Intervention de Jean-Claude Requier

Réunion du 19 novembre 2015 à 14h30
Loi de finances pour 2016 — Article 22 et participation de la france au budget de l'union européenne

Photo de Jean-Claude RequierJean-Claude Requier :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, instrument de solidarité et d’intégration, le budget de l’Union européenne finance la politique de cohésion, la politique agricole, ainsi que de nombreux investissements en matière de compétitivité, de recherche et développement, d’infrastructures de transport ou d’énergie, dont la mise en œuvre à un niveau supraétatique apparaît nécessaire et évidente.

Ces dépenses d’intervention ne sont pas suffisamment mises en avant alors qu’elles intéressent de près nos concitoyens, dont l’attention se porte plus souvent sur l’austérité, les excès normatifs et la technocratie.

Certes, les « marchandages » concernant le cadre financier pluriannuel et le budget annuel ne contribuent pas à améliorer l’image d’une Europe qui, pourtant, nous apporte beaucoup.

Le prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne, évalué à 21, 5 milliards d’euros pour 2016, est en légère hausse par rapport à l’année précédente. Cette évolution est notamment due à l’augmentation de la contribution française, du fait de l’entrée en vigueur rétroactive de la nouvelle décision relative au système des ressources propres.

Deuxième contributeur net après l’Allemagne, la France est également le deuxième bénéficiaire du budget de l’Union européenne.

À l’heure de la crise des migrants, alors que se posent des enjeux de sécurité et de lutte contre le terrorisme, il convient plus que jamais d’unir nos forces pour affronter des circonstances exceptionnelles, qui doivent nous conduire à transcender les antagonismes d’ordre financier et politique.

Le comité de conciliation entre le Conseil et le Parlement européens est parvenu à un accord ce week-end sur le budget pour 2016.

Celui-ci prévoit 155 milliards d’euros en crédits d’engagement et près de 144 milliards d’euros en crédits de paiement, soit des hausses respectives de 6, 7 % et 1, 9 % par rapport à 2015.

Par ailleurs, 4 milliards d’euros devraient être affectés à la crise des réfugiés, les moyens ayant été jusqu’à présent jugés insuffisants pour assumer non seulement les coûts de la gestion des frontières, mais aussi les coûts d’intégration de ces réfugiés.

Lors du sommet de La Valette des 11 et 12 novembre 2015, un montant de 500 millions d’euros prélevés sur le budget européen a été évoqué, auquel s’ajouteraient 2, 5 milliards d’euros fournis par les États membres afin d’aider la Turquie pour l’accueil des réfugiés. La contribution de la France atteindrait 386 millions d’euros et celle de l’Allemagne 534 millions d’euros.

Nous voyons ici les limites du budget de l’Union européenne, qui doit répondre également aux efforts d’investissement du plan Juncker, à la crise agricole, ainsi qu’à la crise des dettes souveraines.

Alimenté par des « ressources propres », composées à 80 % des ressources RNB - qui avaient pour objectif initial de combler l’insuffisance des ressources propres traditionnelles – et de la TVA, ce système, nous le savons, favorise la logique comptable au détriment de la solidarité, en raison des rabais et des « rabais sur le rabais ». Or la solidarité implique, par définition, que l’on ne reçoive pas forcément un retour équivalent à l’effort consenti, comme Margareth Thatcher le demandait en son temps et comme M. Cameron continue à le demander.

Mais les intérêts de chacun ne sont pas que financiers...

Troisième année du cadre financier pluriannuel couvrant la période 2014-2020, le budget pour 2016 est déjà insuffisant.

Face à la rigidité de cet outil inadapté aux fluctuations de l’économie et à tout imprévu, les instruments de flexibilité ne pourront pas combler le manque flagrant de moyens de l’Union européenne pour financer ses politiques prioritaires, parmi lesquelles figurent, notamment, la croissance et l’emploi.

La réforme du budget de l’Union européenne constitue ainsi un impératif.

C’est la raison pour laquelle nous devons convaincre nos partenaires européens de la nécessité de faire monter en puissance les autres ressources propres dans un contexte où les circonstances exceptionnelles tendent malheureusement à constituer un état permanent.

Il convient effectivement de trouver d’autres ressources réellement « propres ». Comme j’ai eu l’occasion de l’évoquer lors de l’examen du projet de loi autorisant l’approbation de la décision du Conseil du 26 mai 2014 relative au système des ressources propres de l’Union européenne, celles-ci pourraient provenir de la mise en place d’une taxe sur les transactions financières, de la hausse des droits de douane aux frontières de l’Union européenne et de la réforme de la ressource TVA, qui ne représente que 13 % du budget total.

Le lancement d’un chantier de la fiscalité européenne est une condition sine qua non pour garantir une autonomie financière réelle. Il ne peut y avoir de politique réussie sans un budget garanti, lisible et aux ressources pérennes.

Cette réforme, dont le rendez-vous a été manqué en 2014, constituerait la traduction du grand projet européen, fondé avant tout sur la solidarité, la stabilité, la paix et la liberté.

Nous devrons rapidement combler ce vide si nous voulons préserver ces valeurs communes. C’est là que se trouve le « juste retour » de notre contribution nationale au budget de l’Union européenne.

L’Europe doit maintenant démontrer qu’elle est capable de s’adapter aux nouveaux enjeux. Dans cet esprit, les membres du groupe RDSE, toujours très européens par leur histoire et leurs convictions, voteront l’article 22 du projet de loi de finances pour 2016.

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