Je n’aurai pas la faiblesse de rappeler chacune de ces prophéties à leurs auteurs, mais permettez-moi simplement de vous dire que les engagements pris devant vous l’année dernière ont été tenus, et que la confiance que le Parlement dans son ensemble nous a accordée, le mandat qu’il nous a confié, ont été respectés.
Les engagements ont tout d’abord été tenus s’agissant du redressement économique du pays.
Pour la première fois depuis de nombreuses années, la prévision de croissance sur laquelle nous avons construit le budget 2015, soit 1 %, est déjà atteinte au bout de trois trimestres : 2015 sera la première année de reprise effective, et il semble acquis que la croissance dépassera 1 %, comme l’anticipent aussi bien l’INSEE que le Fonds monétaire international.
Cette prudence et ce réalisme ont de nouveau prévalu pour la construction du budget 2016. Nous avons retenu cette fois une hypothèse de 1, 5 % de croissance pour l’an prochain. C’est la prévision de ce que l’on appelle le « consensus des économistes », prévision que le Haut Conseil des finances publiques considère comme « atteignable » quand 1 % l’an passé lui semblait optimiste. Cela nous conforte donc dans cette hypothèse, et je pense que cela nous permettra d’éviter les contestations assez traditionnelles sur la fixation de l’hypothèse de croissance de la France.
J’emploie volontairement le terme « hypothèse ». Chacun sait que les prévisions économiques sont entachées d’incertitude : il s’agit là avant tout d’un choix réaliste pour construire notre budget et pour éviter de devoir demander un effort supplémentaire aux Français en cours d’année.
La reprise que nous observons cette année est la conjugaison de l’effet des politiques que nous avons menées, notamment le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, ou CICE, et le Pacte de responsabilité et de solidarité, qui rendent les entreprises plus compétitives et davantage à même de profiter de la demande extérieure, ainsi que la baisse d’impôt sur le revenu qui vient conforter en 2015 le pouvoir d’achat des ménages à revenus modestes ; en outre, l’environnement extérieur est plus favorable : un prix du pétrole divisé par deux, un taux de change euro contre dollar plus en ligne avec ses fondamentaux et des conditions de financement propices pour les entreprises et les ménages, avec des taux d’intérêt bas.
Ce que nous montrent les derniers indicateurs, c’est que la reprise se diffuse progressivement dans l’économie. Chacun commence à en ressentir les effets.
Le pouvoir d’achat des ménages devrait progresser de 1, 5 % en 2015, avec des créations d’emploi qui ont redémarré – plus de 50 000 emplois privés depuis un an, même si le nombre de ces créations ne permet pas de contrebalancer les nouveaux arrivants sur le marché du travail.
Le climat des affaires dépasse sa moyenne de long terme pour la première fois depuis 2011. Le redressement du taux de marge au premier semestre apporte aux entreprises une bouffée d’air bienvenue : il a progressé de 2 points depuis un an, reprenant les deux tiers du chemin perdu depuis la crise.
Avec la demande qui se renforce et des capacités à investir qui apparaissent, l’investissement des entreprises a redémarré puisqu’il a déjà progressé de plus de 2 % sur un an.
L’engagement est tenu aussi s’agissant du redressement de la situation budgétaire.
Loin des dérapages annoncés, le déficit public pour 2014 s’est finalement réduit à 3, 9 %, grâce à une progression des dépenses, hors crédits d’impôt, contenue. Il s’agit là d’un record obtenu grâce à l’engagement de l’ensemble des administrations publiques : ministères, administrations de sécurité sociale comme collectivités locales.
Cette dynamique se poursuit cette année avec une dépense qui évoluera sensiblement au même rythme. Les recettes rentrent sans difficulté – je préfère le dire car certains ont pris l’habitude de s’en inquiéter ! Nous conservons donc la prévision de déficit de l’ensemble des administrations publiques à 3, 8 % cette année.
Nous poursuivrons l’effort l’an prochain, avec une diminution plus sensible du déficit en lien avec les efforts réalisés et le retour à davantage de croissance.
