Les Français sont encore nombreux à croire que les fumeurs « rapportent » plus qu’ils ne coûtent à l’État, en raison de la fiscalité des produits du tabac. Au contraire, le coût des dégâts du tabagisme, en hausse constante, pèse lourdement sur les comptes publics. La dernière étude de l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, datée de septembre 2015, estime le coût global du tabac à 120 milliards d’euros par an, soit dix fois le déficit de la sécurité sociale, lequel s’élève, Fonds de solidarité vieillesse compris, à 13 milliards d’euros en 2015. Cette étude révèle aussi que, pour les seules dépenses sanitaires, le coût s’élève à 25 milliards d’euros par an.
Cet amendement vise à exercer une forte pression fiscale sur les prix des cigarettes, pour deux raisons majeures.
La première est que le prix constitue un élément essentiel de la lutte contre le tabac. Le Président de la République l’a lui-même rappelé lors de la présentation du plan cancer 3 en février 2014 : « L’évolution des prix nous enseigne que les seules baisses significatives – elles ont été rares – de la consommation de tabac se sont produites après des augmentations fortes du prix des cigarettes. » Les addictologues et toutes les personnes impliquées dans l’élaboration des plans de lutte contre le tabagisme le confirment.
La deuxième raison est qu’une augmentation du prix accroît les rentrées fiscales et permet de compenser partiellement le coût sanitaire et social du tabac, qui pèse sur les comptes de la sécurité sociale.
Face à l’hécatombe sanitaire et financière, il est urgent d’adopter des mesures fortes. Le tabac tue aujourd’hui 79 000 personnes par an, vingt fois plus que les accidents de la route. L’objectif, à terme, est d’atteindre le seuil psychologique que représente, selon les spécialistes en addictologie, la fixation du prix du paquet de cigarettes à 10 euros, en intensifiant, parallèlement, la lutte contre le commerce illicite et en travaillant activement à une convergence fiscale européenne.
Cette mesure, prise isolément, perd évidemment de son intérêt. Elle a vocation à s’inscrire dans le cadre d’une politique générale de lutte contre le tabagisme, qui partirait du constat lucide selon lequel aujourd’hui, malgré les efforts – notamment ceux qui font l’objet d’un certain nombre d’articles du projet de loi de santé –, la réalité résiste : le problème du tabagisme persiste en France de façon inquiétante.
J’indique enfin que l’article 40 nous empêche, nous, parlementaires – et c’est bien normal – de faire certaines propositions. Je pense par exemple qu’il serait souhaitable de renforcer l’ensemble des mesures d’accompagnement des personnes qui souhaitent arrêter de fumer. Il existe déjà des lieux, des spécialistes, des réseaux, qui mériteraient d’être renforcés et aidés davantage ; mais je ne peux pas le proposer. Cet amendement a donc également pour objet d’encourager les efforts accomplis par le Gouvernement, par les réseaux auxquels j’ai fait allusion, par les médecins, et d’indiquer en même temps que nous sommes loin du compte.