La commission auditionne M. Bernard Cazeneuve, ministre de l'intérieur, sur les crédits de la gendarmerie nationale dans le projet de loi de finances pour 2016.
Je salue la présence de M. Dominati, rapporteur spécial de la commission des finances, et vous prie d'excuser l'absence de M. Gournac, notre co-rapporteur, qui est en Corée avec le Président de la République. Bienvenue, monsieur le ministre, et merci de votre disponibilité. Le budget de la gendarmerie est en augmentation et prévoit 184 postes de gendarmes supplémentaires. Comment répond-il aux deux priorités que sont la lutte contre le terrorisme sur l'ensemble de notre territoire et la gestion de la crise migratoire ? En cette période difficile, je souhaite dire notre confiance en cette institution bien connue des sénateurs qu'est la gendarmerie.
Merci de l'intérêt que vous portez au budget de la gendarmerie nationale qui, comme la police nationale, est plus que jamais aux avant-postes de la lutte contre le terrorisme, contre la délinquance et la criminalité et pour le maintien de l'ordre républicain. C'est dans un contexte empreint de gravité, marqué par des pertes humaines - je pense en particulier à la mort de Laurent Pruvot à Roye - que je vous présente un budget pour 2016 qui réaffirme la priorité donnée à la sécurité.
La France s'est engagée à réduire ses dépenses publiques de 50 milliards d'euros en trois ans. Ce cap est tenu. Le projet de loi de finances pour 2016 prévoit que les dépenses de l'État, hors charges de la dette, pensions et transferts aux collectivités territoriales, diminueront en valeur de 1,2 milliard d'euros en 2016 par rapport à la trajectoire prévue et transmise à la Commission européenne. C'est à cette aune qu'il faut évaluer la situation du budget du ministère de l'intérieur pour 2016. Alors que l'État réduit ses effectifs et ses dépenses, ce budget, hors dépenses de pensions et hors élections, s'établit à 15 milliards d'euros, en augmentation de 95 millions d'euros par rapport à 2015.
La hausse de la masse salariale, de 30 millions d'euros sur un total de 11,1 milliards d'euros, finance les mesures catégorielles les plus urgentes. J'ai également obtenu que le renforcement des moyens d'investissement et de fonctionnement à l'échelle du ministère soit poursuivi. Ainsi, hors dépenses d'élections - il n'y en a pas en 2016 - ces moyens croissent de 112 millions d'euros, soit 3,1 %, après une hausse de 1,5 % entre 2014 et 2015. Entre 2007 et 2012, les crédits de la police et de la gendarmerie hors titre 2 avaient diminué de 8 %... Ces évolutions positives traduisent ma volonté de donner au ministère dans son ensemble, et aux forces de sécurité en premier lieu, les moyens nécessaires à l'accomplissement de leurs missions dans un contexte d'exceptionnelle sollicitation. Compte tenu des décisions récentes relatives à l'accueil des réfugiés et au renforcement des forces de sécurité, nos moyens seront encore renforcés, si le Parlement accepte les amendements d'abondement des crédits que le Gouvernement déposera.
Pour faire face aux missions qui nous sont dévolues, nous avions besoin, avant tout, d'effectifs supplémentaires. En 2016, notre ministère est l'un des rares à voir à nouveau ses effectifs augmenter. Ce projet de loi de finances crée 428 postes supplémentaires, après 654 créations nettes en 2015. En tenant compte des créations annoncées après sa présentation en conseil des ministres, et sous réserve de l'approbation de ces décisions par le Parlement, nous bénéficierons en 2016 de 1 612 effectifs supplémentaires pour l'ensemble du ministère.
Cette augmentation globale bénéficie aux forces de sécurité, comme en 2015. Le plan antiterroriste sera poursuivi. Pour mémoire, en 2015, le plan antiterroriste créait cent postes dans la gendarmerie ; 93 % de ces renforts sont déjà arrivés dans les unités nationales et territoriales chargées de la lutte antiterroriste, où ils renforcent la capacité d'observation, de surveillance et d'analyse des cyber-menaces. En outre, cent mille jours d'emploi de réservistes de la gendarmerie sont financés. Ce renfort favorisera la détection de signaux faibles pouvant être en lien avec une menace terroriste. Je ne souhaite pas que nous relâchions l'effort en 2016. Le plan antiterroriste prévoit ainsi 55 nouvelles créations de postes dans ces unités sur l'ensemble du territoire. Hors plan de lutte antiterroriste, le PLF prévoit 129 créations nettes de postes dans la gendarmerie, qui renforceront les unités de terrain et contribueront à recentrer les effectifs de l'administration centrale, notamment en ce qui concerne les fonctions supports, au fur et à mesure des départs en retraite et des mutations.
Les besoins de la gendarmerie nationale ne se limitent pas à la lutte antiterroriste, qui constitue bien évidemment une priorité. J'ai tenu à ce que les besoins structurels en renfort soient traités, notamment dans les territoires. C'est le sens de l'engagement du Président de la République, tenu depuis 2012, et qui le sera à nouveau en 2016.
