C’est ainsi que, en Alsace, nous avons pris en 2014 une initiative originale : une « charte régionalisée », rédigée par l’association Culture et bilinguisme d’Alsace-Moselle, est proposée à toutes les collectivités locales. Elle reprend la Charte européenne, mais en supprimant tout ce qui concerne l’État. Les collectivités locales sont invitées à choisir 35 des engagements énumérés. Le conseil régional, les deux départements, ainsi que de nombreuses communes, ont d’ores et déjà adhéré à cette charte régionalisée.
J’en viens au deuxième constat. En ce qui concerne les langues régionales proprement dites, la révision de la Constitution qui est proposée est dépourvue de toute portée juridique et pratique, à tel point que le Comité fédéral pour la langue et la culture régionales en Alsace et en Moselle propose aux parlementaires d’amender le texte gouvernemental en ajoutant la phrase suivante : « La République encourage l’usage des langues régionales de France et ne s’oppose pas à leur utilisation à titre complémentaire par les services publics. »
Le troisième constat est aussi le plus grave : ce projet de loi prévoit d’inscrire dans la Constitution la déclaration interprétative de 1999. Selon l’éminent juriste, ancien président du tribunal administratif, qui préside l’association Culture et bilinguisme, René Schickele Gesellschaft, le résultat « risque tout simplement d’être catastrophique. En effet, cette déclaration interprétative comporte un ensemble de réserves et de restrictions quant aux mesures de soutien aux langues régionales. En les ancrant dans la Constitution, elles feront obstacle à ce que les langues régionales puissent accéder à un véritable statut protecteur ».
Je fais mienne cette analyse juridique et, par conséquent, je voterai contre un projet de loi qui prend pour des naïfs les régionalistes authentiques, dont je suis.