Le budget de la mission « Enseignement scolaire » est spectaculaire : 67 milliards d'euros en intégrant le versement au compte d'affectation spéciale « Pensions », 48 milliards d'euros hors contribution au CAS. Il pose la double question de sa soutenabilité par rapport à la loi de programmation des finances publiques et de la pertinence de la répartition des grandes masses entre l'enseignement primaire et l'enseignement secondaire, dont le déséquilibre explique peut-être une partie des difficultés de notre pays en matière de formation.
S'agissant de la soutenabilité, la mission « Enseignement scolaire » dépasse régulièrement le plafond triennal fixé par les lois de programmation des finances publiques. En 2016, cet écart s'élèvera modestement à 132 millions d'euros. En 2014, alors que les crédits de la mission avaient été votés avec un dépassement de 210 millions d'euros, celui-ci s'est finalement élevé à 450 millions d'euros. Cet écart résulte notamment d'un glissement vieillissement-technicité (GVT) mal évalué, de nombreux enseignants ayant reporté leur départ à la retraite. Fin 2016, nous constaterons vraisemblablement un dépassement s'agissant des dépenses de personnel.
L'année 2016 sera une année que je qualifierais de « conservatrice ». Le schéma d'affectation des grandes masses n'évolue guère, comme si tout fonctionnait de manière satisfaisante. Les crédits du programme 140 « Enseignement scolaire public du premier degré » progressent de 400 millions d'euros, ce qui représente une augmentation d'environ 2 %. Cette évolution est positive s'agissant de notre point faible. Les crédits du programme 141 « Enseignement public du second degré » sont stables, hormis l'impact de l'acquisition de manuels conformes aux nouveaux programmes scolaires à la charge de l'État : 150 millions d'euros pour une première tranche en 2016, autant en 2017. Le programme 143 « Enseignement technique agricole » enregistre une progression de 0,70 % inférieure à celle constatée sur l'ensemble de la mission. Les dotations à l'enseignement privé évoluent de façon similaire à celles de l'enseignement public, même si les effectifs croissent plus rapidement que dans le public. La stabilité des crédits du programme 214, « Soutien de la politique de l'Éducation nationale », masque une évolution peu maîtrisée et préoccupante des dépenses consacrées aux grands chantiers informatiques.
La dépense en faveur de l'enseignement en France se situe dans la moyenne des pays de l'OCDE : elle est passée en trente ans de 5,7 % à 6 % du PIB, soit plus qu'en Allemagne et qu'en Italie, mais moins qu'aux États-Unis, en Finlande ou en Corée du Sud. En euros constants, du fait de l'augmentation du PIB, les dépenses totales sont passées de 66 milliards d'euros en 1980 à 129 milliards d'euros en 2014.
Plus préoccupants, les médiocres résultats aux enquêtes internationales s'expliquent en partie par les priorités inégales du ministère. La dépense française moyenne par élève du primaire atteint 83 % de la moyenne des pays de l'OCDE, contre 119 % pour un élève du secondaire : dans l'enseignement secondaire, il y a plus de programmes, plus de diversité, plus d'années d'enseignement et l'encadrement par élève est supérieur à la moyenne de l'OCDE : un enseignant pour 12,5 élèves en France contre un pour 13,5. Au contraire, ce taux est d'un pour 18,9 élèves dans l'enseignement primaire français, contre un pour 15,3 dans l'OCDE. Nous sommes donc confrontés à un problème d'affectation des moyens entre un primaire stratégique et un secondaire dispersé.
S'agissant des 55 000 créations de postes prévues dans l'éducation, les prévisions seront atteintes si le budget 2016 est voté et si le budget 2017 épouse la même ligne. Hormis le millier d'enseignants destinés à l'enseignement agricole, plus de la moitié des emplois - 26 000 - concernent des stagiaires. Il s'agit donc d'un exercice comptable. On se réjouit d'avoir 14 000 enseignants supplémentaires dans le primaire et 7 000 dans le secondaire ; ne faudrait-il pas transférer la totalité vers le primaire ? La création de 6 000 postes d'accompagnants est également prévue, qui ne seront pas nécessairement devant les élèves, sinon en doublon avec les enseignants.
Un tel effort quantitatif interdira l'évolution qualitative, qui serait nécessaire dans le secondaire notamment, où nous avons besoin de moins d'enseignants, mais de qualité et recrutés à un bon niveau. Un fort déséquilibre se fait jour entre le nombre de postes offerts aux concours, le nombre de candidats inscrits, le nombre de présents et le nombre d'admis, particulièrement en langues vivantes - notamment en anglais - en mathématiques, en lettres classiques, même si, semble-t-il, l'année 2015 est plus favorable. Quels enseignants voulons-nous, avec quelle carrière ? Le niveau des élèves à la sortie du secondaire ne peut que nous interpeller : nous savons les résultats des enquêtes Pisa et l'échec en première année de faculté montre que les mentions sont désormais le réel critère de valeur du baccalauréat.
Davantage de dépenses seront consacrées au numérique, dans le cadre du programme d'investissements d'avenir. Ne sont retracées dans ce budget que les seules dépenses consacrées à la formation des enseignants. L'articulation des projets ministériels avec les actions des collectivités territoriales reste à déterminer. Il en va de même pour la prise en charge des activités périscolaires qui restent à la charge des collectivités territoriales. Je regrette également le report des décisions sur les bourses de lycée qui laisse les familles dans l'incertitude.
Par ailleurs, ce ministère n'arrive pas à sortir de son projet de système d'information Sirhen (système d'information des ressources humaines de l'éducation nationale), dont le coût dépassera de 241 millions d'euros le budget initialement prévu.
Enfin, les opérateurs sont, dans une large mesure, exonérés des efforts demandés au ministère.
Ce budget est donc un budget de statu quo qui ne s'attaque en rien aux problèmes de l'enseignement scolaire. Si des chefs d'établissement s'engagent, des élus locaux sont partenaires, des familles s'impliquent, des mesures devraient également être prises telles que l'allègement du secondaire, le renforcement du primaire ou encore l'accompagnement de la diversité avec l'enseignement agricole, l'enseignement privé, l'apprentissage et l'autonomie des établissements.
Je proposerai donc l'adoption de ce budget sous réserve du vote de deux amendements que je présenterai.
Je partage l'analyse objective des chiffres réalisée par Gérard Longuet, et non son analyse du fond.
Avec plus de 67 milliards d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, la mission « Enseignement scolaire » reste le premier budget de la France. Derrière des chiffres témoignant de l'effort de la Nation en faveur de la formation de la jeunesse, il convient de s'interroger sur la politique mise en oeuvre, sur sa pertinence et sur son adéquation aux besoins. Les crédits sont en augmentation de 0,6 % par rapport à 2015. Il reste des problèmes de mise en oeuvre du budget et de mise en place des effectifs. Je ne reviendrai pas sur les besoins de l'enseignement primaire. Dans le secondaire, les 7 000 créations de postes seront insuffisantes car il reste des classes surchargées à 30 élèves.
Le budget 2016 s'inscrit dans la continuité des derniers exercices qui revenaient sur les 80 000 suppressions de postes décidées par le précédent Gouvernement. Ces coupes drastiques avaient été incomprises par le corps enseignant, victime d'une « souffrance ordinaire » selon les mots de Brigitte Gonthier-Maurin dans son rapport de 2012 sur le métier d'enseignant. La politique de recrutements est nécessaire et répond à un véritable besoin. La critique récurrente des soi-disant surnombres dans l'éducation nationale est dépassée, les coupes franches dans les effectifs sous le précédent quinquennat y ayant plus que répondu. Faut-il, dès lors, supprimer des postes de remplaçants, au risque de se retrouver avec des classes sans enseignant ? Faut-il supprimer des postes de directeurs d'école ou d'accompagnants d'élèves handicapés ? Je ne le crois pas. Ceux qui appellent à diminuer les effectifs sont les premiers à critiquer la fermeture de classes dans leur commune, dans leur département ou dans leur région. Un raisonnement comptable vaudrait-il à Paris mais pas en province ? Comment expliquer l'existence de surnombres qu'aucun d'entre nous ne constaterait localement ?
Les créations de postes prévues dans le présent projet de loi de finances répondront aux besoins des élèves et des enseignants et contribueront à la réduction des inégalités sociales et à la résorption de la fracture territoriale. C'est pourquoi je me félicite que l'objectif de 55 000 créations de postes sur le quinquennat puisse être atteint, même si, comme le notent certains syndicats d'enseignants, on ne perçoit pas toujours sur le terrain l'effet de ces annonces.
L'effort budgétaire est significatif mais cessons de considérer la mission « Enseignement scolaire » comme une dépense : c'est plutôt un investissement de la Nation dans sa jeunesse.
Je ne crois pas que nous ayons trop d'enseignants. Notre situation budgétaire nous oblige à prendre en compte la quantité, mais ne perdons pas de vue la qualité, revendication portée par les enseignants eux-mêmes. Pour autant, l'augmentation des effectifs ne saurait répondre à tous les défis du système scolaire français. Le problème vient de la mise en oeuvre de cette politique de rétablissement des moyens humains depuis 2012. La réforme du recrutement des enseignants de 2010, qui avait fait disparaître l'année de stage en alternance, a été difficile pour de nombreux jeunes enseignants. La création des écoles supérieures du professorat et de l'éducation (Espé) a permis la reconstitution d'une formation initiale demandée par les jeunes enseignants.
Pour autant, certains points demeurent en suspens. Les emplois d'avenir professeurs, qui seront progressivement remplacés par les contrats d'apprentis professeurs, permettent à des jeunes intéressés par les métiers de l'enseignement d'acquérir une première expérience même si, bien souvent, les travaux réalisés par ces jeunes le sont au détriment de leur formation. Il serait préférable d'instaurer une forme de pré-recrutement plutôt que d'avoir recours à ces étudiants qui ne doivent pas constituer un palliatif aux recrutements d'enseignants titulaires.
