Séance en hémicycle du 9 novembre 2015 à 14h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • PLFSS
  • d’économie
  • l’assurance
  • l’équilibre
  • vieillesse

La séance

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La séance est ouverte à quatorze heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Le compte rendu intégral de la séance du jeudi 5 novembre a été publié sur le site internet du Sénat.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Lors de sa réunion du 5 novembre dernier, la conférence des présidents a décidé l’inscription à l’ordre du jour de la séance du lundi 16 novembre 2015, à seize heures trente, sous réserve du respect du délai d’information préalable du Gouvernement, de la proposition de résolution visant à affirmer le rôle déterminant des territoires pour la réussite d’un accord mondial ambitieux sur le climat, présentée en application de l’article 34–1 de la Constitution.

Le délai de quarante-huit heures prévu par la loi organique du 15 avril 2009 étant expiré, cette proposition de résolution peut être inscrite à l’ordre du jour du lundi 16 novembre 2015, à seize heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

M. le président du Sénat a reçu de M. le Premier ministre les contre-expertises de l’évaluation socio-économique du projet de reconstruction du court séjour adulte du CHU de Reims et du projet de restructuration de l’hôpital Saint-Joseph de Marseille, accompagnées des avis du Commissariat général à l’investissement.

Acte est donné du dépôt de ces documents.

Ils ont été transmis à la commission des affaires économiques, à la commission des affaires sociales, ainsi qu’à la commission des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2016 (projet n° 128, rapport n° 134 [tomes I à VIII], avis n° 139).

Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, cher Christian, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, monsieur le rapporteur pour avis, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous retrouvons pour ce rendez-vous annuel que constitue l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, le PLFSS. Cette année est particulièrement importante, puisque, plus que jamais, les enjeux de solidarité sont sur le devant de la scène.

La France, en 2015, se projette dans l’avenir, innove, avance. Nous avons toutes les raisons d’être confiants, confiants dans l’avenir, confiants dans nos valeurs, confiants dans notre capacité à aller de l’avant, en dépit de ce que peuvent ressentir nombre de nos concitoyens. Cependant, dans la période difficile que nous connaissons, la population exprime encore et toujours son attachement à notre système de protection sociale ainsi que sa confiance dans celui-ci.

Garantir la survie, la pérennité, la modernité de la sécurité sociale, c’est garantir un avantage comparatif véritablement exceptionnel. C’était, hier, une responsabilité pour tous. C’est devenu, aujourd'hui, un combat.

En effet, trop nombreux sont ceux qui dépeignent notre modèle social comme un héritage archaïque ou comme un gouffre sans fin, voué à être liquidé, faute de pouvoir être réformé. Il nous faut combattre ceux qui brandissent l’épouvantail de l’assistanat pour casser l’adhésion des Français à un système solidaire, ceux qui font croire que les droits fondamentaux des Français seraient solubles dans le marché.

Ce combat, c’est celui que mène le gouvernement auquel j’appartiens. Nous le menons parce que nous avons la conviction que la protection permet de se projeter dans l’avenir, d’entreprendre, de prendre des risques, de fonder une famille et de contribuer à la société. Nous le menons parce que nous considérons que la fatalité est l’autre nom du reniement et que nous ne saurions en faire preuve alors même que les Français ont plus que jamais besoin d’un modèle social conquérant et innovant. Nous le menons aussi parce que nous avons la conviction profonde que notre modèle social peut être modernisé. À cette modernisation, nous œuvrons depuis trois ans, pour lui permettre de toujours mieux répondre aux attentes et aux besoins de nos concitoyens.

Réduire les déficits, faire progresser les droits, innover : tels sont les trois axes de notre engagement.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, adopté par l’Assemblée nationale, marque une étape supplémentaire dans cette voie.

D’abord, il marque une étape nouvelle dans le redressement des comptes sociaux.

Réduire le déficit de la sécurité sociale n’est évidemment pas une fin en soi : cela ne suffirait pas à considérer que le résultat serait atteint !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Ce n’est pas suffisant, mais c’est nécessaire !

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Réduire le déficit de la sécurité sociale est une exigence.

C’est une exigence à l’égard de nos concitoyens, qui n’acceptent pas la perspective de laisser la dette pour seul héritage à leurs enfants. C’est une exigence à l’égard de toutes celles et tous ceux qui pâtiraient les premiers de la régression des droits qu’entraînerait l’austérité budgétaire. C’est une exigence, enfin, si nous voulons garantir à chacun qu’il continuera de pouvoir bénéficier de l’accès aux soins, en particulier aux traitements les plus coûteux, sans conditions, comme nous l’avons fait pour les personnes atteintes de l’hépatite C. Les traitements contre certains cancers qui arriveront demain sur le marché seront très coûteux. Nous devons nous doter des marges de manœuvre qui nous permettront de les financer.

Quoi qu’il en soit, les résultats sont là. Depuis trois ans, nous avons réduit le déficit du régime général de 40 %, dynamique que nous poursuivrons en 2016. Le déficit du régime général et du Fonds de solidarité vieillesse devrait être ramené sous la barre des 10 milliards d’euros. La branche vieillesse devrait revenir à l’équilibre, pour la première fois depuis 2005. Nous devrions collectivement nous en réjouir ! Au lieu de cela, certains essaient d’expliquer que ce ne serait pas une chance ou que ce serait le fruit du hasard…

En 2016, le déficit de l’assurance maladie s’élèvera à environ 6 milliards d’euros. C’est trop, mais c’est 2, 6 milliards d’euros de moins qu’en 2011. Afin de pouvoir tenir cet objectif, nous avons défini une progression de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie – l’ONDAM – de 1, 75 %, ce qui représentera un effort très important de 3, 4 milliards d’euros, contre 3, 2 milliards en 2015.

Cet objectif, nous devrons le tenir, au nom d’une double exigence.

D’abord, nous devons engager des réformes structurelles : c’est dans le respect de cette exigence que nous parvenons à réduire nos dépenses, et non en passant quelque « rabot » que ce soit. Je pense notamment à la lutte contre le gaspillage, à la baisse des prix des médicaments, au développement des médicaments génériques, aux économies d’échelle à l’hôpital. Ce sont les orientations qui nous guident, avec succès, depuis trois ans.

Nous devons aussi répondre à une exigence sociale, en refusant de faire des économies qui rogneraient la protection de nos concitoyens. C’est ce que je fais depuis trois ans, et c’est une rupture radicale, assumée par rapport à la politique menée par la majorité précédente. Depuis que nous sommes au pouvoir, il n’y a eu ni nouvelle franchise ni déremboursement ! Au contraire, l’année dernière, le Parlement a voté la suppression des franchises médicales pour les Français les plus modestes.

Mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi de vous dire que, face à ce cap que nous avons tracé, nous éprouvons quelque peine à saisir celui que la majorité sénatoriale nous propose de suivre.

Lors de mon audition devant la commission des affaires sociales, nombreux ont été les parlementaires ayant salué les engagements pris par le Gouvernement. Votre rapporteur général a relevé, avec l’esprit constructif qui est le sien, la dynamique de réduction des déficits et de maîtrise des dépenses que traduit le présent PLFSS.

Pourtant, le rapporteur pour avis de la commission des finances propose de rejeter les tableaux d’équilibre du texte. On nous dit qu’il faut aller plus loin dans la réduction des déficits – sans nous dire, d'ailleurs, quelle doit être la cible.

Au reste, je m’interroge sur les mesures concrètes proposées au travers des amendements qui ont été déposés et sur les orientations qu’elles dessinent.

Mesdames, messieurs les sénateurs de la majorité sénatoriale, vous proposez d’affaiblir les mécanismes de régulation du médicament. Or cela veut dire moins d’économies ! Vous proposez d’exonérer de prélèvements sociaux sur les revenus du capital les non-résidents. Cela aussi veut dire moins d’économies ! Comme souvent, on lit une grande appétence pour la réduction du déficit en général, mais beaucoup moins d’enthousiasme lorsqu’il s’agit de proposer des mesures concrètes.

Nous vous laisserons résoudre ces contradictions entre les ambitions et les moyens… Pour notre part, nous poursuivons, avec détermination et sérénité, la dynamique engagée. En effet, c’est ainsi que nous garantissons à nos concitoyens la pérennité de notre modèle social.

Par ailleurs, les Français veulent un système modernisé, adapté à leurs besoins quotidiens. C’est à cette demande que nous répondons, au travers de mesures importantes.

Premièrement, nous mettons en œuvre la modernisation de la protection sociale, dans le prolongement de la politique que nous avons menée ces dernières années.

Je ne reviendrai pas sur la ligne de conduite que je défends. Je veux simplement vous rappeler ma volonté d’améliorer les droits, lesquels doivent toujours mieux prendre en compte les situations individuelles de nos concitoyens.

Ainsi, nous avons agi de manière que certains dispositifs soient mieux ciblés et s’adressent davantage à ceux qui en ont le plus besoin.

Je pense à la retraite, qui tient désormais compte des conditions de pénibilité dans lesquelles tout un chacun a pu être amené à travailler.

Je pense à la politique familiale, avec la modulation des allocations, qui a permis de revaloriser les prestations en direction des familles modestes.

Je pense à l’élargissement des droits des femmes, avec la prise en charge à 100 % de l’interruption volontaire de grossesse, et des personnes modestes, avec la revalorisation de l’aide au paiement d’une complémentaire santé pour les personnes âgées ou encore la suppression des franchises médicales pour l’ensemble des bénéficiaires de cette aide, que je viens d’évoquer.

Les résultats sont là et c’est ce qui nous donne de l’énergie et de la détermination afin de poursuivre.

En 2013, pour la première fois depuis 2008, les personnes les plus modestes ont vu leur niveau de vie augmenter. La Commission des comptes de la santé confirme désormais année après année que le reste à charge des Français en matière de santé diminue régulièrement : en 2011, nos concitoyens payaient de leur poche en moyenne 9, 1 % de leurs dépenses de santé ; cette part n’est plus que de 8, 5 % en 2014, ce qui représente globalement 1 milliard d’euros de dépenses en moins pour les ménages français.

Derrière les chiffres, un mouvement de fond est engagé : en trois années seulement, nous avons effacé cinq ans de hausse du reste à charge. Nous devons nous en réjouir, mais aussi en profiter pour accélérer et amplifier le mouvement.

D’abord, en créant la protection universelle maladie. Comme j’ai eu l’occasion de vous le dire, notamment en commission, il s’agit non pas de créer un droit nouveau, mais de se prémunir contre des situations de rupture de droits. Certaines étapes de la vie – changement de profession, évolution dans la famille, déménagement… – qui ne devraient être qu’une formalité au regard de l’assurance maladie se transforment bien souvent en une montagne administrative à gravir. Ces situations, des millions de Français en connaissent chaque année.

L’assurance maladie est universelle depuis l’instauration de la couverture maladie universelle, la CMU, voilà plus de quinze ans. Pourtant, beaucoup de Français ne peuvent, pendant un temps, faire valoir leur droit à l’assurance maladie et sont contraints de renoncer à certains soins. Cette protection universelle maladie va donner à chacun la capacité de faire valoir ses droits en simplifiant radicalement les conditions requises pour ouvrir droit à remboursement.

Ce qui est en jeu, ce n’est pas uniquement la simplification. Il s’agit d’une réforme profonde puisque le statut d’ayant droit sera supprimé pour les majeurs. Beaucoup de femmes – car ce sont principalement des femmes qui sont aujourd’hui ayant droit de leur conjoint – auront leurs droits personnels identifiés sur leur carte Vitale, …

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

… avec leur propre numéro de sécurité sociale. La carte Vitale pourra être obtenue dès douze ans si les parents le souhaitent.

La spécificité des différents régimes sera évidemment maintenue. Toutefois, dans les faits, les statuts d’étudiant, d’épouse ou d’époux, d’indépendant, de salarié ou de chômeur s’effaceront au profit d’une seule et unique citoyenneté sociale. La protection universelle maladie fait de la sécurité sociale un espace au sein duquel la carte Vitale a valeur de passeport.

Ce PLFSS renforce également les droits sociaux des Français en étendant le droit à bénéficier d’une complémentaire santé de qualité. C’est l’une des priorités fixées par le Président de la République.

Dès le 1er janvier 2016, les salariés pourront bénéficier de la généralisation de la complémentaire santé en entreprise. Cependant, en l’état actuel des textes, les salariés les plus précaires, ceux qui sont en contrat à durée déterminée très court ou qui travaillent simultanément chez plusieurs employeurs, ne pourraient y prétendre. Avec le présent PLFSS, ils pourront accéder à ce droit.

Nous étendons aussi le droit de bénéficier d’une complémentaire santé de qualité aux personnes âgées, retraitées ou non – ce n’est pas le sujet –, confrontées à une hausse du coût de leur complémentaire santé à mesure qu’elles avancent en âge. Nous voulons permettre aux plus de soixante-cinq ans de bénéficier d’une complémentaire moins chère ou apportant de meilleures garanties. L’Assemblée nationale a apporté des clarifications bienvenues aux dispositions proposées. L’enjeu est véritablement de garantir l’accès de tous à la complémentaire santé.

De plus, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale instaure le droit à une garantie des impayés de pension alimentaire. Les familles monoparentales sont davantage confrontées à la pauvreté que les autres. Parfois, le parent isolé – il s’agit le plus souvent de femmes, de mères – ne perçoit pas la pension alimentaire à laquelle il a pourtant droit ou la perçoit de manière irrégulière.

Depuis près d’un an, nous avons donc expérimenté une solution nouvelle dans plusieurs départements : la mise en place d’une pension alimentaire minimale de cent euros par enfant, versée directement par la caisse d’allocations familiales, laquelle se retourne ensuite, avec les moyens qui sont les siens, contre le parent défaillant pour l’amener à payer ce qu’il doit. Une caisse d’allocations familiales dispose en effet de moyens beaucoup plus importants qu’un parent seul et peut donc faire valoir les droits financiers de manière plus efficace.

Cette expérimentation a donné d’excellents résultats dans les vingt départements où elle a eu lieu. À terme, ce sont donc 30 000 familles qui pourront en bénéficier sur l’ensemble du territoire.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale va également nous permettre de renforcer la prévention et l’accès aux soins des Français. Il s’inscrit dans la démarche engagée par le projet de loi de modernisation de notre système de santé qui suit, parallèlement – si j’ose dire –, son chemin parlementaire.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Plusieurs mesures sont proposées. Vous savez que la ligne de force de ce texte est de sortir du « tout curatif » et d’investir dans la prévention, en particulier en direction des jeunes.

Et c’est ainsi que dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale nous inscrivons des financements pour permettre le repérage, par le médecin traitant, d’un risque d’obésité chez les enfants de trois et huit ans et la prise en charge financière de bilans d’activité physique ou de l’intervention de diététiciens et de psychologues, qui, aujourd’hui, ne sont pas remboursés par la sécurité sociale.

Nous proposons également des mesures renforçant l’accès des mineures à la contraception en rendant gratuites et anonymes la consultation de la prescription et les analyses biologiques qui y sont liées.

Enfin, nous proposons, comme je l’ai annoncé lors du lancement de la campagne « octobre rose », la prise en charge intégrale du dépistage du cancer du sein des femmes présentant un risque plus élevé que la moyenne. L’assurance maladie prend aujourd’hui en charge une mammographie tous les deux ans pour les femmes de cinquante à soixante-quatorze ans. Toutefois, certaines femmes présentant un risque plus élevé de cancer du sein – par exemple en raison de facteurs héréditaires – peuvent avoir besoin d’examens avant cinquante ans, plus souvent qu’une fois tous les deux ans ou après soixante-quatorze ans. Or ces examens supplémentaires ne sont pas pris en charge à 100 %. Il y a là une forme d’injustice, à laquelle nous proposons de mettre fin.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale renforce également l’accès aux soins des Français en soutenant l’hôpital public. La semaine dernière, j’ai présenté un plan d’action pour renforcer l’attractivité de l’exercice médical à l’hôpital, pour attirer de jeunes médecins dans nos hôpitaux de proximité, dans certaines spécialités qui manquent de professionnels, et assurer ainsi le bon fonctionnement et la pérennité de nos établissements.

Ce PLFSS traduit lui aussi un engagement fort en direction de l’hôpital public. Pour la première fois depuis des années, l’évolution de l’ONDAM hospitalier sera en ligne avec l’évolution de l’ONDAM général.

Les ressources consacrées à la prise en charge à l’hôpital des personnes précaires sont sensiblement renforcées : 10 millions d’euros supplémentaires seront alloués en 2016 aux établissements les plus mobilisés.

Par ailleurs, les soins palliatifs bénéficient d’une enveloppe de 40 millions d’euros supplémentaires qui permettront, dès 2016, la création d’au moins trente équipes mobiles et de six unités supplémentaires.

Soutenir l’hôpital public, c’est aussi réformer son financement. J’ai engagé cette réforme dès 2012, avec des dispositifs de soutien aux activités isolées ou la mise en œuvre d’un financement à la qualité.

Avec ce PLFSS, nous créons un mode de financement innovant pour les soins de suite et de réadaptation : la dotation modulée à l’activité. Concrètement, il s’agit de mettre un terme au « tout T2A » en instaurant davantage de dotation dans les financements pour plus de stabilité.

Nous réformons également le financement des stages des internes et des étudiants en médecine afin de valoriser davantage le temps de formation.

Renforcer l’accès aux soins, c’est aussi engager le virage ambulatoire. Au-delà des mesures que j’ai déjà indiquées, nous renforçons le développement de l’offre de soins visuels sans dépassements d’honoraires afin de réduire les délais d’attente chez l’ophtalmologiste et confortons le modèle retenu dans certaines régions – je pense notamment à la région Pays-de-la-Loire – pour financer la permanence des soins ambulatoires.

Mesdames les sénatrices, messieurs les sénateurs, redressement des comptes sociaux, modernisation de notre protection sociale, innovation dans nos manières de prévenir et de soigner, c’est un PLFSS de progrès que Christian Eckert et moi-même vous proposons aujourd’hui.

Je souhaite que nos débats non seulement nous permettent d’avancer et d’enrichir ce texte, mais aussi soient à la hauteur des attentes de nos concitoyens – ce dont je ne doute pas – et nous permettent de renforcer durablement ce modèle social auquel ils sont toutes et tous tellement attachés.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Aline Archimbaud applaudit également.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Madame la présidente, madame la ministre, chère Marisol, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, l’examen de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 porte sur près de 496 milliards d’euros de dépenses, soit sensiblement le même montant que les dépenses de l’État et des collectivités territoriales réunis.

C’est dire si les déterminants de ces dépenses et de ces recettes présentent un intérêt particulier pour la trajectoire de nos finances publiques.

Nous serons attachés, mes collègues du Gouvernement et moi-même, à vous apporter dans ces débats les réponses à l’ensemble des questions que vous souhaiterez aborder, car chaque sujet doit en effet être traité au fond.

Je voudrais insister sur les trois points.

Premièrement, sur les résultats que nous obtenons, à savoir un redressement de la situation financière de la sécurité sociale et une réduction continue des déficits.

Deuxièmement, sur la manière dont nous les obtenons, c’est-à-dire par des économies en dépenses, que nous assumons.

Troisièmement, enfin, sur les priorités poursuivies par ce gouvernement, que ces mesures nous permettent de financer.

Tout d’abord, nous obtenons des résultats chaque année sur le terrain de la réduction des déficits. Nous pourrons tous tomber d’accord pour dire que ce gouvernement a la responsabilité d’apurer des décennies de déséquilibres des finances publiques et en particulier de la sécurité sociale.

En effet, le régime général et le Fonds de solidarité vieillesse n’ont plus été excédentaires depuis 2001. Dès lors que les années de croissance n’ont pas été mises à profit pour mettre la sécurité sociale à l’abri du déficit, la crise économique qui pèse sur les recettes depuis 2008 rend le redressement des comptes encore plus difficile.

Ce gouvernement et cette majorité ont rompu avec cette façon de faire. Ce changement porte ses fruits. Pour les finances publiques dans leur ensemble, les résultats sont là : notre déficit est au plus bas depuis sept ans. La dette globale se stabilise par rapport au PIB. Enfin, la dépense progresse à un niveau historiquement bas, grâce à une maîtrise sans précédent.

Pour la sécurité sociale plus précisément, c’est encore plus clair. On ne le dira jamais assez : le déficit de la sécurité sociale recule chaque année depuis le début de la législature. Il est passé de 21 milliards d’euros en 2011 à 12, 8 milliards d’euros prévus en 2015. Ce résultat sera équivalent à celui d’avant la crise.

L’année prochaine, deux des quatre branches de prestations du régime général seront en excédent : la branche accidents du travail-maladies professionnelles et la branche vieillesse. La branche famille, quant à elle, s’en rapprochera puisque son déficit ne sera plus que de 800 millions d’euros, et l’équilibre sera atteint en 2017. Ce sont les réformes des retraites et les mesures d’économie prises sur la branche famille qui ont permis ces résultats.

M. Jean-Baptiste Lemoyne s’exclame.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

En 2015, pour la première fois depuis douze ans, la dette sociale va baisser en valeur, et ce mouvement s’amplifiera en 2016.

L’horizon de remboursement intégral de cette dette est fixé à 2024, et cet horizon ne s’est pas éloigné depuis le début de ce quinquennat. C’est dans ce contexte favorable que s’inscrit le transfert de dette sociale de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale – l’ACOSS – à la Caisse d’amortissement de la dette sociale – la CADES –, dans la limite prévue, qui reste de 62 milliards d’euros.

Ces résultats sont principalement obtenus par des économies sur la dépense. Elles sont indispensables sur la sécurité sociale comme sur l’ensemble des administrations publiques.

En 2016, nous réaliserons 16 milliards d’euros d’économies au titre du plan de 50 milliards d’euros d’économies sur trois ans. Dans cet ensemble, la contribution des administrations de sécurité sociale atteindra 7, 4 milliards d’euros, qui contribuent donc fortement à l’amélioration globale du déficit public, sans sacrifier les droits des assurés – Marisol Touraine vient de le rappeler – et en maintenant notre action prioritaire en faveur des Français les plus modestes.

Les dépenses sociales du régime général augmenteront de seulement 0, 5 % en 2016, soit le niveau le plus bas depuis vingt ans, après une hausse de 0, 8% en 2015.

Faire des économies, c’est d’abord assurer aux Français que les dépenses sont efficaces et que leur argent est bien utilisé. C’est revoir régulièrement nos modes d’intervention pour choisir ceux qui sont les plus efficaces et les plus économes. Ces économies se fondent sur des diagnostics sérieux, établis notamment à partir des revues de dépenses lancées par la loi de programmation des finances publiques adoptée l’année dernière.

Elles sont par exemple réalisées sur les niches sociales. Dès lors que nous avons mis en place des allégements massifs de droit commun, nous sommes fondés à revoir certaines exonérations critiquées dans leurs caractéristiques ou inefficaces dans leurs effets. Il s’agit en particulier des exonérations applicables en outre-mer, qui seront réduites pour certaines entreprises – les grandes et celles qui sont peu exposées à la concurrence – et augmentées pour d’autres, là où il y a des enjeux d’emploi et de croissance.

L’Assemblée nationale a souhaité conserver des dispositifs d’exonérations zonées, dont la suppression était pourtant réclamée dans de nombreux rapports, notamment parlementaires. Le Gouvernement peut l’admettre, compte tenu de la modicité des économies en cause, à savoir 15 millions d’euros la première année. Cependant, sur ce sujet, plus encore que sur d’autres, j’invite chacun à s’interroger sur sa propre cohérence. On ne peut pas sans cesse se poser la question de l’efficacité de nos dispositifs d’exonération et ne pas tirer les conséquences qui s’imposent lorsqu’il est démontré de manière évidente que certains sont inefficaces.

S’agissant des dépenses d’assurance maladie, se fixer un objectif de progression inférieur à la tendance « spontanée » des dépenses, c’est également faire des économies.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Il s’agit de s’assurer que les dépenses sont faites à bon escient, par exemple que les médicaments ne sont pas payés trop chers ou que les actes et les prestations ne sont pas réalisés inutilement. Il s’agit aussi de rechercher la meilleure organisation des professionnels de santé, pour aller vers la meilleure qualité des soins au meilleur coût. C’est tout le sens du virage ambulatoire conforté par la loi relative à la santé.

Faire des économies, c’est réformer. Ainsi, le projet de loi de finances prévoit une réforme des modalités de revalorisation de l’ensemble des prestations sociales. Elle est également inscrite dans ce PLFSS pour les prestations qui en relèvent.

Vous le savez, au 1er avril de cette année, le Gouvernement aurait dû diminuer les prestations familiales de 0, 7 point s’il avait appliqué strictement les textes en vigueur, qui prévoient une correction si l’inflation a été plus basse que prévu.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Nous avons choisi de ne pas appliquer cette règle, mais il faut la modifier pour l’avenir.

Par ailleurs, les dates de revalorisation, au nombre de cinq, sont différentes selon les prestations, de même que les indices pris en compte pour le calcul.

C’est pourquoi nous proposons deux choses. D’une part, il convient de retenir seulement deux dates de revalorisation : le 1er octobre, sans changement, pour les retraites et le 1er avril pour toutes les autres prestations. D’autre part, nous proposons de supprimer tout risque de régularisation négative, puisque la revalorisation se fera en fonction d’évolutions connues, et non plus prévisionnelles.

Mme Nicole Bricq opine.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Cette réforme est neutre à long terme pour les finances publiques comme pour les particuliers. Elle aura, dans le contexte de très faible inflation que nous connaissons actuellement, un impact positif sur l’ensemble des finances publiques, de l’ordre de 400 à 500 millions d’euros à court terme.

Enfin, je voudrais revenir rapidement sur les 7, 4 milliards d’euros d’économies réalisées dans la sphère sociale en 2016, des interrogations s’étant fait jour sur ce point. Or je souhaite qu’il n’y ait pas d’ambiguïté s’agissant de la réalité de ces économies.

Les mesures en question se décomposent de la manière suivante : 3, 4 milliards d’euros d’économies sur l’ONDAM ; 1 milliard d’euros correspondant à l’impact en 2016 de la modulation des allocations familiales, laquelle produit des effets croissants, et des mesures de la loi sur les retraites, telles que la réforme du cumul emploi-retraite ; 3 milliards d’euros résultant d’autres mesures.

Je veux ici en donner le détail :…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

… 500 millions d’euros d’économies sur les dépenses de gestion des organismes de protection sociale ; 500 millions d’euros au titre de la réforme des modalités de revalorisation des prestations, déjà évoquée ; 300 millions d’euros liés aux mesures de lutte contre la fraude et au ralentissement des dépenses d’action sanitaire et sociale des organismes ; 1 milliard d’euros d’économies attendues à la suite de la négociation entre les partenaires sociaux au titre de la réforme des retraites complémentaires, l’accord signé devant conduire à un résultat proche de cette prévision ; 800 millions d’euros de nouvelles économies dans le champ de l’assurance chômage – c’est ce qui reste à confirmer en fonction de l’évolution de la négociation.

Je viens de décrire dans le détail les propositions d’économies qui sont les nôtres. C’est sur la base de ces mesures qu’est fondée la trajectoire de redressement des comptes que nous vous proposons, mesdames, messieurs les sénateurs.

J’ai noté que, lors de l’examen du texte, la commission des affaires sociales du Sénat a été favorable au plus grand nombre des dispositions du projet de loi, notamment celles qui ont un impact financier important. La commission reconnaît d’ailleurs que ces mesures vont dans le bon sens. Bien entendu, le rapporteur général s’interroge, et c’est son rôle, sur certaines de nos hypothèses, notamment concernant la progression de la masse salariale. Mais là aussi, dans la mesure où nos prévisions pour les deux dernières années se sont avérées justes, et au vu des avis du Haut Conseil des finances publiques ou des prévisions des organismes économiques indépendants, nos hypothèses sont tout à fait raisonnables, accordez-le-nous.

Dès lors, je m’étonne que la commission envisage d’adopter ce texte tout en en retirant les prévisions de recettes, de dépenses et de solde qu’il doit nécessairement comporter. C’est d’autant plus incompréhensible que cette décision serait, si je comprends bien, justifiée non pas par les mesures contenues dans ce projet de loi mais par celles qu’il ne comporte pas.

Mais dans ce cas, mesdames, messieurs les sénateurs, il vous revient de proposer et d’adopter les dispositions qui vous paraissaient propres à garantir la trajectoire de redressement des comptes sociaux à laquelle vous aspirez. Quelles sont ces mesures ? Nous aurons ce débat.

Enfin, il me faut rappeler que, si nous faisons ces économies, c’est pour nous donner les capacités de financer notre politique.

Il s’agit d’abord de financer notre politique de santé et de protection sociale, sans sacrifier les droits des assurés, mais en les renforçant. Plusieurs mesures, présentées par Marisol Touraine, visent ainsi à améliorer les prestations versées aux assurés.

Je prends l’exemple de la santé. L’ONDAM est fixé pour 2016 à 185, 2 milliards d’euros, soit 3, 3 milliards d’euros de plus qu’en 2015, mais aussi 3, 4 milliards d’euros de moins que le montant qui aurait été atteint en cas d’évolution spontanée. Ce sont là de vraies économies. Bien évidemment, lorsque l’on dépense moins que le niveau auquel nous amènerait l’évolution tendancielle des dépenses sans mesure nouvelle, il y a nécessairement un effort d’économie.

S’agissant de l’assurance maladie, je souligne que, depuis 2012, l’objectif de dépenses a été respecté chaque année. L’avis du comité d’alerte d’octobre confirme cette maîtrise pour 2015 et valide la construction de l’ONDAM 2016.

L’objectif d’augmentation de 1, 75 % est exigeant ; c’est d’ailleurs le taux le plus bas depuis la création de l’ONDAM en 1997, mais il est fixé en garantissant le respect de la qualité des soins aux assurés.

Par ailleurs, nous mettons en œuvre des mesures en faveur de nos concitoyens. Je pense notamment à la suppression des cotisations minimales d’assurance maladie des exploitants agricoles et des travailleurs indépendants. Il s’agit d’une proposition issue du rapport, remis au Premier ministre, des députés Sylviane Bulteau et Fabrice Verdier sur le régime social des indépendants. Elle s’inscrit dans une refonte plus globale des cotisations sociales payées en cas de revenu très faible. Nous proposons ainsi d’améliorer les droits à la retraite des travailleurs indépendants dont les revenus sont les plus faibles.

