Intervention de Chantal Jouanno

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 8 octobre 2015 : 1ère réunion
Femmes et lutte contre le changement climatique — La délégation aux droits des femmes et la cop 21 : bilan de la table ronde du jeudi 25 juin 2015

Photo de Chantal JouannoChantal Jouanno, présidente :

Nous en venons maintenant au deuxième point de notre ordre du jour : l'examen de la synthèse de la table ronde du 25 juin 2015 sur les femmes et la lutte contre le changement climatique.

Vous avez reçu le procès-verbal de cette réunion, à laquelle ont été associés, je le rappelle, aux côtés de notre délégation, nos collègues du groupe de travail du Sénat sur le suivi des négociations climatiques internationales, Catherine Coutelle, présidente de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale, ainsi que Danielle Bousquet, présidente du Haut conseil à l'égalité entre les femmes et les hommes (HCE|fh). Quant aux spécialistes auditionnées le 25 juin, elles représentaient le Comité ONU Femmes-France, l'UNESCO, l'OCDE, qui effectue un suivi du financement de l'aide au développement, et plus particulièrement des financements alloués à la promotion de l'égalité, ainsi que deux associations : Women in Europe for a better future (WECF), très impliquée dans le domaine de la lutte contre le changement climatique sous l'angle des femmes, et OXFAM France, davantage spécialisée dans la sécurité alimentaire.

Le constat établi par ces intervenantes se résume de la manière suivante.

Tout d'abord, les femmes sont les premières victimes du dérèglement climatique. Certes, celui-ci affecte tant les hommes que les femmes, mais ses conséquences sont plus marquées pour les femmes, qui représentent une proportion très importante des personnes les plus démunies. Or ce sont justement les personnes les plus vulnérables qui subissent de plein fouet les effets des changements climatiques : accès perturbé à l'eau, à l'énergie, aux ressources alimentaires...

L'exclusion que subissent les femmes dans de nombreuses sociétés du fait de leur pauvreté et de leur faible niveau d'instruction aggrave donc, et ce constat est extrêmement répandu, les effets économiques et sociaux des changements climatiques.

Je voudrais vous citer quelques chiffres significatifs :

- 70 % des personnes dans le monde subsistant avec moins de un dollar par jour sont des femmes ;

- les femmes possèdent moins de 1 % des ressources du monde et moins de 2 % des terres ;

- moins de 5 % des prêts bancaires dans le monde sont attribués à des femmes.

L'exemple le plus connu peut-être des conséquences négatives en chaîne, pour les filles et les femmes, du dérèglement climatique, concerne l'eau. Les changements climatiques rendent le ravitaillement en eau, qui incombe aux femmes, plus difficile. Les épisodes de sécheresse qui se multiplient obligent les femmes à parcourir chaque jour des distances de plus en plus longues et la corvée d'eau leur prend de plus en plus de temps. Ce phénomène a, entre autres conséquences, pour effet la déscolarisation des petites filles qui sont mises à contribution pour participer à ces corvées. Ainsi se trouve aggravée la spirale de l'exclusion et de la pauvreté des femmes.

Pourtant, les femmes ont aussi un grand rôle à jouer dans la lutte contre le dérèglement climatique. Elles ne doivent pas être considérées uniquement comme des victimes : les nombreuses compétences qu'elles possèdent, notamment en raison de leur contribution aux activités économiques, et les responsabilités familiales qui leur incombent, en font aussi des actrices toutes désignées de la lutte contre les changements climatiques.

Par exemple, leurs compétences dans le domaine agricole doivent être mieux connues et les faire considérer comme des atouts pour le développement durable. Elles ont en effet une très bonne connaissance de la terre et de leur environnement. Il ne faut pas oublier qu'elles représentent entre 45 et 80 % des petits agriculteurs dans le monde. Certains produits agricoles seraient d'ailleurs produits à 90 % par des femmes. Pourtant, elles ne possèdent que très peu de terres, sont exclues des technologies, des marchés et du crédit et le rendement des terres qu'elles exploitent est, pour cette raison, inférieur de 30 à 40 % à celui des terres cultivées par les hommes.

Selon une estimation faite par L'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), si les agricultrices avaient accès aux mêmes ressources (terres, crédit, technologie, instruction...) que les hommes, elles pourraient augmenter leur production dans une proportion telle que la diminution du nombre de personnes souffrant de la faim dans le monde pourrait être comprise entre 100 et 150 millions.

Je n'en dis pas plus sur l'importance des femmes dans la lutte contre les changements climatiques, car vous avez reçu avant cette réunion la synthèse des travaux de la table ronde que je vous ai présentée.

Abordons maintenant, avant de procéder à notre débat, les neuf recommandations que je vous propose d'adopter en conclusion de ce rapport. Certaines de ces recommandations concernent l'aide au développement, d'autres ont pour objet plus spécifiquement la lutte contre les changements climatiques et la COP 21.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion