Intervention de André Trillard

Réunion du 30 septembre 2015 à 14h30
Accord france-russie relatif à des bâtiments de projection et de commandement — Adoption définitive en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de André TrillardAndré Trillard :

Troisièmement, je m’interroge sur l’argument selon lequel l’accord permet à notre pays de recouvrer la pleine propriété des bateaux, rendant possible leur revente le plus rapidement possible.

L’annonce du rachat des BPC par les Égyptiens est une bonne nouvelle, mais ne croyons pas que la France soit le seul fournisseur de l’Égypte en matière d’armement. Pour preuve, la commande à la Russie d’hélicoptères Ka-52 Alligator, compatibles, d’ailleurs, avec les BPC français.

Enfin, n’oublions pas qu’en juin dernier la Russie et l’Égypte ont organisé des manœuvres navales communes.

La clause de réexportation sans veto russe permet de limiter les pertes financières pour l’État. Grâce à la revente des BPC, ce coût sera ramené entre 200 millions et 250 millions d’euros – nous disposerons bientôt du chiffre exact.

Ma quatrième remarque porte précisément sur ce que vous ne dites pas, je pense aux risques industriels et commerciaux à terme.

Les garanties de la COFACE, fussent-elles à 100 %, ne couvrent pas les pertes relatives aux fuites de savoir-faire. Quid de la diffusion de maîtrise technologique rare, résultant de plusieurs années d’investissement dans la recherche et développement de la part des groupes industriels français et des PME sous-traitantes ?

Pendant plusieurs mois, mon département, la Loire-Atlantique, a accueilli 400 marins et experts russes. Ces derniers ont reçu des formations de très haut niveau prévues dans le cadre des accords de 2011.

Nous avons dédommagé la Russie pour ces formations, alors même que les équipages ont eu accès à des technologies hautement classifiées et sensibles.

Croyez-vous que cet accord efface des mémoires russes les maîtrises de logiciels dispensées à Saint-Nazaire ?

De même, je pense aux EDAR de la CNIM. Dans le secteur des engins amphibies de débarquement, la France est à la pointe, mais la diffusion de ce savoir-faire pourrait être très préjudiciable.

Enfin, je rappelle aussi une autre réalité : celle du marché. Oui, en 2015, les exportations d’armement françaises ont battu des records, mais c’est aussi le résultat de décennies d’investissements, que nous serions incapables de fournir aujourd’hui.

Prenons garde à ne pas altérer notre crédibilité commerciale, en particulier au moment où le marché de l’armement est en pleine expansion et où nous faisons face à une concurrence effrénée.

Pour toutes ces raisons, le groupe Les Républicains ne soutiendra pas le texte, certains s’abstiendront, d’autres voteront contre. Pour ma part, je m’abstiendrai, car nous n’avons pas l’habitude dans le département d’avoir des bateaux au rebut parmi ceux que nous fabriquons à Saint-Nazaire. Nous sommes généralement fiers de nos fabrications et nous aimons bien les voir naviguer.

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