Dans ce domaine, le Gouvernement a fait preuve non seulement de réactivité, mais aussi d’anticipation. Ainsi, il a déjà mis en œuvre la plupart des mesures recommandées en 2014 par vos collègues MM. Jean-Noël Cardoux et Jean-Pierre Godefroy dans leur rapport. Il s’agissait notamment de mettre en place la régularisation anticipée des cotisations sociales dès que le revenu de l’année précédente est connu. Ce système est aujourd’hui en vigueur, et a été très bien accueilli par les assurés.

Ces économies nous permettent aussi de financer notre politique économique, en poursuivant la baisse des prélèvements sur les entreprises et les ménages.

Ce PLFSS met en œuvre les mesures du pacte de responsabilité applicables en 2016, telles qu’elles ont été présentées voici dix-huit mois, à savoir la baisse de la C3S – la contribution sociale de solidarité des sociétés – et des cotisations familiales, afin de favoriser l’emploi et de permettre une amélioration des marges des entreprises.

Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion générale du projet de loi de finances, nous attachons en effet un prix élevé à la stabilité des orientations données en matière de prélèvements obligatoires.

S’agissant de l’existant, notre politique est simple et consiste à maintenir les dispositifs qui fonctionnent. Je pense notamment au crédit d’impôt recherche, mais aussi au CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, dont la transformation en allégement de cotisations peut constituer une perspective à terme. Pour autant, ce crédit d’impôt ne doit pas être remis en cause, alors même que les entreprises se l’approprient pour de bon :…

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

… les chiffres relatifs aux créances de 2015 le montrent.

Nous mettons en place depuis deux ans une politique économique qui suit un cap clair, et nous nous y tenons.

Nous prévoyons de réaliser pas moins de 9 milliards d’euros d’allégements supplémentaires pour les entreprises en 2016, auxquels contribuent deux mesures comprises dans ce PLFSS.

Il s’agit tout d’abord de la baisse de 1, 8 point des cotisations sociales pour les salaires inférieurs à 3, 5 SMIC qui sera réalisée à compter du 1er avril prochain. Pour conserver une enveloppe globale constante, ce décalage tient compte des mesures décidées cette année en faveur des entreprises et dont elles bénéficient déjà, pour certaines, dès 2015, je pense notamment au suramortissement des investissements.

Il s’agit ensuite de la baisse de la C3S, qui se poursuit. Nous avons fait le choix d’un abattement, qui est porté à 19 millions d’euros. Cela favorise les TPE et PME, puisque 80 % des entreprises qui en restaient redevables en seront exonérées. Par ailleurs, ce ciblage permet de faire bénéficier les entreprises industrielles d’une proportion importante de l’exonération, …

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

… soit 250 millions d’euros.

Enfin, nous menons aussi cette politique pour financer notre modèle social et en assurer la pérennité.

Vous ne manquerez pas de relever que, comme l’année dernière, c’est l’État, et non la sécurité sociale, qui supportera intégralement les baisses de recettes.

Là encore, les engagements qui ont été pris sont tenus. Comme l’année dernière, la compensation sera réalisée par le transfert au budget de l’État de certaines dépenses aujourd’hui retracées dans les comptes de la sécurité sociale, dans une logique de rationalisation. Il s’agit notamment du transfert du reste des dépenses liées aux allocations logement.

Cet effort supplémentaire de plus de 5 milliards d’euros explique pourquoi, malgré l’ampleur des économies, le solde nominal de l’État se réduirait de l’ordre de 1 milliard d’euros en 2016.

Alors que certains leaders de l’opposition entendent « baisser les impôts par l’ascenseur, et les dépenses par l’escalier » – ce qui ne manquerait pas de creuser les déficits –, il n’est sans doute pas inutile de rappeler que nous, nous sommes en mesure, avec la volonté de prendre les mesures d’économie sans renoncer à nos priorités, de réaliser simultanément des baisses de prélèvements et des déficits publics.

Dans le cadre de l’article concerné, nous traitons aussi les suites de l’arrêt dit « de Ruyter » de la Cour de justice de l’Union européenne, sur lequel je me suis exprimé de manière très détaillée auprès de votre commission. Je ne préciserai devant vous que deux points supplémentaires, mais ils sont d’importance.

D’abord, nous avons pris toutes les dispositions nécessaires afin de garantir que les personnes qui entrent dans le champ de cet arrêt puissent, pour le passé, bénéficier d’un remboursement des prélèvements effectués à tort, en application de la décision du Conseil d’État. Vous avez sans doute pris connaissance de la communication réalisée par la direction générale des finances publiques au mois d’octobre dernier. La procédure est en cours.

En outre, un certain nombre de parlementaires nous ont interpellés sur la situation de certains redevables qui, dans l’attente de l’issue des contentieux, ont tardé à déposer leurs réclamations. M. le député Philip Cordery m’a ainsi écrit, parmi d’autres, afin que soit prise en compte la situation des personnes qui sont devenues assujetties en 2012.

J’ai donc demandé à l’administration fiscale de permettre à ces personnes – comme elle peut le faire, sur la base d’une disposition réglementaire en vigueur – de déposer le cas échéant une demande de remboursement au titre des prélèvements qu’elles auraient payés en 2012.

Ensuite, et j’insiste sur ce point, rien ne nous interdit juridiquement de soumettre les non-résidents aux prélèvements sur le capital, ni de prélever un impôt sur l’ensemble des redevables, y compris ceux qui ne sont pas affiliés en France, dès lors que ces recettes ne participent pas au financement de prestations réservées aux assurés de la sécurité sociale en France.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous souhaitons que notre système de protection sociale puisse continuer d’assurer aux générations futures les mêmes garanties que celles dont nous bénéficions aujourd’hui.

Ce texte y contribue très largement en sécurisant notre trajectoire de réduction du déficit public, en introduisant des mesures en faveur de l’activité et de la croissance, mais aussi en créant les conditions d’un rétablissement progressif de la confiance des assurés, puisque les résultats constatés depuis plusieurs années confortent plus que jamais nos prévisions pour les années à venir.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Aline Archimbaud applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, la crise a conduit l’ensemble des pays européens à accroître leurs dépenses sociales dans une première phase, laissant le système de protection sociale jouer son rôle d’amortisseur, puis à organiser leur reflux.

La France ne fait pas exception à cette règle, avec trois singularités notables : notre pays était déjà, avant la crise, caractérisé par un niveau de dépenses élevé et par des déséquilibres structurels ; il a non seulement accompagné le mouvement d’augmentation des dépenses, mais l’a amplifié par des dépenses supplémentaires ; il a engagé beaucoup plus tardivement que ses partenaires, en 2015, un processus de maîtrise des dépenses.

C’est pourquoi les finances sociales restent un enjeu majeur de la crise des finances publiques que connaît notre pays, avec des dépenses très élevées, une dette préoccupante, une croissance toujours aussi atone et, surtout, un chômage massif.

Seul point positif à cette absence de reprise : le niveau toujours très bas des taux d’intérêt, qui modère le coût de notre endettement.

La tendance est à l’amélioration des comptes – c’est vrai, j’en donne acte au Gouvernement –, mais de façon limitée au regard de l’effort massif demandé depuis trois ans, en termes de prélèvements obligatoires, aux ménages et aux entreprises : en 2015, plusieurs milliards d’euros de recettes nouvelles, mais une réduction du déficit de seulement 400 millions d’euros.

En 2016, les administrations de sécurité sociale, les ASSO, retrouveraient l’équilibre, avec un excédent de 1, 3 milliard d’euros – pour 582, 6 milliards d’euros de dépenses –, contre un déficit de 6, 2 milliards d’euros en 2015.

Ce redressement spectaculaire appelle quelques précisions.

Tout d’abord, ce chiffre comprend les contributions positives de la CADES et du Fonds de réserve pour les retraites. Sans elles, le déficit atteint 14, 7 milliards d’euros.

Ensuite, 5 milliards d’euros de dépenses auront été transférés à l’État au titre de la compensation du pacte de responsabilité : le déficit des ASSO diminue de 0, 4 point de PIB, celui de l’État de 0, 1 point.

Enfin, il faut signaler – pour mémoire – qu’en 2008, avant la crise, ce même solde était positif de 14 milliards d’euros.

Venons-en au PLFSS proprement dit.

En 2016, le déficit de l’ensemble régime général et FSV, le Fonds de solidarité vieillesse, serait de 9, 7 milliards d’euros, pour 352 milliards d’euros de dépenses.

Ce montant comprend 3, 7 milliards d’euros pour le FSV, qui reste et – si l’on en croit les perspectives pluriannuelles – restera le symbole du financement de la protection sociale par le déficit.

Le ralentissement des dépenses est réel, s’agissant en particulier des risques famille et vieillesse, à la suite des réformes récentes. En revanche, le déficit de la branche maladie se maintient à un niveau particulièrement élevé, malgré un ONDAM dont le taux de progression est encore réduit. Le constat est simple : les comptes ne se redressent que là où un effort bien réel a été supporté par les assurés.

J’évoquerai plus particulièrement trois mesures de ce projet de loi.

Ce projet porte la deuxième étape du pacte de responsabilité.

Cette évolution me paraît acter un changement de la nature des allégements de charges : il ne s’agit plus seulement de soutenir l’emploi, il s’agit également de financer autrement la protection sociale, en pesant moins sur les salaires.

Cette évolution reste néanmoins mesurée. Les cotisations sociales représentaient 55 % des recettes en 2014, elles en représenteront 55, 4 % en 2016.

On peut regretter que la réduction des cotisations famille n’intervienne qu’à compter du 1er avril 2016, alors qu’elle avait été annoncée pour le 1er janvier. Le Gouvernement a fait valoir que des mesures supplémentaires avaient été prises en faveur des entreprises, ce qui est exact, même si celles-ci n’ont pas été présentées comme alternatives au pacte de responsabilité. La question qui nous est posée est donc très simple : pour financer ce milliard supplémentaire, faut-il augmenter d’autant les prélèvements – alors que la mesure à compenser vise à les réduire – ou réduire les dépenses – et, dans ce cas, lesquelles ?

C’est pourquoi la commission des affaires sociales s’est sagement gardée de présenter des amendements sur ce calendrier des allégements.

Ce projet de loi comporte également, comme à l’accoutumée, des mesures de redéploiement de recettes, ce que d’aucuns appellent la « tuyauterie du PLFSS ».

Cette année, ces redéploiements prennent une ampleur particulière en raison de la solution proposée par le Gouvernement pour se mettre en conformité avec l’arrêt « de Ruyter » de la Cour de justice de l’Union européenne.

Je ne reviens pas sur le détail de cette affaire, sinon pour rappeler que l’intéressé était résident fiscal en France, mais non affilié au régime français de sécurité sociale. C’est donc bien des non-affiliés que nous parlons et de prélèvements de 250 à 300 millions d’euros, selon les informations que vous nous avez transmises, monsieur le secrétaire d’État.

Pour se mettre en conformité avec l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, le Gouvernement a décidé, à l’article 15, d’affecter le produit de tous les prélèvements sociaux sur les revenus du capital au FSV au titre des prestations non contributives, à la CADES et à la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, ce qui représente un total de transferts de 18 milliards d’euros.

Malgré ce véritable chamboulement, cette solution me paraît fragile, pour deux raisons principales.

En premier lieu, dans son arrêt, la Cour exclut clairement une affectation de ces recettes au financement de la sécurité sociale ou à l’apurement de sa dette – ce à quoi une affectation à la CADES contrevient clairement.

Deuxièmement, dans le règlement communautaire de 1971, la distinction entre prestations contributives et non contributives n’est pas aussi claire que le laisse entendre la proposition du Gouvernement.

Selon moi, une affectation de ces recettes au budget de l’État aurait été préférable, plus sécurisée. À défaut, une clarification du règlement de 1971 est impérative.

L’article 17 procède, quant à lui, à une anticipation du calendrier de transfert de dette de l’ACOSS à la CADES. Il s’agit d’une mesure de bonne gestion, qui laisse entier le problème du stock de dettes que les déficits alimentent chaque année : d’ici à la fin de la période couverte par la programmation, une dette de 30 milliards d’euros sera reconstituée à l’ACOSS. Une décision devra donc être prise en 2017. Les paramètres sont connus : reporter la dette sur les générations futures, ou augmenter la CRDS, la contribution pour le remboursement de la dette sociale.

S’agissant de la programmation pluriannuelle, l’annexe B du projet de loi, qui lui est en principe consacrée, ne comporte que très peu d’éléments au-delà de l’année 2016, et rien sur l’ONDAM, ce qui n’est pas conforme aux dispositions organiques qui lui sont applicables.

Cette annexe prévoit un retour à l’équilibre retardé et différé après 2019, malgré des hypothèses d’inflation et d’évolution de la masse salariale comparables à celles qui prévalaient avant la crise, et donc très optimistes.

Voici, madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’état, mes chers collègues, les principales observations de la commission des affaires sociales.

Sur les orientations générales du texte, la commission propose au Sénat l’adoption des première et deuxième parties relatives aux comptes des années 2014 et 2015. Cette position n’est en rien une approbation de la politique menée : il s’agit d’un exercice clos et d’un exerce en voie de l’être.

En revanche, les équilibres généraux pour 2016 ne sont pas satisfaisants, contrairement aux propos que vous avez tenus à cet égard, monsieur le secrétaire d’État. Cette insatisfaction n’a pas tant pour cause le contenu de ce texte – qui est somme toute très technique et qui va d’ailleurs dans le bon sens – que ce que nous n’y trouvons pas, à savoir des mesures fortes et des objectifs pluriannuels, propres à rétablir l’équilibre à court terme, dans deux branches en particulier : la vieillesse et l’assurance maladie.

J’en viens justement aux dispositions relatives à l’assurance maladie, qui constituent l’objet de près d’une trentaine d’articles du PLFSS.

On y trouve plusieurs sujets déjà abordés lors de la discussion du projet de loi relatif à la santé, mais cette fois sous l’angle du financement des mesures. Je pense notamment à l’article 42, qui s’inscrit dans le mouvement de réforme de la filière visuelle, engagé à travers les amendements que le Gouvernement a présentés lors de l’examen de la loi « santé ». Plusieurs de ces articles présentent un aspect très technique ; je ne m’y attarderai donc pas.

Je relève toutefois l’article 44, qui prévoit la pérennisation de l’expérimentation conduite par l’ARS Pays de la Loire sur l’organisation de la permanence des soins ambulatoires, ainsi que sa possible extension à toute ARS volontaire. Voilà une bonne mesure, qui peut effectivement contribuer à améliorer l’accès aux soins, et aussi à faire des économies ! Ces dispositions me paraissent très intéressantes et montrent qu’il est possible d’imaginer des solutions sur ce sujet épineux.

Je me concentrerai sur les quatre articles dont la portée me semble la plus importante.

La principale mesure de ce texte est incontestablement la création d’une « protection universelle maladie », communément appelée « PUMA », prévue par l’article 39.

Cette PUMA n’a d’universel que le nom : elle ne prévoit aucune disparition des quatorze régimes et quatre-vingt-trois opérateurs qui forment notre protection sociale. Il s’agit finalement d’une réforme administrative d’ampleur pour les caisses.

Concrètement, le droit à la prise en charge des frais de santé au moyen des prestations en nature de l’assurance maladie sera garanti à toute personne majeure résidant durablement et légalement en France, et ce sans condition supplémentaire.

On ne peut qu’approuver le principe : cette mesure devrait simplifier la vie des assurés sociaux. Nous nous interrogeons cependant sur les modalités de son application. La tâche des différents régimes et des administrations, en matière de mise en œuvre informatique et de rédaction de textes réglementaires, apparaît en effet considérable.

Le directeur général de la CNAM, la Caisse nationale de l’assurance maladie, nous a par exemple indiqué que quatre millions d’ayants droit majeurs figurent parmi les affiliés du régime général, et qu’il faudra organiser leur basculement vers l’affiliation directe.

Nous souhaitons donc, madame la ministre, que vous puissiez nous dire dans quelle mesure tous les régimes – je dis bien « tous » ! – sont bien en capacité de mettre en œuvre ce dispositif, et surtout de quels moyens et de quel accompagnement ils pourront bénéficier.

Une deuxième réforme d’ampleur est celle de la nouvelle tarification des soins de suite et réadaptation, ou SSR, à l’article 49. Cette réforme, dont le principe fait consensus, tend à mettre en place une nouvelle forme de tarification constituée de deux parties : une dotation forfaitaire et une part de rémunération fondée sur l’activité. En cas de succès, cette réforme de la tarification pourrait incontestablement servir de modèle à d’autres établissements.

Malheureusement, les bases sur lesquelles les nouveaux tarifs doivent être établis apparaissent incertaines ; elles sont fortement contestées par les établissements privés lucratifs. De fait, les tarifs proposés se fondent sur des études nationales de coût, dont l’article 51 du projet de loi de financement de la sécurité sociale tend à renforcer la fiabilité. On comprend l’inquiétude que suscite cet article pour des établissements dont la pérennité dépend de la réforme, alors que, encore une fois, le principe d’une réforme de la tarification des SSR est accepté par tous. Nous proposons donc au Sénat des amendements destinés à lever ces incertitudes.

Deux mesures importantes concernent enfin non pas la sécurité sociale, mais les organismes complémentaires. D’ailleurs, madame la ministre, nous nous interrogeons sur leur place au sein du projet de loi de financement de la sécurité sociale, même si cela a le mérite d’introduire les complémentaires dans la sphère publique budgétaire.

Il faut sans doute voir plus modestement dans le rattachement de ces mesures une question de calendrier, puisque le régime des complémentaires d’entreprise obligatoires sera généralisé au 1er janvier prochain.

L’article 21 est celui qui pose le plus de difficultés. Il s’agit de prévoir un mécanisme d’appel d’offres. Après le passage à l’Assemblée nationale, c’est devenu une labellisation des contrats de complémentaire santé pour les personnes âgées de plus de soixante-cinq ans. L’enjeu est de tirer les conséquences de l’accord national interprofessionnel, l’ANI, qui, en prévoyant l’obligation de contrats collectifs pour les salariés, les fait basculer à l’âge de la retraite sur des contrats individuels beaucoup plus chers.

Je note à ce propos qu’il existe de multiples dispositifs permettant aux personnes de plus de soixante-cinq ans ayant des revenus modestes d’accéder à une complémentaire santé, à commencer par la couverture maladie universelle complémentaire, la CMU-C, et l’aide pour une complémentaire santé, l’ACS, dont le seuil d’accès a d’ailleurs été modifié l’année dernière pour les personnes de plus de soixante ans.

Je remarque également que les mécanismes de mutualisation des risques sont les seuls véritablement susceptibles de faire baisser les primes pour les plus de soixante-cinq ans et que certains existent déjà, notamment pour les mutuelles de la fonction publique.

J’observe, enfin, que l’article pose des questions relatives à l’emploi dans le secteur des assurances complémentaires.

Dès lors, la commission des affaires sociales vous propose de supprimer cet article et d’attendre sagement le rapport demandé à l’Inspection générale des affaires sociales, l’IGAS. Je le souligne, son analyse semble partagée par la grande majorité des groupes politiques de notre assemblée.

La commission des finances propose pour sa part un autre mécanisme que celui qui est prévu à l’article 21. Cette solution paraît de nature à mieux atteindre l’objectif ; nous la soutiendrons.

L’article 22 offre un droit d’option aux salariés en contrat court entre la complémentaire d’entreprise et un chèque permettant l’adhésion à un contrat individuel responsable. À quelques semaines de l’entrée en vigueur des dispositifs collectifs négociés par les entreprises, cette mesure paraît malvenue. En effet, s’il est souhaitable de garantir la couverture complémentaire des salariés en situation atypique, pour ne pas dire précaire, il ne saurait être question de remettre en cause l’équilibre des accords déjà négociés, et ce au moment même où ils doivent entrer en application. La commission des affaires sociales s’en remettra finalement, pour améliorer ce dispositif, aux amendements identiques déposés par nos collègues de la majorité et de l’opposition.

Ainsi que je vous l’ai indiqué à propos des équilibres généraux, il n’est possible aujourd’hui de résorber le déficit que par une baisse des dépenses, ce qui a été entrepris. Aussi la commission des affaires sociales et la commission des finances proposeront-elles un dispositif que nous avons adopté l’année dernière et qui paraît plus que jamais nécessaire : la mise en place de trois jours de carence pour l’ensemble des personnels hospitaliers.

Cette mesure législative devrait, selon nous, s’accompagner de plusieurs mesures d’ordre réglementaire ou de gestion, dont l’adoption incombe au Gouvernement ; je les détaillerai au moment de l’examen de l’ONDAM.

Je conclus. Le soixante-dixième anniversaire de la sécurité sociale a été l’occasion de célébrer un modèle parfois fantasmé. La sécurité sociale d’aujourd’hui n’a que peu à voir avec celle des origines, qui, je le rappelle, mobilisait en tout et pour tout environ 15 % de la richesse nationale. Loin de s’éloigner d’un âge d’or, elle a, au contraire, connu une expansion continue.

La population française augmente ; elle vieillit et bénéficie de soins plus efficaces et plus sophistiqués. C’est précisément pour faire face à ces besoins légitimes que notre système de protection sociale doit évoluer, s’adapter, interroger son organisation et ses pratiques dans une logique de solidarité, que nous ne renions pas, mais aussi d’équité entre les Français et entre les générations.

Vaste programme, me direz-vous… Et, j’en conviens, le projet de loi de financement de la sécurité sociale ne peut sans doute pas y répondre seul.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Giudicelli

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’ONDAM médico-social atteindra 18, 2 milliards d’euros l’année prochaine, en progression de 1, 9 % par rapport à l’année 2015. L’objectif global de dépenses devrait, quant à lui, augmenter de 2, 1 %, pour s’établir à 19, 5 milliards d’euros en 2016. Ces évolutions, relativement favorables au regard de la progression des dépenses d’assurance maladie dans leur ensemble, méritent malgré tout d’être nuancées.

En effet, la décélération du rythme de progression des enveloppes allouées au secteur médico-social se poursuivra en 2016. Je le rappelle, en 2013, elles augmentaient encore de 4 %. Le secteur médico-social contribue très largement à la régulation des dépenses d’assurance maladie, par le biais des gels de crédits en cours d’année. Une partie de l’augmentation des crédits résultera, comme en 2015, d’un prélèvement opéré sur les réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA ; cette méthode ne peut pas constituer une solution pérenne de financement du secteur.

Ces réserves ne doivent pas occulter le fait que 405 millions d’euros de moyens supplémentaires devraient être alloués aux établissements et services pour personnes âgées et handicapées l’année prochaine, notamment afin de poursuivre la médicalisation des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, ainsi que les créations de places.

Sur ce dernier point, je salue l’annonce par Mme la ministre de la mobilisation d’une enveloppe de 15 millions d’euros pour débloquer la situation de familles qui, faute de solution d’accueil adaptée, sont aujourd’hui contraintes de se tourner vers la Belgique. Au-delà de cette mesure ponctuelle, je crois qu’il nous faut travailler à mieux adapter l’offre d’accueil sur notre territoire, ainsi que le dispositif d’orientation par les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH.

La commission des affaires sociales est favorable à l’adoption des articles relatifs au secteur médico-social, sous réserve de modifications rédactionnelles.

L’article 46 prévoit le transfert vers l’assurance maladie du financement des dépenses de fonctionnement des établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, à compter du 1er janvier 2017. Notre commission reconnaît l’intérêt d’ancrer pleinement ces structures dans le champ médico-social et d’assurer davantage de souplesse aux agences régionales de santé, les ARS, dans le pilotage de leurs enveloppes de financement. Je vous en avais déjà parlé, madame la ministre.

Pour autant, je tiens à attirer votre attention sur le fait que les modalités financières de la réforme ne sont pas prévues dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale. L’an prochain, le Gouvernement devrait donc prévoir le transfert vers l’assurance maladie d’une recette de l’État suffisamment dynamique pour couvrir à la fois les besoins de fonctionnement et d’investissement des ESAT. Ceux-ci sont importants et les crédits actuellement alloués par l’État, près de 1, 5 milliard d’euros pour le fonctionnement et de 1, 5 million pour l’aide à l’investissement en 2016, ne sont, me semble-t-il, pas au niveau des besoins constatés. Si les recettes transférées vers l’assurance maladie se révélaient insuffisantes, il serait regrettable que le poids du financement des ESAT ne pèse in fine sur les ressources propres de la CNSA, au détriment de la compensation des dépenses d’allocation personnalisée d’autonomie, ou APA, et de prestation de compensation du handicap, ou PCH.

Au demeurant, cette réforme ne sera qu’en partie source de simplification. En effet, l’État continuera de financer l’aide au poste, qui permet de garantir un niveau minimal de rémunération aux travailleurs en ESAT, et pour un montant proche de 1, 3 milliard d’euros l’année prochaine. À partir de 2017, les deux enveloppes, les dépenses de fonctionnement et l’aide au poste, seront placées sous la responsabilité de deux financeurs différents : l’assurance maladie et l’État. À mon sens, rien ne garantit qu’elles évoluent à l’avenir dans les mêmes proportions.

Notre commission s’est prononcée en faveur de l’article 47, qui prévoit la généralisation, sur une période de six ans, des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, les CPOM, dans les établissements et services pour personnes handicapées lorsque ceux-ci sont tarifés par le directeur général de l’ARS. Cette proposition nous apparaît cohérente avec la généralisation des CPOM dans les EHPAD, prévue à l’article 40 bis du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement, que le Sénat vient d’adopter en deuxième lecture.

Si la généralisation des CPOM permettra de moderniser le financement des structures concernées, notamment celles qui passeront d’une tarification au prix de journée vers un système de dotation globale, elle doit également servir de levier pour améliorer la qualité et la prise en charge. De ce point de vue, le fait que la réforme ne fasse pas l’objet d’un accompagnement financier spécifique risque, je le crois, de limiter les marges de manœuvre en la matière.

J’insiste également sur le fait que le CPOM ne peut être à lui seul la solution miracle pour dépasser les limites de l’organisation de l’offre médico-sociale sur nos territoires. Dans son rapport Zéro sans solution, publié au mois de juin 2014, Denis Piveteau a tracé un certain nombre de pistes. Certaines, il est vrai, sont déjà en voie d’être mises en œuvre ; je pense à l’article 21 bis du projet de loi santé. D’autres restent encore à construire pour mettre fin aux ruptures de parcours et améliorer de manière structurelle l’accompagnement des personnes handicapées et de leurs familles.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et au banc des commissions. – Mme Françoise Gatel applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, nous sommes tous ici attachés à la pérennité de la politique familiale. L’équilibre des comptes de la branche famille en est une condition sine qua non.

Alors que son déficit avait de nouveau augmenté en 2013, atteignant un niveau historique, les résultats en 2014 sont meilleurs que prévu et le déficit 2015, à 1, 6 milliard d’euros, est inférieur à l’objectif retenu voilà un an. Le présent projet de loi prévoit de le ramener à 800 millions d’euros en 2016, ce qui représenterait près de 2 milliards d’euros de diminution du déficit en deux ans.

On nous dit que le retour à l’équilibre de la branche famille est désormais prévu à l’horizon 2018. Faut-il pour autant s’en réjouir, en croyant à des jours meilleurs ? Certes, d'un strict point de vue comptable, tout semble mener la branche famille vers l’équilibre. Mais, derrière les chiffres affichés, c’est tout le fondement de la politique familiale et même sa pérennité qui semblent remis en cause.

Le creusement du déficit de la branche famille a été largement lié à une conjoncture économique exceptionnelle. Alors que le retour, annoncé, de la croissance et l’inversion, promise, de la courbe du chômage se font toujours attendre, c’est bien la faiblesse de l’inflation et le ralentissement de la natalité qui contribuent à freiner l’évolution spontanée des charges de la branche. Pas de quoi se réjouir !

Nous ne pouvons pas non plus saluer et applaudir le « tour de passe-passe » budgétaire qui consiste à décaler les charges d’une année sur l’autre au mépris des familles.

Ne soyons pas dupes ! Quand le Gouvernement a décidé de décaler le versement de la prime à la naissance du septième mois de grossesse au deuxième mois après la naissance, il s’agit d’une économie très artificielle !

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

C’est une charge reportée sur 2016. Ce sera trop tard pour les familles, qui auront déjà dû faire face aux dépenses pour accueillir leur enfant !

Nous ne pouvons pas non plus nous réjouir des économies nées de la modulation des allocations familiales. Cette mesure, qui s’apparente à une mise sous condition de ressources au regard des montants dérisoires versés aux familles les plus aisées, permettra d’économiser 880 millions d’euros en 2016, après 440 millions d’euros en 2015 : il s’agit là d’économies réalisées au mépris du principe de l’universalité, d’autant que le cumul des mesures d’économies, sociales et fiscales, décidées depuis 2012, représentera en 2016 une ponction de plus de 1, 8 milliard d’euros pour les familles.

Les mesures ponctuelles en faveur des familles les plus modestes sont incomparables avec les mesures d’économies, qui touchent également les classes moyennes.

Le texte qui nous est proposé fait bien reposer le redressement des comptes sur une baisse des dépenses, c’est-à-dire sur une diminution des prestations versées aux familles.

Le redressement des comptes de cette branche pèse uniquement sur les familles, sans que les personnes sans enfants soient mises à contribution, contrairement au principe de solidarité horizontale sur lequel cette politique s’est construite.

Pour ces raisons, la commission des affaires sociales vous proposera de ne pas adopter l’objectif de dépenses pour 2016.

La modification des modalités de revalorisation annuelle des prestations sociales entraînera une moindre dépense ponctuelle de 400 millions d’euros pour l’année 2016, dont 200 millions d’euros pour la branche famille. Cette mesure explique la moitié de la différence entre le solde qu’atteindrait spontanément la branche et la cible retenue.

L’autre moitié de cet écart résulte d’un vaste mouvement de réaffectation de recettes fiscales entre les différentes branches, mais ne correspond nullement à des mesures d’économies.

Notons que les allégements de cotisations sur les bas salaires prévus par le pacte de compétitivité n’entreront finalement en vigueur qu’au 1er avril 2016.

La perte de recette pour la branche sera donc plus élevée d’environ 1 milliard d’euros en année pleine, et de nouvelles recettes devront être trouvées si la trajectoire de retour à l’équilibre doit être respectée. On ne pourra pas éternellement tout remettre au lendemain !

Je refuse donc de cautionner le fait que la réduction salutaire du déficit de la branche de près de 2 milliards d’euros en deux ans repose principalement sur l’effet de mesures réduisant considérablement les prestations apportées aux familles, d’une part, et sur des mesures de tuyauterie et de trésorerie qui ne représentent aucune économie réelle, d’autre part.

Nous ne pouvons pas accepter que l’aide apportée aux familles soit sacrifiée sur l’autel de l’amélioration de la situation comptable de la branche famille.

Le texte qui nous est proposé fait essentiellement reposer le redressement des comptes sur une diminution des dépenses, c’est-à-dire sur une baisse des prestations versées aux familles.

Je rappelle, mes chers collègues, qu’en 2015 les mesures sociales et fiscales prises depuis 2012 représenteront, selon des chiffres communiqués par le Gouvernement, plus de 1, 8 milliard d’euros.

Alors que la politique familiale devrait reposer sur la solidarité entre les personnes sans enfants et les familles, seules ces dernières sont mises à contribution.

Ainsi, si le Gouvernement soutient que la politique familiale devient plus redistributive, c’est sous l’effet d’une restriction inacceptable et profondément injuste de l’effort global en faveur des familles.

La modulation des allocations familiales, qui étaient la seule prestation réellement universelle, modifie radicalement la nature de la politique familiale telle qu’elle a été conçue en France il y a exactement soixante-dix ans.

Cette politique a historiquement pour but de compenser la charge représentée par l’éducation d’un enfant, conformément à l’idée que chaque enfant doit bénéficier de la même aide de la part de la nation. C’est donc renier l’esprit qui a guidé nos prédécesseurs ; c’est renier nos principes républicains ; c’est aussi renier les fondements de notre politique familiale qui place l’épanouissement de l’enfant en son cœur.

Cette évolution est d’ailleurs totalement rejetée par l’ensemble des associations familiales que j’ai pu rencontrer et qui ont exprimé leur attachement à l’universalité de la politique familiale.

Cette évolution guidée par des considérations purement financières est par ailleurs inquiétante.

En effet, si on considère aujourd’hui que la politique familiale ne doit consister qu’en une politique de soutien aux revenus des familles les plus modestes et que les enfants des familles des classes moyennes ou aisées n’ont pas vocation à bénéficier de prestations sociales, qu’est-ce qui s’opposera, demain, à une modulation des remboursements de soins par l’assurance maladie ? Ne pourrait-on également étendre cette logique aux services publics et remettre en cause leur gratuité ? Ces évolutions semblent évidemment impensables à court terme, mais souvenons-nous que voilà à peine un an le Gouvernement excluait fermement toute remise en cause de l’universalité des allocations familiales.

Les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent, et le Gouvernement rencontre les plus grandes difficultés à tenir les siennes. Les exemples ne manquent pas...

Je dirai un mot sur l’accueil des jeunes enfants. Le Gouvernement en a fait un axe important de sa politique en faveur des familles, en fixant au travers de la convention d’objectifs et de gestion conclue avec la Caisse nationale des allocations familiales, la CNAF, pour 2013-2017 des objectifs ambitieux de création de places d’accueil individuel et collectif. Force est toutefois de constater que ces objectifs sont loin d’être atteints. Alors que 275 000 solutions nouvelles doivent être créées d’ici à 2017, seulement 21 000 l’ont été en 2013 et en 2014.

En matière d’accueil individuel, le nombre de solutions d’accueil a même régressé de plus de 8 000 places en deux ans, alors qu’il était censé progresser de 40 000 places.

Compte tenu de la situation financière des communes et de la ponction qui a été réalisée sur les ressources du Fonds national d’action sociale, on voit mal comment le retard accumulé pourra être rattrapé.

Or l’accueil des jeunes enfants représente un enjeu de la plus grande importance pour les familles, notamment pour l’insertion professionnelle des femmes. De réels efforts doivent donc être réalisés en la matière afin, sinon d’atteindre les objectifs fixés, ce qui ne paraît plus possible, au moins d’obtenir de réels progrès en la matière.

J’ai évoqué dans mon rapport quelques pistes de travail, dont certaines sont, je le sais, étudiées par le Gouvernement. On peut par exemple s’interroger sur les normes applicables aux établissements, sur l’organisation de la filière des métiers de la petite enfance ou encore faire évoluer les aides à la garde individuelle.

Enfin, je tiens tout de même à saluer la seule mesure qui constitue une avancée sociale digne d’intérêt dans ce texte : la généralisation du dispositif de garantie contre les impayés de pensions alimentaires, qui avait été mis en place à titre expérimental par la loi du 4 août 2014. Oui, madame la ministre, cette mesure devrait contribuer à aider les parents isolés, des femmes dans la plupart des cas, qui sont particulièrement exposés à la précarité, voire à la pauvreté.

En conclusion, je veux souligner combien je suis inquiète pour l’avenir et pour les familles qui, déjà, renoncent à s’agrandir.

M. Jean Desessard s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Caroline Cayeux

Plutôt que de se donner les moyens de consolider une politique familiale qui fait sens et donne à notre pays le dynamisme nécessaire, nous faisons tout l’inverse !

À l’heure où la Chine déverrouille sa natalité, la France verrouille la sienne !

À l’heure où il faut « faire », notre gouvernement n’a pas d’autre ambition que celle de « défaire » !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 tel qu’il nous a été transmis par l’Assemblée nationale, s’agissant de la branche vieillesse, ne présentait pas à première vue d’enjeux particuliers.

Il ne comporte en effet aucune disposition significative si ce n’est quelques mesures de correction des dysfonctionnements de la loi du 20 janvier 2014, en particulier sur le dispositif du cumul emploi-retraite.

Il est, surtout, porteur en apparence d’une bonne nouvelle. §Le déficit de la branche vieillesse poursuit sa réduction et atteindra en 2016 le montant de moins 2, 8 milliards d’euros, profitant des 900 millions d’euros d’excédent prévus pour les régimes de base. C’est en soi une excellente nouvelle !

Cette situation résulte, chacun le sait, d’une conjoncture rare : les recettes, « dopées » par la hausse des cotisations vieillesse intervenue depuis 2012, sont plus dynamiques que les dépenses, qui bénéficient pleinement de la réforme des retraites de 2010 et du recul de l’âge légal à soixante-deux ans.

Cependant, cette conjoncture est temporaire puisque la hausse des cotisations vieillesse prendra fin en 2017, après avoir porté leur taux à 17, 75 %, ce qui pèsera tout de même durablement sur le coût du travail.

Néanmoins, madame la ministre, et comme je vous l’avais déjà indiqué lors de votre audition devant la commission des affaires sociales, je salue cette trajectoire de baisse du déficit, qui représente un « coin de ciel bleu », selon l’expression utilisée par notre collègue Jean-Louis Tourenne la semaine dernière.

Pourtant, ce « coin de ciel bleu » ne change rien à notre profonde préoccupation quant à l’équilibre de long terme de notre système de retraite par répartition. Cette préoccupation est de trois ordres.

Tout d’abord, l’amélioration du déficit de la branche vieillesse souligne avec d’autant plus de force la persistance du déficit du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, qui se stabilisera en 2016 au niveau très élevé de moins 3, 7 milliards d’euros.

Réapparu en 2009, ce déficit s’explique par la persistance depuis la crise d’un chômage de masse face auquel la promesse d’inversion durable de la courbe est pour l’instant restée lettre morte. Nous espérons toutefois que les chiffres du chômage du mois de septembre soient le signe d’un amorçage de cette inversion. En attendant, rien dans ce texte ni dans vos propos récents, madame la ministre, ne laisse entendre que le Gouvernement souhaiterait agir contre le déficit du FSV. Vous êtes-vous résolue à n’avoir qu’un traitement par la conjoncture de ce déficit ou alors pensez-vous que des mesures devront être prises ?

Ensuite, les perspectives économiques ne permettent pas d’envisager à législation constante un retour à l’équilibre du système de retraite à l’horizon des vingt-cinq prochaines années.

Les analyses récentes du COR, le Conseil d’orientation des retraites, l’ont très bien montré : il faudrait que le taux de chômage chute à 4, 5 % et que les gains de productivité du travail bondissent à 2 % par an pour que cet équilibre soit assuré. Autant de conditions impossibles à réunir à court terme avec un tendanciel de croissance si faible.

Les hypothèses macroéconomiques sur lesquelles se fondent les textes financiers de cet automne sont encore considérées comme très optimistes par le Haut Conseil des finances publiques.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État

Ce n’est pas vrai !

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Vous nous aviez fait la promesse que la réforme de 2014 ramènerait durablement le système à l’équilibre. Nous aimerions savoir si vous maintenez toujours cette promesse qui nous paraît, hélas ! aléatoire.

Enfin, l’accord sur les régimes de retraite complémentaire des salariés du privé AGIRC-ARRCO doit être salué. C’est un soulagement tant les résultats de la négociation étaient déterminants pour la pérennité financière du système de retraite dans son ensemble.

Une mesure a concentré les attentions même si elle n’est pas la plus financièrement rentable : il s’agit du mécanisme de « coefficients temporaires », le fameux « bonus-malus », que nous avons longuement évoqué la semaine dernière dans le cadre de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale, la MECSS, et qui devrait de facto repousser à soixante-trois ans, dès 2019, l’âge effectif de départ à la retraite de la grande majorité des salariés du privé.

Cette mesure est présentée comme un premier pas vers une « retraite à la carte », ce qui est une idée d’avenir. Elle a néanmoins été difficile à prendre pour les partenaires sociaux, en particulier pour les syndicats de salariés. Comment ne pas y voir les conséquences de l’absence de mesures suffisamment courageuses à court terme par le Gouvernement lors de la réforme de l’année dernière ?

De plus, cet accord introduit une nouvelle disparité entre les salariés du privé et les fonctionnaires qui, eux, pourront toujours continuer à partir à soixante-deux ans en percevant l’intégralité de leur pension. La réforme de 2003 s’était précisément employée à effacer les différences entre les deux secteurs.

Aussi, tirant les conclusions de ces préoccupations, je proposerai au Sénat de voter les amendements de suppression des articles fixant les objectifs de dépenses de la branche vieillesse et du FSV, qui ont été déposés par notre collègue Francis Delattre, au nom de la commission des finances.

J’ai donc proposé à la commission des affaires sociales – et je réponds par là même au secrétaire d’État M. Eckert, qui nous reprochait de ne pas avancer de propositions – d’adopter, ce qu’elle a fait, un amendement permettant de porter, à compter du 1er janvier 2019 pour la génération de 1957, l’âge légal à soixante-trois ans tout en maintenant l’âge d’annulation de la décote à soixante-sept ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Cet amendement met en œuvre un relèvement progressif de l’âge légal, mécanisme qui a fait ses preuves aussi bien à court terme, ce qui est essentiel car les régimes de base renoueront avec les déficits en 2019, que sur le moyen terme. En effet, nous savons qu’en 2016 la réforme de 2010 permettra une économie de 5, 1 milliards d’euros.

L’amendement que je présente, je le sais, fait débat dans notre assemblée, et même au sein de la majorité sénatoriale. Je le juge toutefois équilibré : à la fois socialement juste et financièrement efficace.

De plus, il ne vise qu’une seule ambition : garantir pour les générations futures la pérennité de notre système par répartition auquel nous sommes tous, sur ces travées, très attachés.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, avec un excédent prévisionnel d’un demi-milliard d’euros, la branche AT-MP devrait pouvoir rembourser l’intégralité de sa dette dès l’année prochaine. Ces résultats très positifs n’auraient pas été possibles sans l’ajustement régulier des taux de cotisation et le maintien d’un dialogue social fructueux.

Je rappelle que les dépenses de la branche AT-MP couvrent, pour l’essentiel, trois types de sinistres : les accidents du travail, les accidents de trajet et les maladies professionnelles. La baisse tendancielle de la sinistralité ne s’est pas démentie dans la période récente. Des évolutions contrastées se profilent néanmoins en fonction du type de risques considérés.

Pour la première fois, en 2014, le nombre d’accidents du travail est passé sous la barre des 900 000. Ce chiffre reste considérable, mais il a diminué de près de 21 % en sept ans. Cette évolution s’explique par trois causes principales : les efforts de prévention déployés par les employeurs, la réduction du secteur industriel, le plus accidentogène dans l’économie française, enfin le ralentissement de l’activité économique en général.

Le nombre d’accidents de trajet a, quant à lui, été ramené d’environ 125 000 à 119 000, malgré une légère remontée en fin de période.

J’en viens aux maladies professionnelles. Leur nombre a connu un pic en 2011, avant d’amorcer une légère descente. Il se stabilise aujourd’hui à environ 68 000 et demeure ainsi largement supérieur au niveau observé au début des années 2000.

La croissance des maladies professionnelles est portée par celle des troubles musculo-squelettiques : leur part est passée de 26 % en 1990 à 87 % en 2014. Je rappelle que la part des pathologies dues à l’amiante s’élève, quant à elle, à 7 %.

Parmi les évolutions notables de ces dernières années, je souhaiterais insister sur le nombre croissant des maladies professionnelles reconnues sur le fondement des procédures dérogatoires par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles, les CRRMP.

En 2014, les affections sur lesquelles ces comités ont eu à se prononcer le plus souvent sont les troubles psychosociaux. Dans ce domaine, en l’espace de quatre ans, le nombre d’avis favorables s’est accru de quelque 73 % pour les dépressions et de 13 % pour les troubles anxieux.

Cet accroissement résulte en partie d’une interprétation plus souple donnée par le Gouvernement sur les règles d’appréciation de l’incapacité permanente. Malgré cet assouplissement, la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une pathologie psychique demeure difficile. Il n’est pas toujours évident d’imputer un burn-out aux seules conditions de travail, et il n’existe pas d’indicateur précis permettant de déterminer le degré d’incapacité provoqué par cette maladie.

Le rapport que le Gouvernement devra réaliser l’année prochaine en application de la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi nous apportera, je l’espère, des éléments d’appréciation nouveaux sur la possibilité d’intégrer des affections psychiques dans un tableau de maladies professionnelles ou d’abaisser le seuil d’incapacité permanente requis pour ces mêmes affections.

Je rappelle que nous avons formulé une préconisation en ce sens dans le rapport d’information de la commission des affaires sociales que j’ai rédigé, avec Jean-Pierre Godefroy, sur le mal-être au travail.

Nous pourrions donc nous réjouir des résultats excédentaires de la branche si la mise en place de nouvelles dépenses de transfert ne venait pas contrarier les efforts visant à renforcer la logique assurantielle et préventive de la branche.

Les dépenses de transferts, entièrement supportées par la part mutualisée des cotisations employeurs, représentent aujourd’hui près de 2, 5 milliards d’euros, soit 20 % des charges de la branche. Elles limitent fortement la partie variable des taux de cotisation, liée à la sinistralité propre de l’entreprise.

Or voici que l’annexe B du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 nous annonce un nouveau transfert de cotisations de 0, 05 point de la branche AT-MP vers la branche maladie du régime général. Cette mesure, qui n’a été découverte par les partenaires sociaux et la direction des risques professionnels de la CNAM qu’au moment de la publication du texte, conduirait à ponctionner la branche AT-MP d’un demi-milliard d’euros supplémentaire en 2016 et d’autant en 2017.

Il s’agit ni plus ni moins d’une nouvelle opération de renflouement de l’assurance maladie, qui remet en cause l’autonomie de la branche AT-MP et sa vocation assurantielle. Nous ne pouvons l’accepter, car elle amoindrit encore davantage la portée des leviers sur lesquels il est permis de jouer pour renforcer l’incitation à la prévention auprès des employeurs.

Faut-il rappeler que la convention d’objectifs et de gestion de la branche pour 2014-2017 et le troisième plan « Santé au travail » réaffirment la nécessité de faire de la prévention une priorité, en rupture avec une approche fondée sur la réparation ? Et que la branche a entrepris de nombreux travaux en ce sens, parmi lesquels la poursuite de la réforme de la tarification ?

Par ailleurs, en vertu du récent accord sur les retraites complémentaires, il est question de compenser la hausse des cotisations de retraite des employeurs, à hauteur de 700 millions d’euros, par une baisse des cotisations de la branche AT-MP à compter de 2019. Ici encore, la commission des accidents du travail et des maladies professionnelles de la branche a été prise de court.

Pouvez-vous, madame la ministre, nous renseigner sur les conséquences précises de cet accord sur la branche AT-MP ? Quels seront l’échelonnement et l’ampleur de la mesure annoncée ?

S’agissant des autres dépenses de transfert, la commission des affaires sociales réitère la double réserve émise l’année dernière.

La première concerne la dotation au fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA. L’activité du fonds connaît depuis 2013 un rythme soutenu, qui lui a permis d’augmenter le nombre d’offres, tout en raccourcissant les délais de réponse. Ce contexte justifie l’effort important de la branche AT-MP pour ce fonds.

Nous regrettons cependant le désengagement manifeste dont continue de faire preuve l’État dans le financement de l’établissement. Depuis sa création, celui-ci a été doté de plus de 4, 7 milliards d’euros, dont 4, 3 milliards en provenance de la branche AT-MP. Comme l’an dernier, le projet de loi de finances prévoit cette année une dotation complémentaire de l’État de 10 millions d’euros, ce qui ne correspond qu’à environ un cinquième du montant des participations assurées avant 2013. Je ne reviens pas sur les préconisations de la mission sénatoriale sur l’amiante, qui avait jugé légitime de prévoir un engagement de l’État à hauteur d’un tiers du budget du FIVA. On en est bien loin !

La seconde réserve concerne le versement de la branche AT-MP à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des maladies professionnelles.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 reconduit la dotation arrêtée l’année dernière, qui s’élève à 1 milliard d’euros, contre 300 millions en 2002. Compte tenu de la progression incessante de ce versement, la réalité des efforts engagés pour lutter contre la sous-déclaration, sans même parler des modalités d’évaluation de ce phénomène, reste sujette à caution. Il nous semble que le caractère automatique du versement ne doit pas exonérer d’un débat de fond sur les causes de la sous-déclaration et sur les actions à mener pour la circonscrire.

N’oublions pas, mes chers collègues, que la branche est alimentée avant tout par la cotisation des entreprises, ce qui veut dire que, sans ces transferts, les cotisations pourraient baisser. Cela soulagerait d’ailleurs les entreprises qui, vous vous en doutez, en auraient bien besoin en ce moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

M. Gérard Dériot, rapporteur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Utiliser de tels subterfuges pour diminuer le déficit de la branche maladie n’est pas très honnête, vous en conviendrez. C’est pourquoi, madame la ministre, mes chers collègues, compte tenu de l’ensemble de ces éléments, vous ne serez pas surpris que la commission des affaires sociales ait émis un avis défavorable à l’adoption des objectifs de dépenses de la branche AT-MP pour 2016.

Applaudissementssur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Mme la présidente, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, en 2016 comme chaque année, le caractère complémentaire des projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale ne se dément pas.

Ce caractère d’imbrication de plus en plus prononcé se manifeste dans le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale par deux dispositions intéressantes, lesquelles constituent même les principales mesures intéressantes du texte.

Il est normal, compte tenu du poids des administrations sociales dans l’ensemble de la dépense publique de notre pays, que la commission des finances émette un avis, et ce alors même que Mmes et MM. les rapporteurs de la commission des affaires sociales ont déjà émis un certain nombre de remarques très avisées.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

M. Gérard Dériot, rapporteur pour les accidents du travail et les maladies professionnelles. Nous mériterions de siéger à la commission des finances...

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je souhaiterais revenir, tout d’abord, sur le rôle déterminant des administrations de sécurité sociale dans la stratégie de redressement des comptes public.

Aujourd’hui, quelque 42 % de la dépense publique proviennent du bloc social. Or les quelques remarques que je ferai sur ce point fondamental seraient de nature à altérer l’optimiste de M. le secrétaire d’État chargé du budget, si toutefois celui-ci avait bien voulu demeurer parmi nous.

Le principal objectif budgétaire du Gouvernement réside désormais dans un retour du déficit effectif en deçà de 3 % du produit intérieur brut en 2017. Chacun connaît désormais les ressorts de ces fameux 3 % et la difficulté d’atteindre cet objectif.

Si l’on considère l’ensemble des administrations de sécurité sociale, les ASSO, dont il était prévu un retour global à l’équilibre dès 2016, force est de constater que ce retard aura un impact sur l’ensemble du dispositif visant au retour du déficit effectif en deçà de 3 %, et donc sur le respect de nos engagements internationaux.

L’amélioration des comptes sociaux serait essentiellement permise par la réalisation d’environ 20 milliards d’euros d’économies entre 2015 et 2017, ce qui représente quelque 40 % du programme global d’économies de 50 milliards d’euros qui a été annoncé par le Gouvernement dans le Pacte de responsabilité et de solidarité.

L’importance de la contribution des administrations de sécurité sociale s’explique par le poids de leurs dépenses, lesquelles dépassent largement celles de l’État.

Il s’agit de savoir si l’objectif de 7, 4 milliards d’euros d’économies qui nous est présenté est réaliste et, surtout, réalisable. Telle est l’une des questions centrales qui se posent à la lecture du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Pour l’année 2016, je le répète, les administrations de la sécurité sociale devraient donc réaliser quelque 7, 4 milliards d’euros d’économies. Devant l’Assemblée nationale, le 20 octobre dernier, le secrétaire d’État chargé au budget, M. Christian Eckert, a précisé le contenu de ces économies. Je vais vous donner, assez brièvement, l’avis de la commission des finances à cet égard.

Tout d’abord, l’objectif de 3, 4 milliards d’euros d’économies nécessaires pour respecter le taux d’évolution de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, de 1, 75 % représente un effort certes considérable, mais réalisable. Il semble en effet possible de suivre le rythme de progression proposé. Nous ne contestons donc pas cet objectif. De même, il semble crédible que les mesures déjà engagées, les années passées, en matière de politique familiale et de retraites permettent d’infléchir la dépense de 1 milliard d’euros.

Cependant, permettez-moi d’émettre des doutes s’agissant des 500 millions d’euros d’économies annoncés en matière de gestion des organismes de protection sociale, alors même que la Caisse nationale des allocations familiales vient d’être autorisée à renouveler 500 emplois et à en créer environ 420 en 2016, tout cela pour faire face aux nouvelles charges introduites par la réforme de l’ensemble du dispositif des allocations familiales que nous connaissons tous.

Enfin, quelque 1, 8 milliard d’euros d’économies proviendraient de l’assurance chômage – vous comprendrez que, dès l’abord, cela soulève de vraies interrogations – et de la réforme des retraites complémentaires AGIRC-ARRCO, sur laquelle il faut bien se rendre compte, mes chers collègues, que le Gouvernement n’a aucun moyen d’intervenir. Je regrette d’avoir à le dire, mais il ne dispose d’aucun levier et n’a aucune prise directe en la matière.

Je souhaitais, bien évidemment, demander des précisions à M. le secrétaire d'État chargé du budget, pour qu’il nous explique comment l’accord relatif à l’AGIRC-ARRCO peut nous amener à réaliser 1, 5 milliard d’euros d’économies, si ce n’est en anticipant sur le fait que, entre malus et bonus, celles et ceux de nos concitoyens qui s’engagent dans la projection de leur retraite en viennent à penser qu’ils attendront un ou deux ans de plus. C’est finalement une façon assez astucieuse d’amorcer un prolongement de l’âge de la retraite, mais il serait tout de même bon que, sur un sujet essentiel comme celui-ci, nous puissions connaître l’avis du Gouvernement.

En raison des fragilités de ce plan d’économies, il est permis de s’interroger sur le redressement véritable des comptes sociaux annoncé en 2016. En fait, le chiffre des économies réalisables que nous atteindrons à l’arrivée est plus près des 5 milliards d’euros que des 7, 4 milliards d’euros.

L’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, qui concerne un périmètre plus restreint, ne permet pas de dissiper ces doutes.

Tout d'abord, ce projet de loi de financement vient à nouveau confirmer l’abandon de l’objectif d’un retour à l’équilibre dès 2016, cette ambition étant reportée au-delà de 2019 !

Ensuite, nous nous trouvons face à un paradoxe : alors même que le Gouvernement annonce un taux d’évolution de l’ONDAM le plus faible jamais fixé et que la croissance tendancielle des dépenses sociales ralentit, un déficit global de 9, 3 milliards d’euros subsisterait en 2016, malgré un plan annonçant, d’un côté, 7, 4 milliards d’euros d’économies, et, de l’autre, 9, 3 milliards d’euros de déficit global – autre paradoxe !

Permettez-moi de dire, mes chers collègues, qu’identifier ce qui relève des économies à l’intérieur du déficit tient plus de la géolocalisation que de la comptabilité

M. Jean Desessard s’esclaffe.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Si le Gouvernement peut se prévaloir d’un retour à l’équilibre de la branche vieillesse – cela, en grande partie, grâce à la réforme des retraites de 2010 qui a été votée par la précédente majorité et que le Gouvernement oublie systématiquement –, ainsi que d’une réduction du déficit de la branche famille au détriment de plus de 600 000 familles, la situation de l’assurance maladie et du Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, demeure inquiétante, puisque leurs déficits respectifs atteindraient 6, 2 milliards d’euros et 3, 7 milliards d’euros.

Qu’en est-il exactement de l’évolution du poste important de l’assurance maladie ?

En réalité, monsieur le rapporteur, nous notons des économies de quelque 300 millions d’euros en 2014 et un creusement prévisible pour l’année 2015 qui atteint le milliard d’euros. De tels chiffres, sur un poste aussi déterminant, ne nous encouragent pas à faire preuve d’un optimisme béat.

M. Jean Desessard s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

En outre, le transfert, très discret dans un premier temps, du déficit de trésorerie de 23, 6 milliards d’euros de l’ACOSS, l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, à la CADES, la Caisse d’amortissement de la dette sociale, sous prétexte d’anticipation, selon le secrétaire d'État chargé du budget, m’amène à vous préciser que la consolidation par prêt d’un trou de trésorerie d’un montant aussi élevé, nous place, de facto, dans la dette maastrichtienne.

Il s’agit bien d’un ajout à la dette, et ce n’est pas une anticipation parce que, en réalité, il s’agit de la reprise des déficits des années 2013 et 2014 sur le FSV, mais aussi sur la branche famille, l’un pour 4, 4 milliards d’euros, l’autre pour 18, 9 milliards d’euros. Ce n’est donc pas l’anticipation de déficits futurs, mais la prise en compte de déficits qui existent vraiment. Cette explication très académique ne nous a donc pas vraiment trompés.

Notre inquiétude majeure est la dette sociale : quelque 219 milliards d’euros en 2016 ! Nous constatons que le one shot qui a été utilisé l’an dernier l’est à nouveau cette année.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. Ce n’est donc plus un one shot ! C’est une Winchester !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Toutefois, sachez, mes chers collègues, que la CADES arrive à saturation. Vous savez très bien ce que cela signifie. Pour l’année 2016 qui s’annonce, ce sont quelque 24 milliards d’euros de déficit qu’il nous faudra prendre en compte au titre de l’ACOSS.

Vous comprendrez que, pour toutes ces raisons, nous aurons de nombreux amendements à vous proposer, pour faire en sorte que la réalité apparaisse plus clairement et que nous puissions dégager des solutions susceptibles d’améliorer la situation.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Madame la présidente, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je dirai quelques mots, après l’intervention de nos rapporteurs, pour résumer le sentiment de la commission des affaires sociales sur ce PLFSS pour 2016.

Ce projet de loi, nous dit le Gouvernement, s’inscrit dans une trajectoire de réduction du déficit de la sécurité sociale. Comme l’a indiqué le rapporteur général, nous ne le nions pas, mais nous relativisons l’ampleur des résultats obtenus et nous contestons un certain nombre des moyens utilisés pour y parvenir.

J’évoquerai tout d’abord les résultats obtenus. Il s'agit d’une diminution d’un tiers du déficit en trois ans, soit un peu plus de 6 milliards d’euros. Ce n’est pas rien, il faut en convenir, mais il reste beaucoup de chemin à parcourir pour rétablir l’équilibre. Constatons simplement que, trois ans après, nous sommes loin de l’engagement n° 9 du Président de la République, à savoir des déficits publics ramenés à 3 % du PIB dès 2013, pour un équilibre en 2017.

Les objectifs ont été décalés dans le temps, pour l’État comme pour les comptes sociaux, malgré les prélèvements supplémentaires décidés depuis 2012 en matière sociale. Je n’en citerai que quelques-uns : deux hausses successives des cotisations vieillesse, une hausse des cotisations accidents du travail, une hausse du forfait social, une hausse des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, enfin la création de la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, la CASA, affectée deux années de suite à la sécurité sociale, tout comme lui a été affecté le produit de la réduction du quotient familial.

Non seulement ces mesures, et toutes les autres que je n’ai pas citées, n’ont pas produit le rendement escompté, mais elles traduisent, et c’est ce que nous contestons, un recours privilégié à l’impôt.

Le pacte de responsabilité, avec les allégements de charges amorcés cette année, marque sans doute un changement d’approche. Néanmoins, sa mise en œuvre renforce à nos yeux la nécessité de réduire, en parallèle, le rythme d’évolution des dépenses.

De ce point de vue, la mesure la plus significative prise depuis trois ans nous paraît totalement inopportune. Je veux parler de la modulation des allocations familiales selon le revenu, et je n’ajouterai rien à ce qu’a très bien dit, à ce sujet, notre rapporteur pour la branche famille.

En matière de retraite, l’action sur les dépenses a principalement été menée en 2010, avec une réforme dont les bénéfices ont été contrariés par l’élargissement des possibilités de départ anticipé, décidé à l’été 2012. Nous avons été surpris que, à quelques jours d’intervalle, le Gouvernement laisse entendre que le problème d’équilibre des régimes de base ne se posait plus, puis se réjouisse d’un accord sur les régimes complémentaires prévoyant, pour la grande majorité des salariés, un report à 63 ans de l’âge de départ avec le bénéfice du taux plein.

Nos concitoyens sont pleinement conscients des réalités démographiques, me semble-t-il. Beaucoup d’entre eux s’inquiètent que le financement à moyen terme de leur retraite ne soit pas aujourd’hui véritablement garanti. Rares sont ceux à ne pas être convaincus qu’un nouveau relèvement de l’âge de départ est inéluctable pour tenir compte des gains d’espérance de vie. Notre commission estime qu’il ne faut pas renvoyer les décisions à plus tard et propose donc une réponse dès ce PLFSS.