Des efforts de rémunération ont été consentis avec l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves (ISAE) dans le premier degré ou la revalorisation des indemnités perçues par les enseignants des établissements relevant de l'éducation prioritaire. Cependant, comment se satisfaire d'une situation où le pouvoir d'achat des enseignants a diminué de 1 % en 2013 ? Nous avons besoin d'enseignants plus nombreux et mieux formés, mais il ne faut pas faire l'impasse sur l'amélioration de leurs conditions matérielles.
Je partage les propos de Gérard Longuet sur l'accompagnement de la réforme des rythmes scolaires. La diminution des crédits destinés au fonds de soutien au développement des activités périscolaires est regrettable dans un contexte de baisse des dotations aux collectivités et de surcoûts dus aux réformes du collège et des programmes.
L'an dernier, j'avais attiré votre attention sur le manque de formations ou d'entreprises volontaires pour que les jeunes, notamment dans l'enseignement technique agricole, puissent réaliser leur alternance, alors que certains métiers connaissent une pénurie de main-d'oeuvre. À l'inverse d'une surabondance d'options, nous constatons une inadéquation de l'offre de formation.
Ce budget n'est donc pas parfait mais certaines mesures vont dans le bon sens, bien que souvent insuffisantes ou inachevées. Sous le bénéfice de ces observations et sans préjuger des amendements qui seront présentés par Gérard Longuet, je vous propose de vous abstenir sur les crédits de la mission « Enseignement scolaire ».
L'amendement n° 1 vise à diminuer les effectifs du secondaire tout en préservant les moyens accordés au primaire. Il prévoit : au titre du programme 141 « Enseignement public du second degré », la suppression des 591 créations de postes d'enseignants stagiaires prévues en 2016 et le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, soit 3 640 postes non remplacés ; au titre du programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés », le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux pour le seul second degré, soit 1 325 postes non remplacés ; au titre du programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale », le non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, soit 308 postes non remplacés. En année pleine, cela représenterait une économie de près de 150 millions d'euros.
Il sera en outre demandé aux opérateurs de contribuer à l'effort de réduction des dépenses à hauteur de 15,5 millions d'euros (8,5 millions d'euros pour l'Onisep, grâce à la dématérialisation de la diffusion gratuite papier dont le coût est estimé par la Cour des comptes à 17 millions d'euros ; 11 % des dépenses de fonctionnement du réseau Canopé, soit 4 millions d'euros ; 3 millions d'euros, soit 10 % des dépenses de fonctionnement du Cned). Au total, cet amendement permettrait une économie de l'ordre de 165 millions d'euros en année pleine.
L'amendement n° 2 vise à interpeller la ministre sur le projet Sirhen - le Louvois de l'éducation nationale...
Un audit de 2013 a réévalué la durée du projet à treize ans au lieu de sept ans et son coût à 321 millions d'euros au lieu de 80 millions d'euros. Cet amendement vise à obliger le ministère à nous indiquer quand et dans quelles conditions il entend sortir de ce labyrinthe ?
Loin d'être l'opérateur de paye de toute l'éducation nationale, Sirhen ne concerne, à l'heure actuelle, que les administrateurs civils et les corps d'inspection ; 300 millions d'euros pour 4 000 personnes, cela paraît excessif ! Notre commission s'est émue des déboires de Louvois ou de l'opérateur national de paye, on ne peut donc que regretter que cela continue avec Sirhen.
Les années passent et se ressemblent, les constats s'amplifient ; la France consacre près de 70 milliards d'euros à l'éducation, premier budget national, part importante du PIB, mais elle recule d'année en année dans les classements Pisa. Les résultats sont-ils en adéquation avec les moyens ?
Je remercie le rapporteur spécial d'avoir insisté sur la différence entre l'enseignement primaire et l'enseignement secondaire. Les taux de réussite aux concours m'interpellent : 62 % des candidats ont été admis en lettres classiques : n'y aurait-il que des bons élèves ? En mathématiques, 48 % des candidats sont admis et 24 % des postes ne sont pas pourvus. C'est très inquiétant pour le métier d'enseignant ! L'éducation nationale est davantage dans une gestion de masse que dans une gestion fine de ses ressources humaines.
L'amendement consistant à rééquilibrer la dépense en faveur du primaire nous renvoie à la multiplication des options. Je me souviens d'avoir passé l'option menuiserie au baccalauréat. Pourquoi des options menuiserie, couture, macramé pour un bac général, ou une option surf en Île-de-France ? Derrière ces options, il y a des enseignants. La multiplication des options complexifie la gestion des ressources humaines. Il faudrait atteindre des ratios d'encadrement proches de ceux de l'Union européenne dans le primaire et avoir moins d'options dans le secondaire. Je soutiendrai l'amendement n° 1.
L'amendement n° 2 met l'accent sur les outils vieillissants de l'éducation nationale, alors que des outils internet sont demandés par les familles. Les centres d'information et d'orientation et l'Onisep travaillent encore sur des supports papier inadaptés.
Je vous remercie d'accueillir dans votre classe studieuse un mauvais élève comme moi. Le budget s'inscrit dans la continuité, en constante augmentation depuis trente ans, sans les résultats escomptés. Nous sommes parmi les pays les plus inégalitaires : un fils d'ouvrier a dix-sept fois moins de chances de préparer une grande école qu'un fils d'enseignant ou de cadre supérieur. La moitié des 150 000 jeunes sortant chaque année du système sans diplôme a connu des difficultés entre le cours préparatoire et le CE2. L'apprentissage des fondamentaux entre quatre et sept ans doit être une priorité : l'avenir d'un jeune est quasiment scellé à son septième anniversaire. Il faut redéployer les moyens du secondaire vers le primaire, avec des enseignants formés aux pédagogies ayant fait leurs preuves et incités financièrement à venir devant les élèves en ayant le plus besoin. Selon la Cour des comptes, il est nécessaire de redéployer et simplifier l'offre de formation au lycée : le nombre de filières et d'options est trop important : un élève de seconde peut choisir entre 236 options différentes !
À la suite de la réforme des programmes, que le conseil supérieur de l'éducation a rejetée, l'État s'est engagé à prendre en charge le financement des manuels scolaires des collèges, mais pas ceux des écoles. Les communes le feront, alors qu'elles supportent déjà le surcoût des rythmes scolaires. Je proposerai certainement un amendement de redéploiement des crédits à partir de ceux consacrés à l'administration centrale, où des économies sont sans doute possibles.
Enfin, le projet Sirhen constitue effectivement une dérive inacceptable.
Je souscris aux recommandations de notre rapporteur spécial. J'ai été nommé inspecteur général il y a dix-sept ans et lors de la première réunion, on nous a dit que le système scolaire ne fonctionnait pas et qu'il fallait le recentrer. Les rapports Pisa le démontrent, ce sont les pays qui se sont recentrés sur les fondamentaux qui progressent le plus vite. En revanche, ceux qui offrent de nombreuses options s'effondrent. Un enseignement collectif ne peut être un enseignement à la carte, individualisé.
Les gouvernements de gauche et de droite n'ont pas eu le courage de mettre un terme à cette dérive : il faut en revenir aux fondamentaux, notamment au niveau du secondaire. Notre système est trop diversifié, trop lourd et donc difficile à gérer. Ce n'est pas avec toujours plus d'enseignants et toujours plus de moyens qu'on changera ce système malade parce que sans objectifs ni lignes directrices.
Nous le répétons d'année en année, nous devrions nous recentrer sur les fondamentaux et arrêter de nous disperser : il faut privilégier la qualité plutôt que la quantité. Avec les 60 000 postes supplémentaires, c'est la quantité qui l'a emporté. Je regrette que les documents budgétaires n'apportent pas de réponses aux questions que nous nous posons. Pourquoi ne connaissons-nous toujours pas le nombre d'élèves par niveau, le nombre de classes et celui d'enseignants ? Je ne sais même pas quelle est l'évolution du nombre d'élèves d'une année sur l'autre. Dans nos communes, c'est pourtant la première chose qui nous préoccupe.
J'ai l'impression de voter à l'aveugle le budget du « mammouth ». J'adopterai les amendements du rapporteur spécial, même si j'aimerais qu'ils aillent plus loin.
Quel est le poids, dans ce budget, de l'administration centrale, des rectorats et des inspections d'académie ? Il y a du monde dans le grand ministère...
Les programmes font l'impasse sur le fonctionnement des institutions et sur le devoir de mémoire : c'est regrettable. Enfin, où en est-on de la médecine scolaire, dont l'importance semble se réduire d'année en année ?
Je suivrai les recommandations de notre rapporteur spécial. Je regrette que l'État retire des collèges tous les personnels qu'il mettait à disposition pour le suivi et la maintenance informatiques. J'ai prévenu la rectrice que mon département serait dans l'incapacité de remplacer ces personnels.
Nous nous félicitons des créations de postes après cinq années de suppressions massives : encore faut-il distinguer les annonces des créations effectives. Les taux d'encadrement ne sont pas neutres : ceux qui ont enseigné savent qu'une classe de 15 ou de 30 élèves, ce n'est pas la même chose.
La crise des recrutements est inquiétante : le métier n'est plus attractif pour diverses raisons, notamment financières. Un plan de recrutement est indispensable pour attirer les jeunes vers ce beau métier de plus en plus difficile à exercer.
L'enquête Pisa rappelle à juste titre le déterminisme entre la situation économique et sociale des familles et la performance des enfants. Nous déplorons la diminution des crédits du fonds de soutien aux activités périscolaires, alors que les communes ont joué le jeu en offrant des activités de qualité. L'école numérique ? Mais ce sont les collectivités qui investissent dans le matériel, notamment dans les écoles élémentaires. L'éducation nationale s'était engagée à former les enseignants à ce nouvel outil. Qu'en est-il ?
L'appréciation des effectifs de l'éducation nationale varie selon que l'on est rue de Grenelle ou sur le terrain. Dans ma commune, toutes les classes comptent 30 élèves et les moyens sont loin d'être excessifs. Nous avons certainement beaucoup trop d'inspecteurs généraux...
et pas assez d'enseignants. Tous les ans, je bénis les directeurs d'école qui réussissent à faire des rentrées correctes avec des moyens très justes.