Compte tenu de la mobilisation exceptionnelle des forces, j'ai souhaité un renforcement des effectifs. Comme l'a annoncé le Premier ministre le 16 septembre dernier, 900 effectifs supplémentaires viendront renforcer les unités de forces mobiles de la police et de la gendarmerie ainsi que ceux de la police de l'air et des frontières. Cette décision se justifie par l'emploi intensif des forces mobiles depuis le début de l'année, tant dans le cadre du plan Vigipirate que de la sécurisation des frontières, à Calais ou à Vintimille. Pour la gendarmerie, ce sont 370 effectifs en sus des créations prévues par le projet de loi de finances. Ils seront positionnés dans les escadrons de gendarmerie mobile, pour améliorer notre capacité d'emploi des forces. Au total, en 2016, 1 632 effectifs seront créés dans les forces de sécurité, dont 554 pour la gendarmerie nationale.
La reconnaissance de la mobilisation exceptionnelle des forces passe également par des mesures catégorielles ciblées mais significatives. Pour les escadrons de gendarmerie mobile, l'indemnité journalière d'absence temporaire a été revalorisée à compter du 1er juillet 2015 pour être portée progressivement, d'ici le 1er janvier 2017, de 30 euros aujourd'hui à 39 euros en métropole, pour un coût de 3,6 millions d'euros en 2016. C'était attendu et indispensable, en l'absence de revalorisation depuis 2002. Outre-mer, aucune revalorisation n'était intervenue depuis 1992. Le niveau actuel des indemnités y diffère de celui qui a cours en métropole. Les sous-officiers bénéficieront également d'une revalorisation indiciaire et d'une mise en cohérence dans les progressions indiciaires des personnels occupant des emplois de commandement d'unités opérationnelles de premier niveau.
Au-delà des mesures catégorielles, j'ai souhaité renforcer la prévention des risques psycho-sociaux. Le dispositif régional de soutien, mis en place depuis 2008, a été renforcé en 2015, et le sera encore en 2016 grâce au recrutement de sept psychologues cliniciens. La prévention des risques psycho-sociaux s'appuie également sur un dialogue social moderne. L'année 2015 a vu l'évolution du dialogue interne en gendarmerie, la Cour européenne des droits de l'Homme ayant ouvert la voie aux groupements professionnels. La loi du 28 juillet 2015 portant actualisation de la loi de programmation militaire pour les années 2015 à 2019 a posé le principe d'associations professionnelles nationales de militaires (APNM). Certaines se sont constituées. En l'état actuel du droit, le Conseil de la fonction militaire de la gendarmerie (CFMG) demeure la seule instance de représentation légitime des militaires de la gendarmerie.
Le redressement des crédits de fonctionnement et d'investissement sera poursuivi. Dans la gendarmerie, ils augmenteront de 1,4% en 2016. En 2015, sur 3308 commandes passées au titre de 2014 et 2015, 1 715 véhicules nouveaux ont été livrés, ce qui correspond à 100 % des commandes passées en 2014 et 36 % des commandes passées début 2015. Ces dernières seront toutes livrées avant la fin de l'année. J'ai obtenu pour la gendarmerie un dégel anticipé de 38 millions d'euros des crédits mis en réserve dès septembre, pour couvrir les dépenses de la gendarmerie mobile et commander de nouveaux véhicules, de nouvelles munitions et de nouveaux équipements informatiques. Le solde de ce dégel, soit 45 millions d'euros, a été demandé au ministère du Budget, et les discussions sont en cours pour en obtenir le déblocage. Je veillerai à ce que la gendarmerie ait les moyens de terminer l'année.
En matière immobilière, le plan triennal de réhabilitation du parc domanial, doté de 70 millions d'euros par an entre 2015 et 2017, aidera à résorber le retard pris ces dernières années et à réhabiliter près de 5 000 logements, après 3 400 réhabilitations en 2015. La gendarmerie bénéficiera également de la poursuite du renouvellement du parc automobile à hauteur de 40 millions d'euros en 2016, ce qui lui permettra d'acquérir 2 000 véhicules neufs.
Le déploiement du projet Neogend dotera les gendarmes d'outils mobiles d'accès aux systèmes d'information, pour plus de proximité et de souplesse dans l'emploi des forces, en particulier en milieu rural. S'y ajoutera le volet 2016 du plan de modernisation technologique de la gendarmerie qui développera des dispositifs de pré-plainte en ligne ou d'aide à la décision s'appuyant sur les données de masse.
En 2016, la gendarmerie verra ses moyens antiterroristes augmentés de 5,2 millions d'euros, surtout pour la modernisation informatique de ses forces. J'ai également souhaité la mise en place d'une structure de coordination : l'état-major opérationnel de prévention du terrorisme facilitera l'échange d'informations entre les services qui concourent à la lutte antiterroriste.
En matière de sécurité routière, nous avons pris 26 mesures en janvier dernier, dont 19 sont déjà applicables ; les autres le seront avant la fin de l'année. À l'issu du comité interministériel de la sécurité routière qui s'est tenu en octobre, nous avons adopté 22 mesures de sécurité routière, adossées à 33 mesures techniques de réorganisation des services, que nous mettrons en oeuvre dans les meilleurs délais.