En matière d’assurance maladie, le Gouvernement se félicite de faire progresser les droits, de ne pas avoir réduit les remboursements ni élargi les franchises, de voir le reste à charge diminuer. Soit, mais tout cela au prix d’un déficit reporté sur les contribuables de demain et d’après-demain ! Celui-ci atteindra cette année son plus haut niveau depuis 2012, soit quelque 7, 5 milliards d’euros.

Nous constatons d’ailleurs que, en 2015, comme en 2014, comme en 2013, les résultats de l’assurance maladie seront dégradés par rapport aux prévisions de la loi de financement initiale ; cela nous laisse prudents quant à la légère amélioration envisagée pour 2016 et sceptiques quant à celle, plus importante, qui est annoncée au-delà de l’actuelle législature.

En 2016, l’augmentation de l’ONDAM sera certes limitée à 1, 75 %. C’est peu ou prou ce que le Sénat proposait, sans succès, l’an dernier. Erreur hier au palais du Luxembourg, vérité aujourd’hui avenue de Ségur ! Or on peut douter que la généralisation du tiers payant, si elle est mise en œuvre, facilite la réalisation d’un objectif qui impose, au contraire, de réduire les facteurs inflationnistes.

Par ailleurs, était-il bien opportun, par cette mesure, de susciter des crispations alors que le concours des professionnels est indispensable pour une coordination des soins plus efficiente ?

Dès lors, comment cette modération de l’ONDAM sera-t-elle obtenue ? Passons sur la ponction, malvenue, aux dépens de la branche accidents du travail, que notre rapporteur vient de signaler. Une part majeure des économies annoncées portera de nouveau sur les dépenses du médicament.

Il faut bien entendu s’en tenir à une juste prescription et tirer les conséquences des évaluations médico-économiques conduites par les instances compétentes. Veillons toutefois à ne pas fragiliser l’innovation, avec les bénéfices dont elle est porteuse à moyen terme en matière d’efficacité des traitements, mais aussi de pérennité des compétences développées par notre pays dans ce domaine.

En revanche, il est un volet qui paraît absent des actions que nous propose le Gouvernement. Nous avons suivi avec attention les difficiles négociations sur le temps de travail à l’Assistance publique des hôpitaux de Paris. Il y a là un enjeu important pour l’ensemble du système hospitalier, un levier pour améliorer son organisation et mieux maîtriser ses dépenses. Toutefois, sur ce plan, le statu quo semble prévaloir, bien que l’on puisse difficilement le juger satisfaisant.

Le présent PLFSS comporte en revanche, une fois encore, plusieurs dispositions relatives aux assurances complémentaires. Nous assistons depuis deux ans à une addition de mesures susceptibles de modifier en profondeur l’organisation et le fonctionnement de la protection maladie. Ces changements interviennent par touches successives, sans que l’on perçoive véritablement leur cohérence d’ensemble, ni la finalité visée. S’agit-il de renforcer le rôle des organismes complémentaires, quitte à réduire le libre choix des assurés ? S’agit-il, dès lors qu’ils assureront une couverture généralisée, de regrouper les intervenants du secteur en réduisant leur nombre ?

Ne devra-t-on pas se poser la question du maintien d’un double niveau d’assurance, de base et complémentaire ? Des voix s’élèvent déjà pour appeler à une simplification drastique, au sein d’un régime universel d’assurance maladie, avec, à la clef, une économie sur les coûts de gestion.

Comme la commission, tous les groupes politiques de notre assemblée, sauf un, souhaitent la suppression de l’article 21 du projet de loi. Cette disposition suscite la controverse, malgré l’objectif de progrès qu’elle affiche. C’est le signe, me semble-t-il, que les clarifications nécessaires n’ont pas été apportées et que les impacts sont difficiles à mesurer.

Voilà, mes chers collègues, les raisons, très brièvement résumées, pour lesquelles la commission des affaires sociales propose au Sénat de rejeter les objectifs de recettes et de dépenses du PLFSS pour 2016. Elle présentera des amendements sur plusieurs articles et vous demandera d’adopter un projet modifié, car elle ne saurait valider les orientations proposées par le Gouvernement.

Enfin, permettez-moi d’ajouter qu’il s’agit du douzième PLFSS sur lequel je suis amené à me prononcer. Comme souvent, il comporte des mesures intéressantes et d’autres que certains qualifieront de « mesurettes ». Comme toujours, il vise une meilleure maîtrise des dépenses de soins, mais le déficit de l’assurance maladie perdure à un niveau très élevé.

Les PLFSS se succèdent donc sans que soit garanti un financement de notre système de santé à la fois pérenne et moins pénalisant pour la compétitivité de nos entreprises. Or, au-delà des ajustements opérés d’une année sur l’autre, il faudra bien un jour, me semble-t-il, traiter globalement cette question, en utilisant de manière beaucoup plus rationnelle des moyens aujourd’hui dispersés entre les caisses de sécurité sociale et les organismes complémentaires.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC. – M. Gilbert Barbier applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Nous passons à la discussion de la motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Je suis saisie, par Mmes Cohen, David et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, d’une motion n° 442.

Cette motion est ainsi rédigée :

En application de l’article 44, alinéa 3, du règlement, le Sénat décide qu’il n’y a pas lieu de poursuivre la délibération sur le projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2016 (128, 2015-2016).

Je rappelle que, en application de l’article 44, alinéa 8, du règlement du Sénat, ont seuls droit à la parole sur cette motion l’auteur de l’initiative ou son représentant, pour dix minutes, un orateur d’opinion contraire, pour dix minutes également, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond et le Gouvernement.

En outre, la parole peut être accordée pour explication de vote, pour une durée n’excédant pas deux minutes et demie, à un représentant de chaque groupe.

La parole est à M. Dominique Watrin, pour la motion.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je montrerai dans mon intervention qu’il n’y a pas lieu de débattre d’un budget qui contredit sur bien des points les fondements mêmes de notre système de protection sociale.

Je veux toutefois dire d’abord un mot du contexte de travail dans lequel nous évoluons depuis le 14 septembre dernier, date de reprise de nos travaux. En moins de deux mois, nous avons étudié quatre textes complexes et parfois sensibles relevant de la commission des affaires sociales : le projet de loi relatif à la santé, la proposition de loi relative à la protection de l’enfant, le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement et la proposition de loi créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie.

Nous avons ainsi examiné – si l’on peut dire – quelque 2 031 amendements ! Or voici que, pris dans ce tourbillon de réunions, d’auditions, de commissions diverses et variées s’enchevêtrant d’ailleurs les unes les autres, nous devons examiner ce texte structurant qu’est le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016. Mes chers collègues, où est le recul nécessaire qui faisait la qualité des travaux de la Haute Assemblée ?

En outre, parallèlement, force est de constater que bien des sujets d’importance échappent au Parlement. Ainsi, nous découvrons dans la presse, comme tout un chacun, le contenu d’un accord sur les retraites complémentaires qui plombera encore les revenus des retraités et futurs pensionnés et fera porter sur eux seuls les efforts de redressement des comptes sociaux.

De même, nous découvrons un accord qui allonge d’un an la durée de cotisation nécessaire pour avoir effectivement le droit de partir à la retraite ; quand on peut perdre presque une mensualité de prestation en partant à la retraite à 62 ans plutôt qu’à 63 ans, qui, à part peut-être le Président de la République, oserait soutenir que l’on a un droit d’option ?

La loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, dite « loi Fillon », avait institué ce rendez-vous particulier, qui donne en fait la main au Medef, et c’est son application qui bafoue aujourd’hui le Parlement. Pourtant, le Gouvernement se félicite de ce nouveau recul et la droite veut même le généraliser…

Par ailleurs, mes chers collègues, ce PLFSS ne répond pas aux vraies questions. Notre système de sécurité sociale distribue certes des prestations pour un montant supérieur au budget de l’État, mais on exagère toujours la gravité de sa situation financière, afin de justifier de nouvelles réductions des prestations fournies aux salariés, aux assurés sociaux, aux familles ou encore aux retraités.

Selon vos propres chiffres, madame la ministre, le régime général de sécurité sociale devrait présenter en 2015 un déficit de 9 milliards d’euros pour un montant prévu de dépenses de 348 milliards d’euros. Cela correspond environ à un déficit de 2, 6 %, c’est-à-dire l’équivalent d’un découvert bancaire de moins de 40 euros pour un salarié percevant 1 500 euros mensuels nets ! Tout est dit…

La vraie question qui se pose à la sécurité sociale ne réside pas dans l’excès de dépenses, même s’il faut agir plus fortement sur les prix de médicaments pratiqués par un certain nombre de groupes pharmaceutiques. La vraie question est bien celle des recettes, victimes à la fois de la fiscalisation des ressources et de la multiplication des allégements de cotisations sociales patronales.

Or ces allégements continuent d’exploser. En effet, écoutez ces chiffres, mes chers collègues : de 23 milliards d’euros en 2015, ils vont passer à 33 milliards d’euros en 2016, avant d’atteindre 41 milliards d’euros en 2017, dans le cadre du pacte de responsabilité ; voilà la vraie raison du « trou de la sécurité sociale » ! Et quels résultats ont ces exonérations de cotisations patronales ? Quelque 6 millions de chômeurs !

Ambroise Croizat, le père de cette institution – le métallurgiste savoyard communiste devenu, à la Libération, le ministre communiste du travail du général de Gaulle – le disait déjà : « Faire appel au budget de l’État, c’est inévitablement subordonner l’efficacité de la politique sociale à des considérations purement financières, qui risqueraient de paralyser les efforts accomplis. » Nous partageons toujours, pour notre part, cette méfiance du fondateur de la sécurité sociale à l’endroit de l’intervention de l’État dans le financement et la gestion de la sécurité sociale.

Assujettir la sécurité sociale à la trop fameuse « trajectoire des finances publiques » contenue dans le pacte budgétaire européen et traduite, dans notre pays, dans la loi de programmation des finances publiques, c’est faire fi de ce qui est l’essence même de son existence : une contribution décisive, sous forme de prestations, au bien-être de l’ensemble de la population, ces prestations participant elles-mêmes à la croissance économique et au progrès social. Voilà un cercle qui serait vertueux !

En effet, le redressement économique de la France après la Libération a aussi été la conséquence du choix opéré par notre pays de disposer d’une sécurité sociale de haut niveau et de caractère universel. Ce système palliait les accidents et les événements de la vie et évitait tant aux salariés qu’à leur famille de sombrer dans la misère si l’emploi avait été perdu ou si l’âge de la retraite avait sonné.

A contrario, avez-vous remarqué, mes chers collègues, madame la ministre, que toutes les lois ayant conduit au recul des droits sociaux ont apporté des périodes de récession ou de ralentissement économiques ? Et que, au cours des deux dernières décennies, nos comptes sociaux n’ont retrouvé – de manière temporaire – la voie de l’équilibre, voire de l’excédent, que pendant la période comprise entre 1997 et 2001, pendant laquelle les lois de réduction et d’aménagement du temps de travail ont eu des effets décisifs ?

Il a suffi que François Fillon, durant le premier gouvernement Raffarin, déconnecte l’exonération de cotisations sociales et la réduction du temps de travail pour que l’on observe de nouveau, d’une part, un décalage entre les dépenses et les recettes de la sécurité sociale, et, d’autre part, les premières mesures d’austérité.

Le PLFSS pour 2016 n’échappe malheureusement pas à ces travers. Entre des objectifs de dépenses intenables et irréalistes, niant les réalités déjà très contraintes des hôpitaux, par exemple, des objectifs flous de santé publique, alors même que la fameuse compétitivité de notre économie dépend fondamentalement de la situation sanitaire de la population salariée, et diverses « mesurettes » d’ajustement de fiscalité, où est la visée ? Où est l’objectif ?

Sur quoi peut se fonder la discussion d’un texte qui, pour ne donner que quelques exemples, ne conteste pas l’assujettissement des retraites à la contribution sociale généralisée – la CSG – et à la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie, ce qui finit par rendre complexe l’adhésion obligatoire aux organismes de protection sociale complémentaire et à mettre en cause le caractère positif, pourtant évident, du tiers payant ?

Si l’on excepte quelques mesures favorables, telles que la gratuité totale de la contraception, la prévention infantile de l’obésité, la prise en charge intégrale du dépistage du cancer du sein ou encore la généralisation de la garantie contre les pensions impayées, ce projet de budget est surtout marqué par la logique de réduction de la dépense publique. Or, je le répète, cela entre en contradiction totale avec l’ambition originelle de la sécurité sociale, qui visait à assurer le bien-être de tous, de la naissance à la mort.

Nous ne connaissons que trop les piteux résultats de cette orientation : des retards dans le traitement des dossiers de retraite dans certaines régions, comme celle dont je suis l’élu, d’où des retards dans la perception des pensions et des allocations des plus modestes et des économies sur les prestations sociales, avec des coupes claires dans les allocations familiales et les dépenses d’assurance maladie – quelque 3, 4 milliards d’euros, notamment pour les hôpitaux publics, qui sont pourtant déjà exsangues. Ma collègue Laurence Cohen vous en parlera plus en détail lors de son intervention.

Ainsi, la droite n’a plus eu qu’à s’engouffrer dans ce sillon déjà tracé pour imposer en commission le report à 63 ans de l’âge de la retraite et l’abrogation des jours de carence pour le personnel hospitalier, pourtant déjà bien à la tâche.

Vous l’aurez compris, pour nous, ce PLFSS est trop marqué par de mauvais choix. En outre, parallèlement, le Gouvernement, cédant au MEDEF, décide de nouveaux cadeaux fiscaux et sociaux au patronat, et refuse de lutter contre la fraude à la déclaration de certains employeurs, qui coûte pourtant, selon la Cour des comptes, quelque 20 milliards d’euros par an à la sécurité sociale.

J’ose espérer, madame la ministre, que le Gouvernement n’utilisera pas l’excédent possible de la branche accidents du travail-maladies professionnelles pour diminuer les cotisations des employeurs, alors qu’il reste tant à faire pour répondre aux besoins des victimes du travail. Nous attendons de vous une réponse claire sur ce point.

Nous vous proposons donc, mes chers collègues, d’adopter cette motion tendant à opposer la question préalable, seul moyen de revoir l’architecture générale de cette construction budgétaire dans son ensemble et de revenir aux fondements humanistes de la sécurité sociale.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Madame la présidente, madame la ministre, la commission a bien l’intention de débattre de ce projet de loi et de ses différents articles.

Elle émet donc un avis défavorable sur cette motion.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous appelle également à ne pas adopter cette motion de procédure.

Je ne veux pas être trop longue pour laisser plus de temps au débat, de sorte que nous puissions répondre à de nombreuses questions, y compris à celles que vous posez, monsieur Watrin. Je m’en tiendrai donc à trois observations.

Tout d’abord, monsieur le sénateur, je m’étonne de votre remarque préliminaire sur la charge de travail excessive de la commission des affaires sociales. En effet, les Français attendent de nous tous que nous travaillions pour eux. Je vous remercie d’ailleurs de souligner, par votre remarque, l’importance du travail du Gouvernement dans le traitement des besoins de nos concitoyens.

Vous évoquez ainsi le texte relatif à la santé, qui a, par exemple, généralisé le tiers payant. Je ne reviens pas davantage sur les mesures que nous avons examinées il y a peu. Vous citez également la loi sur le vieillissement : qui peut dire que nos concitoyens n’attendent pas, en la matière, des mesures fortes ? Vous mentionnez aussi des propositions de loi, comme celle sur la protection de l’enfance.

Néanmoins, vous ne pouvez, d’un côté, demander que l’on réponde aux attentes sociales des Français et, de l’autre, regretter le travail que cela entraîne pour les parlementaires et pour le Gouvernement.

Ensuite, en ce qui concerne la branche accidents du travail-maladies professionnelles, et bien que je préfère répondre plus longuement à la fin de la discussion générale aux différentes questions qui m’ont été posées, il n’est pas de bonne politique de laisser à une branche de la sécurité sociale des ressources excédentaires. La sécurité sociale forme un tout, et cette branche sera largement excédentaire en 2016, tous les rapports le démontrent. Il est donc normal que nous fassions en sorte que ces ressources excédentaires puissent être redirigées vers l’assurance maladie.

Enfin, monsieur le sénateur, j’ose espérer que vos mots ont dépassé votre pensée lorsque vous vous êtes interrogé sur les fondements que l’on pouvait trouver à la discussion d’un tel texte. Permettez-moi de vous renvoyer la question : comment ne pas trouver un grand et beau fondement à discuter de la mise en place de mesures de prévention pour empêcher de jeunes enfants d’être confrontés à l’obésité ?

Comment ne pas vouloir discuter d’un texte qui va permettre à des mineurs de voir leur contraception mieux prise en charge ou d’améliorer le dépistage de certaines maladies, en particulier du cancer du sein ?

Comment ne pas vouloir débattre d’un texte qui propose des ressources complémentaires aux hôpitaux publics, notamment ceux qui prennent en charge, davantage que les autres, les publics en situation de précarité, ou aux femmes seules, qui sont le plus souvent concernées, de bénéficier d’une garantie de pension alimentaire lorsque leur ex-conjoint ne leur paie pas la pension qu’il devrait leur payer ?

Comment ne pas vouloir discuter d’un texte qui tend à simplifier et à mieux prendre en compte les situations de la vie quotidienne de millions de Français en créant une protection universelle maladie ?

Je pourrai continuer ainsi longtemps, monsieur le sénateur, mais je me contenterai de répéter mon incompréhension devant votre interrogation sur la nécessité de discuter d’un tel texte. En effet, la réponse figure dans les articles que j’ai présentés ! Je suis étonnée que votre groupe politique, par votre intermédiaire, exprime son désintérêt pour l’ensemble de ces mesures.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Je veux dire très simplement et calmement que les parlementaires du groupe socialiste ne voteront pas cette motion, car ils estiment qu’il est de notre responsabilité collective de ne pas sacrifier un débat ayant pour finalité d’assurer au mieux la protection de nos concitoyens et le progrès social de notre pays.

L’exercice budgétaire est indispensable et constitutif de l’engagement que nous avons pris devant la nation. Toutefois, une loi de financement est infiniment plus qu’un texte financier : c’est la définition d’une politique, au service d’une ambition de progrès et des droits des individus !

Je ne reviendrai pas sur les différentes mesures qui viennent d’être évoquées par Mme la ministre et je conclurai en rappelant simplement que notre système de protection sociale est l’une de nos principales richesses collectives. Nous devons donc débattre pour que ce dispositif progresse vers plus d’efficacité et de modernité, afin de répondre aux défis de notre société.

Ainsi, dans trente ans, nos successeurs dans cet hémicycle auront-ils peut-être l’occasion de fêter le centenaire de la Sécurité sociale et de célébrer les mérites d’un dispositif imaginé par le Conseil national de la Résistance en 1944 pour protéger les Français et leur permettre de gagner chaque jour de nouveaux droits.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Pour ne pas être trop longue, je ne m’exprimerai pas sur le fond de toutes ces questions, qui seront, je l’espère, débattues par la suite.

Fidèle à la position qu’il adopte depuis plusieurs années, notre groupe fera en sorte que le débat ait lieu sur des sujets aussi graves pour nos concitoyens que la santé publique, la santé au travail, la solidarité nationale et l’accès aux droits. C’est pour cette raison que nous voterons contre cette motion tendant à opposer la question préalable.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à Mme Laurence Cohen, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Cette question préalable n’est peut-être pas appropriée, mais je voudrais tout de même souligner que la réponse de Mme la ministre a été quelque peu caricaturale.

Je me permets de le dire, parce que le groupe CRC n’a jamais balayé d’un revers de main les questions posées au travers du PLFSS ! Au contraire, nous les trouvons suffisamment importantes, mais nous pensons aussi que les réponses apportées par le Gouvernement ne sont pas à la hauteur des enjeux et des défis, notamment ceux qui sont posés par l’insuffisante qualité des soins ou le renoncement à se soigner.

Nous souhaitons donc porter ce débat autrement, et c’est la solution qu’offre cette motion. Je ne suis sénatrice que depuis 2011, mais les réponses que j’entends depuis lors sont toujours les mêmes : non à de nouvelles recettes et à de nouveaux financements ! Pas touche aux entreprises et à leurs profits ! En revanche, il faut travailler plus, plus longtemps, plus vieux, pour gagner moins ; ça, c’est possible !

Nous nous permettons donc de souligner l’absurdité de ces réponses au moyen de cette motion, non pas pour balayer le débat, mais pour dire qu’il faut essayer d’aller plus loin. Ne vous inquiétez pas, nous avons bien l’intention de discuter, car nous allons proposer des amendements constructifs et tendant à proposer une autre vision de notre modèle social.

Néanmoins, nous voulons aussi montrer que les choix relevant d’une autre politique sont refusés ici et que les marges de manœuvre du Parlement sont bien limitées. Les patientes et les personnels de santé en souffrance, qui seront dans la rue le 17 novembre prochain, sauront vous le rappeler, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Gérard Roche, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Roche

Pendant ces quelques jours, ici au Sénat, nous n’aurons qu’un souci : maintenir un système de protection sociale qui est l’un des meilleurs au monde, mais qui souffre de problèmes de financement.

Chacun aborde ce débat avec sa propre sensibilité politique. Je sais que même nos collègues du groupe CRC, qui sont à l’origine du dépôt de cette motion, sont animés de la ferme intention d’améliorer le système. Nous en sommes tous là, mais il faut que le débat vive selon les règles de la démocratie, c’est-à-dire en confrontant les idées et les points de vue des uns et des autres. Telle est la richesse de notre système démocratique ! Le Gouvernement nous fait des propositions, nous en ferons d’autres, et nous verrons bien ce qu’il en sortira.

En tout état de cause, considérant que le vote de cette motion reviendrait à fermer trop prématurément le débat, notre groupe s’y opposera.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Je mets aux voix la motion n° 442, tendant à opposer la question préalable.

Je rappelle que l'adoption de cette motion entraînerait le rejet du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Je rappelle en outre que la commission et le Gouvernement ont émis un avis défavorable.

En application de l'article 59 du règlement, le scrutin public ordinaire est de droit.

Il va y être procédé dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 45 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures cinquante-cinq, est reprise à dix-sept heures cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen de la proposition de loi organique de modernisation des règles applicables à l’élection présidentielle, déposée sur le bureau de l’Assemblée nationale le 5 novembre 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Dans la suite de la discussion générale, la parole est à Mme Aline Archimbaud.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, assurant à tous protection et solidarité, la sécurité sociale est un pilier de notre République. Certes, elle fait face à de nombreux défis, notamment la lutte contre un déficit chronique depuis 2001, sans pour autant perdre de vue l’objectif principal de protection de tous, à un moment où la crise économique et la crise sociale explosent. Il s'agit d’un jeu d’équilibre difficile, car il conditionne la pérennité de notre système social, aussi bien de ses grands principes fondateurs que de son fonctionnement pratique.

Le déficit s’est réduit depuis quelques années. Nous ne pouvons que saluer cette situation, même si les moyens mis en œuvre n’ont pas toujours été les plus justes, ni les plus efficaces. Mon collègue Jean Desessard y reviendra dans la suite de la discussion générale.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Dans les quelques minutes qui me sont imparties, je voudrais insister sur le fait que la réduction du déficit de la sécurité sociale, notamment celui de la branche maladie, ne peut, selon nous, être réelle et durable si l’on ne décide pas de s’attaquer fermement, en amont, à deux problèmes majeurs et structurels.

Le premier problème est l’explosion dans notre pays des maladies chroniques, bien souvent liées à nos modes de vie et à notre environnement, et pour lesquelles la prévention est l’élément clef. En 2006, l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, constatait que quelque 86 % des décès étaient dus aux maladies non transmissibles en Europe.

La France ne fait pas exception. On estime que plus de 80 % des dépenses remboursées par l’assurance maladie dans notre pays peuvent être attribuées à des maladies non contagieuses, chroniques, comme le diabète, les cancers, les maladies respiratoires chroniques dont l’apparition et l’aggravation sont souvent directement ou indirectement liées à des éléments sur lesquels nous avons la possibilité d’agir.

L’air que l’on respire, avec son lot de polluants, la nourriture que l’on mange, avec les produits chimiques qui l’accompagnent, sans compter les addictions au tabac ou à l’alcool, nos modes de déplacement, de production et de consommation ont un coût sanitaire extrêmement élevé. Le surcoût dû aux maladies chroniques sur à peine vingt ans a été évalué à environ quatre fois la dette de l’assurance maladie – 108, 6 milliards d’euros – et à deux fois celui de la dette sociale totale – 209 milliards d’euros !

Le groupe écologiste, très attaché à ces problématiques, proposera donc, comme à son habitude, plusieurs amendements visant à réduire l’impact de ces facteurs environnementaux et comportementaux sur la santé. Compte tenu de l’urgence de la situation, nous espérons être écoutés.

Je voudrais dire un mot sur le diesel. Nous alertons depuis des années sur les dangers des particules fines et du dioxyde d’azote, produits en grande quantité par les moteurs diesel. Nous avons même déposé une proposition de loi à ce sujet, qui a été débattue ici même en novembre 2014. Il nous avait été répondu, à l’époque, que nos alertes étaient inutiles, car les filtres à particules permettaient de rendre l’air plus pur et que les nouvelles voitures aux normes « euro 6 » étaient d’une propreté remarquable…

Notre tout récent amendement qui, il y a quelques semaines, avait pour objet de demander la mise en place d’expertises indépendantes en vue de mesurer très clairement les émissions de particules a été rejeté ici même, juste avant que n’éclate le scandale Volkswagen ! Nous espérons que ces expertises pourront être rapidement mises en place.

J’en viens au second point fondamental que je souhaite évoquer : il faut se donner tous les moyens de lutter contre le non-recours aux droits par les nombreuses personnes perdues dans les méandres de l’administration, isolées, engagées dans un véritable parcours du combattant. Or cela coûte très cher aux finances publiques, nous voulons insister sur ce fait.

Prenons la question de l’accès aux soins. Une fameuse étude de l’OCDE, publiée ces jours derniers, fait apparaître que quelque 23 % des Français dont les revenus sont inférieurs à la moyenne ont des besoins de santé non satisfaits en raison du coût trop important des consultations et des traitements. Pourtant, nombreux sont ceux qui pourraient avoir accès à des dispositifs et qui, en attendant le tiers payant généralisé que nous appelons de nos vœux, pourraient leur permettre de ne pas avancer de frais médicaux.

Pour ne citer qu’un chiffre, qui est fourni par le fonds CMU, entre 21 % et 34 % des personnes éligibles à la CMU complémentaire – soit, entre un et deux millions de personnes, selon cette même source – n’avaient pas ouvert leurs droits en 2013.

La simplification des démarches administratives, que nous demandons régulièrement, le développement de la prévention – point sur lequel nous avons en effet avancé, madame la ministre – sont indispensables pour éviter des drames sanitaires qui ne sont pas inéluctables. Même si ces propositions sont coûteuses à court terme, les économies à moyen et long terme pourraient être énormes.

Plusieurs mesures présentées dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale vont dans ce sens, et nous nous en réjouissons. C’est le cas, par exemple, de l’individualisation de la gestion des droits à la protection universelle maladie, qui constitue une bonne avancée en matière d’accès aux droits et d’égalité entre les femmes et les hommes et qui permet de lutter contre toutes les ruptures que nous connaissons dans une société en crise.

Je me réjouis également de la mise en place de la première garantie d’une pension alimentaire minimale. Dans le domaine de la prévention, nous soutiendrons les mesures proposées pour lutter contre l’obésité, le dépistage plus étendu du cancer du sein et l’accès facilité à la contraception pour les mineurs. Elles sont nécessaires et elles étaient attendues. Toutefois, il reste beaucoup à faire.

Mes chers collègues, le groupe écologiste sera très attentif à l’évolution des débats dans notre hémicycle pour décider finalement de sa position sur ce texte.

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, à la lecture de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, il est évident que la politique que ce gouvernement mène d’une année sur l’autre est marquée par une grande continuité.

Ce texte contient un certain nombre de mesures ou de « mesurettes », comme on l’a dit, pour limiter autant que faire se peut le déficit – avec une certaine réussite, selon le secrétaire d’État chargé du budget. Toutefois, tout compte fait, une analyse détaillée permet d’en relativiser la pérennité, car il est procédé, pour l’essentiel, à des montages artificiels et à des mouvements financiers. Le retour à l’équilibre, qui nous était promis pour 2016 ou 2017, est aujourd’hui reporté à 2020.

La Cour des comptes l’a d’ailleurs rappelé assez sévèrement en appelant de ses vœux des réformes structurelles qui ne viennent pas, en particulier dans la branche maladie qui demeure chroniquement déficitaire.

Il serait temps aussi, à mon sens, de ne plus employer l’expression trompeuse de « réduction des dépenses », alors qu’il ne s’agit, de fait, que d’une moindre progression de celles-ci par rapport à un tendanciel pour le moins très théorique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Barbier

Comme exemple d’artifices, je citerai l’article 17 du présent texte, qui autorise la CADES à reprendre, dès 2016, les déficits cumulés de l’ACOSS.

La manœuvre peut paraître pertinente pour consolider des taux d’intérêt très bas. Néanmoins, comme l’ont rappelé non seulement la Cour des comptes, mais aussi M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, il serait nécessaire de relever à due concurrence de 0, 23 point la CRDS pour que le remboursement ne s’étende pas au-delà de 2024. Le Premier président de la Cour des comptes a d’ailleurs employé à ce sujet une formule assassine : « En matière de déficit, les miracles sont vraiment exceptionnels, et la magie fonctionne très rarement. »

J’examinerai à présent les différentes branches. La branche retraite arrive à l’équilibre, certes au prix de mesures que vous avez prises, mais, surtout, du fait des décisions prises en 2010 par vos prédécesseurs et dont le plein effet se fait aujourd’hui sentir.

Ce déficit est-il pour autant définitivement vaincu ? Personne n’ose l’affirmer ; il est d’ailleurs bon de le reconnaître. Toutefois, dans très peu d’années, il faudra revenir sur ce problème récurrent. Nous nous contentons, quels que soient les gouvernants, de reporter sur les générations futures nos déficits de fonctionnement ; il faudra bien assumer un jour cette dette cumulée.

D'ailleurs, ce satisfecit concernant l’équilibre de la branche retraite ne doit pas occulter le déficit de plus de 3 milliards d’euros du Fonds de solidarité vieillesse.

Concernant la branche famille, je suis conscient qu’il faut faire des économies dans le maquis des prestations et de leur calcul. Je regrette néanmoins que le Gouvernement n’ait pas trouvé une méthode permettant de conserver l’universalité des prestations tout en acceptant, peut-être, une modulation de celles-ci.

Les mesures prises ont été ressenties comme brutales et ciblées. Loin de moi l’idée de rapprocher ces décisions et la chute de la natalité enregistrée en 2014 dans notre pays ; il faut pourtant avouer que la coïncidence est troublante… Dans la même branche, la manœuvre consistant à décaler au 1er avril l’allégement promis aux employeurs des cotisations famille, loin de contribuer à rétablir la confiance du monde de l’entreprise, ne peut que nuire à la reprise d’activité dont nous avons tant besoin.

Quant à la branche maladie, elle demeure très déficitaire et le restera tant que de nécessaires réformes de structure ne seront pas engagées.

La première de ces réformes, madame la ministre, puisque vous nous avez demandé d'en proposer, devra concerner l’hospitalisation publique. Au risque de me répéter chaque année, la restructuration de ce secteur est nécessaire et urgente. Certes, elle n’est pas facile à mener ; certes, elle risque d’être impopulaire. Elle représente néanmoins la première condition pour une nouvelle organisation de l’offre de soins.

Il existe en France quelque 1 458 établissements publics, auxquels s’ajoutent 712 établissements privés à but non lucratif et 1 022 à but lucratif. C’est beaucoup et c’est beaucoup trop ! Cela entraîne surtout une dissémination des moyens et une offre de soins très inégalitaire.

Aujourd’hui, chacun de nous, en tant que patient, souhaite être pris en charge dans les meilleures conditions de traitement ; la proximité n’est plus un critère déterminant. En outre, l’évolution des techniques fait qu’il n’est plus possible de pouvoir tout bien faire partout.

La dissémination des hôpitaux publics est coûteuse et nuit à leur qualité. Ils devraient être des pôles d’excellence, mais, hélas, tel n’est plus toujours le cas. Ce n’est d’ailleurs pas faute, madame la ministre, de vous avoir alertée de l’abaissement qualitatif dont souffrent certains services hospitaliers sur notre territoire.

Les mesures récemment annoncées visant à relancer un recrutement de qualité dans les hôpitaux publics me paraissent pour le moins surprenantes, dans leur forme comme dans leur financement. Elles montrent néanmoins que vous avez enfin pris conscience de ce problème.

Pour le reste, les mesures contenues dans ce texte budgétaire n’ont rien de très innovant. En revanche, elles concordent de manière frappante avec les données issues du baromètre d’opinion récemment publié par la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, la DREES. Les Français, selon cette étude, approuvent la réduction des tarifs des professionnels de santé, la limitation de la liberté d’installation des médecins, des taxes plus élevées sur les fabricants de médicaments ou encore la prescription obligatoire de médicaments génériques. Avouons que la similitude est étrange avec les mesures que le Gouvernement prend et nous propose d’adopter dans les budgets successifs de la sécurité sociale !

Il a été annoncé que l’ONDAM augmenterait de 1, 7 % en 2016. Cette valeur est d’ailleurs quelque peu artificielle, dans la mesure où, comme vous le savez très bien, l’augmentation sera plutôt de 2 % à périmètre constant : certaines cotisations des personnels auxiliaires médicaux conventionnés ont, en effet, été transférées vers une autre catégorie de dépenses.

L’effort de maîtrise des dépenses porte sur les cibles traditionnelles du Gouvernement. Cette année encore, le volet « médicaments » devra en assumer une part extrêmement lourde, à savoir près de la moitié de ces économies.

J’ai noté, madame la ministre, que votre majorité à l’Assemblée nationale s’alarmait de ces mesures. Mme Orliac, députée de votre majorité, évoquait ainsi les conséquences désastreuses que ces mesures d’économies sur le médicament entraîneraient : délocalisations, pertes d’emplois, déclin des exportations, assèchement des capacités françaises d’innovation, etc. Je le répète, c’est votre majorité qui tient de tels propos !

Il est évident que le message ainsi envoyé aux industriels étrangers ou français risque de les dissuader d’investir dans notre pays. Quand bien même on ferait fi de l’incidence économique de cette mesure, il serait évident que nous entrons dans une impasse à vouloir raboter sans discernement.

On peut ainsi noter que, parmi les quelque 350 classes thérapeutiques de médicaments, les 10 classes qui ont connu la plus forte augmentation de leur chiffre d’affaires l’an dernier regroupent les médicaments les plus innovants. L’absence de ligne directrice de votre politique du médicament nuit non seulement aux finances, mais surtout aux patients.

L’hospitalisation privée n’est pas exempte non plus de mesures d’économies, alors même que près de 30 % des cliniques sont déjà en déficit.

Pour le reste, les travaux menés sur le projet de loi de modernisation de la santé, dont ce projet de loi de financement de la sécurité sociale n’est que le prolongement, ont fait comprendre à chacun que le Gouvernement entendait imposer sa philosophie partisane et faire évoluer notre système de santé vers une étatisation rampante.

Le découragement guette. De là, madame la ministre, naît un verbe qui n’existait pas jusqu’alors dans le dictionnaire : « déplaquer ». Les professionnels de santé « déplaquent » ! Cela, à mon sens, résume les résultats de votre politique !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Madame la présidente, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale était particulièrement attendu en cette année de célébration du soixante-dixième anniversaire de notre modèle de protection sociale.

Malheureusement, plutôt que de répondre aux besoins de santé de la population, le Gouvernement préfère poursuivre la réduction des dépenses, sur la santé comme sur les besoins sociaux, et compenser une fois de plus les exonérations offertes au patronat.

Il s’agit donc pour vous, madame la ministre, d’économiser sur la santé quelque 10 milliards d’euros en trois ans, dont 3, 4 milliards d’euros en 2016. S’y ajoutent 5, 3 milliards d’euros d’exonérations de cotisations sociales patronales, que vous avez décidé d’élargir dans la mise en œuvre du deuxième volet du pacte de responsabilité. Mais quelle mouche a donc piqué le Gouvernement pour qu’il s’entête dans une politique, censée redresser l’emploi, qui ne marche pas ?

La courbe du chômage serait-elle en train de s’inverser à la suite des cadeaux consentis au patronat, notamment au travers du pacte de responsabilité ? Nous pensons au contraire qu’il est urgent d’évaluer et de conditionner toutes ces aides qui profitent aux entreprises et non à l’emploi.

Paradoxalement, d’un côté, vous prônez la rigueur et appelez à soigner mieux avec de moins en moins de moyens quand, de l’autre côté, vous faites preuve d’une générosité à fonds perdu. Faut-il rappeler que ces exonérations consenties au patronat représenteront au total, au-delà de la santé, quelque 33 milliards d’euros en 2016 et 41 milliards d’euros en 2017 ?

Comment ne pas s’insurger contre cette logique libérale mortifère que nous dénoncions ensemble il fut un temps ? Nous désapprouvons votre objectif de transformation de notre système universel de protection sociale en un filet de sécurité minimal pour les plus pauvres, les plus précaires, les plus fragiles et les plus âgés.

Au motif de l’indépassable dette de la sécurité sociale, qui est en réalité voulue et entretenue, vous vous obstinez à vouloir réduire les moyens financiers consacrés à la couverture des besoins sociaux et à la santé des assurés.

La réduction du déficit, que vous estimez à 9, 7 milliards d’euros pour 2016, est annoncée telle une victoire. Toutefois, ne croyez-vous pas qu’il faut se demander à quel prix elle est obtenue ?

Faisons la chasse aux dépenses inutiles, soit ; néanmoins, contrairement à vous, madame la ministre, nous ne considérons pas que renoncer au principe d’universalité des allocations familiales est une mesure de justice sociale. En réalité, les 865 millions d’euros d’économies réalisés sur le dos des familles, loin d’être redistribués, profitent aux entreprises.

Pardonnez-nous, madame la ministre : nous ne pouvons pas nous réjouir avec vous de ce résultat.

De même, réduire le déficit en faisant des économies sur le dos des personnels et des populations est une vue à court terme, qui ne peut entraîner que de lourdes conséquences : fermetures d’hôpitaux et de maternités de proximité – j’y reviendrai – ou encore dégradation des soins, mais aussi de la prise en charge des usagers par les personnels des agences de la sécurité sociale. Ainsi, les retraités du Nord se sont retrouvés sans pension ni allocation pendant plusieurs mois !

J’ai bien entendu votre satisfaction quant aux résultats de la branche vieillesse. Toutefois, si celle-ci est effectivement excédentaire de 900 millions d’euros en 2016, combien de Françaises et de Français devront travailler plus longtemps pour une pension toujours plus faible ?

Comment ignorer que ces résultats sont le fruit de reculs sociaux opérés par des gouvernements de droite et, hélas, poursuivis par vous ? En 2010, Éric Woerth, alors ministre du travail, ouvrait les hostilités en annonçant le recul de l’âge de la retraite de 60 à 62 ans. En 2014, c’est vous qui persistez et signez, en allongeant à quarante-trois années la durée de cotisation nécessaire pour bénéficier d’une retraite à taux plein ! Que dire, en outre, des reniements qui se sont traduits, en 2015, par l’augmentation des cotisations vieillesse et du gel des pensions ?

Visiblement, ce n’est pas assez pour certains : la majorité de droite de la commission des affaires sociales vient de voter, sur proposition de son rapporteur, un recul d’un an supplémentaire de l’âge de départ à la retraite, en s’appuyant sur l’accord des régimes complémentaires conclu sous l’impulsion du MEDEF. Quelle indécence, dans un contexte où la pauvreté progresse parmi les retraités, singulièrement les femmes retraitées !

En ce qui concerne la branche accidents du travail-maladies professionnelles, il est particulièrement cynique de vouloir financer les retraites complémentaires sur le dos des victimes du travail. L’accord sur les retraites complémentaires AGIRC-ARRCO, qui prévoit la prolongation d’un an, à compter de 2019, de la durée de cotisation pour la retraite à taux plein, ainsi que la revalorisation, à cette même date, des cotisations employeurs, est en effet assis sur la baisse des cotisations des entreprises sur les accidents du travail et des maladies professionnelles.

Alors que l’excédent de cette branche masque – faut-il le rappeler ? – la sous-déclaration massive des accidents du travail et des maladies professionnelles, les victimes du travail vont, en quelque sorte, servir de variables d’ajustement au patronat.

Notre groupe est d’autant plus inquiet à ce sujet que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 prolonge de manière cohérente le projet de loi de modernisation de notre système de santé. La même logique prévaut dans ces deux textes : le Gouvernement part non pas de la satisfaction des besoins de santé, mais d’une enveloppe contrainte, à partir de laquelle des choix sont faits.

Pour faire passer des mesures particulièrement graves, injustes et inefficaces, vous avez instauré les groupements hospitaliers de territoire, placés sous la houlette des toutes-puissantes agences régionales de santé, ou ARS. Voilà une façon habile de cacher les fermetures d’établissements et les suppressions de lits !

En outre, pour raccourcir les hospitalisations, on a inventé le fameux virage ambulatoire. Vous taisez néanmoins, madame la ministre, que rentrer chez soi dans des délais raccourcis pour se remettre d’une intervention chirurgicale nécessite un accompagnement médical important et un relais familial considérable. En réalité, vous espérez réaliser ainsi 465 millions d’euros d’économies.

Vous allez d’ailleurs encore plus loin quand vous annoncez la réduction de l’ONDAM à 1, 75 % pour 2016. Ce seuil, le plus bas depuis sa création voilà vingt ans, est bien en deçà de la progression tendancielle des dépenses, évaluée par les pouvoirs publics aux alentours de 4 %.

L’an dernier, lorsque notre collègue rapporteur général, membre de l’UDI-UC, avait proposé de fixer l’ONDAM à 1, 5 %, vous l’aviez à juste titre refusé au nom de l’absence de justice de la mesure. En quoi est-il plus juste de le fixer à 1, 75 % cette année ?

Ces chiffres recouvrent des moyens manquants pour soigner les populations et des exigences accrues vis-à-vis des personnels, déjà en surcharge de travail. Je pense notamment aux personnels de l’AP-HP, que j’ai déjà évoqués tout à l’heure, qui mènent une lutte déterminée contre la remise en cause de leur temps de travail et seront à nouveau dans les rues le 17 novembre. Il faut bien rappeler que, d’ici à 2017, ce sont quelque 22 000 emplois de la fonction publique hospitalière qui seront supprimés.

Peut-on même parler d’ONDAM concernant la psychiatrie et les soins de suite et de rééducation ? Ce secteur se voit imposer une progression de 0 % des dépenses, soit une économie de près de 715 millions d’euros. Il faut à mon sens mettre ce chiffre en perspective avec le démantèlement du réseau de soins de secteur en psychiatrie voté dans le cadre du projet de loi de modernisation de notre système de santé.

À partir des éléments que je viens de mettre en exergue, comment ne pas faire de parallèle avec les injonctions d’économies de Bruxelles ? La baisse du budget de la sécurité sociale pour 2016 est la principale source d’économies : elle représente 1 milliard d’euros, qui s’ajoutent aux 600 millions d’euros d’économies réalisées l’an passé.

Quant à l’ONDAM des soins de ville, il est fixé à 2 %, ce qui réduit un peu plus cette année encore la marge de manœuvre des médecins de ville pour faire face au surcroît de consultations et au renforcement de leurs missions dans le cadre du développement de la médecine ambulatoire.

Comment voulez-vous améliorer l’accès aux soins en réduisant chaque année les dépenses de santé ? Quid d’un budget de prévention à la hauteur des enjeux ? On parle de prévention, mais les moyens manquent !

Certes, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 contient des mesures positives – heureusement ! –, que Dominique Watrin a soulignées et sur lesquelles je ne m’attarderai donc pas, mais ce ne sont que de bien maigres consolations par rapport aux réductions des prestations des assurés sociaux.

Madame la ministre, votre renoncement à faire de la sécurité sociale une protection sociale globale se révèle chaque année un peu plus. En témoigne votre proposition de complémentaire obligatoire pour les plus de 65 ans. Vous renvoyez délibérément aux complémentaires de santé la protection des plus de 65 ans, en dépossédant la sécurité sociale des moyens de protéger les plus précaires d’entre nous. Ce que vous présentez comme une avancée est en réalité un recul supplémentaire. Hélas, vous poursuivez la privatisation progressive de notre protection sociale, que la droite avait entamée.

La mesure emblématique de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est la création de la protection universelle maladie, dite « PUMA ». Cette mesure pourrait représenter une avancée pour l’ensemble de la population, mais le moyen utilisé par le Gouvernement va à l’encontre même des principes fondateurs de notre sécurité sociale, qui, je le rappelle, assis sur un financement par le salaire socialisé, donc sur les richesses créées par le monde du travail.

Face à ce constat, notre groupe sera cette année encore force de proposition et présentera des mesures de substitution. Pour nous, il est impératif de créer les conditions d’une prise en charge à 100 % des frais de santé par la sécurité sociale. Pour y arriver, nous proposons de dégager de nouvelles recettes en créant une contribution additionnelle sur les revenus financiers, modulée selon les entreprises, de supprimer les exonérations de cotisations et de taxer le patrimoine des plus riches.

Nous exigeons que soit appliquée la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes et nous déplorons que les contrevenants ne soient pas pénalisés avec plus de rigueur et de sévérité.

Je veux le redire ici avec une certaine solennité : pour nous, les véritables fraudeurs de la sécurité sociale sont les employeurs qui refusent de participer à la solidarité collective. Je rappelle que la fraude aux cotisations patronales a été estimée par la Cour des comptes à plus de 20 milliards d’euros en 2012. Il est donc plus que temps d’engager des moyens pour lutter véritablement contre la fuite de ces cotisations.

Être de gauche, c’est agir pour la justice sociale et fiscale. Nous proposons donc d’augmenter le taux des retraites chapeaux et de réduire le plafond au-delà duquel les cotisations sociales s’appliquent.

De la même manière, nous demandons la suppression des exonérations des cotisations des entreprises décidées par le Gouvernement avec le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi. Comme le rappelle le rapport du mois de septembre 2015 du comité de suivi, il n’existe aucun lien direct entre les dispositifs intégrés du CICE et la création d’emplois, la formation et les investissements productifs. Dès lors, cet argent public doit être utilement redistribué.

Nous proposons de revenir sur la modulation des prestations familiales, en réinstaurant l’universalité des prestations sociales, et nous souhaitons nous aussi maintenir la prime à la naissance à sept mois de grossesse.

Je ne puis énumérer toutes nos propositions. Je tiens en revanche à insister sur le fait que l’accès aux soins se dégrade et que les mesures incitatives pour l’installation de médecins dans les déserts médicaux sont sans effet.

Madame la ministre, comment ne pas s’étonner que vous ayez refusé toutes nos propositions pour tenter de remédier à ce problème lors de l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé et que l’on apprenne, par voie de presse et non lors du débat parlementaire, quelques jours plus tard, l’existence de mesures qui seront éventuellement adoptées lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale ? Il s'agit d’une étrange conception du débat démocratique...

En conclusion, vous l’aurez compris, mes chers collègues, notre groupe s’opposera à ce projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 qui, nous l’avons montré, poursuit les logiques de rigueur et d’austérité. En ce soixante-dixième anniversaire de la création de notre système de protection sociale, le Gouvernement n’a pas fait le choix de se donner l’ambition d’une reconquête de la sécurité sociale fondée sur une amélioration des droits, en matière aussi bien de santé et de retraites que de politique familiale.

Il est temps de mettre un terme à cette fuite en avant vers toujours plus de réductions des dépenses aux dépens d’une santé de qualité pour toutes et tous sur l’ensemble du territoire. Il est urgent d’adopter de nouvelles mesures de financement pour redonner toute sa force et toute son efficacité à notre système de protection sociale. C’est possible, à condition d’en avoir la volonté politique.

Voter pour de nouveaux financements, c’est éponger la dette de la sécurité sociale par des mesures justes et efficaces, renouant avec les principes fondateurs qui ont guidé Ambroise Croizat. J’espère que nous voterons leur création et que nous ne rejouerons pas en séance publique ce qui s’est passé en commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, j’aborde moi aussi l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 avec solennité.

En cette année anniversaire, en effet, ce texte traduit plus que jamais notre volonté et celle du Gouvernement de faire vivre encore pour l’avenir et pour notre jeunesse le système de protection solidaire imaginé au sein de la Résistance française il y a soixante-dix ans. La lucidité n’exclut pas d’apprécier la présentation de résultats et de perspectives de nouveau positifs que nous ne connaissions plus depuis longtemps.

C’est un texte de responsabilité et de justice. Le double engagement de redresser les comptes sans réduire les protections est en voie d’être tenu. Les chiffres sont là. La part des dépenses qui restent à la charge des assurés a diminué de 9, 1 % en 2012 à 8, 5 % en 2015 et, en seulement trois ans, le déficit du régime général a été réduit de plus de 8 milliards d’euros, soit de 40 %.

C’est également un texte de progrès dont nous allons débattre, qui améliore durablement les droits sociaux, renforce la prévention et l’accès aux soins, poursuit la réforme des structures de notre système de protection sociale.

En 2014, une exécution meilleure que prévu a réduit le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base de 11, 7 milliards d'euros à 9, 3 milliards d'euros.

L’amélioration s’est poursuivie en 2015, avec un solde plus favorable que les prévisions initiales en loi de financement, de moins 10, 1 milliards d'euros à moins 8, 6 milliards d'euros. Ces résultats permettent de prévoir pour 2016, outre une situation plus favorable de la branche accidents du travail et maladies professionnelles, qui est excédentaire depuis quatre exercices, un retour à l’équilibre de la branche vieillesse pour la première fois depuis 2004 – son déficit aura été divisé par huit –, tandis que la branche famille voit son déficit réduit des deux tiers.

Ainsi, le déficit du régime général, qui était de 17 milliards d'euros en 2011, est réduit à 9 milliards d'euros cette année et estimé à 6 milliards d'euros en 2016, soit son plus bas niveau depuis 2003. Le solde global permet d’apprécier la réalité de la trajectoire financière sur la période 2012-2015, avec une croissance des recettes à 8 %, supérieure aux charges en croissance de 6, 4 %. Le déficit de l’ensemble des régimes obligatoires de base se réduira de 3 milliards d'euros et, en considérant le champ de l’ensemble des administrations de sécurité sociale, l’amélioration du solde prévue en 2016 est de 7, 5 milliards d'euros.

Cette dynamique positive reste conditionnée, d’une part, à la réalisation des projections de conjoncture macroéconomique, et, d’autre part, à la poursuite de la politique de maîtrise des dépenses engagée depuis 2012. La prévision de croissance établie à 1 % pour 2015 est jugée cohérente par le Haut Conseil des finances publiques. Pour 2016, les projets de loi de finances et de loi de financement de la sécurité sociale sont construits sur une prévision de 1, 5 %, conforme aux anticipations du FMI et de l’OCDE.

L’effort de régulation et de réduction des dépenses sociales, partie intégrante du pacte de stabilité, impose en 2016 de réaliser une économie de 7, 4 milliards d'euros sur l’évolution tendancielle des dépenses des administrations de sécurité sociale, qui a été en moyenne de 3, 5 % par an au cours de la période 2007-2012, soit une réduction de l’évolution des dépenses de 3, 4 milliards d'euros dans le champ de l’ONDAM, dont le taux d’évolution est limité à 1, 75 %, ce qui représente malgré tout une augmentation des financements de 3, 3 milliards d'euros – il faut toujours le souligner, même si certains s’en réjouissent tandis que d’autres le déplorent. Cet objectif n’a pas appelé de réserves de la part du comité d’alerte, dans son avis rendu le 6 octobre dernier, qui estime réalisable ce programme d’économies.

Les économies annoncées porteront sur les dépenses hospitalières pour 690 millions d'euros, sur la poursuite du virage ambulatoire pour 465 millions d'euros, sur la pertinence et le bon usage des soins pour 1, 2 milliard d'euros et sur les produits de santé pour 1, 045 milliard d'euros. Sur ce dernier point, nous présenterons plusieurs propositions destinées à favoriser davantage encore le recours aux génériques.

Par ailleurs, la mise en œuvre de la deuxième tranche du pacte de responsabilité et de solidarité porte sur 9 milliards d'euros d’allégements supplémentaires pour les entreprises en 2016. Rappelons qu’elle est entièrement compensée pour le budget de la sécurité sociale.

Ces mesures financières s’accompagnent de la poursuite de réformes structurelles, qui doivent permettre de simplifier le fonctionnement des organismes et des établissements, de renforcer leur efficacité. Il s’agit pour l’essentiel d’instaurer un nouveau mode de financement des soins de suite et de rééducation – c’est une réforme attendue depuis longtemps –, de pérenniser l’expérimentation d’une gestion régionale globalisant les forfaits d’astreinte et de régulation, mais aussi les honoraires résultant de la permanence des soins ambulatoires, de poursuivre la réforme du régime social des indépendants, qui arrive maintenant dans une position d’équilibre, en d’autres termes d’achever de réparer la « catastrophe industrielle » due à la réforme de 2008.

Au-delà de ces choix de responsabilité, dont les effets positifs sont aujourd’hui tangibles, ce texte comporte également deux autres volets qui sont la traduction concrète d’une politique sociale juste et réformatrice.

Cette politique est juste pour les Français auxquels sont reconnus de nouveaux droits, avec – c’est un progrès majeur – la création d’une protection universelle maladie, une meilleure prise en charge des victimes du terrorisme, le bénéfice d’une assurance complémentaire de santé de qualité pour les plus de 65 ans, ainsi que pour les travailleurs précaires, et la garantie des impayés de pension alimentaire.

Cette politique est réformatrice et s’inscrit dans le prolongement des axes tracés par la stratégie nationale de santé, qui investit dans la prévention et favorise l’accès aux soins, en assurant la prise en charge du repérage par le médecin traitant d’un risque d’obésité chez les enfants de trois à huit ans, la prise en charge intégrale du dépistage du cancer du sein pour les femmes à risques et le renforcement de l’accès des mineures à la contraception.

Toutes ces mesures de progrès n’empêchent nullement, je l’ai dit, un regard lucide sur les difficultés qui demeurent.

Il s’agit tout d’abord du champ de l’assurance maladie. Son déficit, qui perdure à 6 milliards d'euros en 2016, est d’autant plus problématique que la situation du secteur hospitalier reste tendue, bien qu’elle connaisse de forts contrastes selon les territoires. Le réseau des officines de pharmacies, comme l’ont confirmé nos auditions, est aussi fragilisé. Des interrogations demeurent également sur le dispositif spécifique de couverture complémentaire de santé pour les plus de 65 ans, qui ne doit pas fragiliser le modèle mutualiste, fondé sur l’intergénération.

Il s’agit ensuite du fonds de solidarité vieillesse, dont le déficit structurel reste en suspens, ce qui doit appeler notre vigilance. Même si l’on se souvient qu’il a été mis à mal en 2009 à la suite d’une ponction de deux points de CSG transférés à la CADES, sa fonction dédiée au financement de prestations non contributives le rend structurellement très dépendant du niveau de chômage et nécessite une ressource suffisante.

La dette sociale diminue en 2015, pour la première fois depuis douze ans, à hauteur de 3 milliards d'euros, l’amortissement réalisé par la CADES étant supérieur à la dette produite par les régimes sociaux. C’est une bonne nouvelle, d’autant que, M. le secrétaire d'État au budget l’a rappelé, ce mouvement se poursuivra en 2016.

Le taux exceptionnellement bas – il est même négatif – en 2015 ayant permis à l’ACOSS de compenser intégralement les charges financières de l’année, le Gouvernement a décidé d’anticiper la reprise de dette à hauteur de 23, 6 milliards d'euros, représentant le reliquat des 62 milliards d'euros, dont le transfert a été fixé et compensé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011. C’est une très bonne mesure.

Certes, demeure la question de la reprise des déficits à venir d’ici à 2019, dont le montant, selon la trajectoire prévisionnelle, est estimé à 29 milliards d’euros. D’autres mesures seront donc nécessaires ultérieurement, mais le moment n’est pas encore venu d’en parler. Je ne voudrais pas achever mon propos en semant un doute.

L’histoire nous enseigne, disait Jaurès, « la difficulté des grandes tâches et la lenteur des accomplissements ». Dans l’accomplissement de cette grande tâche, vous pouvez compter, madame la ministre, sur l’entier soutien, la forte motivation et la grande conviction de l’ensemble du groupe socialiste.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, le projet de loi de financement de la sécurité sociale que le Gouvernement nous présente l’année du soixante-dixième anniversaire de la sécurité sociale s’inscrit dans la continuité des précédents. Il se caractérise à mon sens par son manque incontestable de réforme structurelle et par un déficit toujours aussi élevé du régime général ; malgré les efforts qui ont été réalisés, celui-ci s’établit en effet à 12, 8 milliards d’euros, Fonds de solidarité vieillesse inclus.

Pendant ce temps, les prélèvements obligatoires, dont près du quart bénéficie à la sécurité sociale, sont passés de 913, 9 milliards d’euros en 2012 à quelque 971, 4 milliards d’euros en 2015.

Malheureusement, le candidat Hollande ne tiendra pas sa promesse : « Moi président, je permettrai le retour à l’équilibre ». En effet, la Cour des comptes ne juge pas envisageable un retour à l’équilibre avant 2020, voire 2021, ce dont personne ne se réjouit. Nous savons tous que ce chantier est difficile, et parce que nous sommes tous attachés à notre modèle social, plus que des promesses, ce qu’il nous faut, c’est du courage ! Les réformes structurelles sont plus que nécessaires. Ce texte n’en contient malheureusement pas assez.

Permettez-moi de rappeler quelques chiffres : les dépenses publiques sociales représentent 32 % du PIB, contre 22 % en moyenne dans les pays membres de l’OCDE, et sont financées à crédit depuis vingt ans. Il en résulte, selon l’INSEE, que la dette publique a été portée au premier trimestre de 2015 à quelque 97, 6 % du PIB, contre 90 % en 2012.

En l’état, notre système de sécurité sociale ne sera pas centenaire, c’est une certitude. Il ne s’agit plus d’attendre que la conjoncture s’améliore. Notre protection sociale d’après-guerre n’est plus adaptée : en matière d’emploi, les parcours professionnels ne sont plus linéaires ; en matière de santé, le vieillissement de la population entraîne des pathologies qui prennent une place de plus en plus importante dans notre système de santé ; enfin, en matière de retraite, l’allongement de l’espérance de vie, dont nous ne pouvons que nous féliciter, doit nous conduire à mettre en œuvre une réforme systémique.

Force est de constater que, sur tous ces points, le PLFSS que nous examinons aujourd’hui est bien loin d’apporter des solutions fortes et pluriannuelles. Je n’ose imaginer que vous laissiez à vos successeurs le soin d’agir...

J’évoquerai maintenant l’aménagement du calendrier de reprise des déficits par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, prévu à l’article 17.

L’article 4 de l’ordonnance du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale prévoit la reprise par la CADES des déficits portés par l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, au titre des années 2011 à 2017 avant le 30 juin de chaque année. Cette reprise de dette est encadrée par un double plafond, qui a été évoqué à plusieurs reprises cet après-midi, de 62 milliards d’euros sur la période mentionnée dans la limite de 10 milliards d’euros par an.

Cet article ouvre donc la possibilité de reprendre dès 2016 le solde permettant de saturer le plafond de 62 milliards d’euros, en franchissant la limite annuelle de 10 milliards d’euros. En 2016, la CADES reprendra donc quelque 23, 6 milliards d’euros à l’ACOSS.

La Cour des comptes recommande cette reprise des déficits de l’ACOSS afin de profiter des taux d’intérêt, qui sont relativement bas en ce moment. En revanche, nous constatons que le Gouvernement ne prend pas ses responsabilités, contrairement à ce qu’avait fait le gouvernement précédent. Outre une forte reprise, la Cour des comptes recommande également une augmentation des recettes de la CRDS de l’ordre de 0, 23 point.

Face à la crise de 2008 et après une réforme des retraites dont vous profitez aujourd’hui – les comptes de la branche vieillesse, hors Fonds de solidarité vieillesse, se rapprochent de l’équilibre grâce au report de 60 à 62 ans de l’âge de départ à la retraite –, une reprise de la dette de l’ACOSS avait été prévue et financée. La reprise de la branche vieillesse était en partie financée par le Fonds de réserve des retraites, ce qui répondait à une certaine logique.

Après avoir autorisé la reprise des déficits des branches maladie et famille sur ce contingent dans la loi de financement de la sécurité sociale de 2014, votre gouvernement va, cette année, saturer l’enveloppe financée de reprise.

Comme l’a souligné en septembre dernier devant notre commission le Premier président de la Cour des comptes : « Une telle opération pourrait profiter des opportunités de marché liées à la faiblesse des taux d’intérêt ; elle comprimerait sûrement en 2016 la part de la dette sociale à court terme de l’ACOSS, mais cela n’aurait selon nous qu’un effet transitoire ».

Nous constatons que le Gouvernement se contente d’utiliser les capacités déjà financées et qu’il laissera à ses successeurs un bel héritage : selon la Cour, il restera encore de l’ordre de 26 milliards d’euros de dette sociale à l’ACOSS d’ici à la fin de 2018. S’y ajouteront les déficits supplémentaires liés au cadrage macroéconomique et aux fausses économies affichées par le Gouvernement. En outre, il ne faut pas écarter une potentielle remontée des taux à court terme. La facture pourrait s’élever à 30 milliards d’euros.

Au-delà de ce futur héritage, de nombreuses mesures présentées dans le PLFSS pour 2016 se caractérisent par un manque de préparation et par une grande précipitation.

Les dispositifs d’exonération de cotisations sociales applicables aux bassins d’emplois à redynamiser, les BER, aux zones de restructuration de la défense, les ZRD, et aux zones de revitalisation rurale, les ZRR, que vous envisagiez de supprimer à l’article 10, ont été fort heureusement conservés, l’Assemblée nationale ayant supprimé cet article.

Sous couvert de simplification, vous présentez à l’article 12 une mesure dont les conséquences n’ont pas été évaluées. Il s’agit ni plus ni moins de confier aux URSSAF le recouvrement des cotisations d’assurance maladie des professions libérales, jusqu’alors assuré, moyennant rétribution, par les organismes conventionnés – assurances et mutuelles – du régime social des indépendants, le RSI.

Selon l’étude d’impact, les URSSAF absorberaient cette mission à coût constant. Or elle ne tient pas compte des pertes de recouvrement, des coûts informatiques, de la reprise, en application du code du travail, des personnels des organismes conventionnés affectés à ces activités. Dans ces conditions, nous comprenons l’amendement de report présenté devant la commission des affaires sociales par le rapporteur général. Cependant, le groupe Les Républicains présentera en séance un amendement de suppression, car il juge nécessaire qu’une étude d’impact plus approfondie soit effectuée avant que cette mesure ne puisse entrer en vigueur.

Autre exemple, l’article 21, qui prévoit la généralisation de la couverture d’assurance maladie complémentaire pour les plus de 65 ans, n’a été préparé, au regard des réactions des acteurs concernés, d’aucune concertation ni étude d’impact.

Madame la ministre, il y a tout juste un mois, vous avez demandé à l’IGAS, l’Inspection générale des affaires sociales, un rapport sur les aides fiscales et sociales allouées aux contrats des complémentaires de santé afin d’évaluer l’efficacité et l’équité de l’architecture de ces différents dispositifs d’aide et de présenter plusieurs scénarios de refonte.

Aujourd’hui, vous nous demandez d’adopter une nouvelle mesure prévoyant un crédit d’impôt pour les organismes complémentaires sans même attendre le résultat de cette évaluation. Surtout, vous accentuez la segmentation de la population en prévoyant un système de mise en concurrence qui participe à la destruction des mécanismes de mutualisation. Nous saluons donc la position du rapporteur général, qui a proposé à la commission la suppression de cet article.

Quant à l’article 22, qui prévoit que les salariés en contrat court ou à temps très partiel puissent bénéficier d’un « chèque santé » de leur employeur en lieu et place d’une adhésion au contrat santé de leur entreprise ou de leur branche, nous considérons qu’il n’y a pas forcément lieu de le supprimer, quand bien même la généralisation serait remplacée par des négociations dérogatoires avec accord de branche. En effet, certaines branches professionnelles ont déjà mis en place des dispositifs efficients qui ont fait leur preuve. Je pense qu’il faut encourager les initiatives en ce sens.

Sur l’article 49, qui prévoit une réforme des soins de suite et de réadaptation, réforme dont le principe fait consensus, cela a été souligné, je présenterai un amendement visant à préconiser, en complément du rapport au Parlement proposé par le rapporteur général, une expérimentation préalable d’une durée de trois ans. Cette réforme apparaît aujourd’hui et en l’état comme étant prématurée.

En effet, le futur modèle de financement présenté dans le texte contient de nombreuses inconnues, qui n’ont pas fait l’objet d’une étude d’impact. Or il pourrait entraîner des effets contraires à ceux qui sont attendus, qu’il s’agisse d’un blocage de la filière de soins, que les soins de suite et de réadaptation ont vocation à fluidifier, ou d’une inflation non maîtrisée des dépenses d’assurance maladie.

Pour ma part, je pense qu’il est nécessaire de ne pas prolonger davantage le mode de calcul actuel du ticket modérateur, qui a pour seule conséquence de creuser les inégalités entre acteurs de santé publics et privés. C’est pourquoi, mes chers collègues, je vous proposerai un amendement de suppression de l’article 48.

Les mesures d’économies en matière d’assurance maladie sont de l’ordre de 3, 4 milliards d’euros. Cependant, faute de réforme structurelle, vous prenez le risque de mettre à mal le secteur de l’industrie pharmaceutique, qui a déjà été lourdement mis à contribution. Ainsi, alors que la trajectoire financière de l’ONDAM est très contrainte, le taux fixé pour 2016 est historiquement bas, soit 1, 75 %.

Au-delà des traditionnelles baisses de prix des médicaments, une série de mesures d’économies directes et indirectes aura un fort impact, pour plus d’un milliard d’euros, sur les entreprises de ce secteur. Or nous devons veiller à ne pas freiner le développement de ce secteur en matière d’emploi et surtout en matière de recherche et d’innovation. Alors que ces entreprises sont l’un des fleurons de notre pays à l’international, nous craignons que les mesures prises successivement depuis quatre ans ne mettent à mal leur développement.

Par ailleurs, madame la ministre, vous espérez économiser près de 500 millions d’euros en mettant l’accent sur le virage ambulatoire. Bien que nous soutenions cette démarche, nous n’acceptons pas la méthode si elle n’est pas dans l’intérêt du patient. Les intérêts financiers ont leurs limites : l’intérêt en termes de santé publique et l’intérêt du patient. Transférer le suivi et la prise en charge à domicile de patients de plus en plus lourdement atteints par la maladie ne peut se faire en continuant de réduire les moyens dévolus à la médecine de ville.

La médecine de ville doit être mieux traitée, et ce n’est pas – je suis désolée de le rappeler – avec la mise en place du tiers payant généralisé et obligatoire que vous allez mettre de l’huile dans les rouages !

Madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous allons examiner manque d’ambition et d’ossature. Certes, nous vous avons entendue, madame la ministre, mais il est certain qu’il sera insuffisant pour donner un souffle nouveau à notre système de protection sociale. Nous attendons du Gouvernement qu’il prenne des mesures fortes et pluriannuelles. Tel n’est malheureusement pas le cas aujourd'hui, et nous le regrettons vivement.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cigolotti

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, avant toute chose, je tiens vivement à remercier le président de la commission des affaires sociales de la qualité des échanges au sein de notre commission et à féliciter le rapporteur général, M. Vanlerenberghe, ainsi que l’ensemble des rapporteurs par branche, de leur approche objective et de leur analyse détaillée et argumentée.

L’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 revêt un caractère particulier, alors que nous célébrons le soixante-dixième anniversaire de la création de la sécurité sociale. Mon intervention, au nom du groupe UDI-UC, portera sur les équilibres généraux du texte, ainsi que sur les branches famille et accident du travail et maladies professionnelles. Je laisserai à ma collègue Françoise Gatel le soin d’intervenir sur les autres branches.

Une fois de plus, les dépenses prévues dans le PLFSS pour 2016 sont plus élevées que le budget de l’État : elles s’établissent à 478, 3 milliards d’euros, contre 472, 8 milliards d’euros de recettes.

Le projet de loi ne prévoit pas cette année de mesures fortes d’augmentation des recettes. Pourtant, la persistance des déficits est injustifiable économiquement ; au reste, elle l’est encore moins socialement ! Mes chers collègues, nous ne pouvons pas continuer de penser que les générations futures paieront nos dépenses actuelles.

Pour revenir à l’équilibre, nous devrions peut-être changer de méthode et prévoir un plan non plus annuel, mais pluriannuel, qui permettrait une plus grande visibilité.

Depuis 2008, de substantiels efforts ont été consentis pour résorber les déficits, et la tendance est effectivement à l’amélioration des comptes ; je ne le conteste nullement. L’équilibre des comptes sociaux ne pourra être atteint que grâce à des efforts plus importants et par une plus grande maîtrise des dépenses, notamment au sein de l’assurance maladie.

Toutefois, quel message transmettre aux Français eu égard aux efforts demandés et à la faiblesse des résultats ? L’avenir de notre protection sociale inquiète particulièrement nos concitoyens. Selon les estimations, le retour à l’équilibre, initialement prévu en 2017, devrait être repoussé à l’horizon de 2020.

Mes chers collègues, nous nous devons de garantir la pérennité de notre système de santé, malgré un contexte économique et social sensible. Hélas, aujourd’hui, le déficit prévisionnel s’élève à 5, 6 milliards d’euros et passe à 9, 3 milliards d’euros si l’on tient compte du fonds de solidarité vieillesse.

Le déficit des deux branches principales reste très important, avec un déficit de 6, 2 milliards d’euros pour la branche maladie et un déficit global de 3, 7 milliards d’euros concernant le risque vieillesse. La dette de l’assurance chômage, quant à elle, s’établit à un niveau préoccupant, avec un montant de près de 25 milliards d’euros.

Je souhaite évoquer un autre point, celui de la fragilisation de la branche famille. Le retour à l’équilibre de la branche est désormais prévu pour 2018 et provient de certaines mesures qui ne sont malheureusement pas en faveur des familles.

La politique familiale française constitue depuis des décennies un atout majeur de notre pays. Elle assure une situation démographique favorable par rapport aux pays comparables.

N’oublions pas, mes chers collègues, que notre système de protection sociale est destiné « à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et les charges de famille qu’ils supportent. »

Notre politique familiale a pour but d’encourager la natalité et le report du versement de la prime à la naissance, passant du septième mois de grossesse au second mois suivant la naissance, a un impact négatif sur les familles. D’ailleurs, durant le premier semestre de 2015, la France a vu la natalité fortement reculer. Est-ce une coïncidence ?

Cette prime a pour objectif de permettre aux familles, notamment les moins aisées, d’acquérir les équipements indispensables à l’arrivée d’un nourrisson. Je me permets de faire un parallèle avec l’allocation de rentrée scolaire, l’ARS, qui est versée bien avant la rentrée.

Une étude de l’Institut national d’études démographiques, l’INED, démontre que ce sont les aides en matière de garde d’enfants, avant les allocations, qui permettent aux mères de concilier travail et vie de famille. C’est l’ensemble de ces dispositifs qui soutient la natalité. Or le manque de places d’accueil en crèche est constant. Nous accumulons un retard inquiétant dans la création de places et la baisse du nombre d’enfants accueillis par les assistantes maternelles complique davantage la situation. Actuellement, nous comptons toujours une place en crèche pour deux enfants environ. Il est nécessaire d’agir !

En ce qui concerne les recettes, la baisse de la cotisation famille à la charge des employeurs, issue du pacte de responsabilité, s’appliquera pour tous les salaires inférieurs à 3, 5 SMIC. Cela concerne neuf salariés sur dix, soit 3, 1 milliards d’euros à compenser d’avril à décembre et 4, 5 milliards d’euros les années suivantes.

Le PLFSS prévoit également le transfert au budget de l’État du financement de l’allocation de logement familial. C’est un choix de financement étonnant, puisque cette allocation est financée depuis 1946 par la branche famille.

Finalement, le déficit de la branche se réduit sous l’effet de la réduction des prestations offertes aux familles et par un jeu de trésorerie qui ne représente sur le fond aucune réelle économie. L’incidence cumulée de ces économies prive les familles de 2, 63 milliards d’euros d’aides, ce qui est considérable.

En revanche, je tiens à saluer la généralisation du dispositif de garantie contre les impayés de pension alimentaire, ou GIPA. Aujourd’hui, 40 % des pensions alimentaires ne sont pas payées ou ne le sont que partiellement, ce qui renforce l’appauvrissement des parents isolés, des femmes dans la plupart des cas. Cette mesure va dans le bon sens.

Cependant, d’importants efforts doivent être encore réalisés, notamment concernant la réduction de la pauvreté des enfants et des familles, particulièrement des femmes. Assurer de meilleures chances à tous les enfants en développant de nouvelles structures dans les territoires ruraux et périurbains est important.

S’agissant de la branche accidents du travail-maladies professionnelles, ou AT-MP, l’excédent des dernières années se confirme à hauteur de 525 millions d’euros pour l’année prochaine. Il convient de souligner la diminution du nombre d’accidents du travail.

Concernant les maladies professionnelles, même si nous constatons une progression des maladies reconnues, certaines sont marquées par un désengagement manifeste de la part de l’État. Je pense à la dotation au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA. Le fonds est en effet doté de 4, 74 milliards d’euros, dont 4, 3 milliards d’euros en provenance de la branche AT-MP.

J’émets également une réserve quant au versement de la branche AT-MP à la branche maladie. Ce transfert ne doit aucunement être justifié au nom de la solidarité interbranches. De plus, si les partenaires sociaux avaient été consultés en 2014, il n’en est rien cette année !

L’année dernière, ce transfert correspondait à une réévaluation à la hausse du nombre d’accidents du travail non déclarés, et donc pris en charge en réalités par l’assurance maladie.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cigolotti

S’agissant du développement des soins ambulatoires, madame la ministre, une baisse de la TVA sur certains dispositifs médicaux, notamment le matériel nécessaire à de tels soins, serait une excellente chose.

Néanmoins, le groupe UDI-UC, vous l’aurez compris, regrette que ce PLFSS soit incomplet et flou sur de nombreux points, comme l’a très largement souligné notre rapporteur général.

Mme Françoise Gatel et M. Gérard Dériot applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Madame la présidente, madame la ministre, mesdames, messieurs les rapporteurs, chers collègues, ce projet de loi de financement de la sécurité sociale s’inscrit dans un contexte historique particulier, rappelé à maintes reprises. Voilà soixante-dix ans, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, naissait la sécurité sociale.

Il faut défendre la sécurité sociale ! Cette institution fondamentale représente le point culminant de plusieurs décennies de lutte des travailleurs pour la solidarité, même si quelques patrons inspirés par le catholicisme social y ont également œuvré. Sous l’impulsion d’Ambroise Croizat, ministre du travail du général de Gaulle, la sécurité sociale a permis d’extraire la santé, l’assurance chômage, la retraite et les allocations familiales des mains du privé, afin de les confier à un ensemble d’associations paritaires œuvrant pour l’intérêt général. Il s’agit sans aucun doute de l’acquis social le plus important de notre pays, pas seulement symbolique, puisque les dépenses du régime de base de la sécurité sociale représentent aujourd’hui un quart de notre PIB.

Soixante-dix ans plus tard, où en est-on ? Force est de constater que les néolibéraux, discrets au sortir de la guerre, sont aujourd’hui idéologiquement omniprésents. Dans leur système de pensée, la dépense sociale est vue uniquement comme un « coût », les cotisations sociales sont appelées des « charges » et il est regrettable que le Gouvernement, faute d’un projet alternatif, finisse par s’inscrire dans cette logique.

Disons-le d’emblée, les écologistes sont favorables à une maîtrise de l’équilibre des comptes sociaux. Il est en effet naturel de veiller à une corrélation de l’évolution des dépenses et des recettes, afin de ne pas mettre en danger la pérennité du système pour les générations futures. Toutefois, nous estimons que cet équilibre doit être réalisé dans un souci de justice, en maintenant le niveau des prestations sociales, voire en l’augmentant pour les plus démunis.

Or, qui bénéficie aujourd’hui le plus de la politique menée par le Gouvernement ? Les entreprises ! Dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale, l’exonération de la C3S, la contribution sociale de solidarité des sociétés, sera offerte aux entreprises réalisant jusqu’à 19 millions d’euros de chiffre d’affaires, contre 3, 25 millions d’euros aujourd’hui.

Le Gouvernement prévoit également d’étendre la baisse de 1, 8 point des cotisations familiales patronales jusqu’à 3, 5 SMIC, soit 5000 euros mensuels.

Ces deux mesures sont mises en place sans conditions ni contreparties, et bénéficieront largement aux grandes entreprises, qui ne sont pas celles ayant le plus besoin de soutien. Nous n’avons pas la même analyse de l’état économique des entreprises aujourd’hui : celles-ci ont reconstitué leurs marges. Les profits sont très importants et l’écart entre les plus riches et les plus pauvres augmente.

Si au moins ces exonérations étaient subordonnées au respect d’obligations en matière de revenus, d’égalité entre les femmes et les hommes, de protection de l’environnement, elles pourraient servir de levier à une transformation du monde de l’entreprise. Cependant, le Gouvernement n’a pas fait ce choix et continue à croire que la mise en œuvre du pacte de responsabilité permettra de relancer la machine économique en créant de la croissance. Or, depuis deux ans maintenant que ce pacte est mis en place, ses effets se font toujours attendre !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Desessard

Tout comme les politiques de relance pures, les politiques de l’offre pures sont vouées à l’échec et il est temps de le reconnaître.

Voilà pourquoi les écologistes vous proposeront durant l’examen de ce PLFSS de supprimer les articles 7 et 8 prévoyant de nouvelles « ristournes » inefficaces en faveur des entreprises.

En matière de propositions, nous vous soumettrons deux amendements afin que ce PLFSS soit celui des salariés. Le premier vise à poursuivre jusqu’au bout la démarche de réforme fiscale engagée par le précédent Premier ministre, Jean-Marc Ayrault. Quel dommage que la grande réforme fiscale qu’il avait annoncée ne soit pas allée à son terme ! Nous vous proposerons ainsi la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, couplée à une baisse des prélèvements sur les salaires inférieurs à deux SMIC. En solution de repli, nous vous proposerons une réduction dégressive de CSG pour les plus modestes, jusqu’à deux SMIC également.

Nous considérons en effet que la redistribution doit succéder aux efforts et que les gestes fiscaux ne doivent pas concerner toujours les mêmes. Si les entreprises sont bel et bien au cœur de l’activité de notre pays et doivent faire l’objet d’une attention particulière de la part des pouvoirs publics, il ne faut pas oublier que celles-ci sont avant tout constituées de salariés et que le capital découle de leur travail.

Ma collègue Aline Archimbaud, comme elle l’a évoqué avant moi, vous présentera au cours de ce débat ses solutions pour une politique de santé plus juste, plus équilibrée et qui prenne enfin en compte l’impact de l’environnement sur la santé de nos concitoyens.

Ainsi, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, en l’état, ne correspond pas au modèle soutenu par les écologistes. Il ne correspond pas non plus, hélas, à l’esprit de solidarité qui présidait à la création de la sécurité sociale, voilà maintenant soixante-dix ans !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, tout d’abord, je ne partage pas tout à fait les analyses de mon collègue Desessard.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Vraisemblablement, nous ne fréquentons pas les mêmes chefs d’entreprises. Pour ma part, j’en vois beaucoup qui souffrent ; si certains gagnent beaucoup d’argent, ils ne sont certainement pas une majorité par les temps qui courent.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

Oui, c’est évident !

Née voilà soixante-dix ans d’une grande idée de solidarité nationale pour répondre au désir de sécurité de la population meurtrie par la guerre, la sécurité sociale est aujourd’hui considérée comme un acquis, et personne ne conçoit qu’elle puisse ne pas exister. Comme vous l’avez rappelé à l’occasion de la célébration de ce soixante-dixième anniversaire : « Sa préservation et sa modernisation tiennent autant du devoir que du besoin », ce qui n’est pas chose aisée dans le contexte économique actuel.

Pour autant, alors qu’en 2010 le déficit avait atteint un niveau abyssal et mettait en péril la survie du modèle social dont nous sommes très fiers, depuis 2012, nous sommes sur la voie du rétablissement des comptes sociaux. Vous prévoyez de ramener le déficit à 9, 3 milliards d’euros en 2016, soit 3, 1 milliards d’euros de moins qu’en 2015 et 9, 9 milliards d’euros de moins qu’en 2012, et ainsi de suite.

Nous regrettons toutefois que le retour à l’équilibre, initialement prévu pour 2017, soit renvoyé, au mieux, à 2021, si l’on en croit les prévisions de la Cour des comptes. Celle-ci juge ce report préoccupant et rappelle que l’objectif ne pourra être atteint qu’au moyen d’efforts plus ambitieux et d’économies structurelles. La persistance des déficits, notamment de l’assurance maladie, menace la pérennité de notre système de protection sociale.

Lors de la présentation à la presse du rapport sur la sécurité sociale pour 2015, le Premier président de la Cour des comptes a reconnu que des progrès avaient été faits, mais que les déficits résistaient obstinément, nécessitant d’aller plus loin et plus vite.

Madame la ministre, ces réformes sont indispensables et ne peuvent être différées. Pour autant, ce PLFSS contient un certain nombre d’avancées que nous saluons.

Je pense, bien sûr, à l’instauration d’une véritable protection universelle maladie. Comme vous l’avez très justement rappelé, « depuis la création de la couverture maladie universelle, chacun a le droit, en théorie, à une couverture pour ses soins [...], mais, dans les faits, ce droit n’est pas toujours effectif ».

Ainsi, chaque année, un million de Français engagent des démarches administratives complexes pour changer de caisse ou bénéficier de la CMU. Ce dispositif permettra d’éviter des situations de rupture de droits en cas de changement de situation professionnelle, familiale, résidentielle, de caisse ou de régime. Désormais, tous les assurés qui travaillent ou résident en France de manière stable et régulière bénéficieront pleinement du droit à la prise en charge de leurs frais de soins.

Le statut d’ayant droit sera supprimé pour les majeurs, et les enfants auront leur propre carte vitale dès l’âge de douze ans, si leurs parents le souhaitent.

Autre avancée : la généralisation du dispositif de garantie des impayés de pensions alimentaires, qui avait été mis en place à titre expérimental dans vingt départements par la loi pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes. Ce dispositif permet le versement d’une allocation de soutien familial dès le premier mois d’impayé. C’est une très bonne chose. En effet, dans 40 % des cas de séparation, la pension alimentaire n’est pas versée ou l’est irrégulièrement, ce qui place souvent les parents isolés dans des situations très difficiles.

Nous nous félicitons également que vous renforciez l’accès des mineures à la contraception, que vous mettiez en place la gratuité des actes de dépistage du cancer du sein pour les femmes présentant un risque particulier, et que vous pérennisiez et étendiez l’expérimentation conduite en matière de permanence des soins ambulatoires.

S’agissant de la lutte contre l’obésité, ce PLFSS introduit la possibilité de mener des expérimentations pour améliorer la prise en charge et le suivi des enfants de trois à huit ans. Nous ne pouvons que souscrire à cette mesure, même si nous pensons que le dispositif devrait être ouvert aux professionnels libéraux qui souhaiteraient s’investir dans ce travail de prévention.

Enfin, madame la ministre, je souhaite vous poser deux questions précises.

Premièrement, sur les 375 000 patients qui sont, chaque année, opérés de la cataracte, près de 35 000 d’entre eux bénéficient d’implants de technologie avancée, qui font l’objet d’un « copaiement » de la part des patients, avec l’accord de l’assurance maladie. Le risque existe aujourd’hui que les futurs patients soient privés de ces implants en raison de l’absence, à ce jour, de décision de la Haute Autorité de santé sur leur évaluation. Savez-vous où en est ce programme d’évaluation ?

Deuxièmement, le Parlement a autorisé, voilà deux ans, les pharmaciens à substituer à un médicament biologique de référence un médicament biosimilaire dans un cadre sécurisé. Or, le décret d’application qui doit préciser les modalités et proposer une liste de référence n’a toujours pas été publié. Pensez-vous que sa publication interviendra prochainement ?

Pour conclure, madame la ministre, la majorité des membres du RDSE sera particulièrement attentive au débat qui va s’ouvrir et à la discussion des amendements. Vous pouvez considérer, pour l’instant, que nous faisons preuve d’une neutralité positive…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Mouiller

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je tiens tout d’abord à remercier les différents rapporteurs pour la qualité de leurs travaux. Ils ont su faire preuve d’une grande pédagogie, nous permettant ainsi d’appréhender ce projet de loi si technique.

En effet, il est nécessaire de bien maîtriser l’ossature générale du budget afin de mieux comprendre son organisation et les transferts de charges qui, parfois, ont pour effet d’embellir la réalité.

On constate une réelle volonté du Gouvernement de diminuer la croissance des déficits des différents budgets, en s’appuyant sur de nouvelles mesures, mais également en récoltant les bénéfices de mesures prises par l’ancienne majorité – je pense notamment à la réforme des retraites.

Je souhaiterais plus particulièrement parler de la branche accidents du travail-maladies professionnelles, ou AT-MP, et du secteur médico-social.

Concernant la branche AT-MP, le rapport de notre collègue Gérard Dériot montre que cette branche participe de plus en plus au renflouement de l’assurance maladie.

En effet, en 2016, un versement d’un milliard d’euros se fera au titre des sous-déclarations, et un transfert d’un demi-milliard d’euros de cotisations interviendra en 2016 et 2017. Dans le même temps, nous constatons le désengagement de l’État du financement du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante. Ces transferts remettent en cause l’autonomie de la branche et sa vocation assurantielle. Je rejoins notre collègue rapporteur sur la nécessité de mettre en place un travail de fond sur les causes de cette sous-déclaration et sur les actions à mener pour la limiter.

S’agissant du secteur médico-social, le rapport de Colette Giudicelli nous indique que l’ONDAM médico-social devrait s’établir à 18, 2 milliards d’euros en 2016, soit une hausse de 1, 9 % par rapport à l’année 2015. Au total, 405 millions d’euros de moyens supplémentaires doivent être alloués aux établissements et services pour personnes âgées et handicapées en 2016.

Toutefois, le Gouvernement a fait un certain nombre d’annonces qui nécessitent de déployer des moyens financiers supplémentaires.

Je pourrais citer, à titre d’exemple, la fin du plan autisme, le plan de modernisation des établissements et services d’aide par le travail – ESAT –, l’accompagnement du rapport de Denis Piveteau, Zéro sans solution, et l’article 21 bis du projet de loi de modernisation de notre système de santé, qui permet de proposer, aux personnes handicapées n’ayant pas de solution ou en situation de rupture, de réelles solutions complémentaires.

Nous ne pouvons qu’approuver ces nouvelles mesures, mais elles impliqueront deux obligations : d’une part, celle de donner des moyens supplémentaires aux maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, afin qu’elles puissent remplir leurs missions, malgré la mise en place de mesures de simplification ; d’autre part, celle de créer des places supplémentaires dans les différentes structures d’accueil, pour répondre aux attentes.

Les moyens proposés par votre gouvernement ne couvriront pas tous les besoins, madame la ministre. Concernant les places nouvelles dans les établissements, le budget prévoit le financement d’environ 18 500 places, alors que les besoins sont estimés à environ 50 000 places.

Je souhaite tout particulièrement évoquer la douloureuse situation de nos compatriotes handicapés, contraints de quitter le territoire national, notamment pour la Belgique. Actuellement, plus de 6 500 personnes handicapées françaises, 1 500 enfants et au moins 5 000 adultes, sont accompagnées par des établissements médico-sociaux belges. Sur ces 6 500 exilés, 4 000 ne sont pas des frontaliers. Pour beaucoup, ce départ vers ces établissements n’est pas un choix, mais une contrainte imposée par un manque de réponses sur le territoire national.

Vous venez d’annoncer le déblocage de 15 millions d’euros pour limiter ces départs. Si le geste mérite d’être souligné, le montant reste manifestement insuffisant.

À l’heure actuelle, la France consacre environ 250 millions d’euros par an pour l’accueil de nos ressortissants dans des établissements étrangers, le financement étant assuré, en fonction des situations, par l’ONDAM médico-social, l’assurance maladie ou les conseils départementaux. Je propose que ces 250 millions d’euros soient utilisés pour créer des places en France, et j’ai déposé des amendements en ce sens.

Par ailleurs, je peux confirmer que le transfert du financement des ESAT, opéré par l’article 46 du projet de loi, est bien accueilli. Néanmoins, ce transfert ne sera effectif qu’en 2017 et ses modalités ne sont pas connues, ce qui suscite de légitimes inquiétudes. Il est nécessaire, madame la ministre, de rassurer les acteurs du monde du handicap sur les modalités de transfert de ces crédits.

Nous avons une responsabilité collective vis-à-vis du monde du handicap. Un certain nombre de rendez-vous ont été reportés, voire parfois oubliés. Notre société doit réellement se mobiliser pour les personnes handicapées.

Même si les moyens financiers ne nous permettent pas de tout régler dans les mois à venir, nous devons engager des efforts significatifs et, surtout, envoyer des signaux forts en direction du monde du handicap, qui peut parfois se sentir désabusé.

En effet, d’un côté, on annonce des moyens supplémentaires, des recherches de solutions concernant les personnes accueillies à l’étranger et, surtout, la mise en place du « zéro sans solution » dans les territoires, mais, de l’autre, le Gouvernement ne prévoit pas suffisamment de financements pour les établissements, continue de geler le nombre de places dans les ESAT et le budget 2016 consacré aux MDPH ne permettra pas de répondre à la charge de travail supplémentaire.

De grâce, madame la ministre, respectez vos engagements et faites attention aux messages que vous envoyez aux personnes handicapées ! Le pire aura été atteint avec le cafouillage engendré par l’annonce, puis le retrait, de la proposition d’intégrer dans le calcul de l’allocation aux adultes handicapés les modestes revenus des livrets non soumis à l’imposition sur le revenu.

