Intervention de Marisol Touraine

Réunion du 30 septembre 2015 à 21h30
Modernisation de notre système de santé — Article 46 bis

Marisol Touraine :

Je veux évoquer à mon tour les grandes orientations et le sens de cet article 46 bis.

À entendre certains propos – ceux de Mme la rapporteur, je tiens à le préciser, n’ont pas été de cette nature –, on a le sentiment que la législation sur le droit à l’oubli existerait dans notre pays depuis des années et qu’il y aurait des difficultés pour la faire progresser. Mais telle n’est pas du tout la réalité ! En fait, pour la première fois – et nous agissons en pionniers –, nous allons inscrire dans la loi française le principe du droit à l’oubli, principe qui va être décliné. Et c’est un saut qualitatif absolument majeur ! Je voudrais que chacune et chacun prenne bien conscience de la transformation radicale que cela représente !

À la suite de discussions entre les différentes parties prenantes, l’avenant à la convention AERAS a été signé le 2 septembre dernier. J’y insiste, dix-sept associations sont signataires ! Elles sont engagées dans ce processus d’amélioration de la vie quotidienne de centaines de milliers, voire de millions, de nos concitoyens, qui, après avoir souffert d’un cancer, ne sont plus considérés comme malades par leur médecin, contrairement à l’opinion de leur assureur.

Pourquoi alors inscrire dans une loi les dispositions dont nous discutons, s’il s’agit de renvoyer les évolutions à la convention ? Deux raisons expliquent ce choix.

Tout d’abord, lorsque le présent projet de loi a été élaboré, cet avenant n’était pas signé. Ainsi, les parties prenantes potentielles ont été avisées de la volonté du Gouvernement d’avancer dans cette direction. Elles savaient donc que le législateur se substituerait à la négociation faute de signature.

Maintenant que la convention a été modifiée, il faut que le législateur pose une règle qui permettra ensuite au Gouvernement de s’assurer de la bonne mise en œuvre de cette convention.

Vous l’avez dit vous-même, madame la rapporteur, voilà maintenant une quinzaine d’années, des conventions impliquant des assureurs n’ont pas donné les résultats escomptés. C’est précisément parce que le Gouvernement veut faire confiance à la démarche conventionnelle tout en marquant sa vigilance que nous vous soumettons, mesdames, messieurs les sénateurs, cet article visant à encadrer le dispositif.

Certains considèrent que nous n’allons pas assez loin, mais je veux attirer l’attention sur le fait que dispositif est en train d’être mis en place et qu’il est fondé sur des évaluations scientifiques. Sur certains points, nous pouvons sans doute le faire évoluer un peu.

J’émettrai d’ailleurs tout à l’heure un avis favorable sur un amendement relatif aux cancers pédiatriques, car celui-ci est motivé par les recommandations de l’Institut national du cancer, l’INCA.

Je suis en revanche défavorable à d’autres amendements proposés, non que je sois opposée à ce que nous allions dans le sens suggéré un jour, mais parce que, si nous bousculons le dispositif qui vient à peine d’être établi, nous prenons le risque d’un blocage.

En outre, pour ne prendre que cet exemple, nous ne disposons pas de la base scientifique nous permettant de ramener le délai ouvrant le droit à l’oubli de quinze à dix ans.

J’attire donc votre attention sur le fait que nous proposons une avancée absolument décisive. Alors que l’on parle de droit à l’oubli depuis des années, c’est la première fois qu’un dispositif le concrétise. Le droit à l’oubli est non pas une pétition de principe, mais une réalité qui s’appuie sur des données scientifiques, en particulier celles qui émanent de l’INCA.

Par-delà les attentes d’approfondissement du dispositif auxquelles je suis sensible, je souhaite vivement que notre débat ce soir ne fasse pas oublier l’avancée remarquable que constituent la signature de l’avenant à la convention et l’inscription dans la loi de ce droit à l’oubli.

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