J’en veux pour preuve l’accord national interprofessionnel – ANI – de 2013, qui donne un rôle grandissant aux mutuelles et aux organismes complémentaires. Il en va de même avec la modulation des allocations familiales, qui revient sur le principe d’universalité de la protection sociale.
Cette remise en cause d’un système qui a fait ses preuves dans les heures les plus difficiles de notre histoire contemporaine a uniquement pour but d’assurer une bonne gestion financière et de faire des économies.
Ainsi, la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, Mme Marisol Touraine, a rappelé plusieurs fois au cours des débats sa volonté de bien gérer les fonds de la sécurité sociale. Or nous attendons de la part du Gouvernement des décisions politiques, et non uniquement des décisions comptables !
Bien sûr, nous devons être vigilants sur les financements de notre système, et c’est la raison pour laquelle nous vous avons fait de nombreuses propositions de recettes nouvelles.
Cependant, les économies que vous nous proposez ont pour seul objectif de compenser les exonérations et autres crédits sociaux faits aux entreprises, aux plus grosses d’entre elles, d’ailleurs.
Censées relancer la croissance et faire baisser le chômage, ces mesures bénéficient surtout à l’enrichissement des grands groupes, de leurs dirigeants, de leurs actionnaires, et représentent une perte importante pour notre protection sociale.
Pour financer ces pertes de recettes, les hôpitaux sont asphyxiés et les patients sont renvoyés chez eux rapidement après leur opération ; c’est ce que vous appelez « le virage ambulatoire ».
Pour financer ces pertes de recettes, il est proposé que les salariés travaillent plus longtemps et cotisent davantage, tandis que le montant des pensions est gelé.
Pour financer ces pertes de recettes, la branche accidents du travail-maladies professionnelles voit son excédent ponctionné, tandis que les entreprises sont exonérées de leurs responsabilités en matière de santé et sécurité au travail.
Pour financer ces pertes de recettes, les familles se serrent la ceinture : 15 % d’entre elles ont vu leurs allocations diminuer.
Enfin, pour financer ces pertes de recettes, c’est le budget de l’État qui est mis à contribution. Ainsi, non seulement les ménages vont subir les conséquences que je viens d’énumérer, mais ils verront aussi nos services publics dégradés : moins d’enseignants, moins de policiers, moins de logements sociaux, moins de magistrats, moins d’agents affectés aux finances publiques, moins d’agents dans nos transports publics… Or ces services incarnent la justice sociale et fiscale, la redistribution des richesses, l’égalité des citoyens, quelle que soit leur origine sociale ou territoriale !
Vous poursuivez ainsi votre politique d’austérité, alors que c’est une politique sociale qui devrait être mise en œuvre !
Le sens de nos propositions, c’est de viser à augmenter les recettes, plutôt qu’à diminuer les dépenses. Ainsi, nous avons proposé la suppression des exonérations de cotisations patronales sur les bas salaires, ce qui donnerait 20 à 22 milliards d’euros supplémentaires par an à notre sécurité sociale.
Nous sommes revenus sur la baisse du forfait social, prévue dans la loi Macron, qui coûte, quant à elle, près de 1 milliard d’euros à la Caisse nationale d’assurance vieillesse.
Nous avons proposé que la perte d’autonomie soit financée non par les retraités mais par les actionnaires : en demandant une contribution de 0, 3 % sur les dividendes versés, il est possible de dégager 600 millions d’euros pour la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie.
Nous avons également proposé de moduler les cotisations payées par les entreprises en fonction de leur politique d’emploi. En effet, les exonérations faites aux entreprises, déjà difficiles à justifier, deviennent incompréhensibles quand elles sont accordées à des entreprises qui licencient à tour de bras pour mieux satisfaire leurs actionnaires.
Tout en saluant les mesures de prévention prévues par ce texte, notamment en matière de contraception, nous avons proposé des amendements pour mieux protéger les travailleurs, de l’amiante, par exemple, et faciliter l’accès aux soins sur le territoire, notamment en zone rurale, en zone de montagne ou en zone péri-urbaine.
Pourtant aucune de nos propositions n’a été retenue. Pire, la droite – nous venons de l’entendre – a profondément aggravé ce texte