En dépit du retrait de cette mesure, les personnes en situation de handicap se sont senties attaquées par cette annonce, qui faisait fi de l’esprit même de la loi de 2005 et de la situation financière, souvent difficile, d’un grand nombre de personnes handicapées.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, les évolutions de notre société et du contexte économique ont nécessairement une influence sur notre modèle de protection sociale. Ce modèle, s’il veut subsister afin d’offrir à nos concitoyens une aide optimale, doit se réformer. Ce modèle mérite que nos gouvernants fassent preuve de courage afin d’assumer des choix parfois difficiles.

Or ce PLFSS s’inscrit dans la continuité de l’exercice précédent, sans présenter de levier de réforme véritablement significatif. Si certaines mesures sont à saluer, les mesures structurelles destinées à infléchir fortement la dynamique des dépenses ne sont pas au rendez-vous.

Pour compléter les propos de mon collègue Olivier Cigolotti, qui s’est exprimé sur l’équilibre général et les branches famille et accidents du travail, je concentrerai mon intervention sur les branches maladie et vieillesse.

La branche maladie représente près de la moitié du budget du régime général, concentrant les deux tiers des déficits, avec un solde négatif supérieur à 6 milliards d’euros.

Quant à la branche vieillesse, elle enregistre un léger solde positif en 2016, mais le Fonds de solidarité vieillesse resterait en situation de fort déficit structurel, à hauteur de 3, 7 milliards d’euros.

Comme je le disais en préambule, madame la ministre, nous pouvons souscrire à certaines mesures de ce projet de loi de financement de la sécurité sociale : la création de places supplémentaires dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, les EHPAD, la réduction des délais d’accès aux soins visuels, le mécanisme de garantie contre les impayés de pension alimentaire, la lutte contre la fraude ou encore la mutualisation d’activités entre organismes de sécurité sociale.

En revanche, d’autres mesures nous laissent plus interrogatifs, à commencer par le régime d’assurance maladie universelle.

Avec la réforme de la protection universelle maladie, les personnes, malgré les aléas de la vie, conserveront leurs droits à la couverture maladie, sans démarche de leur part, sans changement de caisse et sans rupture de droits. Si nous sommes naturellement enclins à soutenir une telle disposition, le flou qui entoure les modalités de sa mise en œuvre nous contraint à la vigilance.

Il en va de même de la réforme des soins de suite. Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016 prévoit une mise en œuvre opérationnelle de la réforme au 1er janvier 2017. N’est-ce pas un peu rapide, alors que les acteurs impliqués s’accordent à dire que les outils techniques sur lesquels repose la réforme sont encore loin d’être fiables ?

Par ailleurs, aucune simulation d’impact n’a véritablement été effectuée, ce qui engendre une absence totale de visibilité des dépenses d’assurance maladie.

Nous nous interrogeons en outre plus spécifiquement sur le financement des soins palliatifs. Lors de l’examen de la proposition de loi relative à la fin de vie, vous avez annoncé, madame la ministre, 40 millions d’euros supplémentaires dans ce budget pour 2016. Ces crédits sont-ils clairement fléchés ? Vous l’aurez compris : nous serons extrêmement attentifs au respect de votre engagement.

On le sait, madame la ministre, il est urgent de revenir à l’équilibre des comptes et, pour cela, la diminution des dépenses est le seul mot d’ordre qui vaille. J’observe toutefois que les efforts portent toujours sur les mêmes secteurs, notamment sur le médicament. Si une réduction des dépenses en la matière est indispensable, rappelons que le médicament ne représente que 15 % des dépenses d’assurance maladie.

L’hôpital est également soumis à forte contribution. Le Gouvernement veut dynamiser la mutualisation des ressources et les économies d’échelle à l’hôpital et nous l’y encourageons. Le développement de la chirurgie ambulatoire et la réduction des durées d’hospitalisation sont des sources d’économies. À cet égard, je salue également l’instauration des trois jours de carence dans la fonction publique hospitalière proposée par notre rapporteur général, car elle permettra de réduire les dépenses de fonctionnement.

Cependant, l’hôpital ne peut pas tout supporter, du moins pas seul. Il doit mieux s’articuler avec la médecine de ville. Il faut associer le médecin traitant à la prise en charge hospitalière du patient, favoriser la communication entre les professionnels et les structures de santé, faciliter l’accessibilité à l’offre de soins hospitaliers pour la médecine de ville. Or, lorsque se pose la question de la médecine de ville, se pose également la terrible question de l’accessibilité aux soins. C’est sans doute sur ce sujet que les réformes structurelles font le plus cruellement défaut.

Nous le savons, le creux de la démographie médicale est attendu pour 2020. Nous ne devons plus tarder pour agir, madame la ministre, alors même que, dans nos territoires, toutes les communes et intercommunalités investissent massivement dans la réalisation de maisons de santé pour lutter contre la désertification médicale.

Certaines mesures de ce projet de loi sont quelque peu inopportunes – me semble-t-il… Ainsi, le groupe UDI-UC se réjouit que la commission des affaires sociales ait proposé de supprimer le nouveau contrat d’assurance maladie complémentaire labellisé pour les personnes âgées de 65 ans et plus. Cette segmentation des offres constitue un frein à la solidarité et à la mutualisation des risques entre les actifs et les inactifs, mettant en difficulté l’équilibre d’ensemble du système. Le dispositif d’appel d’offres proposé par le Gouvernement va sans doute conduire à une baisse artificielle des prix, au détriment non seulement des garanties proposées, mais aussi de ceux qui paieront in fine la facture : les actifs plus jeunes.

Nous n’étions pas non plus très favorables à l’article 22, que la commission des affaires sociales propose également de supprimer. Cet article prévoit un « chèque santé » pour les salariés en contrats très courts et les temps très partiels. Nous ne disposons pas de données chiffrées permettant d’évaluer le nombre de salariés concernés. Nous ne savons pas non plus où se situe le curseur pour définir les seuils donnant droit au dispositif. Enfin, nous pensons que cette mesure risquerait finalement de pénaliser la catégorie de salariés qu’elle prétend défendre. L’alourdissement des démarches administratives et des charges pourrait en effet amener les entreprises à renoncer à recruter des salariés bénéficiant de tels contrats. Au 1er janvier 2016, alors qu’on ne cesse de parler de simplification, une avalanche d’obligations d’une grande complexité va s’abattre sur les entreprises et cette mesure renchérit cette complexité.

Concernant la branche vieillesse, nous observons certes une amélioration, mais vous avouerez que nous ne pouvons que maintenir une extrême vigilance, car cette amélioration apparaît bien fragile. Du reste, les partenaires sociaux l’ont parfaitement compris et ont fait preuve d’une grande responsabilité en ce qui concerne les régimes de retraite complémentaire.

Actuellement, en vertu de la réforme de 2010, l’âge légal de départ en retraite est repoussé chaque année de cinq mois jusqu’au 1er janvier 2017. Cette mesure permet de dégager 5, 1 milliards d’euros et l’âge de la retraite sera ainsi fixé à 62 ans pour la génération née en 1955…

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Gatel

C’est d’ailleurs cette réforme qui contribue largement au recul du déficit de la branche vieillesse, mais elle n’est évidemment pas suffisante pour revenir à l’équilibre. Comme l’a très bien exposé le rapporteur de la commission des affaires sociales pour la branche vieillesse, Gérard Roche, le levier de l’âge légal de départ à la retraite est, de loin, celui qui offre à la France les plus importantes marges de manœuvre. C’est pourquoi nous approuvons totalement sa proposition visant à reporter à 63 ans l’âge légal de départ en retraite à compter du 1er janvier 2019. Il s’agit là d’une proposition courageuse, lucide et indispensable, qui pourra, sans conteste, contribuer à la durabilité de notre système de sécurité sociale auquel nous sommes tous profondément attachés.

En conclusion, je voudrais remercier le président et les rapporteurs de la commission, en particulier le rapporteur général, Jean-Marie Vanlerenberghe, pour la qualité de leur travail et leur pédagogie.

Madame la ministre, le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale n’appelle ni à la réjouissance ni aux lamentations, mais il suscite une forte déception. Vous l’aurez compris, nous regrettons, une fois de plus, l’absence de véritable réforme structurelle courageuse, visant à rétablir durablement l’équilibre des comptes.

Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Madame la ministre, vous avez une équation fort difficile à résoudre – M. le secrétaire d’État chargé du budget l’a rappelé tout à l’heure. Il vous faut tout à la fois redresser la situation financière, faire des économies et financer vos priorités. Certes, l’opposition manie les chiffres de manière différente, mais force est de constater que je ne l’ai pas entendu formuler d’autres propositions : elle ne conteste pas le fait que les économies prévues sont bien réalisées. Je souhaite d’ailleurs rappeler à nos collègues de l’opposition que la réduction du rythme spontané de la dépense sociale représente un changement de paradigme.

Qui plus est, je note que le Gouvernement ne regarde pas uniquement les dépenses, il se fixe aussi un horizon crédible en matière de recettes.

Madame la ministre, vous arrivez à résoudre cette équation et je crois que nous le devons à votre opiniâtreté, à votre conviction et à votre rigueur. Depuis trois ans, vous avez une ligne de conduite : limiter, voire réduire, la charge sociale qui pèse sur les plus modestes et leur garantir un accès à la santé.

Le cadre financier est certes contraint, mais il est quelque peu meilleur en cette fin d’année 2015 que lors des deux années précédentes, d’un point de vue tant macroéconomique que microéconomique. Ainsi, une bonne nouvelle a été annoncée sur l’emploi…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. Il ne faut pas crier victoire ! Ce serait immodeste et déplacé, mais il faut aussi accepter les bons signes.

Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Avec 600 000 licenciements, la « bonne » nouvelle est relative…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Les défaillances d’entreprises sont moins nombreuses et les chefs d’entreprise se saisissent petit à petit des outils qui ont été mis en place, notamment dans le cadre du pacte de responsabilité. Finalement, le climat des affaires s’améliore. C’est pourquoi mon propos se limitera à quelques articles qui ont une portée économique et financière, en particulier en lien avec la mise en œuvre de ce pacte.

Tout d’abord, les entreprises ont certainement compris et assimilé le crédit d’impôt compétitivité emploi, le CICE, qui avait donné lieu à beaucoup de débats il y a deux ans, un peu moins l’année dernière et quasiment pas cette année… Sachez monsieur Desessard que le CICE a sauvé et créé des emplois : l’Observatoire français des conjonctures économiques, l’OFCE, estime ainsi à 140 000 le nombre d’emplois créés en deux ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

L’investissement n’est pas encore au rendez-vous, mais les marges retrouvées par les entreprises et le mécanisme de suramortissement que nous avons voté dans la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques devraient enclencher un cycle positif. En 2016, nous disposerons d’une étude complète du comité de suivi du dispositif, qui éteindra – j’en suis sûre – la querelle des contreparties.

L’effort inédit consenti par la nation au travers des projets de loi de financement de la sécurité sociale doit faire réfléchir ceux qui, sur les bancs de l’opposition, crient au scandale quand le Gouvernement propose, dans l’article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, de décaler de trois mois la mesure tendant à réduire les cotisations patronales de la branche famille. Ils savent très bien qu’il s’agit de financer d’autres dispositions prises en faveur des entreprises, dont le suramortissement que je viens d’évoquer.

Le rapporteur général a regretté ce report, mais il tient tout de même des propos d’une grande lucidité dans le rapport qu’il a présenté à la commission : « il s’agit autant d’un aménagement du financement de la protection sociale que d’une politique de l’emploi, dans la mesure où 90 % des salariés seront désormais concernés par des mesures d’allégements ou de réduction de cotisations ».

Dans une logique identique de soutien aux entreprises, j’ai proposé un amendement qui vise à réparer une erreur matérielle liée à une modification apportée par la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques. Alors même qu’il a été déposé dans les délais réglementaires et que la commission des affaires sociales l’a examiné ce matin avec bienveillance, je viens d’apprendre, il y a seulement trente minutes, que la commission des finances l’a déclaré irrecevable au titre de l’article 40 de la Constitution. Lorsque j’exerçais des responsabilités à la commission des finances, j’étais présente pour examiner les amendements en temps et en heure, y compris le dimanche !

Mon amendement vise à permettre à des jeunes de moins de 26 ans de bénéficier de l’aide aux chômeurs créant ou reprenant une entreprise, l’ACCRE, et je souhaiterais, au regard de son objet et alors même que la modification avait été votée de manière consensuelle par le Sénat lors de l’examen de la loi « croissance et activité », que le Gouvernement reprenne cet amendement.

Je souhaiterais également saluer l’engagement constant du Gouvernement concernant la baisse de la contribution sociale de solidarité des entreprises, la C3S, dont les entreprises industrielles bénéficient à hauteur du quart. En 2015, 200 000 entreprises en ont tiré parti, elles seront 80 000 de plus en 2016. En effet, l’article 8 du PLFSS prévoit que, à compter de l’année prochaine, une PME dont le chiffre d’affaires est inférieur à 19 millions d’euros ne payera plus cette contribution.

En ce qui concerne le Fonds de solidarité vieillesse, le FSV, qui est en partie alimenté par la C3S, l’article 15 du PLFSS prévoit une refonte de l’architecture de son financement, qui permet également au Gouvernement de tirer les conséquences de l’arrêt de Ruyter de la Cour de justice de l’Union européenne. Le produit des prélèvements sociaux sur les revenus du capital, y compris pour les Français qui exercent leur activité à l’étranger, est par là même réaffecté, ce qui a suscité des réactions et des amendements de la commission.

Nous aurons l’occasion d’en débattre, mais je souhaite dire, dès l’abord, que nous soutiendrons le choix du Gouvernement de mettre un terme au contentieux, en affectant le produit des revenus du capital à la section non contributive du FSV. Il me paraît en effet prioritaire de préserver l’unité de la CSG. En outre, une somme comprise entre 250 et 300 millions d’euros serait dégagée par cette modification, ce qui est naturellement utile au FSV.

De son côté, la commission des affaires sociales estime que l’article 15 du PLFSS ne clôt pas le contentieux et le rapporteur général a proposé un amendement visant à supprimer la référence au « financement d’avantages non contributifs instaurés au bénéfice des retraités de l’ensemble des régimes ».

Au-delà de l’interprétation différente ainsi développée, cet amendement vient couper la route du Gouvernement et nous ne pourrons pas suivre la proposition de la commission. D’ailleurs, présentée comme plus sûre et dans l’intérêt de la France, cette mesure me semble, finalement et sans faire de procès d’intention, plus orientée par une motivation politique que juridique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Dériot

Ce n’est pas l’habitude du rapporteur général !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Nous en reparlerons au moment de l’examen de l’article et de l’amendement.

Madame la ministre, lors de votre intervention liminaire, vous avez indiqué que vous présentiez un PLFSS « de progrès ». Je retiens ce terme ! Au sein du groupe socialiste, nous sommes des acteurs du progrès, en conséquence de quoi nous vous soutiendrons et nous voterons toutes les dispositions que vous nous proposez. Nous ne sommes certes pas des « godillots » – pour reprendre une expression parfois utilisée – et nous aurons bien évidemment des débats. Mais nous vous soutiendrons et nous vous remercions de l’opiniâtreté dont vous faites preuve pour défendre votre ministère, dans l’intérêt des Français les plus modestes.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les rapporteurs, mes chers collègues, je m’associe aux compliments qui ont été adressés aux rapporteurs par mes collègues qui se sont succédé à cette tribune.

On a toujours beaucoup de plaisir et on s’enrichit toujours à lire les rapports sur les PLFSS, qui améliorent notre connaissance de ce sujet très complexe qu’est le budget de la sécurité sociale. Pour avoir précédé Jean-Marie Vanlerenberghe et Yves Daudigny dans la fonction de rapporteur général, je sais d’expérience combien il est difficile, pour nos collègues, de maîtriser ce sujet.

Nous sommes invités, à partir de ce soir, à examiner le PLFSS pour 2016, dont nous pouvions, selon moi, espérer qu’il témoigne d’une plus grande rigueur et de plus de réalisme de la part du Gouvernement. En effet, la lecture des annexes et des prévisions très volontaristes – pour ne pas dire optimistes – que le Gouvernement a retenues pour nous laisser présager des perspectives meilleures et un retour à l’équilibre beaucoup plus rapide qu’on ne pourrait l’imaginer nous laisse rêveurs et nous amène à nous interroger.

Au reste, je comprends que, à la veille d’une échéance électorale importante, il importe à certains d’apparaître relativement vertueux…

De fait, le Gouvernement essaie de démontrer qu’il est maître d’une situation qui semble cependant lui échapper, si j’en crois la situation sociale et économique de notre pays. Or lorsque l’économie va mal, lorsque la croissance n’est pas au rendez-vous, lorsque la masse salariale n’est pas aussi dynamique qu’attendu, les recettes sont à l’avenant, les dépenses galopent et il est d’autant plus difficile d’atteindre l’équilibre des comptes.

On constate que le déficit de l’assurance maladie, qui s’élevait à 5, 9 milliards d’euros en 2012, passera à 7, 5 milliards d’euros en 2015, si les prévisions du Gouvernement se confirment. Il faut donc s’attendre plutôt à un dérapage qu’au redressement que nous avions pu espérer, même si l’on est loin des niveaux élevés de déficit que nous avons connus par le passé.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Malgré une amélioration de sa situation, la branche famille continuera d’accuser un déficit de 1, 6 milliard d’euros.

Qu’aurions-nous pu faire pour améliorer les choses ? Je ne suis pas là pour jouer les moralisateurs ni pour donner des leçons à qui que ce soit, car je sais que l’exercice n’est pas facile.

Cela étant, ayant eu, par le passé, à présider la mission d’évaluation et de contrôle de la sécurité sociale, la MECSS, et ayant été rapporteur général du budget de la sécurité sociale, je reste persuadé que d’importantes marges de manœuvre subsistent pour ce qui concerne l’hôpital. Si la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite « loi HPST », était censée permettre quelques progrès, ceux-ci restent, à mon sens, très nettement insuffisants. Il faudra aller beaucoup plus loin et nous devrons nous battre, pendant l’examen de ce texte, pour sensibiliser le Gouvernement à la nécessité de s’intéresser de plus près à l’hôpital.

À ce sujet, je veux de nouveau la question que j’avais déjà posée lorsque j’exerçais les responsabilités que je viens de mentionner : à quand la convergence des tarifs entre secteur public et secteur privé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

Je veux maintenant évoquer brièvement la branche vieillesse et le Fonds de solidarité vieillesse, le FSV.

Le gouvernement de François Fillon espérait les faire renouer avec l’équilibre en 2018. Cet équilibre devait être renforcé par la réforme – selon moi, il s’agit d’une demi-mesure – engagée, en 2013, par le Gouvernement, plus préoccupé, à mon sens, par les conséquences politiques de ses annonces sur son électorat que par les considérations économiques qui devraient dicter les choix de tout gouvernement.

Madame la ministre, après que le gouvernement précédent a décidé de priver le Fonds de réserve des retraites de sa recette de 1, 3 milliard d’euros « en provenance du prélèvement social sur le capital et en prélevant avant l’échéance de 2020, 2, 1 milliards d’euros par an du capital constitué », ces mesures, comme l’augmentation des cotisations de retraite que vous avez décidée en 2013, ne suffiront malheureusement pas à la branche pour retrouver un équilibre pérenne.

Ainsi que l’ont dit plusieurs de nos collègues, le Fonds de solidarité vieillesse restera quant à lui durablement déficitaire, pendant que la branche vieillesse atteindra un équilibre très fragile en 2017, qui se dégradera à nouveau à partir de 2018.

Notre système de retraite par répartition est-il à bout de souffle ? L’absence de courage qui caractérise cette réforme purement paramétrique ne peut que nous inciter à demander à nos gouvernants, quels qu’ils soient, de s’inspirer du régime suédois à comptes optionnels. Les réformes Balladur, Fillon, Bertrand et Woerth ont évité la catastrophe, mais chacun savait qu’elles ne seraient pas suffisantes à terme. Nos voisins allemands et italiens ont été plus volontaires et exemplaires.

Par ailleurs, pensez-vous que les mesures tendant à rendre universelle la protection du risque maladie, si louables soient-elles dans leurs objectifs, ainsi que le dispositif imaginé pour faciliter l’accès à moindre coût à une complémentaire santé pour les personnes de plus de soixante-cinq ans seront de nature à améliorer la santé financière de notre régime de sécurité sociale ? Ces mesures sociales auront un coût, soit pour la branche maladie, soit pour les intéressés eux-mêmes.

Par ailleurs, anticiper le transfert de la dette des branches maladie, famille et vieillesse, pour un montant de 23, 6 milliards d’euros, afin d’en libérer l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale, l’ACOSS, dont ce n’est pas la vocation, est a priori vertueux, dans la perspective d’une éventuelle remontée des taux d’intérêt. Notre collègue Francis Delattre s’est exprimé très clairement sur le sujet. Cependant, vous n’aurez pas pour autant résolu le déficit structurel des branches que je viens de citer, car la dette se sera reconstituée à hauteur de 38, 4 milliards d’euros en 2019.

Madame la ministre, que ferez-vous de cette dette, contrainte par les dispositions de la loi organique, qui ne vous permettra pas de prolonger la durée de vie de la Caisse d’amortissement de la dette sociale, la CADES, et ne pourra vous faire échapper à une nécessaire augmentation de la contribution au remboursement de la dette sociale, la CRDS ? Vous en reportez courageusement la décision au-delà de 2017…

Pour terminer, je veux évoquer la maîtrise des dépenses de médicaments et les mesures médico-sociales.

Alors que le médicament représente 15 % des dépenses de l’assurance maladie, vous continuez à faire supporter à l’industrie pharmaceutique plus de 50 % des efforts d’économie. Les grossistes-répartiteurs sont également mis à contribution, à travers la réduction tarifaire. Ne sommes-nous pas arrivés à la limite économique de ce que peut supporter cette activité sans que soit porté atteinte à l’emploi, à la recherche et à l’innovation ?

Enfin, les handicapés ne sont-ils pas les principaux oubliés du PLFSS – notre collègue Philippe Mouiller y a fait allusion –, alors que de nombreuses familles sont réduites à se tourner vers nos voisins belges pour trouver une solution au problème de l’accueil de leurs enfants handicapés ? Quelle réponse le Gouvernement entend-il apporter à l’appel au secours de ces familles ?

Madame la présidente, je vous remercie de votre tolérance, car j’ai dépassé d’une minute le temps qui m’était alloué.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

C’est exceptionnel !

La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Godefroy

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, l’examen de la situation de la branche accidents du travail-maladies professionnelles de la sécurité sociale nous oblige, cette année, à mobiliser tout notre discernement.

On constate, en 2014, une stabilisation des accidents du travail et des maladies professionnelles et une diminution du nombre de journées d’incapacité temporaire ou permanente. Ces informations sont relativement bonnes, après des années difficiles, particulièrement pour les maladies professionnelles. Ces incontestables progrès sont dus aux interventions des pouvoirs publics, aux aides financières et aux conseils des caisses de sécurité sociale, aux organismes spécialisés, ainsi qu’aux employeurs et aux salariés, qui sont les premiers concernés.

La prévention est devenue une priorité, à travers notamment les plans de santé au travail, le troisième venant d’être adopté de manière consensuelle par le Gouvernement sur proposition des partenaires sociaux. Il est important de souligner les progrès accomplis depuis plusieurs années grâce à cette prise de conscience et ces efforts partagés.

Parallèlement, la gestion de la branche a été remise en ordre et est redevenue satisfaisante, ce qui doit être souligné compte tenu du contexte général. Après un excédent de 691 millions d’euros en 2014, il est prévu que la branche dégage un nouvel excédent, de 603 millions d’euros, en 2015.

Mes chers collègues, un tel excédent n’a pas manqué d’attirer l’attention, ce qui m’amène à évoquer deux points, madame la ministre.

Premièrement, à la suite de l’accord qui vient d’intervenir entre les organisations patronales et trois syndicats sur le financement des retraites complémentaires AGIRC et ARRCO, il a été observé que la revalorisation des cotisations des employeurs prévue à cet effet serait intégralement compensée par une baisse des cotisations que ceux-ci acquittent sur la branche AT-MP en 2019.

Comme vous le savez, les associations de victimes et plusieurs de nos collègues députés se sont vivement émus de cette perspective. Je dois dire que je m’interroge moi-même à son sujet… Aussi, j’espère que vous pourrez nous donner un certain nombre d’informations sur ce point.

Je voudrais rappeler que, dans le rapport d’information que nous avons consacré à la question du financement de la branche AT-MP, Catherine Deroche et moi-même avions préconisé, pour le retour à l’équilibre de cette branche, une augmentation des cotisations patronales, mais nous avions suggéré qu’une diminution de celles-ci puisse intervenir lorsque la dette serait apurée et l’équilibre de la branche, assuré. Toutefois, nous n’avions pas imaginé que cette baisse puisse servir de compensation dans une négociation, notamment sur les retraites complémentaires.

On nous annonce un chiffre de 700 millions d’euros. Je veux rappeler qu’une augmentation d’un dixième des cotisations patronales sur la branche AT-MP représente 500 millions d’euros !

Deuxièmement, il est écrit, dans l’annexe B du projet de loi, que « compte tenu de la conjonction d’un déficit persistant de la branche maladie et, à l’opposé, d’un excédent croissant de la branche AT-MP depuis l’année 2013, un transfert de cotisations de 0, 05 point entre la branche AT-MP et la branche maladie du régime général sera mis en place en 2016 puis en 2017, afin d’améliorer le solde de la branche maladie de 250 millions pour chacune de ces deux années, soit 500 millions au total ». Je dois dire que les arguments développés dans l’annexe ne m’ont pas totalement convaincu ; ils mériteraient certainement une étude plus approfondie.

La ponction prévue vient s’ajouter au reversement traditionnel de la branche AT-MP à la branche maladie, reversement justifié par la sous-déclaration systématique des accidents et de la non-reconnaissance de l’origine professionnelle de nombreuses maladies. Ce transfert, en hausse continue depuis 1997, s’élèvera encore cette année à 1 milliard d’euros. Je rappelle que, dans son rapport, Noël Diricq avait fixé un plafond à 1, 3 milliard d’euros.

Madame la ministre, ces trois prélèvements très importants sur une trésorerie saine depuis peu risquent de porter gravement atteinte à celle-ci. Il est de notre devoir de vous alerter sur ce point.

Je rappelle que, dans notre rapport d’information, Catherine Deroche et moi-même avions fait un principe de la préservation de l’équilibre de 1898. En effet, contrairement à ce que pourrait laisser penser la date de sa conclusion, l’accord qui a alors été trouvé est tout à fait moderne. Il s’agit notamment d’assurer le financement par les entreprises, mais aussi de n’imputer à la branche que les dépenses qui lui incombent. Il me semble souhaitable que l’on s’en tienne là.

L’effort de prévention des accidents du travail ne doit pas être relâché, surtout si le travail atypique, générateur de beaucoup d’accidents, continue à se répandre.

Madame la ministre, je n’aurai pas le temps d’aborder le problème de l’amiante. Ce n’est pourtant pas l’envie qui m’en manque ! Je veux quand même vous dire que nous approuvons le retour, après deux années de dotation nulle, d’une dotation de 10 millions d’euros pour le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, le FIVA, même si ce montant reste très largement en deçà des préconisations de la mission commune d’information du Sénat sur le bilan et les conséquences de la contamination par l’amiante. La dotation totale de la branche au FIVA atteindrait 430 millions d’euros, pour une dépense estimée à 525 millions d’euros.

Après avoir connu de grandes difficultés, qui avaient amené certains à programmer sa disparition, le Fonds de cessation anticipée d’activité des travailleurs de l’amiante, le FCAATA, est revenu à l’équilibre. Il devrait même être en excédent de 12 millions d’euros en 2015.

Toutefois, le projet de loi prévoit un résultat négatif de 42 millions en 2016, malgré de nombreuses sorties du dispositif, la revalorisation quasi nulle des allocations en raison de la faible inflation, le non-versement du capital-décès aux ayants droit et la limitation de l’accès à la retraite anticipée par l’obligation d’avoir travaillé dans un établissement figurant sur une liste de sites.

La branche devra inévitablement supporter ces nouvelles charges, à moyen et à long terme.

C’est pourquoi je considère qu’il serait grandement imprudent de laisser une gestion annuelle du risque accidents du travail-maladies professionnelles s’installer ou, plus exactement, se réinstaller. Il importe surtout de ne pas distraire des finances de la branche les moyens nécessaires à la prévention et à l’amélioration de la réparation versée aux victimes.

Tel est notre objectif et je sais, madame la ministre, qu’il est aussi le vôtre. Soyez assurée que nous soutiendrons tous les efforts que vous consentirez pour parvenir à l’atteindre !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – MM. Gérard Dériot et François Fortassin applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le président de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, le projet de financement des établissements médico-sociaux pour 2016 manifeste, malgré les difficultés du moment et la nécessité de venir à bout d’une dette héritée considérable, alors que l’inflation est quasi nulle, une triple volonté et s’inscrit parfaitement dans les objectifs maintes fois réaffirmés de la politique gouvernementale.

Il s’agit, d’abord, de résorber sans faiblir la dette sociale accumulée. Les résultats sont éloquents et donnent la mesure de l’effort accompli, sans déremboursements ni augmentations de franchises.

Il s’agit, ensuite, de relever le défi du vieillissement. C’est tout l’enjeu du projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement et du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Il s’agit encore d’avancer avec détermination vers la construction d’une société toujours plus « civilisée », au sens qu’Edgar Morin donne à cette expression, d’un monde qui offre à tous, et particulièrement aux plus vulnérables, les moyens d’accéder à leur autonomie maximale, de participer autant que faire se peut à la vie sociale et d’exercer leur citoyenneté.

Ainsi, au-delà des déclarations, les moyens mis en œuvre sont la traduction de cet acte de foi : évolution du budget consacré aux établissements médico-sociaux en hausse de 1, 9 % – c’est-à-dire une progression supérieure à celle de l’ONDAM général, fixée à 1, 75 % –, soit 405 millions d’euros sur une enveloppe globale de 19, 5 milliards d’euros ; augmentation de 0, 75 % du budget destiné à améliorer la qualité de vie, d’accompagnement et d’épanouissement des résidents dans les divers établissements ; accélération, à hauteur de 100 millions d’euros, du processus de médicalisation des établissements ; volonté manifeste d’augmenter le nombre de places d’accueil ou de suivi des personnes en situation de handicap à travers une enveloppe supplémentaire de 300 millions d’euros sur trois ans en investissement permettant de créer, en établissements et services, 25 500 places de plus à destination des personnes âgées et plus de 14 000 places à destination des personnes en situation de handicap.

