Puisque nous allons débattre, n’oublions pas que l’enjeu principal semble être la question de l’autonomie du malade à choisir les conditions dans lesquelles il souhaite mourir.
Bien que l’on puisse éventuellement modifier les circonstances et conditions susceptibles de pousser un malade à demander sa mort, il y aura toujours des patients qui réclameront une euthanasie ou un suicide assisté, en raison de convictions purement individuelles. La mort induite d’un individu peut-elle être acceptable, ou non ? Même si l’on répond à tous les autres éléments importants dans la prise en charge des situations de fin de vie, le problème moral né de cette question persiste. Ainsi, on peut faire diminuer l’apparition des demandes d’euthanasie par une prise en charge tenant compte des besoins individuels des malades, mais on ne pourra jamais éliminer toutes les demandes d’euthanasie ou de suicide assisté.
Est-ce qu’accorder le droit de mourir ainsi est une avancée dans le respect de l’autonomie du malade ? C’est une question morale à laquelle une société ne peut échapper, mais qu’une meilleure connaissance du contexte des fins de vie peut éclairer.
Pour conclure mon propos, je dirai qu’il me semble que la proposition de loi créant de nouveaux droits pour les malades et les personnes en fin de vie, telle que réécrite par la commission des affaires sociales, qui, monsieur le rapporteur pour avis, a intégré plusieurs amendements de la commission des lois, réussit le tour de force d’être à la fois une avancée et le fruit d’un consensus. Je me félicite de la plupart des orientations de ce texte de loi, qui vont dans le sens d’une plus grande autonomisation de l’individu, même si celle-ci reste encore à parfaire.
Avant de laisser place au débat, je citerai une nouvelle fois le professeur Emmanuel Hirsch, pour qui « il n’est plus l’heure de se soucier de l’état d’esprit que révèle l’urgence législative visant “à bénéficier d’une assistance médicalisée pour terminer sa vie dans la dignité” ».
La moindre infraction au consensus présent est considérée avec suspicion et réprouvée, surtout par les dépositaires de la sagesse publique : ils se sont prononcés à ce propos de manière définitive.
De sondages en concertations publiques, de consultations en rapports et en avis, de concessions en renoncements, notre société apaisée est prête aux avancées préconisées.
La sédation profonde et continue est avancée comme une évolution majeure en matière de droit de la personne malade ou en fin de vie. Les problèmes liés à la fin de vie ne concernent pourtant pas uniquement les patients. On constate, de même, un malaise chez les professionnels confrontés aux fins de vie et aux questions touchant aux bonnes pratiques. Ces problèmes avaient notamment été mis en évidence à l’occasion de différentes affaires, dont celle de Vincent Humbert en 2003 fut la plus marquante et, probablement, la plus médiatisée.
Dans cette atmosphère favorable au respect de l’autonomie du malade, mais opposée à tout acte qui provoquerait sa mort, l’approche des soins palliatifs a pu se développer assez facilement. Elle participe au renforcement des droits de l’usager, tout en permettant à chacun de bénéficier d’une fin de vie aussi digne que possible.