Je souhaiterais revenir, tout d’abord, sur le rôle déterminant des administrations de sécurité sociale dans la stratégie de redressement des comptes public.
Aujourd’hui, quelque 42 % de la dépense publique proviennent du bloc social. Or les quelques remarques que je ferai sur ce point fondamental seraient de nature à altérer l’optimiste de M. le secrétaire d’État chargé du budget, si toutefois celui-ci avait bien voulu demeurer parmi nous.
Le principal objectif budgétaire du Gouvernement réside désormais dans un retour du déficit effectif en deçà de 3 % du produit intérieur brut en 2017. Chacun connaît désormais les ressorts de ces fameux 3 % et la difficulté d’atteindre cet objectif.
Si l’on considère l’ensemble des administrations de sécurité sociale, les ASSO, dont il était prévu un retour global à l’équilibre dès 2016, force est de constater que ce retard aura un impact sur l’ensemble du dispositif visant au retour du déficit effectif en deçà de 3 %, et donc sur le respect de nos engagements internationaux.
L’amélioration des comptes sociaux serait essentiellement permise par la réalisation d’environ 20 milliards d’euros d’économies entre 2015 et 2017, ce qui représente quelque 40 % du programme global d’économies de 50 milliards d’euros qui a été annoncé par le Gouvernement dans le Pacte de responsabilité et de solidarité.
L’importance de la contribution des administrations de sécurité sociale s’explique par le poids de leurs dépenses, lesquelles dépassent largement celles de l’État.
Il s’agit de savoir si l’objectif de 7, 4 milliards d’euros d’économies qui nous est présenté est réaliste et, surtout, réalisable. Telle est l’une des questions centrales qui se posent à la lecture du présent projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Pour l’année 2016, je le répète, les administrations de la sécurité sociale devraient donc réaliser quelque 7, 4 milliards d’euros d’économies. Devant l’Assemblée nationale, le 20 octobre dernier, le secrétaire d’État chargé au budget, M. Christian Eckert, a précisé le contenu de ces économies. Je vais vous donner, assez brièvement, l’avis de la commission des finances à cet égard.
Tout d’abord, l’objectif de 3, 4 milliards d’euros d’économies nécessaires pour respecter le taux d’évolution de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, de 1, 75 % représente un effort certes considérable, mais réalisable. Il semble en effet possible de suivre le rythme de progression proposé. Nous ne contestons donc pas cet objectif. De même, il semble crédible que les mesures déjà engagées, les années passées, en matière de politique familiale et de retraites permettent d’infléchir la dépense de 1 milliard d’euros.
Cependant, permettez-moi d’émettre des doutes s’agissant des 500 millions d’euros d’économies annoncés en matière de gestion des organismes de protection sociale, alors même que la Caisse nationale des allocations familiales vient d’être autorisée à renouveler 500 emplois et à en créer environ 420 en 2016, tout cela pour faire face aux nouvelles charges introduites par la réforme de l’ensemble du dispositif des allocations familiales que nous connaissons tous.
Enfin, quelque 1, 8 milliard d’euros d’économies proviendraient de l’assurance chômage – vous comprendrez que, dès l’abord, cela soulève de vraies interrogations – et de la réforme des retraites complémentaires AGIRC-ARRCO, sur laquelle il faut bien se rendre compte, mes chers collègues, que le Gouvernement n’a aucun moyen d’intervenir. Je regrette d’avoir à le dire, mais il ne dispose d’aucun levier et n’a aucune prise directe en la matière.
Je souhaitais, bien évidemment, demander des précisions à M. le secrétaire d'État chargé du budget, pour qu’il nous explique comment l’accord relatif à l’AGIRC-ARRCO peut nous amener à réaliser 1, 5 milliard d’euros d’économies, si ce n’est en anticipant sur le fait que, entre malus et bonus, celles et ceux de nos concitoyens qui s’engagent dans la projection de leur retraite en viennent à penser qu’ils attendront un ou deux ans de plus. C’est finalement une façon assez astucieuse d’amorcer un prolongement de l’âge de la retraite, mais il serait tout de même bon que, sur un sujet essentiel comme celui-ci, nous puissions connaître l’avis du Gouvernement.
En raison des fragilités de ce plan d’économies, il est permis de s’interroger sur le redressement véritable des comptes sociaux annoncé en 2016. En fait, le chiffre des économies réalisables que nous atteindrons à l’arrivée est plus près des 5 milliards d’euros que des 7, 4 milliards d’euros.
L’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2016, qui concerne un périmètre plus restreint, ne permet pas de dissiper ces doutes.
Tout d'abord, ce projet de loi de financement vient à nouveau confirmer l’abandon de l’objectif d’un retour à l’équilibre dès 2016, cette ambition étant reportée au-delà de 2019 !
Ensuite, nous nous trouvons face à un paradoxe : alors même que le Gouvernement annonce un taux d’évolution de l’ONDAM le plus faible jamais fixé et que la croissance tendancielle des dépenses sociales ralentit, un déficit global de 9, 3 milliards d’euros subsisterait en 2016, malgré un plan annonçant, d’un côté, 7, 4 milliards d’euros d’économies, et, de l’autre, 9, 3 milliards d’euros de déficit global – autre paradoxe !
Permettez-moi de dire, mes chers collègues, qu’identifier ce qui relève des économies à l’intérieur du déficit tient plus de la géolocalisation que de la comptabilité