : la création d’un contrat de travail pour les sportifs et les entraîneurs professionnels.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, dans le monde sportif, les joueurs sont mieux protégés par le contrat à durée déterminée. Les motifs de rupture anticipée sont limités. À l’inverse, avec un CDI, les joueurs et les entraîneurs pourraient démissionner à tout moment, au risque de désorganiser l’équipe et de compromettre les résultats. Ils empêcheraient également les transferts rémunérés de joueurs et la hausse générale des rémunérations, menaçant la pérennité des petits clubs, alors que la majorité des clubs étrangers recourent classiquement au CDD.

Ce risque de déstabilisation des relations contractuelles a justifié jusqu’à récemment le recours au contrat à durée déterminée dit « d’usage », reconnu par le Conseil constitutionnel comme « usage inhérent à la nature du sport professionnel », mais la Cour de cassation a récemment remis en cause ce type de contrat en refusant son caractère impératif. Aussi l’article 9 de la proposition de loi vient-il sécuriser la situation en créant un contrat à durée déterminée spécifique.

Le texte issu de l’Assemblée nationale prévoyait que la durée de ce contrat ne pouvait être inférieure à douze mois, sauf pour le remplacement de joueurs absents. Une période contractuelle de douze mois est évidemment peu judicieuse, car elle ne correspond pas à une saison sportive. Une durée minimale de neuf mois me paraissait plus adaptée, mais la proposition de M. le rapporteur de lier la durée du CDD des sportifs et des entraîneurs professionnels à la saison sportive, dont les dates varient en fonction des disciplines, est meilleure. Afin de limiter la précarité de l’emploi, tout contrat de travail signé au cours d’une saison sportive doit courir au minimum jusqu’au terme de cette dernière. Je souhaite d’ailleurs remercier particulièrement Michel Savin de la qualité de ses travaux.

La proposition de loi sécurise également le statut des sportifs indépendants en les protégeant de la qualification inadéquate qu’avaient retenue le Conseil d’État et la Cour de cassation en leur appliquant la « présomption de salariat des artistes du spectacle ».

Par ailleurs, le texte prévoit des dispositions visant à accroître l’insertion professionnelle des sportifs, que nous ne pouvons qu’approuver. Des appuis sont ainsi fournis aux sportifs, qu’ils soient de haut niveau ou des professionnels salariés, afin de leur permettre de préparer efficacement la seconde partie de leur carrière.

Je salue également la reconnaissance dans le texte du Comité paralympique et sportif français, afin de lui permettre d’être officiellement reconnu par l’International Paralympic Committee, l’IPC, comme le seul représentant du mouvement paralympique français.

Avant de conclure mon propos, et avant de présenter mes amendements tout à l’heure, je tiens à dire que je trouve dommage que le texte ne prévoie aucune disposition sur la participation à l’équipe de France et qu’il ne fasse nullement référence aux pôles Espoir, aux pôles France et aux centres de formation.

Mes chers collègues, force est de constater que cette proposition de loi socialiste est extrêmement consensuelle puisqu’elle a été adoptée à l’unanimité à la fois par nos collègues députés et par la commission de la culture du Sénat. Face à un tel consensus, nous aurions peut-être pu aller un peu plus loin au moment où notre pays s’apprête à accueillir l’Euro 2016. Les liens entre la jeunesse française et le sport, entre santé publique et sport, la médiatisation du sport, et bien d’autres sujets encore, restent à aborder.

J’espère, monsieur le secrétaire d’État, que ce texte ne sera pas le seul consacré au sport d’ici à 2017.

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