De plus en plus souvent, les maires de mon département sont saisis de demandes visant à permettre à des jeunes de quitter l'école sous prétexte qu'ils vont avoir chez eux une formation adéquate. C'est scandaleux, car il s'agit surtout de jeunes filles qui sortent du système scolaire sans que personne ne vérifie la réalité de l'enseignement à domicile. Il n'existe pas non plus de cours par correspondance : ces jeunes de 14-15 ans sont soustraites d'office de l'école, sans aucun contrôle. Je reçois pratiquement toutes les semaines des maires qui doivent signer de telles demandes d'exemptions qui se multiplient.
Pour favoriser la formation professionnelle et éviter que 150 000 jeunes sortent du système scolaire sans diplôme ni formation, supprimons le collège unique. Beaucoup d'élèves ne s'intéressent pas aux cours qui y sont dispensés. Il faudrait sélectionner les élèves à la sortie du primaire : le certificat d'études n'existe plus, ce que je déplore. Comme les redoublements ont été supprimés, ces jeunes passent de classe en classe sans acquérir aucune formation, ce qui explique en grande partie l'insécurité dans nos communes. Au lieu d'avoir été formés à un métier manuel, ces jeunes deviennent pour la plupart des délinquants.
Je serai plus nuancé que le rapporteur spécial sur cette approche quantitative. La situation est très différente en fonction des régions, certains rectorats manquant d'enseignants. À l'étranger, nous avons beaucoup de mal à recruter des enseignants français, parce que les recteurs bloquent le départ des professeurs de mathématiques, de physique, de langues vivantes. Le plan de recrutement de 14 000 postes pour le primaire et de 7 000 postes pour le secondaire répond en partie à ces préoccupations.
Le niveau de rémunération de nos enseignants ajoute à la difficulté : leur prestige social s'est amoindri et les salaires sont inférieurs à ceux pratiqués chez nos voisins, notamment en Allemagne.
Quant au qualitatif, la France en fait beaucoup trop : 216 options ! J'estime qu'il faut les ramener à 21 par exemple...
Laissons cela à la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.
Les parents veulent toujours davantage d'options, ce qui entraîne des horaires surchargés, alors que dans d'autres pays, il y a trois à quatre heures d'enseignement le matin et l'après-midi est consacrée aux sports ou aux activités culturelles. Et pourtant ces enfants sont au moins aussi éveillés que les nôtres...
Je ne voterai pas le premier amendement sur les réductions de crédits, mais je suis assez tenté par le second. Si ces 44 millions d'euros sont supprimés, arrêtera-t-on de payer les fonctionnaires en question ? Les administrations françaises tentent de développer de grands programmes informatiques sans en avoir la compétence.
Les amendements de notre rapporteur sont empreints de bon sens ; ils portent sur une centaine de millions d'euros alors que le budget augmente de 700 millions d'euros. J'espère que l'effort portera prioritairement sur l'enseignement primaire car l'apprentissage des fondamentaux est la priorité. Les chiffres donnés par notre rapporteur spécial sont éloquents lorsqu'on compare notre situation à celle de nos voisins. Quel est le nombre de postes qui ne sont pas affectés à l'encadrement des élèves ?
J'ai du mal à comprendre pourquoi les crédits alloués au fonds de soutien dans le cadre de la réforme des rythmes scolaires diminuent alors que le nombre d'élèves reste stable. Ce fonds devra-t-il être abondé en cours d'année ?
Le nombre d'élèves de l'enseignement préélémentaire privé augmente alors qu'il diminue dans l'enseignement public. Pourtant, les crédits augmentent plus dans le public (+ 1,89 %) que dans le privé (+ 0,40 %). Le niveau d'encadrement sera-t-il maintenu dans le privé ?
La diminution du nombre de régions va-t-elle entraîner une réduction des crédits affectés à l'administration décentralisée de l'éducation nationale ?
Je note que cette année, la rentrée s'est bien passée. Lorsque notre rapporteur nous dit qu'il s'agit d'un budget conservatoire, je m'en félicite, car cela augure bien de la rentrée prochaine.
Dans mon département, la densité de population en zone de montagne est de 17 habitants au kilomètre carré tandis qu'à proximité de Toulouse, la densité est très forte. Ne globalisons donc pas le nombre des enseignants. Notre collègue Alain Duran vient d'être nommé par le Gouvernement pour rédiger un rapport sur l'offre de formation différenciée en zone urbaine et en zone rurale et de montagne.
L'actuelle formation des maîtres va dans le bon sens, mais nous nous interrogeons sur la crise des recrutements et sur les rémunérations. Des agrégés enseignent dans des collèges de région parisienne : la politique de recrutement pourrait sans doute être revue.
Le plan numérique à l'école va commencer à porter ses fruits en 2016. Pour un euro dépensé par les départements, l'État contribuera à hauteur d'un euro mais prenons garde à la maintenance et au soutien aux établissements, comme l'a rappelé Philippe Adnot. La commission consultative sur l'évaluation des charges, que je préside, n'abordera pas ce sujet car il ne s'agit pas de transferts, ni de charges nouvelles. La question se pose néanmoins de l'accompagnement de l'extension évidente et nécessaire de ce plan.
Thierry Foucaud et moi-même avons à coeur de mieux comprendre le fonctionnement de l'éducation nationale, même si nous n'en tirons pas les mêmes conclusions.
Je remercie le rapporteur général pour son soutien à mes amendements.
Jean-Claude Carle estime que la France est le pays le plus inégalitaire. Le problème de l'égalité est philosophique : beaucoup de parents ont des enfants pour qu'ils prolongent en mieux ce qu'ils sont. Il est logique que les parents responsables s'impliquent et il ne faut pas nous priver de leur bonne volonté. En revanche, nous devons sans doute nous substituer à ceux qui sont indifférents. La classe unique permettait aux enseignants de suivre les enfants. Ceux-ci passent désormais d'une classe à l'autre en changeant de professeurs. C'est un facteur de faiblesse car ils ne connaissent pas assez leurs élèves.
Je suis d'accord avec Jean-Claude Carle sur les apprentissages des fondamentaux, notamment de la lecture. Les nouveaux rythmes scolaires sont une charge pour les collectivités locales, charge qui n'est pas compensée et qui n'avait été demandée par personne.
Roger Karoutchi a parlé de la dispersion du secondaire : il faut accepter la diversité de notre pays, qu'elle soit démographique, géographique ou historique. Les régions industrielles ont de nombreux lycées professionnels qui sont l'héritage des centres d'enseignement technique lancés par les industriels et repris par l'éducation nationale. Nous allons vers l'unité, mais elle supposerait l'internat. Hélas, cette excellente solution fait l'objet du rejet des mères, qui ne sont d'ailleurs plus des mères mais des « mamans » comme des pères, qui sont devenus des « papas », qui ont peur de perdre leurs enfants. Je trouve cela navrant, mais il s'agit d'un fait de société contre lequel nous ne pouvons rien.
Je remercie Vincent Delahaye pour la précision de ses questions : il s'agit en effet d'un budget de statu quo. En revanche, nous disposons des tableaux récapitulatifs demandés : nous pourrons vous les communiquer. Les régions n'évoluent pas de la même façon et leur sociologie n'est pas la même.
Je découvre les demandes d'exonération de présence scolaire évoquées par Francis Delattre. Votre enracinement dans le Val-d'Oise vous rend familier de la diversité française actuelle.
Pour répondre à Marc Laménie, la médecine scolaire est en effet marginalisée. Cette médecine, exclusive il y a cinquante ans, est entrée en compétition avec une médecine de ville désormais très présente. Plus que le médecin, c'est l'infirmière qui est importante dans un établissement, car elle a un talent polyvalent.
Nous ne disposons pas de données exactes sur les enseignants qui ne sont pas devant les élèves : lorsque la droite est au pouvoir, elle s'efforce d'en réduire le nombre et quand la gauche arrive, elle crée des fonctions de soutien. Le balancier est reparti vers des enseignants qui ne sont pas à proprement parler devant des élèves, qui sont en doublon, ou ont une clientèle particulière dont le coût- rendement n'est pas établi - c'est le cas des Rased.
J'ai noté l'observation de Philippe Adnot sur le retrait des personnels d'État qui étaient mis à disposition des collèges pour la maintenance des outils informatiques. C'est contradictoire avec l'idée de former les enseignants aux techniques informatiques. Toutes les expériences étrangères montrent que l'informatique ne règle en rien les problèmes de la pédagogie, celle-ci restant adossée à la présence de l'enseignant et à sa relation avec les élèves.
Éric Bocquet a raison de distinguer les postes annoncés et les postes créés. J'en parle à la page 39 de mon rapport. En 2014, l'écart a été spectaculaire, la sous-consommation du plafond d'emplois s'étant élevée à 12 784 équivalents temps plein travaillé (ETPT). Certes, on ne recrute pas les enseignants comme des laveurs de carreaux, mais il reste un écart significatif entre les emplois annoncés et ceux qui sont pourvus.
Je souscris à ce qui a été dit par Francis Delattre, l'inégalité territoriale est une réalité. Les statistiques globales montrent tout, sauf l'essentiel : c'est « la forme suprême du mensonge ». Il faut entrer dans le détail pour y voir clair. Vous avez 30 élèves par classe dans votre département pour une moyenne nationale de 12,5. Voilà pourquoi les élus doivent travailler avec les recteurs et les directeurs départementaux de l'éducation nationale. J'ai noté votre observation sur les jeunes filles retirées du système scolaire. J'interrogerai le ministère sur cette « évaporation ».
Pour répondre à Serge Dassault, René Haby ne voulait pas d'un collège vraiment unique. Tous les ministres, y compris Najat Vallaud-Belkacem, acceptent l'idée de la diversité. À l'intérieur du collège unique, il faut multiplier l'information professionnelle pour que les jeunes garçons veuillent devenir autre chose que pompier ou footballeur. Par exemple, sénateur ou constructeur d'aéroplane... Le moule unique est inacceptable, car contraire à la réalité. Ouvrons aux jeunes des fenêtres d'ambition et d'espoir.
