Intervention de Georges Patient

Réunion du 17 novembre 2015 à 21h30
Débat sur la réforme de la dotation globale de fonctionnement

Photo de Georges PatientGeorges Patient :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la DGF est destinée à compenser les inégalités de situation entre les collectivités territoriales en leur apportant un niveau de ressources suffisant pour faire face à leurs charges particulières. Elle ne remplit ce rôle que de façon lacunaire dans les collectivités d’outre-mer, qui sont pourtant, en majeure partie, considérées comme les plus pauvres de France.

Conçue avant tout pour les collectivités hexagonales, elle pâtit d’une certaine inadaptation aux réalités ultramarines, qui ne sont que peu prises en considération. Les outre-mer présentent des particularités issues de leur histoire et de leur géographie qui, indéniablement, les différencient des collectivités hexagonales, et les articles 73, 74, 76 et 77 de la Constitution en apportent la preuve.

Leurs charges sont ainsi incontestablement plus élevées, tant en fonctionnement qu’en investissement, en raison du contexte de rattrapage économique et social, de leur démographie et des compétences plus étendues qu’elles exercent.

Mais leurs recettes fiscales directes sont beaucoup plus faibles : elles ne représentent que 20 % de leurs recettes de fonctionnement, contre 40 % dans l’Hexagone. En conséquence, les collectivités d’outre-mer souffrent d’une très grande fragilité financière, et nombre d’entre elles sont en situation de déficit. Une majorité d’entre elles fait en effet l’objet d’une procédure d’alerte cette année.

Afin que la DGF joue pleinement son rôle de stabilisateur des budgets des collectivités locales et de compensation de leurs charges en outre-mer, il est impératif de l’adapter en comblant les lacunes des dispositifs de droit commun et en étudiant sérieusement la mise en place de mesures de péréquation spécifiques aux outre-mer.

Ayant fortement sensibilisé le Gouvernement et Mme Pires Beaune, en avançant des propositions, je m’attendais à des avancées significatives. Tant s’en faut !

L’article 58 du projet de loi de finances pour 2016 ignore une fois de plus la situation particulière des outre-mer. En dépit de tous les constats déjà établis, le droit commun s’impose toujours en ce qui concerne la dotation forfaitaire et le statu quo est maintenu pour les dotations de péréquation !

S’agissant de la dotation forfaitaire, les engagements pris n’ont pas été tenus, en particulier envers les communes de Guyane, déjà lésées par un prélèvement exceptionnel et inique de 27 millions d’euros sur leurs recettes d’octroi de mer depuis 1974. Les maires de Guyane, excédés de ne pas obtenir gain de cause après de multiples demandes de rétrocession de ce prélèvement, ont pris la décision de déposer un recours devant le tribunal administratif.

Dans leur rédaction actuelle, plusieurs points de l’article 58 susvisé méritent d’être revus, corrigés et précisés pour les communes d’outre-mer.

Tout d’abord, la détermination de la population retenue pour le calcul de la dotation de base n’intègre pas de coefficient de majoration pour les communes de Guyane dans lesquelles l’INSEE refuse de procéder aux tournées physiques de recensement en raison de leur dangerosité pour ses agents. Comme vous le savez, les garimpeiros, ou orpailleurs clandestins, pullulent dans les forêts guyanaises et peuvent être dangereux lorsque se présentent devant eux des fonctionnaires de l’État. Il ne s’agit donc pas d’une sous-estimation de la population recensée pour des raisons techniques, mais bien de la non-prise en compte d’une catégorie de population, dont l’existence est pourtant connue de l’État.

La dotation de ruralité, censée remplacer la dotation superficiaire, voit sa portée limitée par le « tunnel », même si son plafond est relevé à quatre fois la dotation de base. Des assurances avaient pourtant été données : cette composante devait constituer une réponse en direction des grandes communes de Guyane en proie à des difficultés énormes pour garantir les besoins primaires à leur population, tels que l’eau potable et l’électricité.

En outre, les critères d’attribution de cette dotation, basés sur la densité de population, excluent de son bénéfice la quasi-totalité des communes des autres départements d’outre-mer, aux fortes densités de population.

La dotation de centralité, quant à elle, fait apparaître tout simplement des situations ubuesques, lorsque l’on connaît un tant soit peu les intercommunalités de Guyane ! Quelles charges de centralité supportent donc des villes-centres envers des communes dont les habitants doivent faire plusieurs jours de pirogue pour s’y rendre ?

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