Monsieur le secrétaire d'État, pour justifier le transfert des personnels de l’AFPA, vous vous fondez sur les règles européennes de la concurrence, qui se doit d’être libre et non faussée. On voit ce qu’il en est dans les secteurs de l’énergie, de la santé, de la statistique publique, des télécoms et, plus récemment, de La Poste. Pour satisfaire encore à ce dogme, c’est maintenant à l’un des acteurs du service public de la formation d’être démantelé.
Quant aux services sociaux d’intérêt général que la majorité présidentielle nous présentait, à l’occasion du référendum sur le traité constitutionnel européen, comme la solution de remplacement des services publics, M. le secrétaire d'État a lui-même reconnu en commission qu’ils n’avaient aucune valeur juridique. Pour notre part, nous avions bien compris que ces services sociaux d’intérêt général étaient différents de nos services publics ; les Français aussi, d’ailleurs !
Il faut saluer l’honnêteté de M. le secrétaire d'État à ce sujet, qui a indiqué en commission que le service d’intérêt général n’était qu’un « label » sans déclinaison juridique.
Pour ce qui est de la jurisprudence constante, qui place la formation dans le champ concurrentiel, je souhaite que nous nous interrogions collectivement : au regard de la définition du champ concurrentiel tel qu’il existe aujourd’hui, quel domaine n’entre pas dans le champ de la concurrence ? Tout pourrait être considéré comme concurrentiel, et c’est bien là votre objectif.
Contrairement à ce que vous avez pu dire, monsieur le secrétaire d'État, dans l’avis qu’il a rendu en juin 2008, le Conseil de la concurrence ne considère pas que le versement de subvention en tant que telle constitue une violation des règles de la concurrence. Ainsi, le considérant 61 précise : « Il [le bon fonctionnement de la concurrence sur un marché] suppose, toutefois, qu’aucun opérateur ne bénéficie, pour son fonctionnement ou développement, des facilités dont les autres intervenants seraient privés et qui seraient d’une ampleur telle, qu’elles lui permettraient de fausser le jeu de la concurrence, sauf alors à ce qu’elles soient justifiées par des considérations d’intérêt général ».
Fin assembleur / DRA / cote 0210séance n° 140, 14h 30
Vous avez bien entendu : le Conseil de la concurrence, que vous invoquez à l’appui de l’article 19, réserve dans son avis un sort particulier aux facilités « justifiées par des considérations d’intérêt général » ! Or, monsieur le secrétaire d'État, nous considérons pour notre part que le service de qualité offert par l’AFPA à des publics très éloignés de l’emploi entre dans le champ de cette exception.
En fait, le Conseil de la concurrence reproche sans doute à l’État de ne pas avoir reconnu l’AFPA comme un véritable acteur du service public de l’orientation et de préférer le considérer comme un opérateur privé : dans une logique concurrentielle, il est interdit de privilégier un opérateur privé par rapport à d’autres…
Si le Gouvernement avait la volonté de préserver l’AFPA, il aurait donc fallu confier à cette dernière, en régie ou par le biais d’une délégation, des missions de service public. Tel est le sens de l’arrêt « Altmark Trans » rendu le 24 juillet 2004 par la Cour de justice des Communautés européennes.
Nous considérons que le présent article, dont le seul objet est d’organiser le démantèlement de l’AFPA, est inacceptable. C’est pourquoi nous en proposons la suppression.