Je dirai seulement quelques mots, car nous avons déjà eu de riches échanges lors de la première lecture au sujet des ambitions de cette proposition de loi. Nous avons entendu les inquiétudes des uns, réaffirmées à cette tribune par certains orateurs, et les regrets des autres, qui auraient souhaité que le texte aille plus loin.
Nous avons perçu au travers des interventions qui se sont succédé la volonté exprimée par tous de chercher à répondre, dans le respect des convictions de chacun, aux préoccupations de notre société.
Je commencerai par remercier l’ensemble des orateurs du ton adopté lors de cette discussion générale et de leur recherche d’un compromis, d’un point d’équilibre, d’un consensus peut-être impossible.
Je remercie également, bien entendu, les rapporteurs, le président et les membres de la commission des affaires sociales, ainsi que tous les orateurs de la tonalité apaisée de leurs propos, même s’ils n’ont pour autant rien caché de leurs inquiétudes, de leurs attentes et de leurs regrets.
De même, le travail réalisé par le Gouvernement a précisément été de chercher, par-delà les convictions des uns et des autres, un point d’équilibre permettant de mieux prendre en compte les attentes de notre société. En effet, les différents orateurs l’ont dit, nous avons tous été confrontés – ou nous le serons un jour, pour nous-mêmes ou pour nos proches – aux interrogations que soulève ce texte.
Il arrive, et c’est heureux, que la mort survienne dans des conditions telles que ces questions nous soient épargnées. Mais il arrive aussi, de plus en plus souvent, que nous soyons conduits à nous interroger sur la prolongation des traitements.
Ces traitements méritent, toujours, d’être prolongés. Pour autant, doivent-ils forcément l’être ? Au regard de ce que chacun d’entre nous conçoit et attend de la vie en ses derniers moments, cette question doit être posée.
Encore une fois, nous devons respecter les convictions de tous, quels que soient leurs fondements. Mais je tiens à dire aussi, de la manière la plus forte qui soit, que la proposition de loi que le Gouvernement vous propose d’adopter, mesdames, messieurs les sénateurs, est un texte de liberté, et en aucun cas de contrainte pour qui que ce soit.
M. le rapporteur pour avis de la commission des lois s’est inquiété d’une possible automaticité. Or il n’y en a pas et il ne peut pas y en avoir ! Je tiens à le dire ; j’aurais pourtant pu concevoir, vous le savez, que le texte aille plus loin. Lorsqu’il s’agit du choix de la vie ou de la mort, il ne peut pas y avoir d’automaticité. Ce serait une perspective absolument insupportable ! Voilà pourquoi cette proposition de loi est, je le répète, un texte de liberté.
Vous avez rappelé, monsieur Barbier, tout en défendant vos convictions, que j’avais présenté ce texte comme une possible étape. « Une étape vers quoi ? », m’avez-vous demandé.
Quant à M. Godefroy, il a indiqué qu’il se résoudrait à accepter ce texte précisément parce que j’avais expliqué qu’il s’agissait d’une étape. Il s’est également interrogé sur le rythme auquel pourrait avancer la législation en la matière.
Ma réponse est simple : ce texte est une étape vers ce que souhaiteront les parlementaires !
Aujourd’hui, un point d’équilibre a été trouvé entre ceux qui auraient voulu aller plus loin et ceux qui auraient préféré que l’on ne modifie rien.
À ceux qui auraient souhaité aller au-delà, je réponds qu’il leur appartiendra de poursuivre ce débat au sein de la seule enceinte habilitée à se prononcer sur cette question, c’est-à-dire le Parlement, et de continuer à défendre cette attente, cet espoir et cette volonté.
À ceux qui, au contraire, veulent en rester là, je dis que de toute façon la société n’est pas prête à aller plus loin, sauf à susciter sur ces questions des débats sans doute vifs.
Certains, à l’Assemblée nationale, ont exprimé le souhait d’aller plus avant. Adopter leurs préconisations aurait probablement provoqué des réactions encore plus vives que celles que nous avons entendues dans cet hémicycle en première lecture.
Je respecte tout à fait ce que le Parlement décide à un moment donné. S’il n’y a pas dans les prochaines années d’autre travail législatif sur le sujet, c’est parce que les parlementaires auront jugé que c’est mieux ainsi. Il ne m’appartient pas de déterminer à l’avance ce qui sera fait à l’avenir ! Mais, à l’évidence, la porte reste ouverte ; elle l’est en tout cas pour certains d’entre vous et pour une partie de nos concitoyens.
Voilà ce que je voulais dire à ce stade de notre débat. Des questions importantes ont été posées, et je ne les laisse pas de côté.
J’ai déjà évoqué le malaise du Gouvernement s’agissant de l’article 2 tel qu’il est issu des travaux de la commission. Nous reviendrons, notamment, sur la question de l’hydratation. Sans doute y a-t-il moins de distance que ce que l’on croit pour ce qui concerne le critère de l’inutilité qui n’a pas le même sens aux articles 2 et 3. Peut-être y a-t-il là un éclaircissement à apporter ; nous le ferons.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous propose de débattre de ces questions essentielles à l’occasion de l’examen des articles. Je m’en tiendrai, pour l’instant, aux remerciements et au rappel des objectifs poursuivis par le Gouvernement.