Intervention de André Gattolin

Réunion du 29 octobre 2015 à 10h30
Échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers — Adoption d'un projet de loi dans le texte de la commission

Photo de André GattolinAndré Gattolin :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, comme j’aurais aimé ne pas avoir à bouder mon plaisir ! Parce qu’avec cet accord sur l’échange automatique d’informations fiscales, c’est en effet une vieille revendication, notamment des écologistes, qui est enfin satisfaite.

Dans le réseau des pays signataires de l’accord, les banques n’auront désormais plus le droit de vendre leur complicité aux contribuables qui cherchent à escamoter des avoirs à l’étranger. Avec ce texte, obligation leur est faite de déclarer tout ou presque aux administrations compétentes. Énoncé ainsi, cela paraît si simple, si évident. Et pourtant, quel parcours du combattant pour en arriver à cette mesure de bon sens et de justice ! Le plus probable, et le plus triste sans doute, c’est que rien n’aurait été fait si les États-Unis et leur fameuse loi FATCA n’avaient pas unilatéralement imposé cette transparence.

Si on veut bien être lucide, ce que cet épisode dit de l’Europe est proprement terrifiant. La concurrence entre États membres y est si forte, la prégnance des intérêts privés si puissante, que même la lutte contre le secret bancaire n’aura pas réussi à cristalliser une conscience collective. L’intérêt général européen aura finalement été défendu par une bravade américaine ! Si l’on croit encore au projet européen – c’est mon cas –, ne serait-il pas temps d’avoir un sursaut d’orgueil ?

Nous discutons actuellement d’un sujet du même ordre ; je veux parler de la transparence fiscale des entreprises, pays par pays, qui permettrait de se faire une idée du rapport entre leur activité, leur profit et leur impôt dans chaque pays où elles sont implantées. Au niveau français, nous l’avons obtenu pour les banques grâce à des amendements adoptés dans le cadre du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires. Je me souviens d’ailleurs que le ministre des finances de l’époque, M. Moscovici, s’était montré défavorable à nos amendements en commission, arguant que la transparence fiscale attentait à la compétitivité de nos banques. Heureusement, il s’était ravisé en séance plénière.

Plus récemment, les eurodéputés écologistes ont réussi à amender la directive relative aux droits des actionnaires en étendant la transparence à tous les grands groupes et en y intégrant la question des rescrits fiscaux. À nouveau, il est malheureusement permis de penser que ce succès totalement inattendu est largement dû à un facteur extérieur aux institutions européennes – je pense naturellement au fameux scandale LuxLeaks. D’ailleurs, la Commission européenne a depuis lors entrepris une longue démarche d’obstruction tendant à supprimer ou, du moins, à édulcorer les dispositions voulues par le Parlement européen.

Monsieur le secrétaire d’État, pourrions-nous compter sur l’engagement public de la France en faveur d’une application de la transparence fiscale à tous les grands groupes ? Ne pourrions-nous pas aller jusqu’à donner l’exemple, comme avec les banques, sans considérer que l’opacité participe de la compétitivité des entreprises ?

Évidemment, mes chers collègues, les écologistes voteront en faveur de ce texte, heureux de constater que celui-ci voit enfin le jour, mais en restant lucides sur sa genèse.

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