Richard Yung ne veut pas opposer qualitatif à quantitatif, mais un recrutement de professeur vaut pour quarante ans... De même, les mesures catégorielles coûtent extrêmement cher. Je l'ai vécu au ministère de la défense : nous diminuions les effectifs et les mesures catégorielles augmentaient la masse salariale. Pour les matières comme les mathématiques et l'anglais, la concurrence du privé est incontestable et nous aurons beaucoup de mal à recruter.
Sur la question de Michel Canevet, nous ne connaissons pas le nombre d'enseignants qui ne sont pas devant les élèves. Nous préférons qu'ils soient dans les classes mais certaines fonctions transverses ne sont pas totalement inutiles. En revanche, il ne faut pas qu'elles soient une occasion de fuir l'élève, tentation d'un certain nombre d'enseignants.
La dotation consacrée au fonds de soutien au développement des activités périscolaires est totalement insuffisante. Quant à l'enseignement privé, le statu quo évite la réouverture d'une guerre, mais les parents choisissent. La demande la plus forte n'est pas dans des régions catholiques et conservatrices. En région parisienne, des familles issues de la diversité choisissent l'enseignement catholique, apostolique et romain parce qu'elles ont le sentiment que leurs enfants seront mieux encadrés.
La régionalisation sera un élément de réponse pour adapter les politiques d'éducation nationale aux territoires. La Meuse compte souvent moins de douze habitants au kilomètre carré. On maintient des établissements que la raison exigerait que l'on supprime. Telle est la vie française dans sa complexité.
Envoyer des agrégés en collège est en apparence anormal. Cela ne l'est pas complètement pour le bien des agrégés, ni pour le bien des élèves. Ce n'est quand même pas la règle dominante.
Il y a du bon et du moins bon dans ce budget. Qu'on n'aille pas dire cependant qu'il témoigne d'un effort significatif. Il augmente de + 0,6 % pour une inflation de 1 %, cette année. Comme tous les ans, on refait la politique de l'éducation nationale, chacun apportant sa pierre à l'édifice. Le budget de l'éducation nationale est de 67 milliards...
dont 20 milliards d'euros pour les retraites : engager, c'est aussi engager un retraité.
contre 40 milliards d'euros pour le pacte de responsabilité et de solidarité : l'éducation nationale ne coûte donc pas si cher.
Nous serons tous d'accord pour dire qu'il n'est pas normal que l'on continue à avoir trente élèves par classe dans un quartier où les populations souffrent. Il faut corriger cette situation, faute de quoi, notre politique sociale en faveur des quartiers ne pourra que se détériorer.
La question de l'apprentissage est posée tous les ans sans jamais qu'on la résolve. On manque de plombiers, de couvreurs... Des apprentis trouvent parfois un employeur sans avoir accès à la théorie ; parfois, c'est l'inverse. Si l'on continue ainsi, on ira dans le mur, car les chiffres resteront les mêmes. Voilà pourquoi j'ai proposé l'abstention.
Enfin, le numérique, qui est une question d'avenir, mobilise 24 millions d'euros pour assurer la formation des enseignants. Les collectivités se sont engagées dans ce programme tout comme elles l'ont fait pour les rythmes scolaires. Il faudrait tenir compte de leurs difficultés de financement et les aider sur ces deux domaines essentiels pour l'avenir.
Nous avons donc de bonnes causes à défendre en faveur de nos enfants et de la France.
Pour répondre à Richard Yung, l'amendement relatif à Sirhen n'aura pas pour conséquence d'interrompre la paye des fonctionnaires. Cet amendement vise, si j'ose dire, à aider le ministre face à son administration. J'ai vécu ce genre de situation avec l'affaire Louvois. Un ministre est toujours bercé de l'illusion que les choses se règleront en trois mois. On connaît la suite...
Je suis évidemment opposé à l'amendement qui réduit les crédits consacrés à l'éducation nationale.
Malgré tous les moyens dont on nous parle, des classes restent chargées, à vingt-cinq ou trente élèves. D'un point de vue mathématique, il y a pourtant un enseignant pour quinze élèves. La contradiction tient à ce que le lycée est très consommateur en moyens humains. Il faudrait redéployer le personnel et surtout réduire les options qui ne sont pas indispensables. D'autant qu'on se sert souvent de ces options pour choisir les bonnes orientations.
L'inégalité vient souvent d'un manque d'accès à l'information. Il n'y a pas de bonne orientation sans bonne information. En 1998, j'ai été rapporteur d'une commission d'enquête sur la gestion des personnels de l'éducation nationale. On recensait alors 30 000 enseignants qui n'étaient pas devant les élèves, soit l'équivalent de l'académie de Grenoble ou d'une trente-et-unième académie virtuelle. Il n'est pas aberrant que tous les enseignants ne soient pas devant les élèves ; il est même souhaitable que certains d'entre eux aillent dans d'autres administrations, voire dans le monde économique. Ce qui l'est moins, c'est qu'un enseignant fasse toute sa carrière hors de l'éducation nationale. C'est un problème de ressources humaines.
L'amendement n° 1 est adopté, ainsi que l'amendement n° 2.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire », ainsi modifiés.
Puis la commission procède à l'examen du rapport de MM. Jacques Chiron et Bernard Lalande, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Économie » et le compte de concours financier « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » (et articles 52 et 53).
La mission « Économie » rassemble une série de d'instruments destinés à soutenir la croissance des entreprises, et notamment des PME de l'artisanat, du commerce et de l'industrie, sous forme de subventions, de prêts, de garanties ou encore d'exonérations fiscales. Elle porte aussi les crédits des administrations, autorités administratives indépendantes (AAI) et des opérateurs chargés de la mise en oeuvre de ces politiques.
Les crédits demandés au titre de l'année 2016 s'élèvent à 1,7 milliard d'euros, en baisse de 4,7 % (- 83 millions d'euros) : l'effort de maîtrise des dépenses publiques est supérieur de 51 millions d'euros à ce qui était prévu dans la programmation triennale.
Le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » porte à lui seul la moitié de ces crédits. Les dépenses de personnel et de fonctionnement et les subventions aux différents opérateurs affichent une stabilité globale : de fait, ces dépenses sont relativement rigides, même s'il reste des marges de manoeuvre, par exemple du fait de la fusion entre Ubifrance et l'agence française des investissements internationaux (AFII) en un opérateur commun dénommé Business France.
L'effort budgétaire repose donc principalement sur une réduction des aides aux entreprises, ce qui est une occasion de rationaliser des dispositifs complexes, éclatés, et peu évalués.
La dotation du fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac), par exemple, baisse à 15 millions d'euros en 2016. Grâce à la réforme de son fonctionnement, en 2014, il est passé d'une logique de guichet, propice aux effets d'aubaine, à une logique d'appels à projets, ciblés sur des chantiers porteurs, dans les zones rurales et dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Depuis la suppression du comité professionnel de la distribution des carburants (CPDC), les aides aux stations-service de proximité sont prises en charge par le Fisac. La poursuite de ces aides, souvent très importantes pour le maillage territorial, doit beaucoup à la mobilisation du Sénat l'année dernière, et particulièrement de la présidente Michèle André. Toutefois, deux interrogations demeurent : comment adapter les critères d'éligibilité au Fisac, très restrictifs, aux spécificités des stations-service ? Et qu'en est-il des 2 200 dossiers en stock ? L'enveloppe de 12,5 millions d'euros que le Gouvernement s'est engagé à débloquer ne figure nulle part dans le programme.
Quant au programme 220, qui porte les crédits de l'Insee, il représente 437 millions d'euros en 2016, en baisse de 2,6 %. Les économies sur les dépenses de fonctionnement et de personnel auraient pu être encore plus importantes si le déménagement vers le nouveau centre statistique de Metz ne connaissait pas quelques vicissitudes.
Le programme 305 représente 427 millions d'euros. Sa forte baisse, de 7,7 %, est imputable à la diminution tendancielle de la subvention à la Banque de France, notamment grâce aux gains de productivité et à l'allègement des procédures de surendettement. La subvention est passée de 317 millions d'euros en 2011 à 252 millions d'euros en 2016. Quelques progrès sont également constatés dans le regroupement des services économiques à l'étranger.
Le programme 343 porte la participation de l'État au plan « France très haut débit », qui déploiera un réseau de fibres optiques à très haut débit sur l'intégralité du territoire d'ici 2022, avec un objectif intermédiaire de 50 % des foyers en 2017. Le déploiement des nouveaux réseaux à très haut débit représente plus de 22 milliards d'euros d'investissement sur les dix prochaines années, soit : 6 à 7 milliards d'euros investis par les opérateurs privés pour assurer la couverture des 3 600 communes les plus denses, avec 55 % des locaux à usage professionnel regroupés sur 10 % du territoire ; 13 à 14 milliards d'euros investis dans les « réseaux d'initiative publique » (RIP) déployés par les collectivités territoriales, l'État apportant pour sa part 3 milliards d'euros d'ici 2022, soit près de la moitié du financement public. Deux outils sont prévus à cette fin : le fonds national pour la société numérique (FSN) et le programme 343, qui prendra le relais à partir de 2015, sur un montant de financement de 2,1 milliards d'euros à l'horizon 2022. Pour 2016, 188 millions d'euros sont débloqués, après les 1 412 millions d'euros prévus en 2015 et avant les 150 millions d'euros en 2017.
Même si nous soutenons avec force le plan « France très haut débit », nous conservons deux réserves. D'une part, le délai de dix ans prévu pour la couverture du territoire semble trop long au regard de la rapidité des transformations induites par la révolution numérique. D'autre part, les abonnés qui bénéficieront d'une couverture plus rapide au titre de la zone dense, fin 2017, ne contribuent pas directement au financement d'un meilleur déploiement dans les zones non denses pour réduire la fracture numérique. Par conséquent, nous suggérons de mettre en place un dispositif de « péréquation numérique », qui pourrait prendre la forme d'une contribution prélevée sur les abonnements à Internet des particuliers et entreprises bénéficiant de la couverture en zone dense, et dont le produit serait affecté au financement des réseaux d'initiative publique dans les zones les moins rentables.
