Intervention de Catherine Deroche

Commission spéciale croissance, activité et égalité des chances économiques — Réunion du 25 mars 2015 à 15h30
Suite de l'examen du rapport et du texte de la commission spéciale

Photo de Catherine DerocheCatherine Deroche, rapporteure :

Reprenant la plupart des propositions du rapport du Conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat salarié (Copiesas) du 26 novembre 2014, le projet de loi poursuit quatre objectifs principaux.

Le premier objectif vise à simplifier et à harmoniser les règles relatives à la participation, à l'intéressement et aux plans d'épargne salariaux. Les règles de conclusion d'un plan d'épargne pour la retraite collectif (Perco) seront alignées sur celles applicables aux accords de participation ; tous les salariés disposant de ce plan pourront lui transférer l'équivalent monétaire de dix jours de congés non pris, qu'ils bénéficient ou non d'un compte épargne-temps.

Ensuite, le texte encourage le développement des dispositifs d'épargne salariale. Le forfait social passera de 20 % à 8 % pendant six ans dans les entreprises de moins de cinquante salariés mettant en place volontairement et pour la première fois un accord de participation ou d'intéressement. Les conditions d'attribution des actions gratuites sont assouplies, tandis que leur cadre fiscal et social est allégé. Afin de renforcer l'attractivité du Perco, le texte supprime la contribution sur les abondements des employeurs dépassant 2 300 euros par an et par bénéficiaire, et autorise des versements unilatéraux périodiques de l'entreprise. Les branches professionnelles devront en outre négocier avant fin 2017 des accords de participation, qui seront directement applicables dans les entreprises qui le souhaitent.

Le troisième objectif concerne le renforcement de la transparence et de l'information sur ces dispositifs. Le Copiesas devra désormais être saisi pour avis de tout projet de loi ou d'ordonnance relatif au déblocage de l'épargne salariale. Le livret d'épargne salariale sera recentré sur les dispositifs effectivement mis en place dans l'entreprise, et tout salarié qui quittera son entreprise sera systématiquement informé des frais financiers qui s'appliquent sur ses comptes d'épargne salariale.

Enfin, le texte vise à mieux orienter l'épargne salariale vers le financement de l'économie. C'est la philosophie du nouveau Perco, ou « Perco plus », qui devra comporter au moins 7 % de titres dans des fonds qui financent le développement des PME et des entreprises de taille intermédiaire. En contrepartie, le taux du forfait social est abaissé à 16 %.

Ni les membres du Copiesas ni les partenaires sociaux ne souhaitent réformer de fond en comble l'épargne salariale, après des années d'instabilité législative. Le principal point d'achoppement avec le Gouvernement concerne le forfait social, qui s'applique à tous les dispositifs d'épargne salariale, et dont le taux est passé progressivement de 2 % lors de sa création en 2009 à 8 % au 1er janvier 2012, puis brutalement à 20 % depuis le 1er août de la même année. Le rendement de cette contribution est considérable : 4,6 milliards d'euros en 2013, dont 80 % bénéficient à la Caisse nationale d'assurance vieillesse, le reliquat étant versé au Fonds de solidarité vieillesse. Le ministre de l'économie, lors de son audition devant notre commission, a estimé que le coût de la présente réforme oscillerait entre 60 et 80 millions d'euros par an, essentiellement en raison des baisses ciblées du forfait social. Le meilleur moyen d'encourager l'épargne salariale serait d'abaisser son taux, mais les conséquences pour les finances publiques seraient majeures.

Conservant les grands équilibres de la réforme, et inscrits dans la continuité des propositions du Copiesas, mes amendements visent essentiellement à développer l'épargne salariale dans les entreprises employant moins de cinquante salariés, pour un coût acceptable pour nos finances.

D'autres mesures sont également destinées à améliorer le financement des entreprises, en particulier des PME, comme la création de la société de libre partenariat, un nouveau véhicule de capital risque destiné à attirer les investisseurs institutionnels étrangers. Il faut également relever que l'article 35 bis assouplit à la marge les réductions d'impôt ISF-PME et « Madelin » en réduisant de dix ans à sept ans de la condition de non-remboursement des apports.

J'observe que ces dispositifs fiscaux, dont l'objet de favoriser le renforcement des capitaux propres des PME, ont suscité le dépôt d'un certain nombre d'amendements sur lesquels la commission se prononcera tout à l'heure. Je crois qu'il y a effectivement des mesures à prendre pour améliorer ces dispositifs qui offrent un levier puissant pour le développement des jeunes PME en croissance. Cependant, pour établir l'avis que je vous proposerai sur ces amendements, j'ai souhaité retenir trois critères.

Premièrement, les conséquences budgétaires : le Gouvernement n'a malheureusement pas dégagé dans la dernière loi de finances les économies qui auraient rendu possibles des gestes fiscaux d'envergure en faveur de la relance de l'activité économique et du développement des entreprises. Le texte actuel n'est pas le véhicule approprié pour y remédier, dans la mesure où il ne peut conjuguer réduction des dépenses et réduction des impôts.

Deuxièmement, les conséquences économiques : il importe de conserver l'attractivité des dispositifs destinés à encourager la prise de risque que représente l'investissement dans de jeunes PME. Exonérer tous les investissements sans distinguer ceux orientés vers les PME assècherait une source de financement importante pour les PME, au bénéfice des grandes entreprises qui se financent actuellement à bon compte.

Troisièmement, la dimension européenne : le dispositif ISF-PME entre dans le champ des aides d'État dont la Commission européenne vérifie la conformité au droit européen. Or le dispositif français doit être refondu, car il est insuffisamment ciblé sur les jeunes PME en croissance. La France est très en retard sur ce point et des discussions sont actuellement en cours avec Bruxelles. Nous aurons l'occasion, sans doute dès la prochaine loi de finances initiale, d'engager un débat global sur la refonte du dispositif « ISF-PME ».

Compte tenu de ces contraintes, je proposerai dans la plupart des cas aux auteurs d'amendements de se rallier à ceux que j'ai déposés sur ces deux dispositifs fiscaux.

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