« L’enfer est pavé de bonnes intentions » dit-on fréquemment. Cette expression se justifie à l’issue de l’examen du présent projet de loi.
On s’en souvient, la stratégie de Lisbonne vise à développer ce que l’on a nommé « l’économie de la connaissance », sorte de plus-value permanente et immatérielle dont l’Europe est en mesure de faire usage pour continuer à jouer, dans le monde, le rôle qui est le sien.
La directive dont nous devions transposer les termes, les principes et les attendus participe en apparence à cet objectif, en prévoyant un degré supplémentaire dans la diffusion large et publique des productions de l’esprit, de la culture et de l’art des pays membres de l’Union européenne. Néanmoins, une telle démarche nécessite que soient pris en compte deux éléments majeurs de la construction européenne.
Le premier élément concerne l’évolution de la fiscalité, notamment le développement d’une forme de fiscalité de l’internet plutôt bienvenue et qui tend à entamer les véritables rentes de situation que certains des opérateurs de la cyberéconomie se sont constituées.
Le second élément, tout aussi essentiel, est la règle imposée aux pays membres de la zone euro en matière budgétaire qui vise à réduire la dépense publique et à solliciter de plus en plus l’usager pour le financement du service public.
Fiscalité de l’internet et réduction de la dépense publique ont produit deux avatars, si je puis dire : le principe de l’exclusivité, véritable transposition des partenariats public-privé au domaine des productions intellectuelles, et celui de la redevance, ce « faute de mieux » que l’on mobilise lorsque les dotations budgétaires des universités diminuent, avec une autonomie financière croissante laissant nombre d’établissements endettés aux prises avec le dialogue bancaire.
Nous pourrions pourtant faire autrement. En finançant la numérisation des fonds d’archives, de documentation et autres, et en prévoyant des dotations budgétaires plus importantes, on permettrait une stricte application du principe de gratuité, qui a pourtant tout son sens dans le projet de loi aujourd’hui débattu.
Selon nous, le compte n’y est pas. C’est la raison pour laquelle nous ne voterons pas en faveur de ce texte.