J'ai annoncé le 30 octobre à Rouen un plan de modernisation des brigades anti-criminalité (BAC) de la police nationale et des pelotons de surveillance et d'intervention de la gendarmerie nationale (PSIG), qui reflète l'urgence à doter nos forces d'armes, de moyens de protection, de véhicules et de moyens numériques. À mon arrivée au ministère, le vieillissement du parc automobile était tel que pour faire fonctionner un véhicule, il fallait en immobiliser deux ! Le plan annoncé protège des gels budgétaires les sommes affectées à l'équipement de celles de nos forces qui sont les plus exposées, et dans les quartiers les plus sensibles, où elles font face aux violences urbaines. Il comporte un volet de formation aux règles déontologiques indispensables lors du maniement de ces armes.
Merci pour l'exhaustivité de votre présentation et pour sa concision. Lutte contre les filières d'immigration irrégulière, lutte contre le terrorisme : les forces de gendarmeries sont au coeur de l'actualité. Je comprends de vos propos que les 370 postes créés pour lutter contre l'immigration clandestine renforceront les escadrons de gendarmerie mobile.
Le travail de la sous-direction de l'anticipation opérationnelle (SDAO) a-t-il été évalué ? Elle appartient au deuxième cercle du renseignement : Faut-il lui accorder des moyens d'investigation comparables à ceux dont disposent les services du premier cercle ? Le général Pattin est en ce moment même entendu par la nouvelle Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR).
La CEDH nous fait obligation d'organiser la représentation professionnelle des militaires. Comment, au sein de la gendarmerie, cette représentation s'articulera-t-elle avec les mécanismes de participation et de concertation existants ?
Les transfèrements de détenus mobilisent d'importantes ressources humaines. Je croyais qu'un accord avait réglé cette question et organisé des transferts de crédits de la gendarmerie vers le ministère de justice. Or il semble que les gendarmes effectuent toujours des transfèrements.
En tous cas, je me félicite qu'en cette période de restrictions budgétaires, le budget de la gendarmerie s'améliore, que celle-ci se mette à niveau en matière de moyens de communication, d'achat de véhicules, de réhabilitation et de construction de nouvelles brigades, compagnies ou groupements de gendarmerie - même si beaucoup reste à faire !
Dans un tel contexte, la hausse du budget de la gendarmerie symbolise la volonté du Gouvernement de faire de la protection des personnes et des biens une priorité. La poursuite de la restructuration de la présence territoriale de la gendarmerie s'inscrit dans une logique d'efficacité : une brigade de quatre ou six gendarmes n'est pas forcément très efficace... Pour autant, nos concitoyens et leurs élus locaux ne le comprennent pas toujours. Envisagez-vous de demander à la gendarmerie de mieux communiquer, par exemple en associant davantage les élus locaux à ses décisions ? M. Chaban-Delmas disait : « Quand la réserve s'active, l'active se réserve. » Ne serait-il pas utile, dans le contexte actuel, de mieux mobiliser la réserve citoyenne ?
De fait, les regroupements suscitent l'inquiétude des maires ruraux. La présence de la gendarmerie génère une activité de proximité. Et l'usage des voitures n'est pas vraiment celui préconisé par le Grenelle de l'environnement ! J'ai beaucoup d'admiration et de respect pour le travail de la gendarmerie outre-mer. J'ai notamment pu observer son action à Mayotte. Les moyens dont elle y dispose sont sans commune mesure avec ceux que nous lui connaissons en métropole et, à cause de l'octroi de mer, ils coûtent cher ! Allez-vous prévoir une hausse des crédits correspondants ?
Budget, effectifs, rémunérations : nous apprécions vos efforts mais les résultats doivent être à la hauteur. La petite délinquance en zone rurale est insupportable, et nourrit certains positionnements politiques. En trois ans, j'ai été cambriolée trois fois ! Ce matin encore, un cambriolage a eu lieu dans l'intercommunalité que je préside. Les dégâts matériels coûtent cher, or les auteurs sont rarement pris. La gendarmerie est très appréciée : on veut toujours plus de gendarmes... Leur nombre va augmenter, très bien : montrez-les ! Lorsqu'on les voit, le sentiment d'insécurité recule. Les gendarmes m'ont indiqué qu'ils souhaitaient disposer plus rapidement des résultats des analyses ADN. Comme l'a dit Mme Perol-Dumont, la gendarmerie doit améliorer sa communication, en particulier sur ses résultats.
Merci pour vos questions précises et pour votre attachement à la gendarmerie. Nos forces de sécurité sont en première ligne pour assurer la protection des Français. Les 370 emplois qui seront créés en 2016 seront affectés dans les unités de forces mobiles. La suppression de 13 000 emplois dans la police et la gendarmerie dans la période récente a conduit à la disparition de quinze unités de forces mobiles. Dans le contexte actuel de mobilisation permanente, c'est intenable. À Calais et à Vintimille, par exemple, quinze unités de forces mobiles sont requises. On entend dire que le Gouvernement concentre volontairement des migrants à Calais pour faire monter le Front National : imaginez la réaction des forces de sécurité chargées de démanteler les filières lorsqu'elles entendent ce type de propos raffinés. À Moirans, en Isère, les unités de forces mobiles ont rétabli totalement l'ordre en deux heures et recueilli des données photographiques et des vidéos qu'elles ont transmises au procureur de la République afin que l'action publique soit déclenchée dans les meilleurs délais. Les Français sont très attachés à l'autorité de l'État. Celle-ci passe par le respect du droit, mais commence par celui de la vérité des faits.
