Intervention de Christian Cambon

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 7 octobre 2015 à 9h38
Approbation de l'accord relatif aux mesures du ressort de l'etat du port visant à prévenir contrecarrer et éliminer la pêche illicite non déclarée et non réglementée — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Christian CambonChristian Cambon, rapporteur :

en remplacement de M. André Trillard, rapporteur. - Monsieur le Président, Mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord relatif aux mesures du ressort de l'Etat du port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée. La pêche illicite, non déclarée et non réglementée, dite pêche INN, est un véritable fléau causant des pertes comprises entre 10 milliards d'USD et 23 milliards d'USD par an (entre 9 milliards d'euros et 20,5 milliards d'euros environ) à l'échelle mondiale, selon une étude de 2009, citée par la FAO, l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture.

Elle peut prendre diverses formes : pêche non autorisée dans les eaux sous juridiction nationale, dans des zones couvertes par des organisations régionales de gestion des pêches (ORGP) ou dans des zones protégées, captures d'individus trop jeunes ou d'espèces protégées, utilisation d'engins de pêche prohibés, non-déclaration des prises etc.

Elle compromet les actions entreprises en faveur d'une pêche responsable et constitue une menace pour la gestion et l'exploitation durable des ressources halieutiques, entraînant l'épuisement des stocks de poisson et la détérioration des écosystèmes. Elle a aussi pour effet d'augmenter la malnutrition, de réduire les revenus des communautés vivant de la pêche artisanale, et indirectement le développement des pays concernés. Enfin, elle se déroule le plus souvent dans des conditions de travail déplorables, voire d'esclavage et sans grande considération pour la sécurité en mer.

En mars 2007, en réponse à une demande de la communauté internationale, le Comité des pêches de la FAO a décidé l'élaboration d'un instrument international juridiquement contraignant sur la base du Plan d'action international visant à prévenir, à contrecarrer et à éliminer la pêche INN et du Dispositif type relatif aux mesures du ressort de l'Etat du port dans le contexte de la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée adoptés par la FAO. Ces instruments facultatifs préconisent l'application des mesures de l'Etat du port qui sont rapidement apparues comme un outil déterminant dans la lutte contre la pêche INN.

L'accord que nous examinons aujourd'hui a fait l'objet de la Résolution 12/2009, adoptée par la Conférence des Parties, en novembre 2009. Il prévoit l'application d'une norme mondiale minimale, sur le fondement de laquelle les Parties peuvent interdire l'entrée dans leur port et l'accès aux services de celui-ci, aux navires ne battant pas leur pavillon, et se livrant à des activités de pêche INN, à l'exception des « navires d'un Etat voisin se livrant à une pêche artisanale de subsistance, à condition que l'Etat du port et l'Etat du pavillon coopèrent pour faire en sorte que les navires » ainsi que des « navires porte-conteneurs qui ne transportent pas de poisson ou s'ils en transportent, seulement du poisson qui a été débarqué auparavant », sous réserve de l'absence de suspicion. Déclinons maintenant ces mesures.

Tout d'abord, l'autorisation ou le refus d'entrée dans le port.

Les Parties désignent les ports dans lesquels les navires peuvent entrer et en communiquent la liste à la FAO qui en assure la publicité. L'autorisation d'entrée dans le port est subordonnée à la transmission préalable d'informations précises. En cas de preuves avérées de pêche INN, les Parties ont l'obligation d'interdire l'accès à leur port. À titre dérogatoire, elles peuvent laisser entrer le navire dans le seul but de l'inspecter et de prendre « d'autres mesures appropriées conformes au droit international et au moins aussi efficaces ».

Deuxièmement, le refus de l'utilisation des ports.

Une Partie a le droit de refuser l'utilisation de son port pour le débarquement, le transbordement, le conditionnement et la transformation du poisson, ainsi que l'approvisionnement en carburant, l'avitaillement, l'entretien et la mise en cale sèche par exemple, à un navire auquel elle a accordé préalablement une autorisation d'accès, si elle constate que celui-ci ne dispose pas d'autorisation valide ou si le poisson à bord a une origine illicite ou encore en cas de fortes suspicions.

En dernier lieu, les inspections et actions de suivi.

Les Parties sont tenues d'effectuer un nombre annuel d'inspections suffisant pour atteindre l'objectif de l'accord. Elles sont invitées à s'accorder sur des niveaux minimaux d'inspection, par l'intermédiaire notamment des organisations régionales de gestion des pêches ou de la FAO.

L'accord fixe le contenu minimal de la formation des inspecteurs, de la procédure d'inspection ainsi que du rapport d'inspection.

La mise en place d'un système électronique, coordonné de préférence par la FAO, permettant l'échange électronique direct d'informations et répondant à des critères précis est encouragée.

Les mesures de l'Etat du port font l'objet d'une publicité auprès du navire, de l'Etat du pavillon du navire, ainsi que dans la mesure du possible, des Etats côtiers, des organisations régionales de gestion des pêches et autres organisations internationales concernés.

Après avoir rappelé les obligations de l'Etat du pavillon à l'égard de ses navires, cet instrument accorde une considération particulière aux besoins spécifiques des Etats en développement, qui se traduit par la fourniture d'une assistance technique et financière, soit directement, soit par l'intermédiaire de la FAO, d'autres institutions spécialisées des Nations unies ou d'autres organisations ou organes internationaux appropriés. Un groupe de travail ad hoc est constitué en vue de l'élaboration de ces mécanismes de financement.

Après un examen attentif, je recommande l'adoption de ce projet de loi qui représente une avancée juridique importante et attendue dans la lutte contre la pêche INN, puisque cet accord n'est toujours pas entré en vigueur faute d'un nombre suffisant de ratifications. Je précise que son application ne posera pas de problème, dans la mesure où un règlement communautaire, d'un niveau d'exigence au moins équivalent et poursuivant le même objectif, s'applique déjà sur notre territoire depuis 2010 et que le code rural et de la pêche maritime prévoit déjà un dispositif de contrôle assorti de sanctions dans les ports.

L'examen en séance publique est fixé au mercredi 14 octobre 2015. La Conférence des Présidents a proposé son examen en procédure simplifiée.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte le rapport ainsi que le projet de loi précité.

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