Intervention de Vincent Delahaye

Réunion du 29 octobre 2015 à 10h30
Échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers — Adoption d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de Vincent DelahayeVincent Delahaye :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la lutte contre la fraude fiscale constitue pour notre pays, pour l’Europe et, plus largement, pour le monde une véritable priorité politique.

De fait, de nombreuses études soulignent chaque année le manque à gagner considérable résultant de la fraude fiscale. Rien que pour notre pays, les différentes formes d’évasion et de fraude fiscales représenteraient environ 60 milliards d’euros par an ! L’état actuel de nos finances publiques rend cette situation encore plus insupportable. De là l’urgente nécessité d’agir.

Voilà longtemps que notre assemblée a pris conscience de l’importance de ces enjeux. En juillet 2012, une première commission d’enquête, après avoir travaillé sur l’évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales, a conclu à l’impérieuse nécessité de faire cesser la fraude fiscale. Une seconde commission d’enquête, formée en 2013, a étudié le rôle des banques et des acteurs financiers dans l’évasion des capitaux ; elle s’est intéressée aux mécanismes des évasions fiscales, afin de mieux connaître les fraudes pour mieux les combattre. Le Sénat a constamment alerté l’opinion publique et l’exécutif sur la nécessité d’agir vite et fort.

Il a toutefois fallu attendre l’exemple des États-Unis, qui ont doté leur administration fiscale de moyens inédits par l’adoption en 2010 de la loi FATCA, pour voir les choses évoluer en Europe. Malgré le temps perdu, la France peut se féliciter de sa forte mobilisation pour faire aboutir un processus auquel plusieurs de nos partenaires européens étaient hostiles.

Conscient de l’importance d’un accord international dans ce domaine, l’exécutif a signé à Berlin, le 29 octobre 2014, un accord multilatéral entre autorités compétentes concernant l’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers. Cet accord, signé sous l’égide de l’OCDE, comporte une avancée majeure : alors que, jusqu’à présent, la coopération fiscale entre États reposait sur l’échange d’informations à la demande entre les différentes administrations fiscales, il prévoit l’automatisation des échanges d’informations.

Ambitieux par le caractère des informations dont il prévoit la transmission, cet accord l’est également par l’étendue des comptes qu’il rend déclarables et par les types d’institutions financières qu’il soumet à l’obligation déclarative. Il devrait donc marquer une réelle avancée dans la lutte contre la fraude fiscale. Dans une certaine mesure, il a même déjà porté ses fruits, la perspective d’un recul du secret bancaire ayant poussé certains de nos contribuables à régulariser leur situation.

Le texte de l’accord présente néanmoins certaines faiblesses, comme l’a souligné M. le rapporteur, dont nous tenons à saluer le travail. Ainsi, contrairement à son équivalent américain, l’accord multilatéral de l’OCDE n’est pas contraignant. Nous sommes encore loin de la loi américaine qui contraint tous les établissements financiers du monde à transmettre à l’Internal Revenue Service, l’IRS, l’ensemble des informations dont ils disposent sur les comptes des contribuables américains, sous peine d’être exclus du marché américain ! Nous devons donc rester vigilants et mobilisés, afin que la plupart des États de la planète rejoignent le dispositif d’échange automatique des données.

De même, l’accord présente la faiblesse d’être incompatible avec la loi américaine. De fait, les normes et les méthodes de la loi FATCA et celles de l’accord de l’OCDE sont malheureusement très différentes. L’échange automatique devrait tendre à long terme vers un standard unique, multilatéral et réciproque : ce n’est pas le chemin que nous empruntons avec cet accord.

En dépit de ces imperfections, l’accord ouvre la voie à un progrès majeur dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales des particuliers à l’échelle internationale. Les sénateurs du groupe UDI-UC sont donc favorables à son approbation !

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