Intervention de Annie David

Réunion du 24 mars 2009 à 21h45
Simplification et clarification du droit — Article 15 bis

Photo de Annie DavidAnnie David :

L’article 15 bis, ajouté au texte initial sur l’initiative du Gouvernement, vise à supprimer l’obligation de transmission à l’inspection du travail du rapport économique et financier annuel qui incombe aux entreprises de plus de cinquante salariés, alors même que ce rapport comporte des informations particulièrement importantes : recours aux contrats de travail à durée déterminée, temps partiel, évolutions des salaires, de la qualification, de la formation, etc.

Pourquoi dès lors supprimer une telle source d’informations en direction de l’inspection du travail ?

Selon le rapport de la commission des affaires sociales, « les inspecteurs du travail n’ont guère le temps d’examiner les nombreux rapports qui leur sont adressés pendant l’année et qui sont archivés aux frais de l’administration ».

Le cynisme d’un tel argument est insupportable quand on sait à quel point l’inspection du travail manque cruellement de moyens et de personnels. Selon un rapport du Bureau international du travail, on comptait en 2005 seulement 1 977 agents de contrôle pour les 18 millions de salariés relevant du secteur privé, dont les conditions de travail sont rendues de plus en plus difficiles par la précarisation du travail et l’éclatement du tissu économique.

De plus, ces agents doivent faire face aux menaces et autres incivilités qui ont augmenté ces dernières années.

Bref, c’est non par choix que les inspecteurs du travail décident de ne pas prêter attention aux rapports économiques et financiers des entreprises, mais à cause d’un manque cruel de moyens.

Une autre des conséquences est d’ailleurs qu’un trop grand nombre de procès-verbaux restent classés sans suite par les tribunaux.

Selon moi, la réponse à ma question est qu’il s’agit en réalité de donner satisfaction à l’une des anciennes revendications du MEDEF, qui n’était encore qu’en partie satisfaite et qui trouve décidément auprès du Gouvernement une oreille attentive !

Le manque de moyens accordés à nos inspections du travail est une raison de demander le retrait de cet article, mais ce n’est pas la seule.

En effet, l’article 15 bis est entaché d’une grave incohérence juridique.

À cause d’une erreur de rédaction, son adoption reviendrait à rendre les dispositions de l’article L. 2323-47 du code du travail, auquel il se réfère, totalement contradictoires : un alinéa obligerait à transmettre un rapport alors que le précédent alinéa – le troisième, si l’article 15 bis était adopté – autoriserait à ne pas transmettre ce même rapport… sauf à vouloir supprimer vraiment cet alinéa, qui prévoit actuellement que « les membres du comité d’entreprise reçoivent le rapport annuel quinze jours avant la réunion », ce qui serait encore une raison grave de repousser l’article.

Tant sur le fond que sur la forme, l’article 15 bis n’est donc pas acceptable en l’état, et nous ne voyons pas d’autre issue que sa suppression.

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