Merci de l'intérêt que vous portez au budget de la gendarmerie nationale qui, comme la police nationale, est plus que jamais aux avant-postes de la lutte contre le terrorisme, contre la délinquance et la criminalité et pour le maintien de l'ordre républicain. C'est dans un contexte empreint de gravité, marqué par des pertes humaines - je pense en particulier à la mort de Laurent Pruvot à Roye - que je vous présente un budget pour 2016 qui réaffirme la priorité donnée à la sécurité.
La France s'est engagée à réduire ses dépenses publiques de 50 milliards d'euros en trois ans. Ce cap est tenu. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit que les dépenses de l'État, hors charges de la dette, pensions et transferts aux collectivités territoriales, diminueront en valeur de 1,2 milliard d'euros en 2016 par rapport à la trajectoire prévue et transmise à la Commission européenne. C'est à cette aune qu'il faut évaluer la situation du budget du ministère de l'intérieur pour 2016. Alors que l'État réduit ses effectifs et ses dépenses, ce budget, hors dépenses de pensions et hors élections, s'établit à 15 milliards d'euros, en augmentation de 95 millions d'euros par rapport à 2015.
La hausse de la masse salariale, de 30 millions d'euros sur un total de 11,1 milliards d'euros, finance les mesures catégorielles les plus urgentes. J'ai également obtenu que le renforcement des moyens d'investissement et de fonctionnement à l'échelle du ministère soit poursuivi. Ainsi, hors dépenses d'élections - il n'y en a pas en 2016 - ces moyens croissent de 112 millions d'euros, soit 3,1 %, après une hausse de 1,5 % entre 2014 et 2015. Entre 2007 et 2012, les crédits de la police et de la gendarmerie hors titre 2 avaient diminué de 8 %... Ces évolutions positives traduisent ma volonté de donner au ministère dans son ensemble, et aux forces de sécurité en premier lieu, les moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs missions dans un contexte d'exceptionnelle sollicitation. Compte tenu des décisions récentes relatives à l'accueil des réfugiés et au renforcement des forces de sécurité, nos moyens seront encore renforcés, si le Parlement accepte les amendements d'abondement des crédits que le Gouvernement déposera.
Pour faire face aux missions qui nous sont dévolues, nous avions besoin, avant tout, d'effectifs supplémentaires. En 2016, notre ministère est l'un des rares à voir à nouveau ses effectifs augmenter. Ce projet de loi de finances crée 428 postes supplémentaires, après 654 créations nettes en 2015. En tenant compte des créations annoncées après sa présentation en conseil des ministres, et sous réserve de l'approbation de ces décisions par le Parlement, nous bénéficierons en 2016 de 1 612 effectifs supplémentaires pour l'ensemble du ministère.
Cette augmentation globale bénéficie aux forces de sécurité, comme en 2015. Le plan antiterroriste sera poursuivi. Pour mémoire, en 2015, le plan antiterroriste créait cent postes dans la gendarmerie ; 93 % de ces renforts sont déjà arrivés dans les unités nationales et territoriales chargées de la lutte antiterroriste, où ils renforcent la capacité d'observation, de surveillance et d'analyse des cyber-menaces. En outre, cent mille jours d'emploi de réservistes de la gendarmerie sont financés. Ce renfort favorisera la détection de signaux faibles pouvant être en lien avec une menace terroriste. Je ne souhaite pas que nous relâchions l'effort en 2016. Le plan antiterroriste prévoit ainsi 55 nouvelles créations de postes dans ces unités sur l'ensemble du territoire. Hors plan de lutte antiterroriste, le PLF prévoit 129 créations nettes de postes dans la gendarmerie, qui renforceront les unités de terrain et contribueront à recentrer les effectifs de l'administration centrale, notamment en ce qui concerne les fonctions supports, au fur et à mesure des départs en retraite et des mutations.
Les besoins de la gendarmerie nationale ne se limitent pas à la lutte antiterroriste, qui constitue bien évidemment une priorité. J'ai tenu à ce que les besoins structurels en renfort soient traités, notamment dans les territoires. C'est le sens de l'engagement du Président de la République, tenu depuis 2012, et qui le sera à nouveau en 2016.
Compte tenu de la mobilisation exceptionnelle des forces, j'ai souhaité un renforcement des effectifs. Comme l'a annoncé le Premier ministre le 16 septembre dernier, 900 effectifs supplémentaires viendront renforcer les unités de forces mobiles de la police et de la gendarmerie ainsi que ceux de la police de l'air et des frontières. Cette décision se justifie par l'emploi intensif des forces mobiles depuis le début de l'année, tant dans le cadre du plan Vigipirate que de la sécurisation des frontières, à Calais ou à Vintimille. Pour la gendarmerie, ce sont 370 effectifs en sus des créations prévues par le projet de loi de finances. Ils seront positionnés dans les escadrons de gendarmerie mobile, pour améliorer notre capacité d'emploi des forces. Au total, en 2016, 1 632 effectifs seront créés dans les forces de sécurité, dont 554 pour la gendarmerie nationale.
