Intervention de François Grosdidier

Réunion du 4 novembre 2015 à 21h30
Justice du xxie siècle — Article 15

Photo de François GrosdidierFrançois Grosdidier :

Personne dans cet hémicycle ne souhaite légiférer sous le coup de l’émotion. C’est bien la raison qui nous amène à soutenir ces amendements et à refuser la « dé-délictualisation » et la contraventionnalisation de certains délits.

La conduite sans permis ou sans assurance se banalise. Je n’ai pas l’habitude d’évoquer mon expérience personnelle, mais je me souviens que, lorsque mon père m’a expliqué les conséquences que pourrait entraîner la conduite d’un véhicule sans permis ou sans assurance, j’aurais préféré parcourir 100 kilomètres à pied plutôt que de prendre le risque de devoir payer toute ma vie un tel comportement, ne serait-ce que pendant un kilomètre. Or aujourd’hui, des délinquants routiers qui se considèrent comme de petits délinquants sont totalement inconscients des risques qu’ils prennent pour eux-mêmes et qu’ils font prendre aux autres.

À ce titre, il faut distinguer deux catégories : d’une part, des jeunes qui n’ont pas encore le permis ou qui n’ont pas les moyens de payer une assurance, et qui se livrent à ces déviances dans l’insouciance la plus complète ; de l’autre, des adultes, en tout cas des personnes plus âgées, qui sont des multirécidivistes de la contravention ou du délit routier. Les seconds ne doivent pas nous inspirer davantage de mansuétude que les premiers !

Il ne faut banaliser ni la conduite sans permis ou sans assurance, pas plus d’ailleurs que la consommation de stupéfiants – il s’agit là d’un autre sujet, mais, à mes yeux, il est essentiel, dans les deux cas, de conserver la qualification de délit.

On nous explique que, aujourd’hui, la justice est incapable de sanctionner avec la rapidité nécessaire. Cette rapidité est d’autant plus importante lorsque des jeunes sont en cause. Il ne s’agit en aucun cas de défendre une justice expéditive ! Mais force est de le constater, lorsque la sanction survient trop longtemps après la commission du délit, elle n’a plus aucune vertu pédagogique. Certains jeunes peuvent être rattrapés par une vieille affaire alors qu’ils ont renoué avec un bon comportement. D’autres, du fait même de la lenteur de la sanction, ont conçu un sentiment d’impunité qui les a déjà conduits à récidiver.

Aussi, la lenteur de la sanction n’est pas un bon argument. Si un délit est sanctionné trop tardivement, il faut se demander comment le réprimer dans un délai raisonnable. Mais surtout, il ne faut pas transformer ce délit en contravention : cela revient à démissionner !

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