Mon avis sera plus nuancé.
Je rappelle une fois encore qu’il s’agit des conditions d’accès à une formation de trente et un mois : sauf à considérer qu’un doctorat en droit est sans contenu et sans valeur, on peut penser que justifier d’un tel diplôme est suffisant pour se porter candidat…
Je comprends les positions défendues respectivement par M. Collombat et M. Mohamed Soilihi.
D’un côté, on peut vouloir, dans la perspective d’une ouverture de la magistrature sur la société, élargir l’éventail des qualifications demandées pour accéder non pas à la magistrature – j’y insiste –, mais à la formation à l’ENM.
De l’autre, on peut estimer que la magistrature n’est pas une profession comme une autre. Il s’agit de l’exercice d’une autorité constitutionnelle, ce qui emporte des exigences considérables : la mission d’un magistrat consiste à juger au nom du peuple, en ayant reçu délégation de la société pour exercer des fonctions extrêmement lourdes, qui peuvent l’amener, en matière pénale, à priver quelqu’un de sa liberté.
Une telle fonction nécessite une grande maturité, un sens aigu des responsabilités, une indépendance et une impartialité que nous requérons sur le plan subjectif, mais que nous voulons organiser aussi sur la base de conditions objectives, permettant d’apporter un certain nombre de garanties.
Dans cette perspective, permettre à des titulaires d’un doctorat en droit d’accéder à la formation au sein de l’École nationale de la magistrature ne me paraît pas extravagant.
Je rappelle que, avant la création de l’Institut d’études judiciaires, ancêtre de l’ENM, on accédait à la magistrature par ce que j’appellerai la « filière dynastique »… L’Institut d’études judiciaires, créé en 1958 et transformé en 1971, si ma mémoire est bonne, a introduit une certaine mixité sociale, ou a ouvert, à tout le moins, l’accès à la formation à des personnes méritantes, talentueuses et travailleuses qui n’y étaient pas socialement prédestinées.
On peut concevoir, dans le même esprit, que des docteurs en droit puissent accéder à l’ENM pour y suivre une formation de trente et un mois en vue de devenir magistrats.
En conclusion, le Gouvernement émet un avis favorable.