La reconnaissance de la mobilisation exceptionnelle des forces passe également par des mesures catégorielles ciblées mais significatives. Pour les escadrons de gendarmerie mobile, l'indemnité journalière d'absence temporaire a été revalorisée à compter du 1er juillet 2015 pour être portée progressivement, d'ici le 1er janvier 2017, de 30 euros aujourd'hui à 39 euros en métropole, pour un coût de 3,6 millions d'euros en 2016. C'était attendu et indispensable, en l'absence de revalorisation depuis 2002. Outre-mer, aucune revalorisation n'était intervenue depuis 1992. Le niveau actuel des indemnités y diffère de celui qui a cours en métropole. Les sous-officiers bénéficieront également d'une revalorisation indiciaire et d'une mise en cohérence dans les progressions indiciaires des personnels occupant des emplois de commandement d'unités opérationnelles de premier niveau.
Au-delà des mesures catégorielles, j'ai souhaité renforcer la prévention des risques psycho-sociaux. Le dispositif régional de soutien, mis en place depuis 2008, a été renforcé en 2015, et le sera encore en 2016 grâce au recrutement de sept psychologues cliniciens. La prévention des risques psycho-sociaux s'appuie également sur un dialogue social moderne. L'année 2015 a vu l'évolution du dialogue interne en gendarmerie, la Cour européenne des droits de l'Homme ayant ouvert la voie aux groupements professionnels. La loi du 28 juillet 2015 portant actualisation de la loi de programmation militaire pour les années 2015 à 2019 a posé le principe d'associations professionnelles nationales de militaires (APNM). Certaines se sont constituées. En l'état actuel du droit, le Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG) demeure la seule instance de représentation légitime des militaires de la gendarmerie.
Le redressement des crédits de fonctionnement et d'investissement sera poursuivi. Dans la gendarmerie, ils augmenteront de 1,4% en 2016. En 2015, sur 3308 commandes passées au titre de 2014 et 2015, 1 715 véhicules nouveaux ont été livrés, ce qui correspond à 100 % des commandes passées en 2014 et 36 % des commandes passées début 2015. Ces dernières seront toutes livrées avant la fin de l'année. J'ai obtenu pour la gendarmerie un dégel anticipé de 38 millions d'euros des crédits mis en réserve dès septembre, pour couvrir les dépenses de la gendarmerie mobile et commander de nouveaux véhicules, de nouvelles munitions et de nouveaux équipements informatiques. Le solde de ce dégel, soit 45 millions d'euros, a été demandé au ministère du Budget, et les discussions sont en cours pour en obtenir le déblocage. Je veillerai à ce que la gendarmerie ait les moyens de terminer l'année.
En matière immobilière, le plan triennal de réhabilitation du parc domanial, doté de 70 millions d'euros par an entre 2015 et 2017, aidera à résorber le retard pris ces dernières années et à réhabiliter près de 5 000 logements, après 3 400 réhabilitations en 2015. La gendarmerie bénéficiera également de la poursuite du renouvellement du parc automobile à hauteur de 40 millions d'euros en 2016, ce qui lui permettra d'acquérir 2 000 véhicules neufs.
Le déploiement du projet Neogend dotera les gendarmes d'outils mobiles d'accès aux systèmes d'information, pour plus de proximité et de souplesse dans l'emploi des forces, en particulier en milieu rural. S'y ajoutera le volet 2016 du plan de modernisation technologique de la gendarmerie qui développera des dispositifs de pré-plainte en ligne ou d'aide à la décision s'appuyant sur les données de masse.
En 2016, la gendarmerie verra ses moyens antiterroristes augmentés de 5,2 millions d'euros, surtout pour la modernisation informatique de ses forces. J'ai également souhaité la mise en place d'une structure de coordination : l'état-major opérationnel de prévention du terrorisme facilitera l'échange d'informations entre les services qui concourent à la lutte antiterroriste.
En matière de sécurité routière, nous avons pris 26 mesures en janvier dernier, dont 19 sont déjà applicables ; les autres le seront avant la fin de l'année. À l'issu du comité interministériel de la sécurité routière qui s'est tenu en octobre, nous avons adopté 22 mesures de sécurité routière, adossées à 33 mesures techniques de réorganisation des services, que nous mettrons en oeuvre dans les meilleurs délais.
J'ai annoncé le 30 octobre à Rouen un plan de modernisation des brigades anti-criminalité (BAC) de la police nationale et des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie nationale (PSIG), qui reflète l'urgence à doter nos forces d'armes, de moyens de protection, de véhicules et de moyens numériques. À mon arrivée au ministère, le vieillissement du parc automobile était tel que pour faire fonctionner un véhicule, il fallait en immobiliser deux ! Le plan annoncé protège des gels budgétaires les sommes affectées à l'équipement de celles de nos forces qui sont les plus exposées, et dans les quartiers les plus sensibles, où elles font face aux violences urbaines. Il comporte un volet de formation aux règles déontologiques indispensables lors du maniement de ces armes.