Intervention de Philippe Bas

Réunion du 27 octobre 2015 à 14h45
Charte européenne des langues régionales ou minoritaires — Question préalable

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Je n’abuserai pas de mon temps de parole, monsieur le président.

Le débat que nous venons d’avoir a été, pour moi, riche d’enseignements. Il confirme totalement l’engagement que nous avons tous, nous sénateurs de la République, de sauver, défendre et promouvoir les langues régionales. Et c’est heureux, car ces langues ne menacent nullement ni l’unité de la République ni la langue française.

En revanche, tel n’est pas le cas de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Pour répondre à certains de nos collègues, je dirai que l’on ne peut mettre sur le même plan les opinions, aussi stimulantes soient-elles, d’universitaires, qui peuvent venir utilement enrichir le débat juridique et donner lieu à des articles de doctrine, lesquels peuvent être ensuite contredits par d’autres universitaires, et des décisions ou des avis rendus par nos institutions, telles que le Conseil constitutionnel ou le Conseil d’État, que notre Constitution charge de dire le droit. Il y a, d’un côté, les opinions et, de l’autre, du droit. Et nous vivons, fort heureusement, dans un État de droit.

Le débat constitutionnel est tranché, et ce depuis 1999. Que ceux qui s’étonnent de l’absence de ratification depuis la signature de la Charte par le gouvernement Jospin veuillent bien comprendre que, du fait de la décision du Conseil constitutionnel – c’est non pas une opinion, mais le droit ! –, il n’était pas possible de soumettre un projet de loi de ratification au Parlement. La procédure engagée par le Président de la République ne permet pas davantage de faire échec aux prescriptions de notre Constitution, pas plus qu’elle ne permettrait d’honorer la signature de la France si nous devions, sur ce fondement, accepter la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Permettez-moi de rappeler en quoi cette ratification serait contraire à la Constitution.

Il s’agit – ce sont les termes mêmes du projet de loi constitutionnelle ! – d’autoriser par la Constitution directement la ratification de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, complétée – c’est le verbe employé – par la déclaration interprétative annoncée lors de la signature de celle-ci, voilà maintenant plus de quinze ans.

La déclaration interprétative n’a pas de valeur constitutionnelle, même si la Constitution y fait référence : elle peut être elle-même complétée, réduite, étendue ou modifiée.

Qui plus est, cette déclaration a deux défauts, qui sont, à mon avis, dirimants.

Tout d’abord, elle est incomplète, et pour cause ! Rédigée un mois avant la décision du Conseil constitutionnel, elle n’a pas pris en compte tous les obstacles que ce dernier a relevés.

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