Intervention de Alain Houpert

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 4 novembre 2015 à 14h33
Loi de finances pour 2016 — Mission « agriculture alimentation forêt et affaires rurales » et compte d'affectation spéciale « développement agricole et rural - examen du rapport spécial - communication sur les relations entre le budget communautaire et le budget national à travers la politique agricole commune pac

Photo de Alain HoupertAlain Houpert, rapporteur spécial :

Ce montant élevé correspond au cumul de plusieurs années de corrections, de 2008 à 2013. La Commission européenne se serait montrée particulièrement rigoureuse, sous la pression croissante de la commission du contrôle budgétaire (Cocobu) du Parlement européen et de la Cour des comptes européenne. Les causes des corrections qui nous sont infligées sont multiples : il s'agit des aides à la surface, les photographies aériennes et leur interprétation ayant été jugées inadaptées, du calcul des DPU ou encore de la mise en oeuvre des contrôles au titre de la conditionnalité.

Le registre parcellaire graphique a été contesté ainsi que le travail de photo-interprétation visant à distinguer les surfaces non agricoles, dont les éléments de paysage, et donc à identifier les surfaces admissibles. Selon la direction générale de l'agriculture de la Commission européenne, le Gouvernement français aurait sa part de responsabilité, puisque chaque État membre définit les règles de la PAC qui s'imposent à lui, y compris dans les modalités d'attribution des droits à paiement. Ainsi, l'Allemagne a choisi de rendre éligibles les éléments paysagers avec le respect de leur maintien à l'identique. À l'inverse, notre pays a préféré utiliser un pourcentage d'éléments topographiques de 3 % ou 4 %, sans obliger au maintien individuel des éléments. Nous avons ensuite attribué des droits à paiements sans respecter la règle que nous avions fixée. Cela a d'ailleurs conduit des agriculteurs, notamment dans l'Ouest, à raser leurs haies pour prévenir le risque contentieux.

Quelles conséquences tirer de ce constat ? Le Gouvernement a mis en place deux plans d'action depuis 2013, l'un concernant les aides du Feaga, le second les aides cofinancées par le Feader afin de répondre à la Commission européenne et de faire évoluer les procédures et systèmes de gestion et de contrôle. Sur le premier pilier, il est proposé d'améliorer la qualité du registre parcellaire graphique, de réviser le calcul des droits à paiements et de réformer le système de sanction découlant des contrôles mis en oeuvre au titre de la conditionnalité. Au niveau du deuxième pilier, le ministère et les organismes payeurs ont préparé de nouvelles instructions concernant le renforcement du contrôle administratif, le contrôle du respect des marchés publics, la vérification des obligations sociales et fiscales et le contrôle du caractère raisonné des coûts. Ces plans nécessiteront des moyens supplémentaires et du temps pour leur mise en oeuvre.

Nous faisons quatre recommandations. Premièrement, simplifier les règles de la PAC, au niveau national comme au niveau européen. Il s'agit d'exiger du ministère et des opérateurs qu'ils ne rajoutent pas de la complexité par rapport aux textes européens, ce qui rejoint la question de la lutte contre la suradministration du monde agricole. Il s'agit aussi de dialoguer avec nos partenaires et avec la Commission européenne pour simplifier les règles de la PAC. Deuxièmement, simplifier les procédures de déclaration pour les agriculteurs. 90 % des bénéficiaires des aides PAC recourent à la procédure dématérialisée, dite téléPAC ; la procédure de télédéclaration dure trois heures, ce qui est encore trop long. Troisièmement, étaler les refus d'apurement : la Commission européenne ne doit pas procéder à des redressements sur cinq ou six ans, qui conduisent à des corrections très élevées. Quatrièmement, la France doit poursuivre la mise en oeuvre des plans d'action et mobiliser l'Institut géographique national (IGN) pour l'actualisation des photos et pour une expertise en matière de photo-interprétation. Il faudra répondre à des défis technologiques, comme le recours aux images satellite : le niveau d'exigence de la Commission européenne est de 50 centimètres alors que la précision de nos photos était d'1,5 mètre... Le travail est titanesque. La numérisation des éléments non agricoles, comme les mares, bosquets et rochers, représente un gros effort : l'IGN dispose d'un inventaire de 200 millions d'objets dans les terres agricoles, il s'agira d'inclure 40 millions d'objets supplémentaires au titre des éléments paysagers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion