Le nombre de sénateurs et de groupes qui proposent la suppression de l’article 21 permet de prendre la mesure de l’opposition qu’il suscite.
Permettez-moi, mes chers collègues, de dresser l’inventaire des principaux griefs que nous lui adressons.
Nous déplorons l’absence totale de concertation avec les professionnels, absence qui explique la réaction des mutuelles.
Nous regrettons l’absence d’étude d'impact, notamment sur la question du prolongement pour les bénéficiaires ainsi que sur la fiscalité. Un rapport n’a été demandé à l’IGAS qu’au mois d’octobre dernier !
Nous estimons que le dispositif marque une rupture de la solidarité intergénérationnelle. Cet argument de fond est important : c’est un peu comme si, d’un seul coup, on modifiait les critères de la retraite par répartition.
La mesure conduira à un nivellement des soins par le bas, avec un panier de soins qui, dans le futur, ne pourra pas être adapté à l’évolution de l’état de santé des seniors – actuellement, la plupart des personnes âgées ont choisi leur mutuelle avec des prestations adaptées à leurs pathologies particulières.
Les classes moyennes seront une fois de plus mises à contribution, contrairement aux personnes à faible revenu, bénéficiaires de la CMU ou de l’aide au paiement d’une complémentaire santé, l’ACS.
La mesure aura une incidence extrêmement forte sur l’emploi : je crains que les protagonistes du dossier ne soient proches de la réalité lorsqu’ils avancent le chiffre de dizaines de milliers d'emplois supprimés…
Le dispositif créera une nouvelle entorse à la concurrence. Madame la ministre, il me semble revenir à l’époque où, discutant de l’accord national interprofessionnel, l’ANI, nous avions bataillé ferme avec le Gouvernement, au cours de la navette, sur les clauses de désignation. Par deux fois, le Conseil constitutionnel les avait supprimées… Pratiquement, l’article 21 du présent texte donnera, de manière un peu détournée, une situation de quasi-monopole à dix grandes compagnies d’assurance en France, au détriment des petits opérateurs.
Le Sénat va probablement supprimer cet article, si l’on en croit le nombre de signataires des différents amendements de suppression. Si, par malheur, l’Assemblée nationale devait le rétablir, nous pourrons toujours saisir le Conseil constitutionnel.