Thierry Foucaud et moi-même avons à coeur de mieux comprendre le fonctionnement de l'éducation nationale, même si nous n'en tirons pas les mêmes conclusions.
Je remercie le rapporteur général pour son soutien à mes amendements.
Jean-Claude Carle estime que la France est le pays le plus inégalitaire. Le problème de l'égalité est philosophique : beaucoup de parents ont des enfants pour qu'ils prolongent en mieux ce qu'ils sont. Il est logique que les parents responsables s'impliquent et il ne faut pas nous priver de leur bonne volonté. En revanche, nous devons sans doute nous substituer à ceux qui sont indifférents. La classe unique permettait aux enseignants de suivre les enfants. Ceux-ci passent désormais d'une classe à l'autre en changeant de professeurs. C'est un facteur de faiblesse car ils ne connaissent pas assez leurs élèves.
Je suis d'accord avec Jean-Claude Carle sur les apprentissages des fondamentaux, notamment de la lecture. Les nouveaux rythmes scolaires sont une charge pour les collectivités locales, charge qui n'est pas compensée et qui n'avait été demandée par personne.
Roger Karoutchi a parlé de la dispersion du secondaire : il faut accepter la diversité de notre pays, qu'elle soit démographique, géographique ou historique. Les régions industrielles ont de nombreux lycées professionnels qui sont l'héritage des centres d'enseignement technique lancés par les industriels et repris par l'éducation nationale. Nous allons vers l'unité, mais elle supposerait l'internat. Hélas, cette excellente solution fait l'objet du rejet des mères, qui ne sont d'ailleurs plus des mères mais des « mamans » comme des pères, qui sont devenus des « papas », qui ont peur de perdre leurs enfants. Je trouve cela navrant, mais il s'agit d'un fait de société contre lequel nous ne pouvons rien.
Je remercie Vincent Delahaye pour la précision de ses questions : il s'agit en effet d'un budget de statu quo. En revanche, nous disposons des tableaux récapitulatifs demandés : nous pourrons vous les communiquer. Les régions n'évoluent pas de la même façon et leur sociologie n'est pas la même.
Je découvre les demandes d'exonération de présence scolaire évoquées par Francis Delattre. Votre enracinement dans le Val-d'Oise vous rend familier de la diversité française actuelle.
Pour répondre à Marc Laménie, la médecine scolaire est en effet marginalisée. Cette médecine, exclusive il y a cinquante ans, est entrée en compétition avec une médecine de ville désormais très présente. Plus que le médecin, c'est l'infirmière qui est importante dans un établissement, car elle a un talent polyvalent.
Nous ne disposons pas de données exactes sur les enseignants qui ne sont pas devant les élèves : lorsque la droite est au pouvoir, elle s'efforce d'en réduire le nombre et quand la gauche arrive, elle crée des fonctions de soutien. Le balancier est reparti vers des enseignants qui ne sont pas à proprement parler devant des élèves, qui sont en doublon, ou ont une clientèle particulière dont le coût- rendement n'est pas établi - c'est le cas des Rased.
J'ai noté l'observation de Philippe Adnot sur le retrait des personnels d'État qui étaient mis à disposition des collèges pour la maintenance des outils informatiques. C'est contradictoire avec l'idée de former les enseignants aux techniques informatiques. Toutes les expériences étrangères montrent que l'informatique ne règle en rien les problèmes de la pédagogie, celle-ci restant adossée à la présence de l'enseignant et à sa relation avec les élèves.
Éric Bocquet a raison de distinguer les postes annoncés et les postes créés. J'en parle à la page 39 de mon rapport. En 2014, l'écart a été spectaculaire, la sous-consommation du plafond d'emplois s'étant élevée à 12 784 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Certes, on ne recrute pas les enseignants comme des laveurs de carreaux, mais il reste un écart significatif entre les emplois annoncés et ceux qui sont pourvus.
Je souscris à ce qui a été dit par Francis Delattre, l'inégalité territoriale est une réalité. Les statistiques globales montrent tout, sauf l'essentiel : c'est « la forme suprême du mensonge ». Il faut entrer dans le détail pour y voir clair. Vous avez 30 élèves par classe dans votre département pour une moyenne nationale de 12,5. Voilà pourquoi les élus doivent travailler avec les recteurs et les directeurs départementaux de l'éducation nationale. J'ai noté votre observation sur les jeunes filles retirées du système scolaire. J'interrogerai le ministère sur cette « évaporation ».
Pour répondre à Serge Dassault, René Haby ne voulait pas d'un collège vraiment unique. Tous les ministres, y compris Najat Vallaud-Belkacem, acceptent l'idée de la diversité. À l'intérieur du collège unique, il faut multiplier l'information professionnelle pour que les jeunes garçons veuillent devenir autre chose que pompier ou footballeur. Par exemple, sénateur ou constructeur d'aéroplane... Le moule unique est inacceptable, car contraire à la réalité. Ouvrons aux jeunes des fenêtres d'ambition et d'espoir.
Richard Yung ne veut pas opposer qualitatif à quantitatif, mais un recrutement de professeur vaut pour quarante ans... De même, les mesures catégorielles coûtent extrêmement cher. Je l'ai vécu au ministère de la défense : nous diminuions les effectifs et les mesures catégorielles augmentaient la masse salariale. Pour les matières comme les mathématiques et l'anglais, la concurrence du privé est incontestable et nous aurons beaucoup de mal à recruter.
Sur la question de Michel Canevet, nous ne connaissons pas le nombre d'enseignants qui ne sont pas devant les élèves. Nous préférons qu'ils soient dans les classes mais certaines fonctions transverses ne sont pas totalement inutiles. En revanche, il ne faut pas qu'elles soient une occasion de fuir l'élève, tentation d'un certain nombre d'enseignants.
La dotation consacrée au fonds de soutien au développement des activités périscolaires est totalement insuffisante. Quant à l'enseignement privé, le statu quo évite la réouverture d'une guerre, mais les parents choisissent. La demande la plus forte n'est pas dans des régions catholiques et conservatrices. En région parisienne, des familles issues de la diversité choisissent l'enseignement catholique, apostolique et romain parce qu'elles ont le sentiment que leurs enfants seront mieux encadrés.
La régionalisation sera un élément de réponse pour adapter les politiques d'éducation nationale aux territoires. La Meuse compte souvent moins de douze habitants au kilomètre carré. On maintient des établissements que la raison exigerait que l'on supprime. Telle est la vie française dans sa complexité.
Envoyer des agrégés en collège est en apparence anormal. Cela ne l'est pas complètement pour le bien des agrégés, ni pour le bien des élèves. Ce n'est quand même pas la règle dominante.