Voilà quarante ans que nous plaidons pour une réforme des bases locatives, mais on ne la fait pas, parce que c'est difficile. Voilà vingt-cinq ans que nous voulons réformer les impôts locaux, au bénéfice de nos concitoyens, mais on ne le fait pas, parce que c'est difficile. De la même manière, nous faisons le constat unanime que la DGF est devenue injuste, et qu'il faut la réformer, et nous ne le ferions pas, parce que c'est difficile ?
Sur les finances des collectivités territoriales, nous faisons tous le même constat. Il existe des injustices flagrantes. Dans mon département, certaines communes ont un potentiel fiscal par habitant de plus de 3 000 euros, lié à la construction de centrales nucléaires, tandis que celui de petites villes supportant des charges de centralité et qui comptent une part importante de logement social ne dépasse pas 600 à 650 euros. Pouvons-nous continuer ainsi ?
Beaucoup de collectivités territoriales connaissent des difficultés financières. Et cela ne date pas d'hier ; déjà, il y a quelques années, une quinzaine de départements étaient à la limite du dépôt de bilan. Certaines communes investissent beaucoup, construisent du logement social, et leurs efforts ne sont pas reconnus par l'État. C'est de ces constats qu'est née la volonté de réformer la DGF.
Je partage certaines des observations qui ont été faites, mais il n'est pas juste de dire que la réforme ne simplifie pas. Voyez la DGF actuelle : personne n'est capable de s'y retrouver. Reconnaissons que cette réforme, en dépit de son caractère technique, rend les choses plus claires : une dotation de base, une dotation de centralité, qui répond à une demande générale, une dotation de ruralité. Ce n'est pas si complexe à comprendre. L'enveloppe est réaménagée pour tenir compte de l'intégration dans des intercommunalités, de la nouvelle réalité des villes mais aussi des campagnes. Plus de 80 % des communes rurales gagnent à cette réforme.
Il est vrai que les villes à l'intérieur des agglomérations intégrées y perdent, comme le soulignait Marie-France Beaufils, et c'est un vrai sujet. Il est également vrai que cette réforme intervient à un moment où le paysage intercommunal évolue et où la contribution au redressement des finances publiques pèse lourd : pour certaines communes, ce sera la double peine. Cela est difficile à accepter. Et là où les intercommunalités évoluent, les charges sont telles qu'elles ne s'en sortent pas.
On ne remédiera à rien en bricolant : il faut une cohérence d'ensemble. D'où le sentiment de mon groupe, qui juge que l'on ne peut souscrire à cette réforme en l'état. Nous manquons de simulations, et nous avons besoin d'aller plus au fond, pour nous forger des certitudes. Mais nous ne voudrions pas que par facilité électoraliste, certains refusent cette réforme tout de go en disant qu'ils en veulent une autre. Tenir un tel discours au congrès des maires en novembre prochain tout en vantant dans son département, comme je le vois faire par certains députés, les avantages que tireront les communes rurales de la réforme serait bien léger. Il faut être cohérent !
Ce n'est pas le moment de réformer, objectent certains : mais ce ne l'est jamais ! Pour nous, si mettre cette réforme en oeuvre dès 2016 peut poser plus de problèmes qu'apporter d'avantages, nous entendons aborder ce projet de nouvelle architecture de façon positive. Nous partageons tous ce constat que les injustices de la DGF sont flagrantes et que l'on doit y réintroduire de l'égalité : il faut aller de l'avant.
On ne peut contester le fait que certaines communes sont riches, mais jamais on ne verra un maire le reconnaître. La commission des finances doit assumer le fait qu'il existe des communes riches, voire très riches, et des communes pauvres, voire très pauvres. Nous devons être capables de faire évoluer cette réforme. S'il serait sans doute prématuré de la mettre en place en 2016, il faut avancer. Jean-Claude Boulard a évoqué l'amendement que le Gouvernement entend déposer à l'Assemblée nationale. Mais il ne l'a pas encore fait, et nous ne travaillons, ici, que sur des conjectures. À ma connaissance, il n'y a pas de texte débattu pour le moment au Parlement. À nous de faire évoluer les choses, en ne perdant pas de vue l'objectif d'équité qui doit nous guider.