S'agissant du numérique, notre commission des finances a constitué un groupe de travail transversal et non partisan, qui a présenté deux rapports, le 17 septembre 2015 : « L'économie collaborative : propositions pour une fiscalité juste, simple et efficace », et « le e-commerce : propositions pour une TVA payée à la source ». Nous présenterons ces propositions aujourd'hui à Axelle Lemaire, secrétaire d'État chargée du numérique.
Enfin, le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » porte les 200 millions d'euros de crédits du fonds pour le développement économique et social (FDES), réactivé en 2014. Il soutient des PME industrielles qui peinent à trouver des financements, mais qui sont viables sur le long terme. Nous estimons que l'État est ici dans son rôle : il ne faut pas laisser les aléas de la crise détruire des industries et des emplois qui ont un avenir.
Les crédits budgétaires de la mission « Économie » (1,7 milliard d'euros) apparaissent bien modestes au regard des 20 milliards d'euros de dépenses fiscales qui y sont rattachées. La principale est bien sûr le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), qui est monté en puissance et représente à lui seul 13 milliards d'euros. Le rapport 2015 du comité de suivi du CICE fait par France Stratégie montre, dans une enquête, que ce crédit d'impôt est plébiscité par les entreprises, qui peuvent l'affecter comme elles le veulent : dans le secteur des services, 54 % l'utilisent pour créer des emplois, et 35 % dans le secteur de l'industrie ; 46 % l'utilisent pour augmenter les salaires dans les services, et 31 % dans l'industrie ; 53 % s'en servent pour conforter leurs résultats d'exploitation dans les services, et 52 % dans l'industrie ; 61 % l'emploient pour investir dans les services, et 65 % dans l'industrie. Enfin, elles sont 35 % dans les services et 25 % dans l'industrie à considérer que le CICE peut permettre une baisse du prix de vente, ce qui signifie qu'il ne sert pas à augmenter la marge.
D'après France Stratégie, le CICE est à 70 % consommé par les micro-entreprises, les PME et les ETI, et seulement 30 % par les grandes entreprises : il convient donc de modérer les critiques qui avaient été faites à ce sujet. Néanmoins, la limite de 2,5 % du SMIC ne bénéficie pas aux entreprises qui versent des salaires élevés - sans pour autant que leurs résultats s'en ressentent, car celles-ci sont souvent exportatrices, et bénéficient donc de compléments de subventions ou d'exonérations particulières. Dans l'ensemble, le CICE a un effet de levier intéressant.
Nous saluons également le suramortissement de 40 % annoncé par le Premier ministre, en avril dernier, et qui vise spécifiquement les investissements productifs. Cette mesure, complémentaire du CICE, est proche dans son esprit de notre proposition de l'an dernier, qui avait été adoptée à la quasi-unanimité du Sénat.
D'autres dépenses fiscales apparaissent mal calibrées, même s'il est difficile d'être complet. Par exemple, l'amortissement exceptionnel des logiciels acquis par les entreprises représente 90 milliards d'euros pour 2 400 bénéficiaires, soit en moyenne 37 500 euros par entreprise, ce qui suggère que de grands groupes en tirent un avantage substantiel. Il pourrait être opportun de limiter son bénéfice aux PME et aux ETI, et le cas échéant d'utiliser les ressources libérées pour favoriser des investissements innovants. Nous ferons des propositions à ce sujet.
L'article 52, qui est rattaché à la mission « Économie », crée un fonds de péréquation de 20 millions d'euros entre les chambres de commerce et d'industrie (CCI). Les ressources des CCI sont en forte baisse, avec un plafonnement de leur taxe affectée (925 millions d'euros cette année), deux prélèvements exceptionnels ayant en outre été opérés sur leur trésorerie, à hauteur de 170 millions d'euros en 2014 et de 500 millions d'euros en 2015. Cette contrainte a conduit les CCI à s'engager dans un grand mouvement de réorganisation et de rationalisation, pour mettre fin à certains excès, conformément à l'esprit de la loi du 23 juillet 2010 relative aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services. Toutefois, cette situation a également provoqué dans certaines chambres des difficultés financières ponctuelles. Beaucoup d'autres ont dû repousser ou annuler des investissements. Surtout, la répartition actuelle de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (TA-CVAE), qui alimente les CCI, repose sur des critères historiques figés en 2010, qui ne tiennent pas compte de la dynamique économique réelle des territoires ni des besoins des entreprises. D'où l'importance d'un dispositif de péréquation à l'échelle nationale.
Concrètement, l'article crée un fonds de 20 millions d'euros alimenté par la taxe affectée, qui aurait vocation à financer des projets spécifiques d'investissement des chambres, et à contribuer à la solidarité financière entre les CCI. Les aides seraient attribuées par délibération de l'assemblée générale de CCI France, l'établissement fédérateur du réseau. Les montants non utilisés en fin d'exercice seraient reversés au budget de l'État.
Nous sommes évidemment favorables à une telle proposition, mais avec deux réserves. D'une part, le montant de 20 millions d'euros est très faible : afin d'éviter tout saupoudrage entre des centaines de projets, nous vous proposons de préciser que les aides sont affectées à « des projets structurants de portée régionale ou nationale », comme par exemple les chantiers du plan « CCI de demain », qui prévoit notamment un guichet unique numérique.
D'autre part, la solution proposée par cet article ne peut être que transitoire, dans l'attente d'une refonte globale des modalités de répartition de la taxe affectée entre les CCI, pour tenir compte de la réalité économique. Toutefois, une telle réforme ne peut être envisagée qu'après un examen détaillé des missions accomplies par les CCI, et en tout état de cause après leur regroupement prévu en 2017 pour s'adapter à la nouvelle carte des régions.
L'article 53 comporte quant à lui deux parties. La première crée trois taxes affectées au profit de trois centres techniques et industriels (CTI) : celui de la fonderie (CTIF), l'Institut des corps gras (ITERG), et le CTI de la plasturgie et des composites (CTIPC), créé cette année. Ces taxes se substitueraient à un financement par dotation budgétaire. L'assiette est constituée par les produits fabriqués par les filières, et finance essentiellement des missions de recherche et développement, ainsi que des transferts de technologie.
Le financement par taxe affectée est une solution pertinente pour les CTI et pour les comités professionnels de développement économique (CPDE) qui leur sont assimilés. Ce modèle devrait être étendu aux trois organismes demeurant financés par une dotation budgétaire. La taxe affectée présente plusieurs avantages : stabilité des assiettes et donc des recettes, assujettissement des importations et plus grande implication des entreprises. Ces trois taxes sont conformes à l'article 16 de la loi de programmation des finances publiques (LPFP), qui prévoit que les taxes affectées sont justifiées dès lors qu'elles répondent à une logique sectorielle. Elles sont plafonnées par l'article 14 du projet de loi de finances, qui fait suite à l'article 46 de la loi de finances initiale du 28 décembre 2011.
La deuxième partie de l'article 53 harmonise les dispositions applicables à l'ensemble des taxes affectées aux CTI et aux CPDE. L'harmonisation porte d'abord sur les modalités de recouvrement, la principale innovation étant que la direction générale des finances publiques (DGFiP) prenne le relais des professionnels en cas de non-paiement de la taxe.
Mais surtout, l'harmonisation consiste à restreindre les actions finançables par la taxe affectée aux seules missions de recherche-développement et de transfert de technologie. Ce dernier point nous semble problématique : depuis longtemps, le succès des CTI et les CPDE repose sur des actions bien plus larges en faveur des entreprises de leur filière : campagnes de promotion en France et à l'international, aides à l'exportation etc. Ces aides sont très importantes pour les filières composées d'un grand nombre de PME faisant face à une concurrence internationale exacerbée. Par exemple, le CPDE du cuir aide toute la filière, pour laquelle le traitement de la peau est le plus important, et commence dès l'élevage des veaux. Notre cuir est de meilleure qualité car en France, on aime manger des veaux de neuf mois, à la différence de l'Italie ou de l'Espagne. Pour des peaux de qualité, la filière aide les éleveurs à remplacer les fils barbelés par des clôtures électriques, et à garder des étables propres pour éviter les champignons.
Afin de préserver cet équilibre, nous vous proposons un amendement qui vise à permettre que les taxes affectées financent l'ensemble des missions des CTI et des CPE - mais sous la stricte condition, et c'est une nouveauté, qu'il s'agisse de missions d'intérêt général, comme pour tout financement public.
Nous vous invitons à adopter sans modification les crédits de la mission « Économie » et du compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés », et à adopter les articles 52 et 53 modifiés par nos deux amendements.
L'amendement n°1 concentre l'effort financier du fonds de péréquation et d'investissement des CCI sur un nombre restreint de projets structurants, de portée nationale ou régionale, pouvant contribuer à la modernisation du réseau consulaire. Les aides ne seraient pas réservées aux seules CCI de région ou à la tête de réseau, elles demeurent librement attribuées à tout projet ou demande d'aide pertinente, par une délibération de l'assemblée générale de CCI France, dans des conditions précisées par décret, comme le prévoit le texte initial. Cela correspond à une demande de CCI France.
Avec l'amendement n° 2, les taxes affectées aux CTI et aux CPEDE pourraient financer des actions correspondant à toutes leurs missions d'intérêt général. Les opérations financées par des ressources publiques devront toujours être précisées par décret en Conseil d'État, contrôlées par la tutelle. Les taxes affectées étant soumises à un plafonnement, le risque de dérive financière est écarté.
La mission « Économie » est une mission importante, avec de très nombreuses dépenses fiscales rattachées. Nous avions été très préoccupés l'an dernier par le plafonnement des ressources et le prélèvement sur le fonds de roulement des CCI. Je remarque que le fonds de péréquation des CCI réalise des investissements et aide les chambres de commerce en difficulté, ce qui sous-entendrait que les prélèvements des années précédentes ont créé des difficultés dans certaines chambres.
