Le Gouvernement propose également de supprimer l’article 15 du projet de loi, conformément à un engagement que j’ai pris publiquement voilà plusieurs semaines.
Initialement, dans le cadre de la réorganisation des contentieux et afin également de permettre aux magistrats et aux greffiers de se concentrer sur leurs missions juridictionnelles, nous avions envisagé de contraventionnaliser les délits de défaut de permis de conduire et de défaut d’assurance, lorsque ces faits sont constatés la première fois et sauf dans certaines circonstances, délits qui, dans 88 % des cas, font l’objet non pas d’une audience correctionnelle, mais d’une ordonnance pénale donnant lieu à une amende.
La moyenne des amendes qui ont été prononcées sur l’ensemble du territoire varie entre 250 euros et 450 euros – nous avons toutefois trouvé le cas d’une amende de 108 euros et celui d’une amende de 1000 euros.
Le délai moyen de traitement de ces délits, quant à lui, varie de sept à quatorze mois, pour un taux de recouvrement faible.
Voilà pourquoi nous avions décidé de transformer le défaut de permis ou d’assurance, lorsque ces faits sont constatés la première fois, en une contravention de la cinquième classe assujettie à la procédure de l’amende forfaitaire. Ces infractions auraient été constatées par procès-verbal électronique et punies d’une amende forfaitaire de 500 euros.
En revanche, en cas de récidive, le délit demeurait et la peine encourue passait de un an à trois ans de prison et l’amende encourue de 3 750 euros à 35 000 euros, ce qui a fait l’objet de discussions au Conseil d’État.
Je précise que la mesure que nous proposions n’était pas nouvelle, puisque, entre 1985 à 2004, pendant une vingtaine d’années donc, ces deux infractions étaient de nature contraventionnelle.
Nous avons étudié les chiffres de la sécurité routière – notre préoccupation première – au cours de cette période et nous n’avons observé aucune augmentation de la mortalité. Au contraire, les chiffres ont connu une tendance à la baisse en raison de la politique très volontariste menée dans ce pays pour faire reculer l’insécurité routière.
En conclusion, quel que soit le régime de sanction – délit ou contravention pour la première infraction –, on n’a observé aucun facteur d’aggravation de l’insécurité routière.
Nous avons étudié la situation dans d’autres pays de l’Union européenne – Royaume-Uni, Pays-Bas, Danemark, Suède –, pays dans lesquels ces infractions sont de type contraventionnel. Ceux-ci obtiennent des résultats sensiblement meilleurs que les nôtres en matière de sécurité routière.
Nous avons évidemment eu le souci de rendre efficace la sanction du défaut de permis et du défaut d’assurance, mais aussi de dégager du temps pour la surveillance et la prévention. Les chiffres de l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière l’attestent : l’efficacité en matière de sécurité routière tient surtout aux actions qui sont menées dans ces deux domaines.
Des travaux parlementaires émanant tant de l’Assemblée nationale que du Sénat ont montré que cette contraventionnalisation rendait la sanction plus efficace.
Il se trouve que cette proposition du Gouvernement a suscité un émoi, que nous comprenons sans difficulté. Nous-mêmes avons fait montre d’une grande prudence au cours de ce travail préparatoire qui s’est étalé sur sept à huit mois et qui a notamment impliqué le délégué interministériel à la sécurité routière. En effet, parce que nous savons la dimension psychologique de cette infraction, nous avons veillé à ce que la réponse pénale qui doit y être apportée soit à la fois cohérente avec la politique menée par le Gouvernement en la matière et acceptable socialement en ne heurtant pas la sensibilité de la société.
J’ai moi-même reçu les représentants des associations de victimes, avec lesquelles nous travaillons régulièrement. D’une façon générale, au terme des deux heures de réunion, ils ont reconnu que le système que nous proposions était plus efficace et bien conçu. Néanmoins, ils ont souligné que, tel qu’il avait été présenté à la fin du mois de juillet par les médias, il donnait à penser que les deux délits concernés feraient l’objet d’une sanction moindre du fait de leur contraventionnalisation ; la mesure semblait plus clémente. Une seule association s’est déclarée favorable au maintien de ce mécanisme.
Tenant compte de l’émoi de ces associations, j’ai donc pris l’engagement de vous soumettre un amendement de suppression de ladite disposition, tout en leur réaffirmant avec honnêteté qu’une telle mesure me paraît plus efficace, car elle permettrait aux forces de police et de gendarmerie de se rendre disponibles pour exercer des missions de surveillance et de prévention. Et je réitère mon propos devant vous, mesdames, messieurs les sénateurs.
En la matière, il est important que la société comprenne qu’il n’y a aucune baisse ni d’exigence ni de vigilance ; elle doit déceler dans la sanction de telles infractions un souci d’efficacité. Tel ne semblant pas être le cas, au nom du Gouvernement, je vous présente donc cet amendement de suppression.