La Commission européenne vient d’ailleurs de constater que nous avions une trajectoire budgétaire, en 2015 et en 2016, « globalement conforme » à ce qui nous avait été recommandé. C’est la première fois depuis longtemps !
Les engagements ont également été tenus s’agissant des baisses d’impôts et de prélèvements, qui se poursuivent et se poursuivront.
Ces baisses d’impôts concernent tout d’abord les ménages : notre volonté de rendre aux Français aux revenus moyens le produit de l’effort qu’ils ont consenti pour le redressement du pays est confirmée. Non seulement il n’y a plus de hausses d’impôts décidées depuis un an, mais nous concentrons nos efforts sur la baisse de l’impôt sur le revenu. Pour la troisième année consécutive, l’impôt sur le revenu sera allégé l’année prochaine pour les ménages, à hauteur de plus de 2 milliards d’euros. Depuis l’été 2014, cette baisse aura représenté 5 milliards d’euros de baisses, et douze millions de foyers fiscaux, soit les deux tiers des foyers fiscaux imposés, auront bénéficié de la baisse de l’impôt sur le revenu.
Il n’y a donc pas lieu de dire, me semble-t-il, que les classes moyennes sont les oubliées de nos réformes : c’est bien le cœur des classes moyennes qui bénéficie des baisses d’impôts sur le revenu. De même, il n’y a pas lieu, de mon point de vue, de dire que l’impôt sur le revenu se « concentre » sur les classes moyennes supérieures. La part des foyers fiscaux imposés retrouve exactement son niveau de 2010, et je vous rappelle que, avec la TVA ou la CSG, tous les ménages paient par ailleurs des impôts.
Nous n’opposons pas les catégories sociales entre elles, nous n’avons pas deux politiques en fonction des uns et des autres. Nous avons un principe et un seul, c’est que l’impôt doit baisser et qu’il doit baisser en priorité pour le cœur des classes moyennes, le couple d’employés avec enfant, l’instituteur débutant, ceux qui ont contribué à l’effort de redressement depuis 2011 alors que cela leur était particulièrement difficile.
Cette baisse d’impôt, mesdames, messieurs les sénateurs, concerne donc les retraités, les salariés, les familles, les ménages à revenus moyens, dont certains sont entrés dans l’impôt ces dernières années et qui sont les principaux bénéficiaires de nos mesures. Ce ne sont bien évidemment pas les seuls à avoir contribué au redressement de nos finances publiques, c’est vrai, mais ce sont aujourd’hui ceux qui sont en droit d’être les premiers à bénéficier de nos baisses d’impôts. C’est une question de justice fiscale, d’équité, et peut-être même de bon sens.
Mesdames, messieurs les sénateurs, une page est en train de se tourner en matière d’impôts, et pas seulement à cause des baisses d’impôt sur le revenu.
L’année 2016 sera l’année du lancement du chantier du prélèvement à la source, qui aboutira au 1er janvier 2018. Les travaux techniques progressent, et nous ouvrons une période de concertation qui se matérialisera par un Livre blanc au printemps prochain et par des choix inscrits « en dur » dans le projet de loi de finances pour 2017, afin que le basculement ait lieu dans de bonnes conditions au 1er janvier 2018.
L’année 2016 sera également l’année de la généralisation de la déclaration des revenus par internet. Cette généralisation sera opérée de manière souple et progressive, en commençant par les plus hauts revenus, sans jamais oublier le cas des personnes qui ne pourraient pas y procéder.
Nous souhaitons que, comme dans de nombreux autres pays, la télédéclaration devienne le principe, le droit commun, tout en permettant à ceux qui n’ont pas la possibilité d’y procéder, parce qu’ils n’ont pas d’accès à internet à leur domicile ou qu’ils déclarent ne pas être en mesure de le faire, de continuer à utiliser le papier. Nous n’allons donc pas, comme je l’entends parfois, faire payer quinze euros de plus à ceux qui ne pourraient pas déclarer leurs revenus par internet !
La justice fiscale, c’est aussi l’intensification de la lutte contre la fraude et l’optimisation fiscale abusive.