Rien ne sert de créer des emplois sans crédits correspondants. C'est pourquoi je propose, après une baisse de 8%, une hausse de 3,1 %, c'est-à-dire un doublement de l'accroissement des crédits hors titre 2 de la police et la gendarmerie par rapport à l'an dernier, qui financera un effort considérable d'équipement des forces de gendarmerie : 40 millions d'euros seront consacrés à l'achat de 2 000 véhicules, le programme Neogend sera mis en place, ainsi que des dispositifs numériques accélérant l'intervention de la gendarmerie en zone rurale. La mise en place du plan de lutte antiterroriste, décidée en janvier par le Premier Ministre et le Président la République, s'accompagne de la création de 500 emplois dans le renseignement territorial, dont 350 policiers et 150 gendarmes, car les signaux faibles à détecter peuvent concerner des personnes vivant dans des zones rurales.
La SDAO coordonne le renseignement opérationnel, notamment à travers le service spécialisé de veille et d'exploitation de l'information d'alerte, elle enrichit ainsi le dispositif national et transmet les informations obtenues en zone gendarmerie aux services spécialisés, en concertation étroite avec le service central du renseignement territorial (SCRT). Résultat, la gendarmerie est à l'origine de 41 signalements de départ vers les zones de djihad. À l'occasion de l'enquête sur les attentats de Charlie Hebdo, elle a recueilli et partagé 25 notes de renseignement en lien avec les investigations. Elle a été saisie de seize enquêtes de disparitions inquiétantes en lien avec un projet à caractère terroriste, et elle a ouvert 170 enquêtes relatives à des faits d'apologie du terrorisme, notamment à travers les réseaux sociaux. Je félicite devant vous le général Favier, et à travers lui toute la gendarmerie nationale, pour l'excellent travail de lutte contre la cybercriminalité réalisé à Pontoise, qui facilite beaucoup nos échanges avec les autres services européens.
Les techniques de renseignement accessibles aux acteurs du deuxième cercle ont été fixées par décret : la SDAO pourra utiliser toutes les techniques, sauf certains algorithmes utilisés dans le cadre de la lutte anti-terroriste.
Le CFMG organise un dialogue régulier entre les gendarmes et leur hiérarchie, ainsi qu'avec les ministres de la défense et de l'intérieur. C'est un outil très performant, dont les troupes ne peuvent que se féliciter.
Le transfert à l'administration pénitentiaire des transfèrements judiciaires doit prendre effet en 2019. Les transferts de crédits se feront à ce moment-là.
Pour assurer la sécurité en milieu rural, la capacité d'intervention doit être permanente, ce qui suppose une masse critique des brigades. Bien sûr, le regroupement des brigades suscite toujours des angoisses dans les territoires ruraux. Mais partout où la concertation a abouti à la création de grandes brigades, les élus éprouvent une grande satisfaction. Il faut donc passer le cap de la pédagogie, de l'explication de la décision. J'ai donné des consignes en ce sens au général Favier, dont c'est du reste la méthode ordinaire. Aussi avons-nous pu conforter sans heurts une centaine de brigades.
Oui. Elles accroissent l'efficacité sans réduire les effectifs. Certes, il faut des résultats. C'est parce que je suis obsédé par les résultats que je donne des moyens ! Sur les douze derniers mois glissants, les atteintes aux biens en zone gendarmerie ont diminué de 3,5 %. Les résultats y sont aussi positifs sur les quatre index des cambriolages, ainsi que sur les violences crapuleuses. Ils sont moins bons sur les violences non crapuleuses, car celles-ci se passent généralement à l'intérieur des familles.
Outre les 24 000 réservistes opérationnels qui s'engagent au quotidien au côté des personnels d'active, la gendarmerie nationale dispose de 1 319 réservistes citoyens, recrutés pour leur expertise professionnelle dans des domaines très variés. Il s'agit d'un relais de la gendarmerie auprès de la société civile, auquel nous souhaitons insuffler une nouvelle dynamique.
La gendarmerie nationale mobilise 3 699 personnes outre-mer, renforcés par 1 417 militaires de la gendarmerie mobile de la garde républicaine et de la gendarmerie départementale. Elle a adapté son dispositif aux défis locaux, notamment en Guyane. Elle rationalise son dispositif de souveraineté outre-mer en rapprochant son soutien de celui des armées et en faisant évoluer son dispositif d'aéromobilité.
Nous sommes tous très fiers du travail de nos gendarmes, qui ont été l'objet de nombreux élans de sympathie après les attentats de janvier. Oui, il faut des résultats. Rencontrant régulièrement les gendarmes dans mon département, je m'inquiète du sentiment de lassitude que suscite chez eux le fait qu'une fois élucidée une affaire, les suites ne sont pas toujours à la hauteur de leurs attentes. Ce sentiment, partagé par la population, nourrit un sentiment d'insécurité qu'il faut traiter.
