Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 tel qu’il nous a été transmis par l’Assemblée nationale, s’agissant de la branche vieillesse, ne présentait pas à première vue d’enjeux particuliers.
Il ne comporte en effet aucune disposition significative si ce n’est quelques mesures de correction des dysfonctionnements de la loi du 20 janvier 2014, en particulier sur le dispositif du cumul emploi-retraite.
Il est, surtout, porteur en apparence d’une bonne nouvelle. §Le déficit de la branche vieillesse poursuit sa réduction et atteindra en 2016 le montant de moins 2, 8 milliards d’euros, profitant des 900 millions d’euros d’excédent prévus pour les régimes de base. C’est en soi une excellente nouvelle !
Cette situation résulte, chacun le sait, d’une conjoncture rare : les recettes, « dopées » par la hausse des cotisations vieillesse intervenue depuis 2012, sont plus dynamiques que les dépenses, qui bénéficient pleinement de la réforme des retraites de 2010 et du recul de l’âge légal à soixante-deux ans.
Cependant, cette conjoncture est temporaire puisque la hausse des cotisations vieillesse prendra fin en 2017, après avoir porté leur taux à 17, 75 %, ce qui pèsera tout de même durablement sur le coût du travail.
Néanmoins, madame la ministre, et comme je vous l’avais déjà indiqué lors de votre audition devant la commission des affaires sociales, je salue cette trajectoire de baisse du déficit, qui représente un « coin de ciel bleu », selon l’expression utilisée par notre collègue Jean-Louis Tourenne la semaine dernière.
Pourtant, ce « coin de ciel bleu » ne change rien à notre profonde préoccupation quant à l’équilibre de long terme de notre système de retraite par répartition. Cette préoccupation est de trois ordres.
Tout d’abord, l’amélioration du déficit de la branche vieillesse souligne avec d’autant plus de force la persistance du déficit du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, qui se stabilisera en 2016 au niveau très élevé de moins 3, 7 milliards d’euros.
Réapparu en 2009, ce déficit s’explique par la persistance depuis la crise d’un chômage de masse face auquel la promesse d’inversion durable de la courbe est pour l’instant restée lettre morte. Nous espérons toutefois que les chiffres du chômage du mois de septembre soient le signe d’un amorçage de cette inversion. En attendant, rien dans ce texte ni dans vos propos récents, madame la ministre, ne laisse entendre que le Gouvernement souhaiterait agir contre le déficit du FSV. Vous êtes-vous résolue à n’avoir qu’un traitement par la conjoncture de ce déficit ou alors pensez-vous que des mesures devront être prises ?
Ensuite, les perspectives économiques ne permettent pas d’envisager à législation constante un retour à l’équilibre du système de retraite à l’horizon des vingt-cinq prochaines années.
Les analyses récentes du COR, le Conseil d’orientation des retraites, l’ont très bien montré : il faudrait que le taux de chômage chute à 4, 5 % et que les gains de productivité du travail bondissent à 2 % par an pour que cet équilibre soit assuré. Autant de conditions impossibles à réunir à court terme avec un tendanciel de croissance si faible.
Les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles se fondent les textes financiers de cet automne sont encore considérées comme très optimistes par le Haut Conseil des finances publiques.