Il est envisagé de créer trois taxes affectées, selon le principe que l'industrie financerait ses propres politiques : pourquoi pas. Mais il y a un problème de principe : le Gouvernement, qui dit vouloir supprimer des petites taxes, en crée trois ! Ceci n'est pas conforme à la loi de programmation des finances publiques, qui prévoit la suppression d'une taxe affectée pour toute nouvelle taxe créée. Voyez par ailleurs la complexité de l'article 53 - sa lecture prendrait une demi-heure, je vous l'épargnerai en séance. J'ai reçu la fédération des industries mécaniques, qui se plaint de multiples taxes avec un calcul compliqué d'assiette. Une pièce comportant du plastique et du métal sera-t-elle assujettie aux taxes sur le plastique et à celles sur le métal ? Et l'on prétend simplifier le code général des impôts ! On pourrait trouver des assiettes et des rédactions plus claires.
On centre enfin le discours sur l'entreprise, créatrice de richesses et d'emplois. Votre tonalité est excellente, mais je suis plus circonspect sur ce qui est en fait un « fonds de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) » des CCI. Les grandes CCI vont payer pour les autres. Voyez l'exemple de la formation professionnelle, sur laquelle les CCI sont en pointe : les riches CCI de la région parisienne pourraient aider celle du Gard ou celles des territoires du nord et de l'est francilien, mais en pratique elles ont souvent des charges importantes pour les grandes écoles comme HEC ou l'Essec. Si vous réduisez les moyens des CCI, elles n'économiseront pas sur ces écoles, elles fermeront des formations.
Je ne peux qu'approuver le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, qui estime que tout est à refaire pour le financement de notre économie. La non-déductibilité fiscale des intérêts des prêts contractés par les ETI et les PME pour investir a fait des dégâts considérables : pourquoi ne pas la supprimer ? Les ETI dépendent à 90 % des prêts bancaires pour se financer. Nous approuverions tous un tel amendement. Le président de la République a convenu que la suppression de la TVA sociale était une erreur, voilà la deuxième erreur ! Il explique ensuite à la télévision qu'il accorde 200 millions d'euros d'aide aux PME et aux ETI - soit une goutte d'eau. Les grands groupes mondiaux, qui empruntent sur les marchés mondiaux, n'ont pas ce problème.
15 millions d'euros pour le Fisac, c'est un peu ridicule. S'agissant de l'article 53, ces trois taxes sont d'une grande complexité. Compte tenu de ces remarques, il sera difficile d'adopter votre rapport.
Quels sont les effets d'aubaine sur le Fisac ? Dans mon agglomération, le niveau d'accompagnement des projets des collectivités territoriales avait beaucoup diminué ces dernières années. On réduit fortement les capacités d'intervention d'un organisme très important, Epareca (établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux), qui accompagne la création des centres commerciaux dans les zones urbaines sensibles.
Il est difficile d'avoir une vision claire en raison de la diversité des modes d'intervention. Je m'abstiendrai donc sur le vote des crédits, mais j'irai plus loin dans l'analyse. Les centres techniques et industriels, avec lesquels j'avais travaillé sur le secteur du bois et de l'ameublement, réalisent un travail intéressant. Sachons être attentifs à leur rôle et à la continuité de leur action.
Le préfinancement des CICE est un élément non négligeable. Quant à l'affectation des sommes par les entreprises, nous ne disposons pour l'instant que des intentions exprimés : il ne faut pas s'y fier aveuglément. En réponse à une question d'actualité, le Gouvernement a rappelé l'ampleur du CICE attribué à Air France : on ne peut pas dire que la compagnie en fasse une utilisation particulièrement exceptionnelle...
Nous nous interrogeons sur la manière dont nos interlocuteurs économiques utilisent le CICE. Souvent le comptable d'une petite entreprise y voit une aubaine pour sa trésorerie. Est-il un bon outil ? Ne faudrait-il pas changer la manière dont les entreprises le considèrent dans leur résultat financier ? Les entreprises soumises à la compétition internationale ne sont pas celles que cible le CICE.
Le plan sur le déploiement du très haut débit est très important. Il est indispensable d'accélérer l'équipement des entreprises et des ménages qui en ont besoin. J'ai été saisi par plusieurs présidents d'intercommunalité de mon département sur le surdimensionnement - et le surcoût conséquent - des infrastructures de très haut débit, y compris, parfois, pour des résidences secondaires au fond des bois. Comment justifier des dépenses considérables pour des populations qui n'utilisent presque jamais le réseau ? Définissons des priorités pour les agriculteurs, les artisans, les commerçants et les ménages le souhaitant.
Nous devons opérer un tri dans les nombreuses missions. Les rapporteurs ont expliqué en quoi le CICE, principale dépense fiscale, est une réussite. L'Insee a publié une étude sur l'évolution comparée du coût du travail, dont la presse du matin se fait l'écho ; celle-ci nous apprend que si le Gouvernement n'avait pas mis en oeuvre le CICE en 2012, le désavantage comparatif aurait pu se creuser, les coûts de production se renchérir et la France décrocher dans la compétition mondiale... Quel bel hommage !
La subvention allouée à la Banque de France revient de 317 millions à 252 millions d'euros en 2016, grâce aux gains de productivité réalisés dans le traitement du surendettement. Cela semble énorme. Les missions de la Banque de France ont-elles changé, avec davantage missions de contrôle et de régulation reprises par la Banque centrale européenne (BCE) ?
Le plan France très haut débit sera subventionné à hauteur de 3 milliards d'euros par l'État, par le biais du programme 343, à horizon 2022. Seules sont prévues des autorisations d'engagement (AE) à ce stade : 1 412 millions d'euros en 2015, 188 millions d'euros en 2016, et 150 millions d'euros en 2017. A-t-on des éléments de programmation au-delà ?
Je partage l'avis de Maurice Vincent sur le très haut débit. N'est-il pas démagogique de prétendre que chaque citoyen doit avoir accès partout à internet ? Est-ce le rôle de l'État de financer cela ? Ce plan de 20 milliards d'euros ne suffira même pas. Il faudrait établir des priorités, avec un maillage des villes et ces centres-bourgs, là où les entreprises sont ou veulent s'installer - et non dans un chalet de haute montagne. Dans une grande ville américaine, vous aurez souvent des difficultés à accéder au très haut débit. Le rapport de Pierre Collin et Nicolas Colin, remis en janvier 2013, soulignait que le déploiement profiterait d'abord aux entreprises collectant des données personnelles, et donc avant tout à Google. Il faut régler la question de la fiscalité internationale avant de développer un équipement universel.
François Marc citait l'étude de l'Insee sur le CICE : on est dans la projection, soyons plus prudents que Le Figaro. L'Insee est remercié pour ses bonnes études : on taille dans ses crédits ! Cela affectera-t-il ses établissements régionaux ? Vont-ils être regroupés ? Un État qui décide se fonde sur de bons instruments indépendants. À trop tailler, on obère l'avenir : Vincent Capo-Canellas a montré comment Météo France n'a pas acheté le supercalculateur dans lequel le Royaume-Uni a su investir malgré ses restrictions budgétaires. Or voilà qu'on demande au Crédoc (centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie) de créer ses ressources propres en produisant des études contestées pour de grands groupes. Doit-on faire de telles économies sur un organisme important ?
Le programme 343 « Plan France très haut débit » est très important. L'Europe souhaite que tous les pays de l'Union européenne bénéficient du très haut débit ; la déclinaison en France se fait au niveau régional ou départemental, grâce aux schémas d'aménagement. Entre le haut débit et le très haut débit, il y a de la marge mais diverses difficultés surgissent, comme celle de la récupération de la TVA.
Il se passe en général deux ans entre le montage des dossiers et leur approbation par le fonds de solidarité numérique (FSN). C'est sans doute ce qui explique qu'aucun crédit de paiement ne soit prévu sur le triennal. Une fois que la fibre optique arrive à domicile, il faut encore trouver un opérateur et des abonnés. Nous devrons donc déterminer les besoins sur le territoire. Nous avons libéralisé le secteur de la téléphonie : dans certaines communes, les opérateurs ne voulaient retenir que certains quartiers. La discussion a duré un an pour que l'opérateur historique accepte de couvrir toutes les communes de la communauté d'agglomération.
L'an dernier les chambres d'agriculture se sont lancées dans la péréquation, avec la création d'un fonds spécifique à cet effet. Cette année, l'article 52 instaure un fonds de péréquation entre les CCI. Votre amendement propose de remplacer les mots « projets spécifiques » par « projets structurants de portée nationale ou régionale ». Des CCI financent des lignes aériennes : si leurs moyens diminuent, elles demanderont aux collectivités de financer ces lignes qui permettent d'aménager le territoire. Le fonds de péréquation ne pourrait-il les prendre en compte ?
Il est toujours facile d'accroître les prélèvements sur les citoyens, les entreprises ou les collectivités puisqu'il suffit d'augmenter des taux ou de créer des taxes. Bien évidemment, nous avons contesté le CICE lors de sa création car ce dispositif nous semblait très compliqué. Un journal du matin...
se satisfait des retours : encore heureux que le CICE ait des effets positifs !
La création d'un fonds de péréquation entre les CCI s'impose, compte tenu des prélèvements importants qui les ont frappées. Reste que les collectivités devront prendre la relève car les actions des CCI ont beaucoup diminué ces dernières années. Le financement par taxes affectées est en forte diminution comme le montre le tableau de la page 49 : ces taxes sont passées de 1 268 millions d'euros en 2014 à 925 millions d'euros en 2016. La tendance baissière est très nette. Disposez-vous de projections pour l'avenir ? Que vont devenir les CCI ? Elles ont accepté les prélèvements sur leurs réserves, mais ceci s'est fait aux dépens des investissements futurs, comme cela a été le cas dans mon département. Le Gouvernement nous dit que les prélèvements portaient sur des réserves : en fait, ils ont empêché des projets de voir le jour.
Le poids des dépenses fiscales nous interpelle ; le programme 220 me surprend car le coût des études statistiques de l'Insee est très important : 437 millions d'euros ! Je peux aussi vous assurer que les parlementaires qui assistent aux assemblées générales des CCI se font interpeller ; il faut prendre en compte cette inquiétude légitime.
Comment le préfinancement du CICE par Bpifrance va-t-il évoluer ? Quel en sera le coût pour le budget de l'État ? Le président de Bpifrance nous a indiqué qu'une rémunération était liée à ce préfinancement.
Avec le CICE, nous voulions que les entreprises puissent investir, innover, embaucher et exporter. Il fallait trouver un mode de financement original qui ne puisse être contesté par la Commission européenne et qui bénéficie à toutes les entreprises, de la plus petite à la plus grande. De plus, cette aide ne devait pas distinguer entre les entreprises. Il fallait aussi tenir compte du fait que les acheteurs allaient immédiatement demander à bénéficier de cette diminution des charges qui augmentait la marge des entreprises : comme dans le monde agricole, à chaque subvention, le marché réclame sa part.
Le CICE est progressivement monté en puissance. Certes, il y a eu des effets d'aubaine, des imperfections, et toutes les entreprises en ont bénéficié, de sorte que nous n'avons pas ciblé les entreprises exportatrices. Cependant, notre culture économique nous porte à ne regarder que les entreprises du CAC 40 alors, que le tissu économique est fait de PME et d'ETI, qui bénéficient également du CICE et ne l'utilisent pas pour leurs actionnaires.
Michel Bouvard nous a interrogés sur le préfinancement du CICE par Bpifrance. Le comité du suivi note un ralentissement depuis le début de cette année, après deux années de progression : au cours du premier trimestre, la diminution a été d'environ 30 %, alors que ce préfinancement s'élevait en 2013 puis en 2014 à 5 milliards d'euros. La reprise de l'activité a réduit les demandes de préfinancement : les entreprises ont bénéficié du CICE, qui répond bien à leurs attentes.
Le plan France Très haut débit en est pour l'instant au stade des études. L'objectif du Gouvernement est de desservir 55 % de la population en 2017. Pour répondre à François Marc, 1,5 milliard d'euros sera dépensé d'ici là. Les zones rurales seront, quant à elles, desservies à l'horizon 2022. Lorsque le minitel a été installé, tout le monde en a bénéficié, jusqu'aux plus lointains villages des montagnes corses, comme on l'avait fait pour l'eau et l'électricité. Aujourd'hui, la sauvegarde des territoires ruraux passe par le très haut débit. On peut très bien vouloir monter un e-commerce en montagne. Le délai de dix ans nous semble trop long : c'est pourquoi nous proposons une péréquation de la redevance pour améliorer le financement du plan France Très haut débit.
Pour l'Insee, le transfert à Metz pose encore problème, certains agents ayant refusé la mobilité territoriale.
La mission « Économie » diminue de 4,7 %, mais, malgré cet effort, elle s'attèle à des sujets d'avenir comme le très haut débit. Notre amendement sur les CCI est de bon sens. Il évitera ce qu'on a appelé les effets d'aubaine en parlant du Fisac - s'agissant de ce dernier, d'ailleurs, certaines collectivités attendent toujours de toucher les fonds.
En 2014 et 2015, 670 millions d'euros ont été prélevés sur la trésorerie des CCI : j'observe qu'aucune d'entre elles n'a mis la clé sous la porte. Ensuite, taxe additionnelle a la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), affectée aux CCI, a diminué. Le niveau de la taxe additionnelle à la cotisation foncière des entreprises (CFE) a en revanche été maintenu. Demain, c'est seulement la répartition de 20 millions d'euros sur une enveloppe totale de 376 millions d'euros qui sera différente : il faut relativiser !
Le rapporteur général a émis des réserves sur l'article 53, en évoquant l'absence de suppression corrélative d'autres taxes. Nous créons trois taxes qui vont produire 3 millions d'euros de recettes, mais nous réduisons de 130 millions les taxes affectées aux CCI. La balance est bonne, il n'y a pas contradiction avec l'esprit de l'article 16 de la loi de programmation des finances publiques.
Les chambres d'agriculture ont consenti les efforts nécessaires entre 2010 et 2014. Elles ont mis en place des outils nationaux pour comparer leurs coûts respectifs, ce que n'ont pas fait les CCI, alors que certaines coûtent beaucoup plus cher que d'autres. Un récent rapport de l'Assemblée nationale, et un autre du Sénat, préconisent que les prélèvements sur les CCI arrivent à leur terme d'ici un an ou deux ; elles seront alors mieux gérées.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Économie ».
Elle décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, le compte de concours financier « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».
Article 52
L'amendement n° 1 est adopté.
La commission décide de proposer au Sénat d'adopter l'article 52 ainsi modifié.
Article 53
Je ne pourrai pas voter l'article 53 en l'état. Sont soumises à la taxe les chaudières d'une température supérieure à 130 degrés et d'une puissance supérieure à 11 300 kilowatts, les récipients de 50 à 300 litres sans dispositif mécanique ou thermique, sans parler des porte-jarretelles en dentelles ou des déshabillés en maille. L'article continue ainsi sur huit pages et pour un rendement de 3 millions d'euros. Et ceci au moment où la direction générale des finances publiques, chargée de contrôler tout cela, va perdre 2 200 postes...
Le texte, demandé par les fédérations, a l'avantage de concerner également des produits importés.
Après avoir adopté l'amendement n° 2, la commission décide de proposer au Sénat de ne pas adopter l'article 53.
La commission entend ensuite une Communication de M. Albéric de Montgolfier sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement (DGF).
Pour compléter la présentation de ce matin, nous allons vous communiquer les deux fichiers des simulations des effets de la réforme de la DGF qui nous ont été transmis par le ministère de l'intérieur, l'un sur les communes, l'autre sur les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Pour obtenir ces informations, je me suis rendu, le 8 octobre dernier, dans les locaux de la direction générale des collectivités locales (DGCL), qui m'a finalement transmis les données le 16 octobre. Ces données permettent de connaître le point d'arrivée de la réforme après épuisement des effets du « tunnel ». Les simulations sont basées sur les données 2015, c'est-à-dire sur les dernières données disponibles. Elles présentent deux limites importantes. Tout d'abord, les résultats sont présentés de manière agrégée pour les communes de la future métropole du Grand Paris.
Ces communes représentent pourtant 18 % de la dotation forfaitaire et sept millions de personnes. Les arbitrages ne sont pas rendus. Le directeur général des collectivités locales nous a indiqué qu'un amendement du Gouvernement serait présenté en séance pour préciser les règles relatives à ces communes. Si les règles de droit commun s'appliquaient, Paris percevrait pratiquement l'intégralité de la dotation de centralité.
La seconde limite réside dans la fiabilité de la carte intercommunale. Les simulations ont été réalisées sur le périmètre des EPCI au 1er janvier 2015. La carte intercommunale est appelée à changer très profondément, ce qui aura de fortes conséquences sur la répartition de la dotation de centralité.
Enfin, le Gouvernement n'a pas tiré toutes les conséquences de cette réforme sur la péréquation horizontale. Une DGF plus juste devrait rendre moins le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC), qui augmente pourtant de 220 millions d'euros en 2016.
J'en viens maintenant aux simulations elles-mêmes. Une commune du centre de la France de 14 000 habitants percevait en 2015 une dotation forfaitaire de 3 millions d'euros. Désormais, sa dotation forfaitaire spontanée est égale à la somme de sa dotation de base (1,18 million d'euros) et de sa dotation de centralité (900 000 euros), soit un peu plus de 2 millions d'euros. Comme ce montant ne s'écarte pas de plus de 5 % de sa dotation forfaitaire de 2015, elle n'est pas impactée par le tunnel. Sa dotation est ensuite écrêtée puis minorée de la contribution au redressement des finances publiques, ce qui donne une dotation forfaitaire 2016 de 2,6 millions d'euros. À terme, sa dotation forfaitaire sera égale à sa dotation forfaitaire spontanée, c'est-à-dire 2 millions d'euros.
Deuxième exemple, une commune rurale de 107 habitants dans l'est de la France percevait une dotation forfaitaire de 83 000 euros en 2015. Désormais, sa dotation forfaitaire spontanée est égale à 12 000 euros. Grâce au tunnel, sa dotation forfaitaire 2016 s'élève à 78 700 euros. Après écrêtement, elle percevra 74 600 euros. À terme, sa dotation sera bien de 12 000 euros.
On nous a indiqué que le tunnel pourrait avoir des effets jusqu'à quarante-six ans au plus.
Troisième exemple, une communauté d'agglomération de l'ouest de la France de 65 000 habitants percevait en 2015 une DGF totale de 5,3 millions d'euros, soit 73,16 euros par habitant. Sa nouvelle DGF spontanée s'élève à 7,8 millions d'euros, soit 107,5 euros par habitant. Ces montants ne sont pas plafonnés et ils ne comprennent pas non plus la majoration. Après garantie et plafond, le montant par habitant passe alors à 76,82 euros. Après contribution au redressement des finances publiques, sa DGF de 2016 s'élève à 4,8 millions d'euros, soit 66,35 euros par habitant.
Par conséquent, il n'y a pas de véritables gagnants dans la réforme, mais plutôt des « moins perdants ». Dans un département d'Île-de-France, une seule commune a une DGF supérieure à celle de 2015 après contribution au relèvement des finances publiques. Pour certains, la réforme atténue la baisse de dotations, pour d'autres, non. En tout cas, elle ne compense quasiment jamais la baisse de dotation.
Ces données ont été transmises à la commission des finances et dès lors tous les commissaires y ont accès. En revanche, elles ne sont pas rendues publiques par le Gouvernement.
Qu'en est-il du rapport sur la soutenabilité du FPIC, puisqu'il perdure ?