Je suis l'un des rares maires à construire une nouvelle caserne. La complexité du cahier des charges de la gendarmerie occasionne des surcoûts importants, sans parler des montages juridiques nécessaires. La brigade sera livrée en septembre prochain, mais nous y travaillons depuis 2011 ! Une simplification des exigences formulées par les gendarmes accélérerait les rénovations et les constructions et diminuerait leur coût.
Je viens du pays de l'automobile, non loin de Sochaux, et vous avais déjà interrogé l'an dernier sur le sujet : pourquoi nos forces de l'ordre roulent-elles dans des véhicules de marque étrangère ? J'ai rarement vu des policiers allemands, espagnols ou portugais rouler en Peugeot ou en Renault. Je sais qu'il y a des règles de mise en concurrence européennes, mais nos gendarmes devraient rouler dans des véhicules français. Par ailleurs, ceux-ci ne pourraient-ils pas, de temps à autre, travailler en civil, dans des véhicules banalisés ? En tenue et avec les gyrophares, on les voit arriver de loin...
Dans mon département de l'Aude, les gendarmes se sont remarquablement adaptés à la nouvelle donne dans les zones où les commissariats de police ont été supprimés à leur profit. Le regroupement en brigades importantes de gendarmes autrefois perdus au fond de la campagne a suscité des craintes, mais s'est révélé très efficace. L'annonce de Rouen a généré de l'angoisse, mais les PSIG ont été étoffés et la couverture géographique sera assurée. Comment les 16,5 millions d'euros annoncés seront-ils répartis entre les BAC et les PSIG ?
Après quelques flottements, l'absence de suppressions d'emplois a apaisé les craintes sur les nouvelles brigades. Le préfet de mon département m'a indiqué que les plaignants n'auraient plus à se rendre à la gendarmerie, mais que les gendarmes viendraient prendre les plaintes munis d'une tablette numérique. Est-ce vrai ?
Je félicite non seulement le général Favier, mais notre excellent ministre : il est clair, il va à l'essentiel et parle vrai.
Chacun connaît l'importance de la question du logement des familles de gendarmes. Quel effort budgétaire sera consacré à cet objectif ?
Une question appelle des précisions. La loi d'actualisation de la loi de programmation militaire a modifié profondément la représentation des militaires. Y aura-t-il une évolution ? Cela me semble inéluctable, puisque les gendarmes sont des militaires. Comment seront désignés leurs représentants ?
M. Perrin souhaiterait que les gendarmes roulent en véhicules français. Nous sommes soumis au code des marchés publics, qui stipule que tous les constructeurs automobiles européens peuvent présenter une offre. Cela dit, les prochains véhicules qui nous seront livrés seront des Peugeot Expert : je tâcherai d'en affecter quelques exemplaires dans votre brigade !
Lorsque j'étais maire, de Cherbourg, j'ai dû relocaliser un PSIG de quelque 300 militaires sur les hauts de la ville. En effet, cela a mis des années... Le niveau d'exigence de la gendarmerie est dicté par ses contraintes opérationnelles. Les 70 millions d'euros annuels que nous avons prévus fluidifieront les relations avec les collectivités territoriales, fortement mises à contribution dans la réalisation des bâtiments précédents : elles en réalisaient l'investissement, en contrepartie de quoi la gendarmerie finançait les loyers sur la durée d'amortissement. Cela permettra de réaliser plus d'opérations, par un dispositif d'amorçage ou en maîtrise d'ouvrage directe.
Les gendarmes travaillent déjà en civil dans des véhicules banalisés pour certaines enquêtes judiciaires. Évidemment, comme on les voit moins, cela ne se remarque pas. Cela dit, la tenue a une vertu dissuasive et renforce le sentiment de sécurité.
Près de 3,3 millions d'euros seront consacrés au renforcement du parc automobile des PSIG, ce qui représente 150 véhicules, et 4,9 millions d'euros seront dédiés à l'optimisation de leurs protections individuelles. En tout, ce seront donc 8,2 millions d'euros sur 16 millions qui iront aux PSIG, et le reste aux BAC : la répartition est équilibrée.
L'accélération de l'équipement numérique est liée au dispositif Neogend : l'expérimentation menée dans le Nord de la France a vocation à être généralisée sur tout le territoire en 2018.
En effet, les conditions de vie familiale des gendarmes influent sur la manière dont ils accomplissent leur mission. Je suis donc favorable à ce qu'on les loge dans les meilleures conditions, à proximité des lieux de leur intervention. Nous y consacrerons 70 millions d'euros par an pendant trois ans, jusqu'à la fin du quinquennat, avec un gros effort de remise à niveau des logements et des casernements.
Pour la COP 21, nous avons demandé à Bercy des moyens spécifiques. Nous mobiliserons, au moins partiellement, 1658 personnes - dont de nombreux gendarmes - pendant l'évènement. Des équipements leurs seront nécessaires, et les négociations avec Bercy sont en cours sur le dédommagement à prévoir.
Je ne susciterai pas moi-même la création des associations représentatives prévues par la loi de programmation militaire. Pour l'heure, la gendarmerie ne semble pas manifester le désir d'en créer mais il en existe une, d'environ 300 membres, qui est déjà engagée dans le dialogue interne classique. Les représentants du personnel sont élus par leurs pairs, le CFMG, dont les membres seront désormais élus, est représentatif et accueilli favorablement par les gendarmes. Son évolution garantira la représentativité des instances de dialogue instituées au sein de la gendarmerie nationale.
