Intervention de Laurence Cohen

Réunion du 12 novembre 2015 à 21h45
Financement de la sécurité sociale pour 2016 — Article 39

Photo de Laurence CohenLaurence Cohen :

L’article 39 pose un certain nombre de problèmes.

Par exemple, son alinéa 10 prévoit que « chacun contribue, en fonction de ses ressources, au financement de cette protection ». Une telle formulation est fâcheuse, car l’employeur est seul à cotiser au titre de la branche accidents du travail et maladies professionnelles ; il le fait de surcroît en fonction de sa sinistralité, et non de ses moyens.

Autre lacune de taille, l’article n’évoque pas du tout les entreprises, alors que l’obligation pour les employeurs de cotiser est un principe fondateur de la sécurité sociale : c’est ce que l’on appelle le « salaire socialisé ».

Comment peut-on parler de protection universelle maladie et de droit universel, alors que ce PLFSS ne remet en cause ni la segmentation de l’assurance maladie opérée depuis des années ni sa fiscalisation ?

La segmentation de l’assurance maladie entre la couverture maladie universelle, ou CMU, la CMU complémentaire, ou CMU-C, et l’aide au paiement d’une complémentaire santé, ou ACS, prouve que le principe d’universalité de la sécurité sociale a volé en éclats. Au lieu de trois mécanismes, il faudrait un vrai régime unifié et une prise en charge à 100 %.

Madame la secrétaire d'État, pourquoi ne pas commencer par l’instauration d’une prise en charge à 100 % au moins pour les populations éligibles à ces dispositifs ? Ce serait une première étape, une mesure de justice et de simplification, d’autant que ces derniers sont financés non par les cotisations, mais par des taxes et des impôts. Cette fiscalisation s’opère sur les citoyennes et les citoyens, et non sur les employeurs.

De plus, à cause de la complexité que je viens de décrire, des personnes éligibles à la CMU-C, par exemple, n’y ont pas recours. L’enquête de l’Institut régional de travail social Paris-Île-de-France, conduite dans vingt-neuf foyers et résidences sociales franciliennes, hébergeant plus de 6 000 personnes confrontées à une forte précarité, a mis en évidence un taux de non-recours à la CMU-C de 23, 7 % et un non-recours presque total à l’ACS. La prise en charge à 100 % mettrait un terme à ces situations. Ajoutons que certains régimes sont encore gérés par des opérateurs privés lucratifs, comme les assureurs.

Pour toutes ces raisons, nous ne pourrons voter en faveur de l’adoption de cet article.

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