en remplacement de Mme Frédérique Espagnac, rapporteure pour avis. - Au-delà de l'examen des crédits budgétaires et dispositions fiscales applicables à l'agriculture, l'examen de cette mission est l'occasion d'interroger les priorités de la politique agricole nationale, dont le budget est l'un des instruments.
Tout d'abord, ce budget ne représente pas la plus grande part des soutiens publics au secteur agricole et agroalimentaire. Les 2,8 milliards d'euros de crédits prévus au sein de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales », ainsi que les 147 millions du Casdar sont utiles, ne serait-ce que pour payer les personnels qui apportent leur support technique à l'activité agricole ou forestière, dans les services de l'État ou des établissements publics, et pour financer des mesures d'intervention, notamment en matière d'allègements de charges pour les travailleurs occasionnels.
Ces crédits budgétaires ne résument néanmoins pas l'effort budgétaire de la Nation en direction de l'agriculture : ils sont complétés par des crédits provenant d'autres budgets, notamment le budget de l'enseignement scolaire et celui de la recherche et de l'enseignement supérieur. Au total, 6 milliards d'euros de crédits budgétaires contribuent à l'agriculture.
Ensuite, le régime des prestations sociales agricoles distribue plus de 19 milliards d'euros de prestations chaque année. Compte tenu du déficit démographique de ce régime, il est financé pour 13,4 milliards par les contributions des autres régimes.
En outre, les dépenses d'intervention économique sont essentiellement portées par des crédits européens : près de 9 milliards d'euros, (7,5 pour le premier pilier et 1,2 pour le second pilier) sont consacrés au secteur agricole. À ces crédits européens s'ajoutent des aides des collectivités territoriales dont l'enveloppe globale est estimée à un milliard.
Enfin, les dispositifs fiscaux favorables à l'agriculture sont estimés à un peu plus de deux milliards, parmi lesquels l'exonération partielle de la taxe intérieure de consommation sur les carburants utilisés par les véhicules agricoles, l'exonération d'impôt sur les sociétés pour les coopératives ou encore les exonérations et dégrèvements de taxes foncières.
Au final, cette mission ne représente que 10 % des concours publics à l'agriculture. Si ses crédits baissent en 2016, cela n'empêche pas pour autant l'entrée en vigueur du plan de soutien à l'élevage qui mobilise 650 millions sur trois ans, dont 180 millions d'allègements de charges dès cette année avec 50 millions d'allègements de charges sociales financés sur les crédits d'action sociale de la mutualité sociale agricole (MSA), 45 millions pour la diminution de l'assiette minimale maladie dès cette année, prélude à une suppression totale en 2016, ou encore la faculté pour les agriculteurs de revenir à une assiette de calcul des cotisations sur l'année 2014 et non sur la moyenne triennale.
Le plan de soutien à l'élevage mobilise aussi des crédits budgétaires avec un renforcement des crédits du FAC, dont l'enveloppe a été portée en 2015 à 100 millions pour financer l'année blanche proposée aux éleveurs en difficulté. En outre, des exonérations de taxe foncière sur les propriétés non bâties sont prévues à hauteur de 50 millions.
Aux côtés du plan d'urgence en faveur de l'élevage, des mesures structurelles d'allègements de charges vont bénéficier au secteur agricole. Le budget 2016 reconduit l'exonération de charges sociales pour l'emploi de travailleurs occasionnels (TODE), soit 411 millions pris en charge sur le budget de l'agriculture.
Ensuite, le secteur agricole et agroalimentaire bénéficie des mesures générales d'allègements de charges sociales et fiscales : en 2016, ces allègements représenteront 1,78 milliard pour la production agricole, dont 392 millions de CICE et 1,76 milliard dans l'agroalimentaire, dont 622 millions de CICE et 86 millions pour les coopératives, au titre de la suppression de la C3S, qui atteindra 253 millions en 2017.
Parallèlement, des moyens nouveaux ont été déployés pour soutenir l'investissement dans le secteur agricole et agroalimentaire : ainsi, le PCAE permettait déjà de mobiliser 200 millions par an. Une rallonge a été annoncée en septembre pour porter ses moyens, financés conjointement par l'État et les régions, à 350 millions par an. L'effet de levier de ces aides publiques devrait mobiliser des financements à hauteur d'un milliard d'euros par an pour investir dans l'agriculture.
Le programme des investissements d'avenir (PIA) mobilisera 120 millions en faveur de l'industrie agroalimentaire, en particulier les abattoirs et les serres.
Bref, tout est fait pour répondre à l'urgence de la crise dans les filières d'élevage mais aussi pour préparer leur avenir.
La baisse des crédits de cette mission ne compromet donc aucune des priorités de la politique agricole. Ainsi, les crédits en faveur de l'installation sont globalement conservés pour financer 6 000 installations par an, même si une partie de la prise en charge est transférée sur des crédits européens. L'enveloppe consacrée à l'indemnité compensatoire de handicap naturel (ICHN) passe de 232 millions à 256 millions, conformément à l'engagement de revalorisation pris par le Gouvernement en 2014. Compte tenu des cofinancements européens, l'ICHN représentera plus d'un milliard d'euros en 2017, soit 300 millions de plus qu'en 2013 pour les deux dispositifs, ICHN et prime herbagère agro-environnementale (PHAE), qui ont été depuis fusionnés.
La volonté de développer l'agroécologie et d'encourager de nouvelles pratiques agricoles est confortée, avec 57 millions d'euros en faveur des mesures agro-environnementales mais aussi grâce au maintien des moyens du Casdar, dont la quasi-totalité est dédiée à l'agroécologie.
La mise en place des groupements d'intérêt économique et environnemental (GIEE), innovation de la loi agricole de 2014, progresse sensiblement : au 1er octobre, 128 d'entre eux avaient été agréés, couvrant 1 500 exploitations.
La sécurité sanitaire reste une priorité, avec la poursuite du renforcement des effectifs de contrôle dans les abattoirs de volaille.
Le budget 2016 de l'agriculture est donc un bon budget : responsable car il répond à l'impératif de maîtrise des dépenses publiques, et ambitieux, car il permet à l'agriculture et l'agroalimentaire de surmonter les difficultés et de répondre aux défis de la compétitivité et d'adaptation aux nouveaux impératifs sociaux et environnementaux.
En tant que rapporteure, Mme Espagnac émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » et du Casdar. Mon groupe et moi-même approuvons sa conclusion.