Merci. Notre commission émettra sans doute un avis favorable à l'adoption de ces crédits.
Nous apprécions votre sang-froid. La nervosité est un défaut ! (Applaudissements).
La commission examine le rapport de M. Joël Guerriau et le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 109 (2015-2016) autorisant la ratification du protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant établissant une procédure de présentation de communications.
Nous examinons aujourd'hui le projet de loi autorisant la ratification du troisième protocole facultatif à la convention relative aux droits de l'enfant établissant une procédure dite de « présentation de communications ». Concrètement, il s'agit d'ouvrir la faculté de saisir directement le comité des droits de l'enfant.
La convention relative aux droits de l'enfant adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies en novembre 1989 est entrée en vigueur en septembre 1990. Premier texte international juridiquement contraignant qui couvre l'ensemble des droits de l'enfant, cette convention consacre quatre principes directeurs : la non-discrimination ; l'intérêt supérieur de l'enfant ; le droit à la vie, à la survie et au développement ; le respect, enfin, de l'opinion de l'enfant. À ce jour, 195 États en sont partie. Elle a été complétée par deux protocoles facultatifs adoptés en mai 2000 et entrés en vigueur début 2002. Le premier concerne l'interdiction de la vente des enfants et la lutte contre la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants ; le deuxième concerne l'implication d'enfants dans les conflits armés. La Convention et ses deux protocoles ont été ratifiés par la France respectivement en août 1990 et en février 2003.
Le Comité des droits de l'enfant, composé de dix-huit experts indépendants recrutés sur des critères de moralité et de compétences dans le domaine des droits de l'enfant, surveille l'application de ces traités. Pour la petite histoire, sachez qu'étonnamment, depuis sa création en 1990, aucun Français n'y a jamais siégé. Ce comité procède à l'examen des rapports d'évaluation transmis par les Etats membres, tous les cinq ans, mais ne pouvait jusqu'à présent être saisi de recours individuels, contrairement aux sept autres comités onusiens.
Adopté en décembre 2011, puis entré en vigueur en avril 2014, ce troisième protocole a justement pour objet principal la mise en place d'un mécanisme de recours individuel auprès du Comité des droits de l'enfant contre la violation, par un État Partie, des droits protégés par la Convention des droits de l'enfant ou l'un des deux protocoles additionnels précités. Il a été signé par 49 États et ratifiés par 19 d'entre eux. La France l'a ratifié en novembre 2014 à l'occasion du vingt-cinquième anniversaire de la convention des droits de l'enfant.
Dans le respect des grands principes onusiens, le Comité des droits de l'enfant doit être guidé par l'intérêt supérieur de l'enfant et prendre en considération les droits et l'opinion de l'enfant, en « accordant à celle-ci le poids voulu en fonction de l'âge et du degré de maturité de l'enfant » - termes qui nous sont familiers, puisqu'ils rejoignent ceux de l'article 371-1 du code civil relatif à l'autorité parentale. Il doit donc adopter un règlement intérieur relatif à la nouvelle saisine organisée par le Protocole, garantissant que les procédures soient adaptées aux enfants et que ceux-ci, conformément à une demande française, ne soient pas manipulés par ceux qui agissent en son nom.
Voyons tout d'abord la procédure dite « de présentation de communications », c'est-à-dire de saisine, devant le Comité des droits de l'enfant
Les recours individuels peuvent être déposés « par des particuliers ou des groupes de particuliers ou au nom de particuliers ou de groupes de particuliers relevant de la juridiction d'un État Partie, qui affirment être victimes d'une violation par cet État Partie de l'un quelconque des droits énoncés » dans la Convention ou dans les deux premiers protocoles précités. S'il est interdit à une association de soumettre une communication en son nom, rien ne s'oppose à ce qu'elle présente une communication en tant que représentant d'un particulier ou d'un groupe de particuliers, victimes d'une violation.
Avant même de statuer sur le fond, le Comité peut demander à l'État partie intéressé de prendre des mesures provisoires « qui s'avèrent nécessaires dans des circonstances exceptionnelles pour éviter un préjudice irréparable ». J'attire votre attention sur ce point, qui fait débat. Cette procédure dite de mesures provisoires est assez classique, elle existe déjà pour d'autres comités onusiens.
Jusqu'à présent, la France a surtout été confrontée à des mesures provisoires prononcées par la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) pour empêcher l'éloignement du territoire national de mineurs étrangers isolés ou de mineurs étrangers retenus en zone d'attente avant la fin de la procédure. Parmi les comités onusiens qui peuvent déjà prononcer des mesures provisoires contre la France, seul le Comité contre la torture l'a fait, dans trois affaires concernant également l'éloignement du territoire national de ressortissants étrangers. Dans un des trois cas évoqués, la France a suspendu la mesure d'éloignement.
Comme on le voit, les cas de recours à cette procédure restent assez rares.