Le transfert des dotations de fonctionnement aux établissements et services d’aide par le travail, les ESAT, du budget de l’État vers la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la CNSA, affirme l’engagement de garantir une évolution des crédits d’accompagnement des travailleurs handicapés conforme à celle de l’ONDAM médico-social et assure une prise en compte globale des besoins de nos concitoyens travaillant dans les ESAT, ainsi que des réponses sociales et sanitaires à leur apporter.

La généralisation progressive des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens, les CPOM, attendue par les gestionnaires d’établissements comme par les grandes associations œuvrant en faveur tant des personnes âgées que des handicapés, permettra d’organiser une approche moins arithmétique des projets et des besoins, une approche non seulement quantitative – beaucoup plus sécurisante que le prix de journée –, mais également qualitative du projet de chacun des établissements.

Un crédit d’amorçage de 15 millions d’euros, assorti de dispositions réglementaires particulières, viendra progressivement améliorer l’adéquation entre offre de places et besoins exprimés pour mettre enfin un terme à l’exode forcé d’un certain nombre de nos concitoyens, notamment vers la Belgique. Il s’agit non pas de contraindre ceux qui y vivent à revenir, mais bien de faire cesser le flux de ceux qui, faute de places en France, doivent s’exiler à leur corps défendant. Ce flux représente chaque année une somme d’une vingtaine de millions d’euros. Le crédit d’amorçage est donc parfaitement adapté.

Force est de constater, madame la ministre, que vous avancez avec détermination sur le chemin que vous avez tracé, celui de la justice sociale, d’une meilleure prise en compte des besoins et des aspirations de nos concitoyens dans une société que vous voulez plus juste et plus accueillante pour tous.

Force est encore de constater que vous avez fait vôtre l’objectif phare du rapport de Denis Piveteau intitulé Zéro sans solution en vous donnant les moyens de l’atteindre.

Je ne résiste pas à la tentation de citer George Bernard Shaw : « certains regardent le monde tel qu’il est et se demandent : pourquoi ? D’autres dessinent le monde tel qu’ils voudraient qu’il soit et se disent : pourquoi pas ? » Je crois que vous avez adopté cette seconde attitude et je vous en remercie.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine

Que dire après cette belle citation de George Bernard Shaw ?

Après ces longues heures de discussion générale, je sais que vous aspirez à entrer dans le vif du débat sur les articles. Je voudrais néanmoins prendre encore quelques instants pour répondre à certaines interpellations.

Je souhaite tout d’abord remercier toutes celles et tous ceux qui ont apporté leur soutien à ce texte, en particulier M. Daudigny, Mmes Archimbaud et Bricq, MM. Fortassin, Godefroy et Tourenne.

Je me suis fixé une ligne de conduite, pour reprendre les termes de Mme Bricq, ou un « cap clair », pour reprendre ceux de M. Tourenne : l’accès aux droits, la réduction du reste à charge de nos concitoyens, la modernisation de notre protection sociale sans remettre en cause notre volonté de faire baisser les déficits, car réduire les déficits c’est donner confiance à nos concitoyens dans l’avenir de leur système de protection sociale.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

À cet égard, je tiens aussi à saluer la volonté réaffirmée de Mme Archimbaud de faire de l’accès aux droits l’une de ses priorités.

Monsieur le président de la commission des affaires sociales, vous avez regretté que le niveau des déficits reste trop élevé. Certes, les déficits sont élevés, mais que préférez-vous ? Un déficit de 21 milliards d’euros, comme en 2011, avec une augmentation du reste à charge…

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

…ou environ douze milliards d’euros de déficits et moins de 10 milliards d’euros l’année prochaine, avec une réduction constante du reste à charge ?

Oui, le déficit reste trop élevé, et c’est bien ce qui justifie l’engagement déterminé du Gouvernement, mais reconnaissez que nous l’avons réduit de manière plus que significative, de près de moitié, par rapport à la situation laissée par la majorité précédente.

MM. Godefroy et Dériot ont évoqué la branche AT-MP dans leurs interventions. Je voudrais rappeler qu’un rapport a été envoyé aux assemblées, dès le mois de septembre dernier, sur la situation de cette branche. Je veux rassurer M. Godefroy et ceux qui se sont exprimés sur cette question : la branche AT-MP va connaître des excédents extrêmement importants qui justifient un transfert de ressources en direction de l’assurance maladie.

M. Desessard a gardé ses distances, comme il a déjà eu l’occasion de le faire, à l’égard du pacte de responsabilité. Toutefois, monsieur Desessard, dire que le Gouvernement mène une politique d’offre pure – que vous opposez à une politique de relance pure – est un raccourci pour le moins difficile à entendre. C’est oublier les ressources que nous consacrons au maintien du pouvoir d’achat et les politiques de soutien en matière de protection sociale que nous menons.

Monsieur Tourenne, vous avez eu raison de souligner l’engagement sans faille du Gouvernement pour faciliter l’accueil des personnes en situation de handicap et augmenter le nombre de places disponibles. Il s’agit également, au-delà d’une politique quantitative, de mettre en place ce que j’appellerai une politique de citoyenneté pleine et entière, qui consiste à faire en sorte que nos concitoyens confrontés au handicap soient des citoyens à part entière.

Tel est le principe qui nous guide et je veux en assurer M. Mouiller et Mme Giudicelli, laquelle – je tiens à le dire – a exprimé son soutien à beaucoup de dispositions du texte, mais aussi son inquiétude sur le fait que les ESAT bénéficieraient de deux sources de financement différentes : l’assurance maladie et l’État. Il ne faut voir là aucune source de confusion : l’État financera la rémunération des travailleurs des ESAT, alors que l’assurance maladie financera le fonctionnement des établissements. Ces deux postes de financement n’ont rien à voir : il est normal que l’assurance maladie apporte son soutien à l’établissement, mais il n’y a pas de raison pour qu’elle rémunère les hommes et les femmes qui y travaillent. Il s’agit même d’une clarification bienvenue au regard des attentes des acteurs du monde du handicap.

Mme Cayeux et M. Cigolotti se sont exprimés sur la politique familiale. Je leur répondrai en quelques mots seulement, afin de ne pas refaire le débat que nous avons déjà eu l’année dernière.

Mme Cayeux a réitéré, comme d’autres, l’opposition de son groupe à la modulation des allocations familiales au prétexte qu’il s’agirait d’une remise en cause de leur universalité. Je vais donc préciser, pour la énième fois, que tel n’est pas le cas, puisque toutes les familles éligibles antérieurement le demeurent. Les parents de deux enfants et plus continuent de percevoir des allocations familiales, même réduites. Il s’agit seulement d’une modulation du montant et non d’une remise en cause du versement.

Mme Cayeux a ajouté, de manière surprenante, que cette modulation des allocations familiales ouvrait la voie à une modulation du remboursement des soins. Mais quel est le responsable politique qui propose une franchise universelle en matière de soins, c’est-à-dire le déremboursement systématique et modulé d’une partie des soins en fonction du revenu ? Cette proposition ne vient pas d’un membre du Gouvernement, mais de l’un des candidats à la primaire de l’opposition. Quand nous proposons une protection sociale universelle, M. Fillon, quant à lui, propose une franchise de soins universelle, c’est-à-dire une modulation des remboursements en fonction des revenus, exactement ce dont ne veut pas Mme Cayeux ! Je trouve donc assez cocasse que cette critique me soit adressée depuis les travées de l’opposition ! Le Gouvernement suit une ligne claire : ne pas remettre en cause l’universalité de l’assurance maladie.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Monsieur Barbier, le nombre de femmes âgées de vingt ans à quarante ans est inférieur de 300 000 à ce qu’il était voilà dix ans. C’est seulement dans quelques années que l’effet du baby-boom du début des années 2000 se fera sentir.

M. Delattre s’est interrogé sur un propos de mon collègue Christian Eckert, selon lequel l’accord AGIRC-ARRCO aurait des répercussions sur l’assurance chômage. M. Eckert a indiqué que la trajectoire financière de la France, et non le PLFSS, prenait en compte l’incidence de cet accord sur l’équilibre des comptes du chômage. Cet accord a en effet pour ambition de modifier les comportements non seulement des salariés, mais aussi des employeurs.

J’ai entendu dire beaucoup de choses sur cet accord, notamment qu’il allait faire peser une pression sur les salariés, contraints de choisir entre un départ à la retraite assorti d’une contribution de solidarité financière temporaire ou le maintien en emploi plus longtemps. Au fond, l’accord AGIRC-ARRCO demande aux salariés, tant que l’équilibre des comptes n’est pas rétabli, d’apporter une contribution de solidarité soit en temps travaillé soit sous forme financière, à leur convenance.

Toutefois, on ne dit pas assez que cet accord a aussi pour ambition de peser sur les comportements des entreprises. En effet, celles-ci ne peuvent déclarer qu’il est souhaitable de travailler plus longtemps et licencier des salariés âgés cinquante-huit ans ou cinquante-neuf ans. Tout l’enjeu est de faire en sorte que les entreprises conservent leurs salariés aussi longtemps que nécessaire, en tout cas plus longtemps qu’aujourd’hui, ce qui se traduira financièrement sur les comptes de l’assurance chômage.

Je vous remercie, monsieur Roche, de votre minute de poésie. D’après vous, nous voyons un « coin de ciel bleu » pour ce qui concerne le financement des retraites. Les inquiétudes dont vous nous avez ensuite fait part ne sont corroborées ni par le Conseil d’orientation des retraites ni par l’INSEE, qui indique clairement que les retraites sont financées durablement. C’est cela, la nouveauté ! Nous devons collectivement le dire aux Français. Qui, parmi nous, a intérêt à ce que nos concitoyens s’inquiètent à propos de l’avenir de leurs retraites ? Personne ! Les inquiétudes en matière de protection sociale et de retraite viennent alimenter des tourments auxquels nous ne devons pas donner prise. Soyons, sinon heureux, du moins collectivement fiers de voir que les efforts demandés portent leurs fruits.

Car les Français ne refusent pas de faire des efforts, mais ils veulent que ceux-ci soient payés de retour. Ils travaillent désormais plus longtemps et cotisent donc davantage. Les résultats sont là ! Assurons-leur ensemble qu’ils n’ont pas fait ces efforts pour rien, au contraire ! Nous avons tous à y gagner.

Monsieur Vasselle, vous affirmez qu’on en reste à des efforts « paramétriques » et qu’il est temps de passer à autre chose. On peut toujours passer à autre chose ! Mais quand les efforts donnent des résultats, que les comptes sont équilibrés et que la stabilité s’installe, pourquoi vouloir tout bousculer ?

Allonger la durée de cotisation, prendre en compte la pénibilité : est-ce une réforme paramétrique ou structurelle ? Pour moi, c’est une réforme structurelle !

Quand j’entends, au sein de l’opposition nationale, les candidats à la primaire batailler pour savoir s’il faut fixer l’âge de départ à la retraite à 63 ans, 64 ans ou 65 ans, je n’ai pas l’impression qu’ils vivent sur une planète structurelle. Le débat paramétrique semble donc prospérer davantage dans votre camp que dans le nôtre.

M. Jean Desessard approuve.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Monsieur Barbier, nous avons eu un débat sur la carte hospitalière voilà quelques jours à peine, au cours de l’examen du projet de loi de modernisation de notre système de santé. Le Gouvernement ne croit pas que l’avenir de notre système de santé et la réduction des déficits passent par une diminution drastique du nombre d’hôpitaux en France. Nous croyons aux coopérations et aux mutualisations entre établissements. Tel est le sens des groupements hospitaliers de territoire. Dans la mesure où il s’agit d’une véritable modernisation de la carte hospitalière, vous devriez soutenir une telle démarche.

Enfin, Mmes Cohen et Imbert ont indiqué qu’elles n’avaient rien contre un engagement en faveur de la médecine ambulatoire.

Madame Imbert, vous avez regretté l’insuffisance des ressources affectées en la matière. Je vous le rappelle, la médecine de ville recevra 1, 4 milliard d’euros supplémentaires l’année prochaine, sans compter les 300 millions d’euros de baisse de cotisations des médecins. Dire qu’il n’y a pas de ressources affectées pour amorcer le virage ambulatoire ne me semble donc ni très juste ni très sérieux. Je ne sais pas comment vous réussirez à expliquer aux Français que ces 1, 4 milliard d’euros supplémentaires ne représentent pas plus de moyens !

Madame Cohen, laisser croire que la volonté du Gouvernement est de faire en sorte que les personnes hospitalisées rentrent le plus rapidement chez elles pour faire des économies, c’est une approximation que je ne peux pas laisser passer. La France est en retard par rapport à d’autres pays en matière de soins ambulatoires : c’est donc qu’il y a des choses qui se font ! Des « premières » sont réalisées dans des hôpitaux français, grâce à l’engagement de services hospitaliers qui en sont fiers. Par exemple, et c’est absolument sidérant, on peut réaliser des poses de prothèse de hanche en ambulatoire. Bien évidemment, il faut être accompagné à domicile. Mais qui dit le contraire ?

Personne ne peut considérer que l’avenir de l’hôpital consiste à maintenir des patients dans des chambres, alors qu’ils pourraient être chez eux ou dans des hôtels hospitaliers, accompagnés par un personnel moins spécialisé. L’hôpital doit se consacrer à ce pour quoi il est irremplaçable.

Monsieur Fortassin, vous avez apporté votre soutien à ce texte, ce dont je vous remercie. Vous avez également posé des questions très précises sur l’évaluation très prochaine par la Haute Autorité de santé des implants oculaires. Vous m’avez également interrogée sur les médicaments biosimilaires. Nous aurons l’occasion d’examiner toutes ces questions dans la suite du débat.

Pour terminer, mesdames, messieurs les sénateurs, je veux vous remercier de vos interventions et de vos interpellations. Nous allons maintenant entrer dans le vif du sujet. Je savoure par avance ces discussions, qui doivent nous permettre de travailler au service des Français.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion des articles.

PREMIÈRE PARTIE

DISPOSITIONS RELATIVES À L’EXERCICE 2014

Au titre de l’exercice 2014, sont approuvés :

1° Le tableau d’équilibre, par branche, de l’ensemble des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

En milliards d’euros

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

Vieillesse

Famille

Accidents du travail et maladies professionnelles

Toutes branches (hors transferts entre branches)

2° Le tableau d’équilibre, par branche, du régime général de sécurité sociale :

En milliards d’euros

Recettes

Dépenses

Solde

Maladie

Vieillesse

Famille

Accidents du travail et maladies professionnelles

Toutes branches (hors transferts entre branches)

3° Le tableau d’équilibre des organismes concourant au financement des régimes obligatoires de base de sécurité sociale :

En milliards d’euros

Recettes

Dépenses

Solde

Fonds de solidarité vieillesse

4° Les dépenses constatées relevant du champ de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, s’élevant à 178 milliards d’euros ;

5° Les recettes affectées au Fonds de réserve pour les retraites, lesquelles sont nulles ;

6° Les recettes mises en réserve par le Fonds de solidarité vieillesse, lesquelles sont nulles ;

7° Le montant de la dette amortie par la Caisse d’amortissement de la dette sociale, s’élevant à 12, 7 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

L’amendement n° 71, présenté par M. Delattre, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. le rapporteur pour avis.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Cet amendement, adopté par la commission des finances, vise à supprimer l’article 1er du projet de loi, qui présente l’exécution des recettes et des dépenses des organismes entrant dans le périmètre des lois de financement de la sécurité sociale pour l’exercice 2014.

Cet amendement est en cohérence avec la position proposée par la commission des finances, et adoptée par le Sénat, sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2014.

Il me permet également de formuler quelques remarques. Tout d’abord, notre pays a pris des engagements, notamment à l’égard de la Commission européenne, sur la réduction de ses déficits. Nous avons ainsi proposé des plans que tous les organismes financiers de ce pays ont examinés à la loupe. Il était notamment prévu que nous aurions un budget à l’équilibre en 2016. Tel était l’engagement du pays pour pouvoir atteindre, en 2017, un déficit inférieur à 3 % du PIB pour l’ensemble des comptes de la dépense publique.

Or le montant des dépenses et recettes des régimes de sécurité sociale pour 2016 qui nous est présenté aujourd’hui handicapera forcément la réalisation de l’objectif pour lequel nous avons pris des engagements internationaux, les dépenses du secteur social représentant environ 42 % de l’ensemble des dépenses du pays.

Ensuite, le paysage qui s’offre à nous est loin d’être celui d’un long fleuve tranquille ! Un déficit de 9, 3 milliards d’euros – 6, 2 milliards d’euros pour l’assurance maladie et 3, 7 milliards d’euros pour le FSV –, ce n’est pas anodin ! Nous regrettons aussi, et je n’ai pas eu le temps de développer complètement ce point tout à l’heure, que notre dette sociale subisse un phénomène d’accumulation et d’accélération.

Il est inexact d’affirmer, comme je peux l’entendre, que notre endettement n’a jamais été aussi faible. Si on demande au ministre son montant, il sera incapable de répondre. Le chiffre exact est de 219 milliards d’euros. Une telle somme est due aux phénomènes d’accumulation et d’accélération. Ainsi, la reprise de la dette de l’ACOSS par la CADES ne fera pas obstacle au fait que, à la fin de l’année 2016, …

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

… on sera obligé d’ajouter au total de la dette une somme au moins égale à 24 milliards d’euros.

Pour ces raisons, nous pensons qu’il ne convient pas d’adhérer aux chiffres présentés, qui ne nous permettront pas de tenir nos engagements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Cet amendement, qui vise à supprimer l’article 1er, ne correspond pas tout à fait, vous le savez, monsieur Delattre, à la position de la commission des affaires sociales.

La première partie de la loi de financement n’est pas une loi de règlement des comptes de la sécurité sociale, tout comme une loi de financement n’est pas un budget de la sécurité sociale. À la différence du budget de l’État, il ne s’agit pas d’un acte d’autorisation de la dépense.

L’exercice 2014 est clos et les comptes sont certifiés. L’article 1er ne fait que constater les écarts par rapport aux prévisions, écarts que vous avez d’ailleurs rappelés. Adopter cet article ne signifie pas que nous approuvons la politique menée, mais que nous prenons acte de ce constat, comme le Sénat l’avait fait l’an dernier pour l’exercice 2013.

La commission des affaires sociales a donc émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre

Défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Yves Daudigny, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Cela vient d’être dit, cet amendement est l’occasion de rappeler certains chiffres.

Puisque nous avons les résultats du déficit du régime général pour l’année 2014, hors FSV, il me semble opportun de nous remémorer ceux des années précédentes. En 2011, ce déficit atteignait 17, 4 milliards d’euros ; en 2010, 23, 9 milliards d’euros ; en 2009, 20, 3 milliards d’euros ; en 2008, 10, 2 milliards ; et, en 2007, 9, 5 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. Francis Delattre, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

C’est un exercice un peu facile ! Il ne vous aura pas échappé que certains événements se sont produits en 2008…

Si la commission des affaires sociales dit qu’elle est d’accord avec nous sur le fond, mais que les comptes doivent être approuvés, nous nous rallions à sa position sans aucun problème, monsieur le rapporteur général.

Debut de section - PermalienPhoto de Francis Delattre

Je retire donc cet amendement qui nous a permis de dire des choses qui n’ont pas l’air de plaire à tout le monde ! Mais ce n’est qu’un début !

L’article 1 er est adopté.

article 2

Est approuvé le rapport figurant en annexe A à la présente loi présentant un tableau, établi au 31 décembre 2014, retraçant la situation patrimoniale des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents ou la couverture des déficits, tels qu’ils sont constatés dans les tableaux d’équilibre relatifs à l’exercice 2014 figurant à l’article 1er.

ANNEXE A

Rapport retraçant la situation patrimoniale, au 31 décembre 2014, des régimes obligatoires de base et des organismes concourant à leur financement, à l’amortissement de leur dette ou à la mise en réserve de recettes à leur profit et décrivant les mesures prévues pour l’affectation des excédents et la couverture des déficits constatés pour l’exercice 2014

I. – Situation patrimoniale de la sécurité sociale au 31 décembre 2014

En milliards d’euros

Actif

2014 (net)

2013 (net)

Passif

Immobilisations

Capitaux propres

Immobilisations non financières

Dotations

Régime général

Prêts, dépôts de garantie

Autres régimes

Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES)

Avances / prêts accordés à des organismes de la sphère sociale

Fonds de réserve pour les retraites (FRR)

Réserves

Régime général

Autres régimes

FRR

Report à nouveau

Régime général

Autres régimes

CADES

Résultat de l’exercice

Régime général

Autres régimes

Fonds de solidarité vieillesse (FSV)

CADES

FRR

Écart d’estimation (réévaluation des actifs du FRR en valeur de marché)

Provisions pour risques et charges

Actif financier

Passif financier

Valeurs mobilières et titres de placement

Dettes représentées par un titre (obligations, billets de trésorerie, euro-papiers commerciaux)

Régime général

Régime général

Autres régimes

CADES

CADES

FRR

Dettes à l’égard d’établissements de crédits

Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) (prêts Caisse des dépôts et consignations)

Encours bancaire

Régime général (ordres de paiement en attente)

Régime général

Autres régimes

Autres régimes

CADES

FSV

CADES

Dépôts reçus

FRR

ACOSS

Dettes nettes au titre des instruments financiers

Créances nettes au titre des instruments financiers

ACOSS

CADES

Autres

FRR

Autres régimes

CADES

Actif circulant

Passif circulant

Créances de prestations

Dettes et charges à payer (CAP) à l’égard des bénéficiaires

Créances de cotisations, contributions sociales et d’impôts de sécurité sociale

Dettes à l’égard des cotisants

Produits à recevoir de cotisations, contributions sociales et autres impositions

Créances sur entités publiques

Dettes à l’égard d’entités publiques

Produits à recevoir de l’État

Autres actifs

Autres passifs

Total de l’actif

Total du passif

Sur le champ des régimes de base, du FSV, de la CADES et du FRR, le passif net (ou « dette ») de la sécurité sociale, mesuré par ses capitaux propres négatifs, qui représentent le cumul des déficits passés restant à financer, s’élevait à 110, 7 milliards d’euros au 31 décembre 2014, soit l’équivalent de 5, 2 points de PIB. Après la forte dégradation consécutive à la crise économique des années 2008-2009, ce passif net connaît pour la première fois en 2014 une légère amélioration, qui reflète essentiellement la poursuite de la réduction des déficits des régimes de base et du FSV (12, 8 milliards d’euros en 2014 contre 16, 0 milliards d’euros en 2013 et 19, 2 milliards d’euros en 2012) et de l’amortissement de la dette portée par la CADES (12, 7 milliards d’euros en 2014 contre 12, 4 milliards d’euros en 2013).

Cette amélioration se traduit en particulier par le constat, pour la première fois en 2014, d’un résultat consolidé positif sur le périmètre d’ensemble de la sécurité sociale retracé ci-dessus, avec un excédent de 1, 4 milliard d’euros contre un déficit de 1, 6 milliard d’euros en 2013.

Le financement du passif net de la sécurité sociale est assuré à titre principal par un recours à l’emprunt, essentiellement porté par la CADES et l’ACOSS. L’endettement financier net de la sécurité sociale, qui correspond à la différence entre les dettes financières et les actifs financiers placés ou détenus en trésorerie, s’établit donc à un niveau proche de celui-ci et en suit les tendances, corrigées des effets de la variation du besoin en fonds de roulement lié au financement des actifs et passifs circulants (créances et dettes) et des acquisitions d’actifs immobilisés, qui pèsent également sur la trésorerie. Du fait de l’augmentation du besoin en fonds de roulement liée notamment aux créances sur les cotisants émises en 2014, dont le taux de recouvrement est par ailleurs demeuré stable, l’endettement financier net s’établit à 121, 3 milliards d’euros au 31 décembre 2014, en légère hausse par rapport à fin 2013.

Évolution du passif net, de l’endettement financier net et des résultats comptables consolidés de la sécurité sociale depuis 2009

En milliards d’euros

Passif net au 31 décembre (capitaux propres négatifs)

Endettement financier net au 31 décembre

Résultat comptable consolidé de l’exercice

II. – Couverture des déficits et affectation des excédents constatés sur l’exercice 2014

Les comptes du régime général ont été déficitaires de 9, 7 milliards d’euros en 2014. La branche Maladie a ainsi enregistré un déficit de 6, 5 milliards d’euros, la branche Famille un déficit de 2, 7 milliards d’euros et la branche Vieillesse un déficit de 1, 2 milliard d’euros, la branche Accidents du travail et maladies professionnelles ayant quant à elle dégagé un excédent de 0, 7 milliard d’euros. Par ailleurs, le FSV a enregistré un déficit de 3, 5 milliards d’euros.

Dans le cadre fixé par la loi organique n° 2010-1380 du 13 novembre 2010 relative à la gestion de la dette sociale, la loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la sécurité sociale pour 2011 a organisé le transfert à la CADES, dès l’année 2011, des déficits 2011 des branches Maladie et Famille du régime général. Elle a également prévu la reprise progressive, à compter de 2012, des déficits 2011 à 2018 de la branche Vieillesse du régime général et du FSV, dans la double limite de 10 milliards d’euros chaque année et de 62 milliards d’euros au total. Conformément aux dispositions organiques, la CADES a été affectataire de ressources lui permettant de financer ces sommes. Même si la reprise des déficits de la branche Vieillesse et du FSV reste prioritaire, compte tenu des marges rendues disponibles par les différentes mesures prises en matière de redressement financier par la réforme des retraites de 2014, la loi n° 2013-1203 du 23 décembre 2013 de financement de la sécurité sociale pour 2014 a prévu que les déficits des exercices 2012 à 2018 des branches Maladie et Famille pourraient être intégrés dans le champ de la reprise, sans modification des plafonds globaux de reprise ni de l’échéance prévisionnelle d’amortissement de la dette transférée à la CADES. Un montant de 10 milliards d’euros a ainsi été repris en 2014, correspondant au transfert des déficits définitifs de la branche Vieillesse et du FSV au titre de 2013 et au financement d’une partie du déficit de la branche Maladie au titre de 2012.

Le PLFSS 2016 vient modifier le calendrier de reprise des dettes, toujours dans le respect du plafond global. Il est en effet proposé de permettre à la CADES de financer dès 2016 l’intégralité du reliquat de déficits à reprendre en application de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 modifiée. 23, 6 milliards d’euros seraient ainsi transférés à la CADES dès 2016, donnant les moyens à cette dernière de réaliser dans des conditions de financement favorables une stratégie globale de portage et d’apurement de la dette sociale qui lui a été transférée. Cette modification permettra de tirer parti des conditions particulièrement favorables de financement actuellement constatées sur les marchés et de prémunir ainsi la sécurité sociale contre le risque qu’une remontée des taux de long terme dégrade les conditions de financement des déficits s’ils étaient transférés plus tardivement.

Par ailleurs, les excédents de la branche Accidents du travail et maladies professionnelles au titre de l’exercice 2014 (0, 6 milliard d’euros) ont été affectés à la réduction des déficits accumulés par cette branche, dont le montant s’est ainsi réduit de 1, 7 à 1 milliard d’euros.

La plupart des régimes de base autres que le régime général présentent par construction des résultats annuels équilibrés ou très proches de l’équilibre. Il en est ainsi des régimes intégrés financièrement au régime général (régimes agricoles à l’exception de la branche retraite du régime des exploitants, régimes maladie des militaires et des marins), des régimes de retraite équilibrés par des subventions de l’État (SNCF, RATP, régimes des mines et des marins), des régimes d’employeurs (fonction publique de l’État), équilibrés par ces derniers, et enfin du régime social des indépendants dont les déficits étaient couverts jusqu’en 2014 par l’affectation, à due proportion, du produit de la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés. Un mécanisme d’intégration financière aux branches Maladie et Vieillesse du régime général s’y substitue à compter de 2015.

Cependant, plusieurs régimes ne bénéficiant pas de tels mécanismes d’équilibrage ont enregistré en 2014 des résultats déficitaires. S’agissant de la branche retraite du régime des exploitants agricoles, dont les déficits 2009 et 2010 avaient été repris par la CADES, le déficit s’est réduit à 0, 2 milliard d’euros (contre 0, 6 milliard d’euros en 2013), portant le montant des déficits cumulés depuis 2011 à 2, 8 milliards d’euros. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 a prévu que ce déficit puisse être financé par des avances rémunérées de trésorerie de l’ACOSS en complément des financements bancaires auxquels avait recours jusqu’ici la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) pour couvrir ces déficits cumulés. Au 31 décembre 2014, ces déficits ont été financés en totalité par une avance de l’ACOSS (2, 5 milliards d’euros).

Le déficit du régime des mines s’est élevé à 0, 1 milliard d’euros en 2014, portant le montant cumulé de dette à 1 milliard d’euros. Dans le contexte d’une limitation des concours financiers de la Caisse des dépôts et consignations, partenaire financier historique de la Caisse autonome nationale de la sécurité sociale dans les mines, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 a étendu jusqu’à 2017 les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 prévoyant la faculté de recours à des avances de trésorerie de l’ACOSS à hauteur de 250 millions d’euros, en complément des financements externes procurés par la Caisse des dépôts et consignations et par des établissements bancaires.

Enfin, la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a dégagé, pour la première fois depuis cinq ans, un excédent de 0, 4 milliard d’euros (après avoir connu un déficit de 0, 1 milliard d’euros en 2013). Cet excédent, qui résulte principalement de l’effet des hausses de taux de cotisations intervenues en 2013 et 2014, a été affecté aux réserves du régime, portant celles-ci à 1, 6 milliard d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Je mets aux voix l’ensemble constitué de l’article 2 et de l’annexe A.

L’article 2 et l’annexe A sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Je mets aux voix l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

La parole est à M. le président de la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Je rappelle aux sénateurs membres de la commission que celle-ci se réunit à dix-neuf heures trente, pour une heure.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le lundi 9 novembre 2015, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, le Conseil d’État a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les articles L. 2151-1, L. 2152-1 et L. 2152-4 du code du travail (Représentation patronale dans les relations collectives de travail) (2015-519 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-neuf heures trente, est reprise à vingt-et-une heures trente.