Les simulations concernent-elles toutes les communes et les EPCI, ou ne prennent-elles que des exemples ?
Vous trouverez dans les fichiers l'intégralité des communes et des EPCI.
Si on isole la réforme de la DGF de la baisse des dotations de 3,5 milliards d'euros, « toutes choses égales par ailleurs » comme disent les mathématiciens, deux tiers de collectivités gagneront à la réforme.
Enfin, la commission procède à l'examen du rapport de M. Maurice Vincent, rapporteur spécial, sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
Le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » est le support budgétaire des opérations conduites par l'État actionnaire. Je vous présenterai tout d'abord les évènements à signaler dans l'année écoulée pour ce compte et puis les aspects purement financiers.
L'année 2015 a tout d'abord été marquée par la mise en place du droit de vote double prévu par la loi du 29 mars 2014 visant à reconquérir l'économie réelle, dite loi « Florange », qui a pour objet de favoriser l'actionnariat de long-terme. Cela s'est déroulé généralement sans difficulté, à deux exceptions près.
Le conseil d'administration d'Air France a souhaité que l'assemblée générale des actionnaires se prononce sur le sujet. Cela a conduit l'État à porter sa participation au capital d'Air France de 15,88 % à 17,58 % pour 42 millions d'euros.
Chez Renault, qui fait encore l'objet d'une actualité particulière aujourd'hui sur ce sujet, l'État a porté sa participation de 15,01 % à 19,73 % pour près de 1,3 milliard d'euros, afin de garantir la mise en place du droit de vote double en assemblée générale des actionnaires.
À titre personnel, il me semble que c'est une bonne disposition qui permet à l'État de mieux faire valoir ses décisions stratégiques et, dans certains cas, de s'assurer des recettes de cession sans perte d'influence.
Le deuxième évènement important concerne Areva, qui connaît d'importantes difficultés et va subir un plan de restructuration. Areva va céder sa filiale de construction de réacteurs à EDF, avec éventuellement une prise de participation de partenaires industriels étrangers, qui pourraient venir du Japon ou de Chine compte tenu du développement attendu du marché chinois. S'agissant de la société Areva elle-même, qui se recentrerait sur les activités liées aux combustibles, l'État sera sans doute conduit à souscrire à une augmentation de capital dont le montant pourrait se situer entre 2 milliards d'euros et 3,5 milliards d'euros.
Je citerai également l'exemple du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB), que l'on pourrait presque considérer désormais comme une start-up car il se développe de manière très importante dans le domaine du traitement du plasma sanguin. Cette société, qui est pour l'instant détenue à 100 % par l'État, a lancé une augmentation de capital de 230 millions d'euros. Le LFB restera entièrement public au terme de l'augmentation de capital qui sera souscrite par Bpifrance, de manière tout à fait pertinente puisqu'il s'agit de permettre à cette société de poursuivre son développement grâce à la construction d'une usine ultra-moderne près d'Arras avec 500 emplois à la clef.
Dernier point, il avait été prévu l'année dernière la création d'un comité stratégique de l'État actionnaire, chargé d'évaluer dans la durée la stratégie et les objectifs de l'État actionnaire, de l'actualiser si nécessaire, et de juger de la performance de gestion de l'Agence des participations de l'État (APE). Je constate que ce comité n'a pas été mis en place.
S'agissant maintenant des aspects financiers, vous savez que, traditionnellement et de manière purement conventionnelle, il est prévu en loi de finances initiale 5 milliards d'euros de produit de cessions sur le compte d'affectation spéciale. C'est encore le cas le cas en 2016.
S'agissant de l'exercice 2015, ce montant n'a pas encore été vérifié, du moins pour ce qui concerne le premier semestre, puisque nous en sommes à environ 1,7 milliard d'euros de ventes. Celles-ci ont principalement concerné la cession de titres Safran, pour de 1,033 milliard d'euros, l'ouverture du capital de l'aéroport de Toulouse-Blagnac pour 308 millions d'euros, et la cession de titres Engie, pour 206 millions d'euros. Nous verrons si d'autres décisions sont prises pour se rapprocher de l'objectif de 5 milliards d'euros.
En 2016, nous pouvons nous attendre à la cession de la participation de l'État dans les aéroports de Nice et de Lyon qui a été autorisée par la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances. J'insiste sur le fait que cette opération porterait sur les sociétés de gestion des aéroports et non pas sur les infrastructures.
S'agissant de Renault, il était prévu que l'État ramène sa participation à son niveau initial de 15,01 % dans l'année. Cette opération n'a pas encore été réalisée, pour des raisons diverses tenant notamment aux conditions de marché pour l'instant peu favorables.
Compte tenu du faible niveau des cessions, la contribution du compte d'affectation spéciale au désendettement de l'État devrait être de l'ordre de 2 milliards en 2015, alors qu'un versement de 4 milliards d'euros était prévu en loi de finances initiale. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit un versement de 2 milliards d'euros du compte d'affectation spéciale vers la caisse de la dette publique.
Le secteur énergétique - à travers des entreprises comme EDF, Engie et Areva - est surreprésenté dans le portefeuille coté de l'État, dont la valeur est donc très sensible à l'évolution du cours de bourse de ces sociétés. Entre avril 2014 et avril 2015, la valeur du portefeuille a ainsi reculé de 2,3 milliards d'euros à 83,1 milliards d'euros, soit une baisse de 2,73 %. Cette évolution s'est depuis accentuée et la baisse est maintenant de l'ordre de 12 % sur un an.
Il faut toutefois rester prudent. Je vous rappelle la forte hausse constatée sur la période précédente, qui s'est élevée à 40,75 % du 30 avril 2013 au 30 avril 2014, s'expliquait déjà principalement par l'évolution du cours de ces actions.
Lors de l'audition du président directeur général (PDG) de la Banque publique d'investissement (BPI), nous avions pu constater que le capital du Fonds stratégique d'investissement (FSI), désormais intégré à la BPI, n'avait pas été entièrement libéré. Est-ce un cas unique ?
Par ailleurs, j'ai lu dans votre rapport que figurait dans le programme des avances d'actionnaire de l'Agence française de développement (AFD) à la Société immobilière de la Guyane (SIGUY). D'autres sociétés immobilières des départements d'outre-mer sont-elles concernées ? Possède-t-on une évaluation de leurs besoins de financement à venir ?
Lors de la vente d'une partie d'Alstom à General Electrics, le PDG d'Alstom, Patrick Kron, nous avait dit que son groupe conserverait son « pôle transports », auquel l'État apporterait deux milliards d'euros. Qu'en est-il ? Par ailleurs, je crains qu'Areva ne connaisse d'importantes difficultés dans les mois à venir.
Bien que libéral d'un point de vue économique, je crois que nous avons vraiment besoin d'un fonds souverain et je souhaitais saluer la montée au capital de Renault réalisée récemment par le Gouvernement afin de préserver le pouvoir de décision de l'État au sein de l'entreprise. Les intérêts stratégiques français doivent être protégés.
Le comité stratégique de l'État actionnaire composé de personnalités indépendantes et qualifiées sera-t-il une autorité administrative indépendante supplémentaire ?
Au 31 juillet, le programme de cessions est très en-deçà des 5 milliards d'euros envisagés pour 2015. Du coup, la participation au désendettement de l'État passerait de 4 milliards d'euros à 2 milliards d'euros, les dividendes sont en baisse, la valeur globale du portefeuille de l'État recule... Est-ce lié essentiellement à Areva ? Est-ce parce qu'il y a eu un changement à la direction de l'Agence des participations de l'État (APE) ?
Il n'y a pas d'autres participations de l'État en dehors de celles qui sont présentées dans le rapport. L'actionnariat de la BPI est réparti pour moitié entre l'État et la Caisse des dépôts et consignations et, à ma connaissance, aucune évolution significative n'est prévue sur ce point. En ce qui concerne les sociétés immobilières des DOM, seule celle dont il est question dans mon rapport relève du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
Je rejoins les analyses de Francis Delattre sur la nécessité pour notre pays de disposer d'un fonds souverain qui puisse servir de pôle d'investissements à long terme et d'investisseur stratégique dans un certain nombre de domaines. Avec le recul, l'intervention de l'État dans le cas de Renault était véritablement positive.
Concernant Alstom, le président Patrick Kron avait évoqué la possibilité pour l'État d'acheter 20 % du capital de l'entreprise une fois que General Electrics aurait récupéré la division « énergie ». Cette option de 2 milliards d'euros n'a pas encore été levée. L'État peut encore y avoir recours dans les mois à venir mais il n'a pas l'obligation de le faire et se déterminera selon des considérations stratégiques. Il sera également attentif à l'évolution du cours de bourse, qui pourrait l'amener à attendre un peu.
Le comité stratégique n'est pas une nouvelle autorité administrative indépendante, il s'agit d'un groupe d'experts chargé d'éclairer les décisions de l'État actionnaire. Il n'a pas été mis en place pour le moment.
Il est tout à fait exact que les cessions de participations sont actuellement en retrait par rapport à ce qui était prévu par la loi de finances pour 2015. Je ne pense pas que le changement de direction à l'APE en soit l'explication. La situation du marché n'a tout simplement pas permis au Gouvernement de vendre des actions dans de bonnes conditions.
Ainsi, EDF subit comme d'autres opérateurs la baisse des prix de l'électricité sur le marché international, ce qui entraîne la diminution de sa valorisation. Dans le cas de Renault, l'État a été obligé de monter au capital pour faire jouer la possibilité de vote double des actionnaires de long terme prévue par la loi « Florange » : il pensait récupérer cet argent rapidement mais n'a pas pu le faire à cause de la situation de Volkswagen qui a fait baisser la valorisation des autres constructeurs automobiles. Enfin, les difficultés financières d'Areva avaient été sous-estimées. C'est ce contexte général qui explique que l'État ait moins cédé de participations et ait réduit le versement à la Caisse de la dette publique par rapport que ce qui était initialement envisagé.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ».
La réunion est levée à 18 h 07.
La réunion est ouverte à 14 h 29.