La force juridique des mesures provisoires a toutefois fait l'objet de discussions. Pendant les négociations, les comités onusiens, comme le Comité contre la torture par exemple, ont souhaité se voir reconnaître, à l'instar de la Cour européenne de droits de l'homme, la faculté d'imposer à l'État concerné les mesures provisoires qu'ils adoptent. Afin de lever toute équivoque à ce sujet, la France a prévu de procéder à une déclaration interprétative sur ce point, pour indiquer que cette disposition « ne peut pas être interprétée comme impliquant une obligation pour l'État partie intéressé d'accéder à la demande du Comité tendant à ce qu'il prenne des mesures provisoires ». Le Défenseur des droits s'est saisi de la question et a fait observer que les États parties devraient selon lui avoir l'obligation de déférer à une demande de mesures provisoires émanant du Comité des droits de l'enfant, et qu'il faudrait donc aller au-delà de la stricte lettre du protocole.
J'ai naturellement examiné très attentivement ce point avec le Quai d'Orsay. Tout d'abord, la déclaration interprétative est rigoureusement conforme à la lettre du texte de l'article 6 paragraphe 1 du troisième protocole relatif aux mesures provisoires. Elle ne contredit évidemment pas la position constante de la France en faveur des droits de l'enfant. Mais la France refuse inconditionnellement toute automaticité, et choisit de se prononcer au cas par cas, après examen au fond de chaque affaire, comme elle l'a toujours fait jusqu'à présent. On peut ajouter qu'à la différence de la CEDH, le comité des droits de l'enfant n'est pas une juridiction de plein exercice et que les décisions qu'il adopte ne sont pas juridiquement contraignantes puisqu'il s'agit de simples recommandations. Je pense donc que l'équilibre atteint à l'issue de mois de négociations et repris par la déclaration interprétative est satisfaisant.
Passons maintenant aux conditions de recevabilité et à l'examen des communications, c'est-à-dire des saisines directes du comité des droits de l'enfant.
Au préalable, je vous indique que la France reconnaît la compétence du comité des droits de l'enfant sur les violations « résultant d'actes, omissions, faits ou événements postérieurs à la date d'entrée en vigueur (à son égard) du présent Protocole ». Il ne sera donc pas possible d'examiner rétroactivement des faits antérieurs à l'entrée en vigueur du Protocole à l'égard de la France, donc à sa ratification par notre pays.
De forme écrite, la communication ou saisine ne doit être ni anonyme, ni infondée, ni constituer un abus de droit. La même question ne doit pas avoir été ou être examinée au titre d'une autre procédure internationale d'enquête ou de règlement. Là encore, la France déposera une déclaration interprétative sur ce qu'est une « autre procédure internationale » afin de s'assurer de la prise en considération des procédures achevées ou en cours devant la CEDH, devant les organes d'enquête ou de règlement du Conseil de l'Europe ainsi que devant le Comité européen des droits sociaux. Il s'agit de s'assurer que le comité des droits de l'enfant ne se prononce pas sur des faits déjà jugés ou en passe de l'être par une autre instance, en particulier européenne.
La communication n'est recevable qu'une fois tous les recours internes épuisés, et dans un délai de douze mois suivant la fin de la dernière procédure interne. La France précisera dans une déclaration interprétative, afin de mieux protéger les droits de l'enfant, que pour que les voies de recours internes françaises soient considérées comme épuisées, il faut prendre en compte non seulement celles exercées à l'encontre des décisions rendues dans les procédures où l'enfant a été entendu mais aussi dans celles où il a été représenté. Comme vous le savez en effet, dans la plupart des procédures françaises, l'enfant agit par l'intermédiaire de son représentant légal et non pas en son nom propre.
La communication ou saisine est ensuite transmise, confidentiellement et dans les meilleurs délais, à l'Etat Partie concerné, qui dispose d'un délai de six mois pour adresser une réponse écrite au comité des droits de l'enfant.
Se fondant sur l'ensemble de la documentation soumise, puisqu'il s'agit d'une procédure écrite, le comité des droits de l'enfant procède ensuite à l'examen de la communication. Il tient ses séances à huis clos, puis transmet ses constatations, éventuellement accompagnées de recommandations, à l'État concerné, lequel doit l'informer, par écrit et dans un délai de six mois, de toute mesure prise ou envisagée à la suite de ces recommandations.
Si la ratification du protocole par un État partie confère automatiquement compétence au comité des droits de l'enfant pour recevoir des communications individuelles le concernant, il n'en va pas de même des deux autres mécanismes prévus par le Protocole que sont les « communications interétatiques » et la « procédure d'enquête », sur lesquels l'Etat Partie doit obligatoirement se prononcer.
La « communication interétatique » est une communication adressée au comité des droits de l'enfant par un Etat Partie qui affirme qu'un autre Etat Partie ne s'acquitte pas de ses obligations au titre de la convention relative aux droits de l'enfant ou de l'un de ses protocoles. Elle n'est recevable que si les deux Etats parties ont déclaré expressément reconnaître la compétence du comité des droits de l'enfant pour recevoir et examiner cette catégorie de communications les concernant.
