En la matière, M. Tourenne a très bien exposé les enjeux. On ne peut se satisfaire que des marins, par la simple grâce – ou plutôt la simple « disgrâce » – du déplacement du siège social de leur employeur, se trouve privés de couverture sociale.
J’ajoute, si vous me le permettez, monsieur le rapporteur général, qu’il n’y a pas lieu ici de s’interroger sur l’attractivité des salariés français pour les entreprises parce que, avec un tel raisonnement, il faudrait dispenser de toute contribution sociale toutes les entreprises étrangères embauchant des salariés français, dans quelque domaine que ce soit. En outre, je le rappelle, ces contributions ou prélèvements sociaux donnent lieu à des prestations pour les salariés concernés.
Par ailleurs, les employeurs affirment que leurs salariés peuvent prendre des assurances privées. Or, on le sait bien – M. Tourenne citait d’ailleurs cet exemple –, dans la plupart des cas, les assureurs en question ne couvrent pas les marins lorsqu’ils sont confrontés à des maladies graves comme des cancers. Les marins se trouvent alors confrontés à des traitements aux coûts gigantesques et sont incapables de les prendre en charge ; ils doivent dès lors revenir en France et faire appel à la solidarité nationale à travers la couverture maladie universelle, la CMU. Cela n’est donc pas satisfaisant, non parce qu’ils peuvent bénéficier de la CMU, mais parce que leur employeur n’a contribué en aucune manière au dispositif.
On me demande ensuite si le régime que l’on propose d’intégrer au régime général ne pourrait l’être à celui des marins, qui a effectivement un écho identitaire très fort pour les personnes concernées. J’entends bien la remarque et la discussion peut se poursuivre à ce sujet, j’y suis ouverte ; le processus parlementaire est en cours.
J’indique toutefois d’emblée, d’une part, que le régime général a plus de moyens pour collecter les cotisations que le régime spécifique des marins et, d’autre part, que les prestations versées par le régime général sont nettement meilleures, notamment pour ce qui concerne les retraites. L’intégration dans le régime général impliquerait en effet de calculer les pensions selon les règles de ce régime plus favorables que celles qui sont actuellement en vigueur dans le régime des marins.
Telles sont les raisons qui ont amené le Gouvernement à proposer cette option. Je crois, madame Gatel, que votre amendement aboutirait purement et simplement à priver la population des marins de toute couverture sociale décente au seul motif que leur employeur s’est établi dans un État complaisant du point de vue du droit social, ce que nous ne pouvons pas accepter.
Je vous demande donc de retirer votre amendement, à défaut j’émettrai un avis défavorable.