À la mi-octobre 2015, sur les 19 Etats ayant ratifié le protocole, six avaient accepté la compétence du comité des droits de l'enfant pour recevoir des « communications interétatiques » : l'Albanie, l'Allemagne, la Belgique, le Chili, le Portugal et la Slovaquie. Il faut savoir que ce dispositif, lorsqu'il est déjà prévu devant d'autres comités onusiens, est de fait très peu utilisé. La France attend de connaître la pratique du comité des droits de l'enfant avant de se prononcer sur la question.
La « procédure d'enquête » , quant à elle, permet au comité des droits de l'enfant de « charger un ou plusieurs de ses membres d'effectuer une enquête » lorsqu'il « reçoit des renseignements crédibles indiquant qu'un État partie porte gravement ou systématiquement atteinte aux droits énoncés dans la convention (des droits de l'enfant) ou l'un de ses protocoles facultatifs », après avoir demandé à l'Etat concerné de présenter des observations. Cette enquête est confidentielle et toute éventuelle visite sur le territoire de l'Etat concerné est subordonnée à son accord. Les Etats parties peuvent déclarer au moment où ils signent, ratifient, ou adhèrent qu'ils ne reconnaissent pas cette compétence du comité des droits de l'enfant à l'égard des droits énoncés dans l'un ou dans la totalité des traités. Cette déclaration peut être retirée à tout moment.
À la mi-octobre 2015, parmi les 19 Etats ayant ratifié le protocole, seul Monaco a déclaré ne pas reconnaître la compétence du comité des droits de l'enfant pour conduire des procédures d'enquête à son encontre. A ce stade et suivant mes informations, la France n'envisage pas d'engager une démarche spécifique pour exclure l'application de la procédure d'enquête à son encontre - ce que j'estime justifié.
En conclusion et sous le bénéfice de ces observations, compte tenu de l'engagement de la France en faveur de la défense des droits des enfants, et en particulier son soutien important à l'UNICEF, je recommande naturellement l'adoption de ce projet de loi, qui améliore la protection des droits de l'enfant et qui comble une lacune dans le système onusien. En effet, la convention des droits de l'enfant était la dernière grande convention relative aux droits de l'homme de l'ONU à ne pas être assortie d'un mécanisme de recours individuel. Cette lacune est désormais comblée. En France, ce dispositif, qui complète l'institution du Défenseur des Droits et celle du Défenseur des enfants n'entraînera pas de modification du droit interne, déjà protecteur du droit des enfants. Il pourra en revanche constituer un levier d'action dans les États où les procédures internes de défense des droits de l'enfant sont encore trop faibles, voire inexistantes.
L'examen en séance publique est fixé au jeudi 5 novembre 2015. La Conférence des Présidents a proposé son examen en procédure simplifiée. Je vous suggère de ne pas vous y opposer afin de favoriser l'adoption rapide de ce texte.
Je vous propose, quant à moi, un rapport publié en forme synthétique, puisque l'Assemblée nationale a déjà adopté, le 22 octobre 2015, le projet de loi autorisant la ratification de ce Protocole.
Je vous remercie de ces éclaircissements.
Lors de la création du Défenseur des droits, nombre de nos collègues s'étaient émus de la disparition de l'institution du Défenseur des enfants, absorbée par cette grosse machine. Avec le recul, estimez-vous que les droits des enfants sont mieux pris en compte, ou faut-il regretter la disparition, comme telle, de cette autorité administrative indépendante ?
La France est souvent pointée du doigt pour la manière dont elle prend en compte la situation des enfants handicapés et des mineurs délinquants. Ce texte est-il susceptible d'apporter, de ce point de vue, une amélioration ?
L'institution du Défenseur des droits préserve la spécificité du droit des enfants. L'existence d'une fonction spécifique au sein de l'organisation garantit que le regard est resté attentif.
Sur la question particulière du handicap, la force de ce protocole additionnel est qu'il exposera la France à un recours en cas de dérive. Tout particulier pourra saisir le comité des droits de l'enfant. J'ajoute que ce comité doit rendre un rapport sur chaque Etat : nous verrons quelle appréciation il portera sur la situation française.
Les réserves d'interprétation introduites par la France ne fragilisent-elles pas le dispositif ?
Elles portent, pour l'essentiel, sur les mesures provisoires, ainsi que l'a souligné le Défenseur des droits. Le texte peut être interprété de deux manières : on peut considérer que ces mesures provisoires s'imposent ou qu'elles ne constituent que des recommandations. La France, qui n'accepte pas que des mesures provisoires lui soient imposées, a tranché dans ce dernier sens.
Ce protocole garantit plus de protection, sans bouleverser notre droit interne. Si la France le ratifiait, elle serait le vingtième pays à le faire. Nous irions dans le bon sens.
Avez-vous pensé, au cours de vos travaux préparatoires, aux enfants enlevés. Ils sont, hélas, nombreux. Comme sénateur des Français hors de France, j'ai été confrontée à de nombreux cas.
Vous visez là un cas très particulier. Cela fait partie des éléments qui peuvent être soulevés dans le cadre de la procédure introduite par ce protocole. J'ajoute que le comité des disparitions forcées s'attache de près à ces questions.
Les cas sont, malheureusement, de plus en plus nombreux.
Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte, sans modification et à l'unanimité, le rapport ainsi que le projet de loi précité, et approuve son examen en procédure simplifiée.
La réunion est levée à 19 h 20.